Podcast et synthèse rédigée

Planisphère. Quelle est la situation géopolitique des Etats-Unis à la fin du mandat de Joe Biden ? Avec M. Chervaux

Par Emilie BOURGOIN, Maxime CHERVAUX, Pierre VERLUISE, le 3 octobre 2024  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Maxime Chervaux, Professeur agrégé à l’Institut français de géopolitique (IFG - Université Paris 8). M. Chervaux est spécialiste de politique américaine, notamment de la géographie électorale.
Interview organisée et conduite par Pierre Verluise, docteur en Géopolitique, fondateur du Diploweb.com, il anime Planisphère sur Radio Notre Dame et RCF depuis septembre 2024. Cette émission a été diffusée en direct le 1er octobre 2024.
Synthèse par Emilie Bourgoin, étudiante en quatrième année au BBA de l’EDHEC et alternante au sein de la cellule sûreté d’un grand groupe. Elle est en charge depuis septembre 2024 du suivi hebdomadaire de l’actualité des livres, revues et conférences géopolitiques comme de la rédaction des synthèses des épisodes de l’émission Planisphère pour Diploweb.com.

Quelle est la situation géopolitique des Etats-Unis à la fin du mandat de Joe Biden ? Après la défaite électorale du républicain Donald Trump en novembre 2020 et l’assaut sur le Capitole, le 6 janvier 2021, la démocratie américaine est-elle véritablement sortie de la zone des tempêtes ? L’hystérie du débat public a-t-elle cessé ? Après la pandémie de Covid 19, la présidence démocrate de Joe Biden a mis en place quatre années d’investissements massifs dans l’économie, avec quels résultats ? En matière de géopolitique externe, Joe Biden a-t-il été dans la continuité de Donald Trump ou bien a-t-il mis en place une rupture nette ? Enfin, dans cette élection présidentielle 2024, quels sont les états qui pourraient faire la différence entre le candidat républicain Donald Trump et la candidate démocrate Kamala Harris ? Pour répondre, nous avons l’honneur de recevoir Maxime Chervaux.
Avec une synthèse rédigée par Emilie Bourgoin, validée par M. Chervaux.

Cette émission, Quelle est la situation géopolitique des Etats-Unis à la fin du mandat de Joe Biden ? Avec M. Chervaux, sur RND

Cette émission, Quelle est la situation géopolitique des Etats-Unis à la fin du mandat de Joe Biden ? Avec M. Chervaux, sur RCF

Lien direct vers cette émission sur RCF

Synthèse de cette émission, Quelle est la situation géopolitique des Etats-Unis à la fin du mandat de Joe Biden ? Avec M. Chervaux. Rédigée par Emilie Bourgoin pour Diploweb.com , relue et validée par M. Chervaux.

À LA FIN du mandat de Joe Biden, les États-Unis se trouvent dans une situation géopolitique complexe, marquée par des défis internes et externes. Quatre ans après son entrée en fonction, Biden a tenté de redéfinir la position des États-Unis dans un monde en mutation, tout en faisant face aux conséquences d’une présidence Trump controversée et d’une pandémie de Covid 19 déstabilisante. L’administration Biden s’est efforcée de restaurer la crédibilité américaine à l’international, de renforcer les alliances et de répondre aux enjeux économiques nationaux. Toutefois, la démocratie américaine reste fragile, et des risques pour sa solidité perdurent, notamment en raison de la polarisation politique et de l’influence des réseaux sociaux.

Planisphère. Quelle est la situation géopolitique des Etats-Unis à la fin du mandat de Joe Biden ? Avec M. Chervaux
Maxime Chervaux
Maxime Chervaux, Professeur agrégé à l’Institut français de géopolitique (IFG - Université Paris 8). Crédit photographique : Pierre Verluise pour Diploweb.com
Verluise/Diploweb.com

Perceptions erronées sur la géopolitique américaine

L’une des idées reçues les plus fréquentes à la fin du mandat de Biden concerne l’intérêt du coût astronomique des campagnes présidentielles. Il est souvent mis en avant que ces campagnes puissent atteindre des budgets colossaux, parfois jusqu’à 10 milliards de dollars. Cependant, il est important de comprendre que ces sommes ne sont pas proportionnelles à la population américaine mais visent, in fine, à convaincre une petite portion de l’électorat seulement. En effet, près de la moitié des électeurs américains sait déjà pour qui elle va voter, tandis qu’un tiers ne participe pas aux élections. Cela signifie que ces investissements massifs sont principalement destinés à convaincre le dernier tiers de l’électorat, celui qui peut réellement faire basculer le résultat. Cette réalité montre à quel point le système électoral américain est devenu polarisé et les campagnes électorales discriminantes.

