Recherche par sujet

www.diploweb.com Géopolitique "L'Europe et la globalisation", par Matthieu Périchaud

CHAPITRE 1 : Politique, médias et société

Partie C : Culture, éducation et citoyenneté

Introduction - 2. Continuité et rupture de la pensée sur l'Europe - 3. Europe et globalisme - 4. La communication sur l'Europe - Conclusion et bibliographie
Les notes de l'ensemble du chapitre 1 se trouvent en bas de cette page

Mots clés - keywords : matthieu périchaud, europe, communication, désinformation, information, propagande, politique, surinformation, pensée unique, politiquement correct, morale, globalisation, mondialisation, éthique, totalitarisme, fascisme, nationalisme, socialisme, marxisme, libéralisme, néolibéralisme, médias, convergence, idéologie, droite, gauche, think-tank, entertainment, edutainment, internet, technocratie, culture, éducation, citoyenneté, démocratie, progrès, employabilité, individu, société.

  <Partie précédente

Le développement et la " démocratisation " des nouveaux moyens de communication (multimédia, Internet, téléphonie mobile, etc.), ont permis un accroissement indéniable de la circulation de l’information. Mais d’une information au sens large du terme puisque, comme nous l’avons souligné, il s’agit le plus souvent de communication plutôt que d’information.

Si cette évolution technique offre en soi une plus grande liberté aux citoyens, il serait pour autant illusoire d’en conclure que la vie sans contraintes est à notre portée… Car ce que l’on appelle les " nouvelles technologies " exige de la part des individus une dépendance toujours plus grande envers la technique, et envers ceux qui l’élaborent. Quant aux "vieux" médias, à commencer par la télévision, leur maîtrise est conditionnée par des " qualités " pas forcément à la portée de tous, et leur utilisation ne se fait pas toujours dans l’intérêt et le respect de chacun…

1/ De la culture au divertissement

Les critères médiatiques qui conditionnent de nos jours la politique, déjà évoqués, sont nombreux.

Mais ils tendent tous vers le même but (partagé par les médias et les hommes politiques), à savoir capter l’attention de la majorité de la population. L’objectif pour les médias, serait, dit-on, essentiellement financier (39) : plus le "produit" est populaire, plus il attire les annonceurs publicitaires, plus il rapporte d’argent.

Une politique "spectacle" pour une société médiatique

Pour l’homme politique, le succès sur la scène médiatique est le garant le plus sûr de son avenir — même si, à trop en abuser, cela peut nuire. Il s’ensuit une personnalisation de la politique, où l’on s’intéresse plus aux qualités et défauts personnels qu’aux projets défendus. Ce que l’on attend des politiciens, c’est qu’ils soient convaincants, proches du public, qu’ils lui renvoient une image positive et narcissique. Cela n’exclue pas l’affrontement télévisuel. Simplement, les "joutes verbales" des politiques font partie du spectacle. Elles n’apportent pourtant rien ou très peu au débat (40).

Ce dévoiement de la politique tiendrait au fait que les citoyens n’aiment pas la dure et cynique réalité (dans la réflexion, car ils sont pourtant attirés par des images pénibles de la réalité, surtout de celle des autres), mais préfèrent la douceur, le réconfort et un discours qui leur ressemble, et qui les rassemble.

Est-ce réellement vrai ? Car l’on sait bien que moins on aiguise sa réflexion, plus grandes sont l’indifférence et la paresse intellectuelle. Or la télévision est devenue plus distractive qu’éducative (même dans l’horreur, la laideur et le mauvais goût).

Du divertissement au travestissement

A ce cruel constat, les professionnels des médias rétorquent que l’on peut réfléchir et s’éduquer tout en se distrayant. C’est ce que les anglo-saxons appellent edutainment, contraction des mots education et entertainment (divertissement). On parle également d’infotainment (information et divertissement).

Il est à ce propos intéressant de citer un extrait d’un dossier consacré aux journalistes, paru dans l’hebdomadaire Marianne (41) : " Voyez les docus télé, réalisés, dans une majorité des cas, par des " sous-traitants ". Témoignage d’une pigiste régulière (et anonyme, bien sûr, car celle-ci veut rester régulière) : " On nous demande des choses incroyables. L’autre jour, pour un sujet sur les chambres de bonnes, on a exigé que je trouve un étudiant asiatique et une coiffeuse. Bref, que je procède à un casting ! " Pourquoi de telles précisions dans ce cahier des charges ? Parce que l’infotainment (…) chère aux grands du multimédia, dicte désormais sa loi dans le secteur : on ne cherche plus l’info, on la met en scène et en sauce, en fonction de la façon dont l’émetteur se représente le public et ses goûts. La précarité, montante dans la profession (20% des journalistes sont précaires), facilite les choses, c’est-à-dire la " souplesse " de ces journalistes. "

La confusion des genres…

Ainsi, cette confusion entre information, éducation et divertissement se développe dans tous les domaines (notamment avec les CD-ROM et Internet). Elle a pour particularité de maintenir l’individu dans l’isolement, quoique collectif, et le narcissisme : son partenaire n’est qu’un écran (d’ordinateur, de télévision) qu’il peut éteindre à tout moment, a fortiori lorsque ce qu’il transmet est contrariant ou dérangeant. Serait-ce pour contrer ce risque de " décrochage " des téléspectateurs que l’essentiel des programmes fait appel non pas à l’intelligence et à la raison de l’individu, mais à ses pulsions (parfois les plus primaires…) ?

