Docteure en Géopolitique de l’Université de Reims Champagne-Ardenne. Membre du Conseil scientifique du Diploweb.com. Agrégée d’histoire, Professeure de chaire supérieure au lycée Faidherbe (Lille) où elle enseigne la géopolitique en classes préparatoires économiques et commerciales. Auteure de nombreux ouvrages.
Découvrez la synthèse de l’actualité internationale d’octobre 2024 : Les résultats des élections dans le monde ; La situation au Proche-Orient ; La justice française éclaire d’une lumière crue le drame des Yézidis ; Une réconciliation franco-marocaine ; L’Union européenne se déchire sur le dossier de l’énergie ; Des BRIC’s aux BRIC’s+, etc.
Voici la précieuse synthèse d’Axelle Degans qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique mondiale, voire préparent un concours ou un entretien de recrutement. Pour ne rien manquer, et recevoir nos alertes sur des documents importants, le plus simple est de s’abonner gratuitement à notre Lettre d’information hebdomadaire ou au compte X anciennement twitter de veille géopolitique @diploweb. Ce compte de veille géopolitique compte de nombreux followers dont de nombreuses pointures du domaine dans de nombreux pays. Vous serez en bonne compagnie. Et c’est plus important que jamais d’être bien entouré.
En Moldavie, un référendum constitutionnel est organisé en octobre 2024 pour inscrire dans la Constitution l’adhésion à l’Union européenne. L’ancienne Bessarabie, annexée à l’URSS par Staline sous le nom de République socialiste soviétique de Moldavie (RSSM), puis indépendante depuis 1991, participe au « Partenariat oriental » lancé par Bruxelles, l’éloignant plus ou moins de l’orbite de Moscou. Alors qu’une partie sécessioniste de son territoire, la Transnistrie, s’affiche comme pro-russe, accueillant des soldats de Moscou, la Moldavie est un pays candidat à l’Union européenne. Les négociations sont ouvertes depuis décembre 2023, sous la pression de la relance de la guerre russe en Ukraine. Les résultats de ce referendum d’octobre 2024 ont provoqué un certain embarras car le « oui » l’a remporté d’extrême justesse avec 50,2% des suffrages, en partie grâce à la diaspora moldave, quand une large part du pays a voté « non ». La participation s’est élevée à seulement à 51% du corps électoral. De nombreux observateurs pointent les ingérences russes pour expliquer ce résultat particulièrement décevant.
En Géorgie, les élections législatives d’octobre 2024 ont été remportées par le parti du Premier ministre. Le Rêve géorgien porté par un affairiste pro-russe a remporté plus de 54% des suffrages, contre un peu plus de 37% pour la coalition pro-européenne selon la commission électorale. L’opposition et la présidente Salomé Zourabichvili ne reconnaissent pas les résultats de cette élection, qui serait entachée de nombreuses irrégularités. En décembre 2023 la Géorgie a obtenu le statut de pays candidat à l’entrée dans l’Union européenne. Bruxelles pourrait mettre entre parenthèses le processus d’adhésion du pays. Un chassé-croisé se réalise donc sous nos yeux : la Géorgie longtemps attirée par l’UE se rapproche de la Russie, quand l’Arménie longtemps proche de la Russie semble vouloir se rapprocher de l’UE après avoir été déçue par Moscou.
La Bulgarie organise en octobre 2024 ses 7e élections législatives depuis 2021. Le pays est dans une impasse politique. Lors des précédentes élections législatives, au printemps 2024, seulement un tiers du corps électoral s’est déplacé. Avec un peu plus d’un quart des suffrages exprimés, le parti conservateur Gerb – de l’ancien Premier ministre Boïko Borissov – arrive en tête du scrutin sans avoir de majorité lui permettant d’exercer le pouvoir en dehors d’une coalition. Plus de la moitié des Bulgares estime que la situation de leur pays est « extrêmement inquiétante ». La Bulgarie est le pays le plus pauvre de l’Union européenne –au moins jusqu’aux prochains élargissements- la corruption y est endémique, entretenue par une mafia très présente. La Russie y dispose de points d’entrée.