Risques pour la démocratie américaine

Quatre ans après la défaite de Donald Trump et l’assaut du Capitole en janvier 2021, des questions persistantes entourent la stabilité de la démocratie américaine. Biden a mis en avant la nécessité de défendre les institutions démocratiques, mais la violence politique, exacerbée par la rhétorique de Trump, a laissé des cicatrices profondes. L’ancien président passe une grande partie de sa campagne à délégitimer les élections, créant des doutes sur leur intégrité. Dans certaines régions, des tentatives pour restreindre l’accès au vote se multiplient, renforçant les inquiétudes quant à la solidité des institutions américaines.

Réseaux sociaux et fragilité démocratique

La montée en puissance des réseaux sociaux a joué un rôle majeur dans l’érosion de la confiance envers les institutions démocratiques aux États-Unis. Bien que le pays soit souvent présenté comme un modèle de démocratie, son histoire de ségrégation et de violations des droits de vote soulève des questions sur la réalité de cette démocratisation. Dans certains États, des gouverneurs continuent de retirer des citoyens des listes électorales, alimentant un climat de méfiance. Les réseaux sociaux, avec leur capacité à diffuser des idées fausses – de la désinformation ou de la mésinformation – et, ainsi, à amplifier la polarisation politique, accentuent ces divisions. Ce phénomène rend difficile la recherche d’un débat critique et informé, nécessaire pour un système démocratique sain.

Bilan économique de la présidence Biden

Sur le plan économique, la présidence de Joe Biden a été caractérisée par des investissements massifs, inédits depuis les années 1960. Biden a pris en main la gestion du pays alors qu’il sortait d’une crise sanitaire mondiale, et ses initiatives ont visé à relancer l’économie tout en réduisant la pauvreté. Le Jobs Act de 2021 a permis d’injecter plus de 1000 milliards de dollars dans les infrastructures américaines, dont beaucoup étaient en très mauvais état, notamment en dehors des grandes métropoles. L’Inflation Reduction Act, adopté un an plus tard, a pour objectif de décarboner l’économie et d’investir dans des technologies de pointe telles que l’intelligence artificielle et les véhicules électriques. Cependant, ces efforts ont été éclipsés par une inflation galopante, culminant à 9 % en 2022, particulièrement dans des aires urbaines comme Atlanta, Las Vegas et Phoenix, cruciales sur le plan électoral.

Politique étrangère : continuité ou rupture ?

En matière de politique étrangère, l’administration Biden a été perçue comme une continuation de la présidence Trump, notamment en ce qui concerne les questions de protectionnisme et de concurrence avec la Chine. Cependant, Biden a également cherché à se démarquer en plaçant la démocratie au cœur de son agenda international. Les partenariats régionaux initiés sous Trump avec des pays comme l’Inde, le Japon et l’Australie ont été maintenus, mais Biden a aussi renforcé le rôle de l’OTAN, notamment après la relance de l’invasion russe en Ukraine. Il a aussi rétabli les discussions multilatérales sur le climat, ce qui marque une nette différence avec son prédécesseur. Malgré tout, les États-Unis continuent de réajuster leur stratégie en se concentrant sur la relation avec la Chine et en réduisant leur implication au Moyen-Orient et en Europe, bien que des crises telles que la guerre en Ukraine et le conflit israélo-palestinien contraignent le pays à rester impliqué.