Tous les sujets de l’actualité peuvent donc se prêter à la mise en scène, y compris la politique.

Mais la politique n’est ni un jeu ni un spectacle. Pour cette raison, la télévision consacre bien la négation d’un des fondements de la politique, à savoir l’affrontement des idées.

Télévision, éducation et sens critique

Il nous paraît utile de souligner le déclin des chaînes de télévision généralistes au profit d’une multitude de chaînes thématiques (par le câble ou le satellite).

De prime abord, on peut se réjouir d’avoir un choix plus vaste, et surtout, de pouvoir regarder ce qui nous plaît le plus (pour les uns, des films, pour d’autres, des documentaires ou du sport…).

Pourtant, il s’agit là d’une regrettable évolution. Le peu d’émissions de qualité sur les chaînes généralistes (qui nous semble tout autant relever d’une politique délibérée que d’une simple réponse aux attentes du public) incite les téléspectateurs à s’abonner à des chaînes payantes, et, de plus en plus, à ne regarder que ce qui les "passionne". Cette tendance sous-tend inévitablement une déculturation croissante des citoyens.

En effet, comment être à même, individuellement, de juger les événements, de faire le tri dans cette surabondance d’informations, de prendre du recul par rapport à l’actualité, quand on n’a plus (ou de moins en moins) de culture générale et de sens critique ? Bien évidemment, la télévision (et les médias plus généralement) n’est pas la seule coupable.

De la démocratie cognitive

Il faut effectivement constater que, compte tenu de la suprématie de la science et de la technique dans nos sociétés, les politiques d’éducation tendent, de plus en plus, et de plus en plus tôt, à spécialiser les individus dans un domaine précis.

Cela les rend certes compétents dans leur profession, mais plus enclins, pour le reste, à se contenter de l’analyse proposée par d’autres professionnels (journalistes, hommes politiques, économistes…). Comme l’affirme Edgar Morin: "Dans de telles conditions, le citoyen perd le droit à la connaissance. Il a le droit d’acquérir un savoir spécialisé en faisant les études ad hoc, mais il est dépossédé en tant que citoyen de tout point de vue englobant et pertinent. (…) Aujourd’hui, on demande à chacun de croire que son ignorance est bonne, nécessaire, et on lui livre tout au plus des émissions de TV où les spécialistes éminents lui font quelques leçons distrayantes. La dépossession du savoir, très mal compensée par la vulgarisation médiatique, pose le problème historique clé de la démocratie cognitive. La continuation du processus techno-scientifique actuel, processus du reste aveugle et qui échappe à la conscience et à la volonté des scientifiques eux-mêmes, conduit à une régression forte de démocratie." (42)

Ainsi, l’hyper-spécialisation de nos sociétés modernes aboutit au paradoxe suivant : jamais la connaissance, et les moyens de la diffuser n’ont été aussi performants, et parallèlement, jamais le citoyen n’a été à ce point dépossédé de sa capacité à appréhender le monde qui l’entoure, et à prendre part aux décisions qui préparent le monde de demain.

Le psychanalyste Erich Fromm ne dit pas autre chose lorsqu’il constate que " L’instruction, à tous les niveaux, a atteint son apogée. Pourtant, alors que les individus sont plus instruits, ils ont moins de raison, de jugement, de convictions. Au mieux, leur intelligence est améliorée, mais leur raison, c’est-à-dire la capacité de pénétrer au-delà de la surface et de comprendre les forces sous-jacentes de la vie individuelle et sociale, est de plus en plus appauvrie. " (43)

Cependant, nous pensons que ce n’est pas vraiment l’instruction qui, " à tous les niveaux, a atteint son apogée. " mais plutôt l’éducation, ce qui n’est pas tout à fait la même chose !

Instruction et éducation

Si l’on peut affirmer que, d’une certaine manière, les citoyens sont de plus en plus éduqués parce qu’ils acquièrent régulièrement des habitudes et des pratiques techniques (informatique, Internet, et le multimédia en général), il nous faut en effet constater qu’ils ne sont pas forcément plus intelligents et plus instruits pour autant.

Rappelons simplement la différence fondamentale entre les termes " éducation " et " instruction ". Tous deux d’origine latine, le mot " éducation " provient du terme " ducere ", qui signifie conduire… ; le terme " instruction " provient lui du vocable " struere ", dont la signification est construire, élever.

Précisément, l’instruction revient donc à accompagner l’individu, à fournir les connaissances lui permettant de s’élever et de se construire. A l’inverse, l’éducation est un processus visant, non pas à construire, mais plus simplement à conduire l’individu dans un sens choisi, autrement dit, à le conformer.