Au Japon, le Parti libéral démocrate (PLD), quasiment toujours au pouvoir depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, n’a pas remporté en octobre 2024 le pari de la dissolution de l’Assemblée pris par le nouveau Premier ministre Shigeru Ishiba. Il ne dispose pas de la majorité solide escomptée, et son parti a perdu plusieurs dizaines de sièges. Ce désaveu politique a pour fond un vaste scandale politico-financier sur le financement de la classe politique japonaise.
En Tunisie le président sortant Kaïs Saïed est réélu en octobre 2024 avec près de 89% des suffrages exprimés. La participation s’établit à seulement 27%, en cause une opposition qui a été empêchée de se présenter. La Tunisie vient-elle de refermer sa parenthèse démocratique ? Pour mémoire ce pays a été en 2011 à l’origine de la dynamique régionale des « printemps arabes ».
Au Mozambique, les élections d’octobre 2024 se sont tenues dans un climat particulièrement tendu. Daniel Chapo a remporté les élections présidentielles pour le parti Frelimo déjà au pouvoir. Il aurait recueilli 71% des suffrages selon la Commission électorale. Les résultats ne sont pas reconnus par l’opposition, des affrontements assez violents ont eu lieu. Ce pays souffre d’une corruption très poussée, accentuée par la découverte d’hydrocarbures dont la manne profite essentiellement au pouvoir en place.
En octobre 2024, le Liban est de nouveau une victime collatérale de l’affrontement israélo-palestinien. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) estime à plus de 830 000 le nombre de personnes déplacées au Liban depuis les attentats du 7 octobre 2023. La situation sanitaire est très préoccupante.
Yahya Sinbwar, qui aurait organisé pour le Hamas les attentats 7 octobre 2023, est mort. Tsahal est parvenu à décapiter les organisations du Hamas et du Hezbollah, mais pas à délivrer les otages toujours aux mains de réseaux terroristes dans la bande de Gaza. Est-ce vraiment une priorité pour le gouvernement ?
Chose diplomatiquement étonnante, Mohammad-Bagher Ghalibaf, président du Parlement iranien, annonce en octobre 2024 vouloir négocier avec la France un cessez-le-feu pour le Liban. Le Premier ministre libanais, Najib Mikati, proteste contre une ingérence manifeste dans les affaires libanaises, ce qui peut indiquer en creux que le Hezbollah est en fait dirigé depuis Téhéran.
Israël a procédé en octobre 2024 à une riposte contre l’Iran qui avait tiré plus de deux cents missiles en réponse aux attaques subies par ses séides du Hezbollah. Les frappes israéliennes ont visé des cibles militaires. En ne ciblant ni des sites pétroliers, ni des sites nucléaires, les Israéliens n’ont pas ouvert un front supplémentaire à ceux de Gaza et du Liban et ont préservé le soutien de Washington qui a appelé Téhéran à ne pas répliquer.
Un procès s’ouvre en octobre 2024 concernant des hommes accusés d’être des djihadistes qui se sont engagés pour Daech. Un procès pour génocide et crimes contre l’humanité contre les Yézidis, cette communauté kurdophone du Moyen-Orient. La justice française dispose d’un dossier judicaire accablant concernant certains hommes qui ont grandi en France, y ont été scolarisés dans l’école républicaine du pays des Lumières et des droits de l’homme. L’horreur du calvaire des Yézidis est enfin exposée au grand jour. Assassinat de masse des civils les plus âgés et les plus jeunes, en cela Daech multiplie les actes de génocide. Les femmes, les jeunes filles et les fillettes sont vendues pour devenir des esclaves sexuelles. Ces viols de masse ont pour but d’éradiquer la communauté en s’attaquant à l’identité même de ce groupe. Les jeunes garçons sont enrôlés dès sept ans pour en faire des « lionceaux » destinés aux combats et aux attentats-suicides. En cela, le projet de Daech est totalitaire d’autant que cette organisation djihadiste s’est taillé un territoire au détriment de l’Irak et de la Syrie. Le prétexte religieux ne doit pas faire illusion, ces hommes sont avant tout des assassins et des violeurs, le fait que leurs épouses aient maltraité voire torturé les yézidies que leur mari violait le corrobore.