Réorientation stratégique vers l’Asie et l’Europe

Depuis les années 2000, les États-Unis ont progressivement réorienté leur stratégie, se concentrant de plus en plus sur la Chine et l’Indopacifique tout en réduisant leur présence au Moyen-Orient et en Europe. Toutefois, des crises comme l’invasion russe en Ukraine et le conflit israélo-palestinien continuent d’exiger une implication américaine dans ces régions. Joe Biden, fort de son expérience sur les questions portant sur l’ancien espace soviétique, a joué un rôle déterminant dans le soutien à l’Ukraine. Toutefois, la position du Parti démocrate sur Israël reste une question délicate, Biden étant critiqué par les Républicains pour ne pas être suffisamment pro-israélien, ce qui complique les relations avec cette région.

La géopolitique électorale et la stratégie de Biden

Sur le plan électoral, Joe Biden a surpris en 2020 en remportant des États traditionnellement démocrates comme le Michigan et la Pennsylvanie, qui avaient été perdus en 2016, tout en conquérant des États du Sud tels que la Géorgie et l’Arizona, considérés comme des bastions républicains depuis plusieurs décennies. Alors que les élections de 2024 se profilent, l’impopularité croissante de Biden, due en partie à son âge et à certaines performances jugées médiocres, soulevait des doutes quant à sa capacité à conserver ces États. Cependant, son retrait et l’entrée en campagne de Kamala Harris en tant que candidate démocrate a redynamisé les perspectives électorales, avec des efforts concentrés sur des États tels que la Floride et la Caroline du Nord.

Le cas particulier du Texas

Le Texas demeure un cas particulier dans la stratégie électorale des démocrates. Bien que la population hispanique y soit désormais majoritaire, cet État reste un bastion républicain, malgré un resserrement des résultats électoraux. Des pratiques électorales contestées, comme le retrait de citoyens des listes électorales, soulèvent des interrogations sur l’équité du processus électoral. Les électeurs hispaniques, en particulier, sont souvent découragés de voter, ce qui illustre les défis auxquels la démocratie américaine continue de faire face au Texas.

Une lecture recommandée

Pour approfondir la compréhension des dynamiques politiques et électorales aux États-Unis, il est conseillé de lire Robert Penn Warren, " Les Fous du roi " ( Paris, Stock, 1950). Ce roman explore la montée au pouvoir d’un candidat populiste et ses dérives, offrant un éclairage toujours aussi pertinent sur les défis contemporains auxquels la démocratie américaine est confrontée.

Copyright pour la synthèse Octobre 2024-Bourgoin/Diploweb.com


Plus

Tous les podcasts géopolitiques de l’émission Planisphère depuis septembre 2024, en un clic. Et avec en bonus une synthèse rédigée, c’est possible ? Oui, ici.


Présentation du concept de l’émission Planisphère par Pierre Verluise

Planisphère est une émission de géopolitique proposée par Radio Notre Dame et RCF. Planisphère est animée par Hugo Billard jusqu’au 31 août 2024 ; par Pierre Verluise (Diploweb.com) depuis le 3 septembre 2024. Chaque semaine des historiens, des géographes, des géopoliticiens, des diplomates, des stratèges et des acteurs des relations internationales prennent le temps de mettre en perspective les soubresauts du monde. Planisphère cherche à comprendre l’actualité mondiale dans l’espace et dans le temps, en privilégiant la clarification des jeux des acteurs comme des résultats sur les territoires. Pierre Verluise cherche à mettre à jour l’interaction des échelles et les dynamiques de la puissance, définie comme une capacité de faire, de faire faire, de refuser de faire ou d’empêcher de faire.
Cette émission est disponible en podcast sur les sites et les applications de ces deux radios, comme sur le Diploweb.com qui offre en bonus une synthèse rédigée, validée dans la mesure du possible par l’intervenant.


Vous aussi, construisez le Diploweb !

Une autre façon de construire le Diploweb

Découvrez les livres géopolitiques publiés par Diploweb : des références disponibles via Amazon sous deux formats, Kindle et papier broché


DIPLOWEB.COM - Premier site géopolitique francophone

SAS Expertise géopolitique - Diploweb, au capital de 3000 euros. Mentions légales.

Directeur des publications, P. Verluise - 1 avenue Lamartine, 94300 Vincennes, France - Présenter le site

© Diploweb (sauf mentions contraires) | ISSN 2111-4307 | Déclaration CNIL N°854004 | Droits de reproduction et de diffusion réservés

| Dernière mise à jour le mercredi 2 octobre 2024 |