Il va sans dire que l’instruction n’a donc aucun rapport avec l’éducation, tant au niveau étymologique qu’en terme de théorie et de pratique.

Assurément, instruire c’est accompagner, éduquer c’est conduire. Instruire, c’est construire, éduquer c’est conformer. On peut donc être éduqué, sans pour autant être instruit… Or que pouvons-nous constater ? L’éducation dans son ensemble est réellement sous l’emprise du scientisme : même la philosophie, l’histoire, etc., s’appellent " sciences humaines ", " sciences sociales ", et ce n’est pas pour rien !

Toutes les disciplines sont, peu ou prou, soumises à une démarche "rationnelle" faite d’automatismes de pensée et d’action qui cloisonnent grandement la réflexion. De plus, cette démarche éducative laisse peu de place, et peu de temps, à la confrontation des idées et des opinions ; elle ne permet que très rarement de recentrer un sujet ou une matière dans un contexte bien plus général.

Comment dès lors relativiser l’information, l’évaluer et la juger en faisant appel à sa culture générale, à son sens critique, et tout simplement, au bon sens ?

2/ Du citoyen cultivé au consommateur "éduqué"…

Cette concordance de la télévision et de l’éducation dans le phénomène général de déculturation massive n’est pas vraiment l’effet du hasard. Elle est, à maints égards, recherchée et programmée depuis de nombreuses années. L’intérêt est, bien sûr, économique, mais également social et politique. Ainsi, comme le rappelle Armand Mattelart, " C’est aux Etats-Unis, dès les années 70, que commence à s’élaborer une réflexion sur l’articulation entre nouvelles technologies de l’information et politiques gouvernementales. Dans un double but : affaiblir la tutelle de l’Etat et installer le modèle libéral concurrentiel. Cela commence par l’application de l’électronique aux " besoins sociaux " et se termine, provisoirement, par des mégafusions, comme celle de Vivendi-Canal Plus et Universal, dont on sait qu’elles menacent désormais la diversité culturelle. " (44)

Mais la menace ne porte pas que sur la diversité culturelle, elle porte aussi sur la diversité d’opinion. Elle touche en effet la capacité de l’individu à appréhender individuellement et personnellement le réel, à le juger, à exercer un sens critique, en résumé, à penser puis à (ré)agir en conséquence.

Education collective et épanouissement personnel

A titre d’exemple, l’entrée en force des médias électroniques dans l’éducation mènera rapidement au télé-enseignement, et peut-être, à plus long terme, au télé-travail.

Cela n’est pas un problème en soi. Quoique la relation entre individus par l’intermédiaire d’outils de communication ne peut jamais se comparer, ni remplacer de vrais échanges, de vraies rencontres… Mais cela peut tout de même avoir un certain intérêt. Tout réside encore une fois dans la manière dont nous est présentée et proposée cette évolution. Or cette dernière est conditionnée par deux éléments : d’une part, la privatisation et la collectivisation de l’éducation et de l’accès aux connaissances, d’autre part l’appauvrissement de la culture et l’exclusion des savoirs jugés inutiles et/ou non rentables (par qui ? pourquoi ?).

Privatiser la connaissance

Privatisation et marchandisation, parce que les industriels poussent les instances publiques à libéraliser l’éducation (45). Constatons, parallèlement, que la dégradation de la qualité de l’enseignement résulte de choix politiques (par exemple en France, 80% de bacheliers par classe d’âge, rejet du redoublement de classe pour les élèves qui en auraient besoin, sur-notation des examens pour "homogénéiser" le niveau des élèves, etc.) qui encouragent les parents à se tourner vers l’enseignement privé (payant)… et bientôt vers l’enseignement par Internet, par CD-ROM, etc. (également payant).

De plus en plus, le système éducatif tend, non pas à permettre aux individus de "tirer" le meilleur d’eux-mêmes pour leur propre épanouissement, non pas à aider chacun à développer ses potentialités personnelles, mais à "tirer" le maximum de chacun pour le mettre au service de la collectivité, selon les orientations que celle-ci s’est fixée. C’est dans ce contexte que l’on peut parler de collectivisation de l’éducation.

Collectiviser l’intelligence

Cet enseignement " collectif " doit amener les individus à travailler en équipe, pour augmenter la connaissance " collective ". En conséquence, tout ce qui tend à différencier les individus, à promouvoir l’originalité, n’est pas forcément le bienvenu, sauf si cela ne remet pas en cause l’esprit d’équipe, l’esprit collectif. On retrouve dès les années 60 ce souci de collectiviser la connaissance et l’intelligence dans un ensemble de remarques de M. Jacques Maisonrouge (à l’époque président français de IBM-Europe).