Comment en peut-on arriver à un tel degré d’horreur ? Comment des hommes élevés dans un pays comme la France peuvent se mettre au service d’une idéologie totalitaire et se conduire en barbare ? L’impunité ne peut être permise, ni pour les bourreaux, ni pour ceux qui financent.
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Le président français est reçu en octobre 2024 par le régime chérifien pour une visite d’Etat de trois jours. Le roi Mohammed VI est venu accueillir le couple présidentiel dès sa descente d’avion, un accueil témoignant de l’importance accordée à cet événement. Cette visite doit sceller une réconciliation après une mésentente de près d’une décennie. Le contexte est complexe. Il est celui d’une entente voulue avec l’Algérie mais rendue impossible par un régime qui a choisi la France comme bouc-émissaire de toutes ses difficultés et explication unique de l’incompréhensible : un pays riche dont les habitants végètent dans la pauvreté et une impasse privant d’avenir toute la jeunesse. 62 ans après la fin de la guerre d’Algérie, son gouvernement fait encore de cette guerre une ressources politique pour détourner la colère d’une partie de sa population devant son incapacité à développer un pays qui dispose de beaucoup d’atouts.
Ce rapprochement est aussi celui d’intérêts bien compris concernant la progression du djihadisme dans un Sahel plus instable que jamais, avec une pression migratoire inédite venue de l’Afrique sub-saharienne. Il prend aussi en compte que le Maroc est désormais un pays proto-émergent aux besoins et aux attentes immenses. Le Maroc est une monarchie stable, une situation assez rare dans l’environnement régional. Des contrats concernent les infrastructures (nouveau tronçon d’une ligne ferroviaire à grande vitesse, l’équipement en infrastructures portuaires…), le développement d’une filière d’hydrogène vert (TotalEnergies), le développement de champs d’éoliennes (EDF)… les possibilités sont nombreuses. Reste à savoir les effets induits d’une corruption structurelle sur ces projets.
Paris, à la suite des Etats-Unis de Donald Trump ou de l’Espagne, reconnait désormais la « marocanité » du Sahara occidental, pomme de discorde avec le voisin algérien. Le contentieux concernant le logiciel espion Pegasus est aplani, la « crise des visas » devrait se conjuguer au passé. Le président français est venu avec un aéropage de ministres, d’industriels pour signer des accords et contrats, et de nombreux artistes soulignant la proximité entre la France et le Maroc. Il s’agit d’un tournant dans les relations internationales mais aussi dans la géopolitique du bassin méditerranéen. Mohammed VI devrait faire une visite officielle en France en 2025. Le président algérien Tebboune annule, lui une visite en France prévue à l’automne 2024.
L’Union européenne est devenue, depuis 2022, une zone où l’énergie est chère. Dans le contexte de la transition énergétique et du passage à une économie décarbonée, se pose la question de la production d’une électricité qui ne soit pas produite à partir d’énergies fossiles. La question centrale est celle de la taxonomie pour être qualifié « énergie bas carbone » et être éligible à un système d’aides. La France, et une dizaine de pays de l’Union, défendent le nucléaire qui est faiblement producteur de gaz à effet de serre (GES), pour produire un « hydrogène vert ». La nouvelle Commission von der Leyen a choisi des contempteurs de l’énergie nucléaire – Teresa Ribera et Dan Jorgensen- satisfaisant les « Amis des renouvelables » comptant l’Allemagne, l’Italie ou l’Espagne contre l’ « alliance du nucléaire » avec les Pays-Bas, la Finlande, la Bulgarie ou la Croatie. Les tensions sont très vives, pourtant, l’Union européenne a-t-elle les moyens de rester un espace d’énergie chère sans compromettre son avenir alors qu’elle est résolument engagée dans la mondialisation ? Pour la France, l’enjeu est tout simplement celui de sa souveraineté énergétique.