Selon M. Maisonrouge, l’Europe et la France qu’il observe à l’époque sont caractérisées par une structure de l’enseignement qui ne favorise pas l’émergence de "bons dirigeants" et de "bons chefs d’entreprise". Ce problème provient, selon lui, du fait que l’enseignement est trop individualisé, trop académique (et surtout, avec un manque de formation en gestion et marketing, dont l’industrie a besoin) : " Or l’enseignement tel que nous le connaissons, c’est-à-dire basé sur une attitude constante de compétition avec les camarades d’études, ne favorise pas l’esprit d’équipe. L’Européen préfère encore le travail isolé au travail de groupe. " (46)

Le travail de groupe permet en effet un meilleur ajustement de chacun aux besoins de l’ensemble, plus spécifiquement ici aux besoins de l’entreprise… Selon ce raisonnement fallacieux, si chacun cherche trop à développer son intelligence et son potentiel pour lui seul, en conclut M. Maisonrouge, cela est nuisible au groupe ! C’est totalement contestable car on sait fort bien que, par de nombreuses études en psychologie, ce que l’on peut appeler " l’auto-accomplissement " de l’individu (réalisation de soi) le libère d’une grande part son agressivité, de sa méfiance à l’égard des autres, et qu’il pourrait alors permettre une société bien plus harmonieuse, du moins basée sur une toute autre relation entre ses membres (ceci n’est toutefois pas l’objet de notre propos, nous ne le développerons donc pas ici).

De cette collectivisation de l’enseignement découle largement le "nivellement par le bas" que l’on peut observer chaque jour un peu plus. Là encore, il est indéniable que ce fait résulte de choix politiques, eux-mêmes déterminés par la suprématie de l’économique (47).

Education et société industrielle marchande

Il est, à cet égard, intéressant de citer Jean-Jacques Servan-Schreiber, qui dans son ouvrage Le défi américain, révèle notamment pourquoi et comment l’éducation des citoyens doit se conformer aux besoins de l’industrie.

Ainsi, celui que l’on surnomme " JJSS " affirme : " D’abord, le développement systématique des relations " client-fournisseur " : les laboratoires, ceux des ministères comme ceux de l’Université, doivent trouver naturel de travailler sous contrats et dans les directions déterminées par les industriels " (48). Les étudiants et la société dans son ensemble doivent donc se mettre au service de l’industrie…

Censure ou loi du marché ?

Précisément, parce que l’éducation est de plus en plus programmée en fonction des buts et des intérêts de la société marchande industrielle, ou post-industrielle d’ailleurs (49), la culture s’appauvrit inéluctablement, dès lors que sont de plus en plus délaissés les savoirs et les arts qui, soit ne correspondent plus aux besoins techniques auxquels sont désormais accoutumés les citoyens, soit n’offrent pas (plus) une valeur commerciale et marchande justifiant de les maintenir en vie. Selon Armand Farrachi: "De même qu’elle s’entend à neutraliser l’information sans la supprimer mais en la noyant dans un flot continuel d’informations indifférenciées, la censure économique n’a pas besoin de ciseaux ni de cartons pour interdire les œuvres non conformes au principe de rentabilité. Il lui suffit d’empêcher celles qui n’auraient pas de public constitué par avance, et par elle-même. L’œuvre n’a plus à créer son public mais à répondre à la demande d’un public " formaté " par le marché. Le vide sera comblé par des ersatz, sur le modèle de ces musiques d’ascenseurs, de salles d’attente et de supermarchés, faites non pour être écoutées mais pour vendre et pour faire patienter, art de charmeurs de serpents ou d’amuseurs d’esclaves à qui l’abrutissement sert d’extase et l’Audimat de jugement. Tandis qu’ils s’applaudissent entre eux, on s’ennuie, avouons-le, on s’ennuie énormément." (50)

En effet, la culture rime surtout maintenant avec loisirs et divertissements payants (parcs à thème, par exemple) et avec consommation sans limite.

Consommer ou posséder ?

Notons, à ce propos, que l’on évolue de plus en plus vers la location, et non plus l’achat, d’informations, de services et de biens, d’où une dépendance accrue envers les fournisseurs. Cette dépendance ne fera que s’accroître dans le futur : par exemple, sachez que le développement d’Internet amène de plus en plus de spécialistes, de fabricants et de consommateurs à utiliser et à considérer le " réseau des réseaux " comme un gigantesque disque dur global… Plus besoin de stocker les informations sur son propre ordinateur, forcément limité en terme de mémoire… Une marque informatique n’a-t-elle pas du reste lancé sur le marché une gamme d’ordinateurs où certes, subsiste encore un disque dur personnel, mais où le lecteur/enregistreur de disquettes est en option !. C’est un peu comme si l’on nous encourageait à emprunter des livres en bibliothèque, mais à ne jamais en posséder véritablement chez soi. Conséquence : toujours pour des raisons pratiques, et pour plus de simplicité, l’individu se dépossède de plus en plus de ses propres moyens d’accéder à la connaissance. Autre exemple, l’on nous annonce depuis longtemps l’agonie des encyclopédies version papier, mais maintenant on prévoit que, d’ici quelques années, ce sont les encyclopédies version CD-ROM qui "prendront leur retraite" : l’on consultera directement sur le Net les encyclopédies électroniques, on accédera enfin au savoir planétaire depuis chez soi.

Ce que l’on appelle désormais la culture rime aussi chaque jour un peu plus avec les adjectifs éphémère et périssable (51). Le " mieux " se résume maintenant au " plus ". Et le " plus " implique forcément le " neuf ", le " nouveau ", le " dernier cri ".

Or si l’on a toujours tendance à vanter les avantages du progrès, du changement, de la nouveauté, on met relativement moins l’accent sur les inconvénients que ces derniers comportent, encore moins l’accent sur l’intérêt d’une société volontairement fondée sur la perpétuelle insatisfaction des individus.

Des conséquences possibles du progrès

Prenons l’exemple très concret du livre. Les progrès techniques en matière informatique font que nous aurons bientôt la possibilité, au lieu d’acheter un livre fait d’encre et de papier, de le télécharger sur une sorte de livre-écran. Nous pourrons faire de même avec les quotidiens, les magazines, etc. Cela est fort séduisant, dans la mesure où, sans sortir de chez soi, chacun pourra se procurer de la lecture et "s’informer".

Pourtant, cela pourrait signifier, peut-être à long terme, la disparition de l’écrit sur papier, la fermeture des bibliothèques (lieu de rencontres physiques, réelles, où l’on peut se cultiver gratuitement, alors que par Internet, l’accès à la culture est logiquement payant et conditionné par un environnement extrêmement commercial…) (52). Cela implique surtout, une dépendance accrue envers l’ordinateur, la technique et ceux qui la produisent.

En admettant qu’en effet, le papier disparaisse comme moyen de communication, que se passerait-il en cas de simple panne d’électricité (cas relativement bénin) ? Que se passerait-il si les propriétaires des " autoroutes de l’information " bloquaient l’accès à certaines informations, à certains ouvrages (cas bien plus inquiétant) ? Pour revenir aux encyclopédies électroniques, constatons simplement la différence entre un savoir imprimé et que l’on possède chez soi, et un savoir peut-être bien plus important, mais qui reste immatériel et que l’on ne possède pas : l’on pourrait rapidement se retrouver, dans un cas extrême, avec des informations modifiées, réécrites, en fonction des impératifs du moment, en fonction des modes et des intérêts des uns et des autres, etc. La novlangue qui sévit dans 1984 de Orwell pourrait bien plus facilement devenir une réalité avec Internet qu’avec la presse à imprimer…

La liberté de choix et le choix de la liberté

Il est sûr que beaucoup trouveront ce dernier cas de figure impossible, et que certains n’y trouveront qu’une méfiance, voire un rejet, de ce que l’on appelle les " nouvelles technologies ", et du progrès technique en général. C’est pourtant loin d’être le cas. Car nous ne cesserons de le répéter, la technique importe bien moins que l’usage que l’on en fait…

C’est une fois de plus l’utilisation de la technique, non pas la technique elle-même, qui peut tout autant libérer l’homme que l’asservir. Si l’ensemble des hommes choisit de dépendre de plus en plus de la technique, c’est une option difficilement contestable.

En revanche, si ce n’est que le choix de certains, et que le reste des citoyens n’a pas droit au chapitre, autrement dit qu’ils doivent s’adapter, suivre le mouvement, alors il y a bien lieu de s’interroger sur la pertinence d’un tel choix.

3/ Le citoyen du XXI e siècle : un citoyen flexible

Ce vaste mouvement de déculturation des individus, et de marchandisation des connaissances auquel nous assistons apparaît alors plus cohérent et plus construit à la lumière d’un rapport datant de 1971, produit par la NASA (agence américaine théoriquement consacrée à l’espace, mais également concernée par les télécommunications et les nouvelles technologies). Ce rapport est intitulé "Communications for Social Needs : Technological Opportunities." (53)

Dans ce document, nous apprenons, entre autres, que l’objectif de la télé-éducation est " d’instaurer des attitudes qui favorisent la naissance d’un citoyen flexible qui, comme beaucoup l’ont déjà pressenti, sera le citoyen dont le XXI e siècle aura besoin ". Ce rapport définit donc l’individu dont notre nouveau siècle aura besoin !

Un choix qu’il faudrait assumer ouvertement

La personnalisation du mot " siècle " est on ne peut plus révélatrice : elle permet de ne pas ouvertement affirmer que ce n’est pas le XXI e siècle qui a besoin d’un citoyen flexible, mais bien les dirigeants économiques et financiers, pour le commerce et l’industrie, les dirigeants politiques et sociaux, pour modifier les comportements et gérer les "masses".

Il faut effectivement bien comprendre que ce besoin de "citoyens flexibles" provient surtout de notre système occidental de développement, qui désormais s’impose, et le mot est faible, partout.

Ce système est essentiellement caractérisé, nous l’avons vu, par le règne de l’industrie, du progrès technique et scientifique, mais il est aussi conditionné par le règne du citoyen-consommateur, sommé de dépenser toujours plus pour profiter des "prodigieuses avancées" de la connaissance humaine. Sans quoi notre société industrielle, basée sur la croissance infinie et la commercialisation des découvertes, n’aurait aucune raison d’être et s’effondrerait.