La Russie a accueilli en octobre 2024 à Kazan la première réunion des BRIC’s (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), élargis depuis janvier 2024 à l’Egypte, l’Ethiopie, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l’Iran. C’est un pied de nez à la communauté internationale qui sanctionne une Russie en guerre en Ukraine, et Vladimir Poutine n’a pas manqué de communiquer pour montrer qu’un autre monde existe en marge de la communauté internationale. Il entend montrer que la Russie n’est pas isolée.
Cette réunion, très importante pour la Russie, n’a pourtant pas apporté ce qu’espérait Moscou. Si les membres des BRIC’s+ ne condamnent pas la guerre relancée par la Russie contre l’Ukraine depuis le 24 février 2022, ils appellent à la paix. Le dirigeant russe n’a pas davantage obtenu un nouvel élargissement des BRIC’s+ à de nombreux candidats (Vietnam, Nigéria, Thaïlande, Turquie…), dont l’Algérie soutenue par Moscou. Une réunion en demi-teinte pour le maitre du Kremlin.
Bonus. Vidéo. Planisphère, « Le narcotrafic menace-t-il la mondialisation ? » Avec F. Manet
Super bonus, la synthèse rédigée de cette émission, pratique pour les candidats aux concours !
Le nouveau président taiwanais Lai Ching-Tai a déclaré, lors de la fête nationale de son pays, qu’il serait prêt à défendre la souveraineté de l’île. Ces propos ont été très mal accueillis à Pékin qui a déployé un exercice militaire aéronavale de vaste ampleur encerclant Taiwan pour « défendre son intégrité territoriale » car la République populaire de chine (RPC) ne reconnait pas l’indépendance de Taiwan, estimant que l’ « ile rebelle » a vocation de retourner dans son giron . Celle-ci a été placée en état d’alerte et obtient de Washington une vente d’armes d’environ deux milliards de dollars concernant un système de missiles sol-air.
Le premier étage de sa mégafusée Starship est récupéré en octobre 2024 sur sa base texane. Une prouesse technologique. Il est revenu se poser sur son pas de tir, une première.
Il reste aux Européens à ne pas se faire sortir de l’aventure spatiale… Airbus Defence Space annonce un plan de réduction de ses effectifs – peut-être 2 500 postes – car l’entreprise, comme Thales Alenia Space, subit une concurrence impitoyable de Starlink sur le créneau des satellites de télécommunication.
Le président Bassirou Diomaye Faye présente en octobre 2024 le plan « Sénégal 2050 », date à laquelle il espère avoir triplé le PIB par habitant et divisé par quatre le nombre de pauvres grâce à une croissance économique supérieure à 7%. Le plan prévoit un investissement de 21 milliards de dollars pour développer l’accès à l’eau et à l’électricité, lutter contre la corruption et industrialiser le pays. Il prévoit aussi d’investir dans l’éducation, ce qui devrait être une priorité pour un pays aussi jeune, et développer des infrastructures toujours insuffisantes. Le Sénégal aura-t-il les moyens de ses ambitions ?
La Libye recommence à pouvoir vendre sa production pétrolière. La situation reste très difficile pour un pays qui ne s’est pas encore extrait de la guerre civile qui dure depuis plus d’une décennie.
Les deux géants chinois et indien sont parvenus en octobre 2024 à un accord concernant les patrouilles sur les zones frontalières litigieuses, d’une frontière commune longue de 3 500 kilomètres. Les tensions frontalières s’apaisent un peu. Reste à savoir pour combien de temps.
Tara est une station polaire mise à l’eau en octobre 2024 à Cherbourg. Cette station scientifique devra dériver dans l’arctique pour mesurer la fonte des glaces et mieux connaitre l’impact du réchauffement climatique sur la biodiversité.
Le pongiste français Alexis Lebrun a remporté brillamment en octobre 2024 les championnats d’Europe. Son frère, Felix Lebrun, a remporté le WTT champions de Montpellier. Il est le pongiste le plus jeune à avoir remporté cette compétition, il est aussi le premier joueur européen à avoir remporté une compétition d’un tel niveau. Bravo à eux.
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