De la "nourriture humaine"

Pour que le système que nous connaissons perdure, il faut inévitablement le "nourrir". Nous entendons par là qu’il faut sans cesse de nouveaux individus formés (et formatés) pour rechercher sans cesse, pour perfectionner constamment, pour appliquer (commercialiser) de plus en plus rapidement les découvertes des chercheurs.

Une illustration manifeste de cette mécanique nous est à nouveau fournie par Jean-Jacques Servan-Schreiber, dans son essai intitulé Le défi mondial.

Cet auteur s’enthousiasme ainsi pour l’avènement de la société de l’information, et pour la révolution que représente la généralisation de l’utilisation de l’ordinateur : " Les robots, ici encore, il faut changer de regard pour ne pas s’y tromper, loin de réduire le besoin en hommes, multiplient le nombre d’hommes dont on a besoin. Et chaque homme, nous avons même dit chaque enfant, peut en quelques mois être suffisamment informé, entraîné, pour participer utilement, à son niveau, qui ne cessera de progresser, à la " nourriture humaine " de l’univers des circuits informatisés. " (54)

L’homme, maître et esclave

L’utilisation de l’expression " nourriture humaine ", avec tout ce qu’elle peut avoir de répugnant à l’égard de l’être humain, témoigne parfaitement de notre dépendance à l’égard de la technique, qui, de plus en plus, nous asservit autant qu’elle nous libère (55).

En somme, il s’agit là d’un cercle vicieux : les découvertes techno-scientifiques font progresser les hommes dans leur soif de puissance et de maîtrise de tout ce qui les entoure, mais pour qu’ils puissent continuer à vivre et à toujours plus "progresser", il leur faut se soumettre aux modifications qu’ont engendrées leurs découvertes.

Raison ou bon sens ?

Mais la réelle question est vraiment jusqu’où ? Jusqu’à quel point devons-nous accepter un environnement de plus en plus déterminé par la " raison ", mais de moins en moins par le " bon sens " (56) ?

Ce doute légitime que nous ressentons tous, que nous masquons malgré tout dans cette fuite en avant, dans cette quête absurde de la perfection, Hervé René Martin l’exprime habilement dans La mondialisation racontée à ceux qui la subissent : "Après s’être soumis à Dieu, il [l’homme occidental] se soumet à sa propre raison. Pourtant son projet initial est toujours le même : se rendre maître de la nature. En libérant sa raison de toute contrainte idéologique, l’homme occidental va simplement devenir incroyablement plus efficace. Il y a néanmoins quelque chose qu’il vient de perdre et qui, sans qu’il puisse encore s’en douter, va le conduire aux plus grands désastres : c’est la relation avec sa propre irrationalité. Sous l’influence du matérialisme scientifique, tout ce qui ne peut être vu avec les yeux ou appréhendé avec les mains sera révoqué en doute, nous dit le psychanalyste suisse Carl Gustav Jung. Les représentants les plus avancés de la conscience européenne vont s’employer à enfermer l’esprit dans une dépendance totale à la matière et aux causes matérielles. (…) Dieu est mort ? A la place l’homme occidental divinisera la machine, l’argent et toute chose concrète que sa raison libérée de toute contrainte lui permettra d’appréhender." (57)

Comme nous l’affirmions précédemment, dans un tel système, il faut donc que les individus soient amenés à perpétuer cet inextinguible besoin d’" ouvriers du progrès ". C’est dans ce contexte que les programmes d’éducation s’avèrent essentiels.

De l’éducation citoyenne à la formation professionnelle

Nous avons ainsi pu constater, depuis des décennies maintenant, une valorisation croissante des matières scientifiques et techniques, tandis que ce que l’on appelait autrefois les humanités, c’est-à-dire la philosophie, la littérature, l’histoire, etc. (en résumé, tout ce qui permet une culture générale indispensable, afin de penser et d’agir individuellement) sont dépréciées.

Dès 1976, Herbert Marcuse constatait, à propos de la société américaine : " Une attaque concertée est actuellement en cours pour détourner les écoles et les universités dans le sens de la formation professionnelle : réduire la part des humanités et des sciences sociales, et faire baisser le niveau de l’enseignement non professionnel. " (58)

Le cerveau planétaire

Pour que cette société du progrès éternel fonctionne parfaitement, l’enseignement doit en priorité assurer le développement de ce que certains appellent un " cerveau planétaire ", c’est-à-dire permettre la coordination croissante de l’intelligence de chacun, pour la fondre en une intelligence globale. Pour cela, il faut également assurer la circulation permanente de l’information, dans toutes les strates de la société, et dans le monde entier, d’où l’enjeu essentiel des autoroutes de l’information-communication. Ces dernières représentent effectivement un prodigieux accroissement de l’efficacité potentielle du " cerveau planétaire "…

Bien évidemment, le système éducatif reste l’élément-clé de la dynamique car il doit inciter la grande majorité des individus à se diriger vers les enseignements et les spécialités "porteuses", en terme de progrès scientifique et technique.

Du "recyclage humain"

Aussi, l’ensemble de la société doit-il, avec enthousiasme si possible, se soumettre à cette marche en avant quasi-infinie, et dont personne ne peut malgré tout prévoir les véritables conséquences, positives comme négatives. Pour étayer cette évolution, faisons à nouveau appel au talent "prémonitoire" de Jean-Jacques Servan-Schreiber.

Dès 1967, dans Le défi américain (déjà cité), cet auteur affirme la nécessité de soumettre les individus à la toute puissance du progrès et de la science (ce qu’il nomme " la Big science "), et lien de cause à effet, de soumettre la société humaine aux exigences de l’industrie. Concernant l’impérialisme techno-scientifique, " JJSS " affirme : "Le besoin fondamental est celui de l’adaptation aux techniques modernes, donc le besoin d’éducation. Au rythme de changement que nous devons envisager, l’éducation au sens classique, sera, de loin, insuffisante. Il faudra une réadaptation constante, et la possibilité à chaque instant d’offrir des " recyclages ", à base de programmes éducatifs organisés (…). Il y faudra des dizaines de milliers de spécialistes en ordinateurs, de ceux qu’on appelle les " programmeurs ". Ensuite , les ordinateurs eux-mêmes serviront d’enseignants et de programmeurs pour leur propre technologie. Avant que cette période n’arrive, c’est-à-dire avant 1980, il faudra que les responsables politiques en aient maîtrisé les implications." (59)

Les ouvriers du progrès

Le propos est clair et déterminé : le progrès économique et industriel réclame des individus compétents aux plans technique et scientifique. L’éducation doit donc fournir ces " ouvriers du progrès ", et les " responsables politiques " doivent élaborer des programmes répondant à cet objectif.

Quid du choix des individus ? Quid de leur épanouissement personnel (qui n’est pas forcément d’ordre scientifique ou technique) ? Ces questions trouvent aisément leur réponse chez " JJSS ", comme chez de nombreux prosélytes de la Science et du Progrès collectif : "Une société tout à fait nouvelle est en vue, qui émergera avant que les hommes de trente ans aient pris leur retraite. Ce ne sera pas seulement une société beaucoup plus " riche ". Au-delà d’un certain seuil, la richesse se traduit moins par un niveau de vie supérieur que par un mode vie différent. La société " post-industrielle " sera caractérisée par une liberté sans précédent de l’homme à l’égard des contraintes physiques, économiques, biologiques : quasi-disparition du travail manuel, temps libre supérieur au temps de travail, abolition des distances, développement spectaculaire des moyens de culture et d’information, pouvoir décuplé sur la nature et sur la vie, etc. Cette société sera-t-elle plus heureuse ? C’est une autre question, qui ne comporte sans doute pas de réponse. Mais il est certain qu’elle représentera l’avant-garde de l’histoire humaine, et ceci nous regarde." (60)

Le progrès pour aujourd’hui, le bonheur pour demain…

Cette société, dans laquelle nous vivons maintenant, est-elle plus heureuse ? Pour Jean-Jacques Servan-Schreiber, cette question ne semble effectivement pas essentielle. Le plus important est que l’homme (entendons ici la collectivité humaine, non pas l’individu) progresse éternellement, soit à l’" avant-garde ", pour qu’enfin demain, il devienne un Dieu vivant ou un sur-homme !

Ainsi, l’épanouissement de chacun au sein de la société a moins de valeur que le "progrès" collectif de l’humanité… Ou encore, s’il n’est pas moins important, il doit cependant être conditionné, et ne pas contrarier les exigences collectives de la " Big science ".

Revenons plus précisément à l’éducation, et à la forme que doit revêtir celle-ci pour répondre aux impératifs de la croissance et du progrès. Rappelons-le, il s’agit d’obtenir le plus de flexibilité, d’adaptabilité de la part des citoyens.

L’éducation, nous l’avons vu, est l’élément déterminant afin de poursuivre le développement "éternel" de ce que nous pouvons définitivement appeler la " croiscience " (puisque les contractions sont à la mode, pourquoi ne pas contracter les termes phare de notre société, " croissance " et " science " ?). Cette éducation, pour être efficace, doit nécessairement être constante, permanente.

Un citoyen employable

C’est ainsi que l’on peut actuellement constater l’apparition d’une nouvelle expression (aussi hideuse que révélatrice), l’employabilité. Ce terme, d’origine anglo-saxonne, est en fait la contraction d’emploi et de flexibilité (adaptabilité). On l’entend de plus en plus dans les médias, chez les hommes politiques, les économistes, les industriels.

Il est en totale cohérence avec la volonté d’organiser la vie des hommes selon les impératifs de la " croiscience ", et d’y soumettre également tout ce qui existe sur la planète, voire au-delà…

Il s’agit en quelque sorte, d’accoutumer les populations, dans un premier temps, à l’instabilité et à la précarité de l’emploi, pour, dans un deuxième temps, les habituer à se (re)convertir régulièrement aux nouveaux métiers dont l’économie et le progrès auront besoin.

Le long terme et le court terme

Encore une fois, ce qui émerge aujourd’hui est le résultat de choix effectués il y a plusieurs décennies. Il serait bien illusoire de croire que les dirigeants n’agissent ou ne proposent que des solutions à court terme, ou qu’ils sont totalement dépendants d’une actualité imprévisible et mouvante. Cette fausse croyance résulte en grande partie de la surinformation et de la désinformation, phénomènes étudiés précédemment.

S’il ne fait aucun doute que les événements conjoncturels ont une certaine influence sur les choix politiques, économiques et sociaux, ils ne remettent pourtant que très rarement en cause les décisions majeures, les orientations structurelles.

Or ces dernières sont les plus déterminantes parce qu’elles modifient en profondeur la société, et modèlent de jour en jour la société de demain.

Des vertus de l’insécurité, ou le malheur des uns pour le bonheur de tous

Comme nous l’affirmions, il s’agit donc d’accoutumer les citoyens à l’instabilité et à la précarité de l’emploi, pour qu’ils puissent constamment se " régénérer " et être " mobiles ", au sein d’une société " ouverte " et globale. Pour les thuriféraires de la " croiscience ", cette incertitude, cette insécurité des citoyens face à l’emploi est même une " saine inquiétude " ! Et elle ne date pas du tout du néolibéralisme…

Là encore, dès les années 60, Jacques Maisonrouge (déjà cité) peut affirmer, à propos du manque de collaboration entre l’administration et les entreprises (à l’époque, car c’est loin d’être le cas maintenant) : " Ce n’est pas un stage de quelques mois dans l’industrie qui peut permettre à un élève de l’ENA de saisir la complexité de l’économie des affaires ni surtout les difficultés des relations humaines. D’autre part, la stabilité et la sécurité des carrières de l’administration créent un état d’esprit bien différent de celui de l’entreprise bien gérée où les cadres éprouvent constamment une " saine inquiétude " pour leur avenir. " (61). Qu’on se le dise, la sécurité de l’emploi est apparemment dangereuse…

Mobiliser pour avancer, avancer pour être mobiles

Notre société moderne est définitivement conditionnée par le mythe de la croissance infinie et l’illusion de la toute puissance de la Science, ce que nous avons appelé le règne de la " croiscience ".

Ce dogme, cette religion des modernes implique de la part des individus une adaptabilité, une mobilité et une malléabilité maximales. Les médias, tout comme les politiques, sont dès lors conditionnés par la nécessité de promouvoir cette " société ouverte ", cette société globale, société sans frontières, société de la révolution collective permanente.

Comme nous avons pu le constater, les orientations choisies par les dirigeants politiques et économiques, orientations qui nous affectent aujourd’hui, ne datent pas d’hier. Ce que l’on appelle maintenant le néolibéralisme est indubitablement la conséquence de décisions adoptées il y a de cela des décennies.

Dans le chapitre suivant, nous pourrons également montrer que la pensée actuelle sur l’Europe, et sa concrétisation, sont elles aussi l’aboutissement d’un processus de longue date. Partie suivante>

Matthieu Périchaud

Notes de l'ensemble du chapitre 1:

  1. BOUGNOUX Daniel. – La communication contre l’information. -, Etudes, mars 1992.
  2. DURANDIN Guy. – L’information, la désinformation et la réalité. -, Paris, PUF, 1993, p. 146.
  3. TCHAKHOTINE Serge. – Le viol des foules par la propagande politique. -, Paris, Gallimard, 1992.
  4. Alexandra Viatteau est chargée du cours "l’Information et la désinformation" à l’Institut Français de Presse, journaliste, et écrivain spécialisé sur la Pologne confrontée au nazisme et au communisme pendant la Seconde Guerre mondiale.
  5. NEVEU Erik. – La communication politique : petit refus de contribution au dictionnaire des idées reçues. –, Cinémaction, n° 63, mars 1992.
  6. "L’opinion publique inquiète les élus.", Libération, 31 mars 1999.
  7. Ibid. # 2, p. 21.
  8. JACQUARD Roland. – La guerre du mensonge. -, Paris, Plon, 1986.
  9. RAMONET Ignacio. – La tyrannie de la communication. -, Paris, Galilée, 1999, p. 28.
  10. BRUNE François. – La dépolitisation par le langage. -, Manière de voir, n° 27, août 1995.
  11. "L’allergie au libéralisme", Libération, 18 juin 1999.
  12. Cf. l’ouvrage d’Alain MINC précisément intitulé La mondialisation heureuse., Paris, Pocket, 1999.
  13. FORRESTER Viviane. – Une étrange dictature. -, Paris, Fayard, 2000, p. 9.
  14. KAHN Jean-François. – La dictature du doigt mouillé. – in CHARDON Jean-Marc et LENSEL Denis (dir.). – La pensée unique, le vrai procès. -, Paris, Economica, 1998.
  15. HUYGHE François-Bernard et BARBES Pierre. – La soft-idéologie. -, Paris, Robert Laffont, 1987, p. 13.
  16. Ibid. # 15, p. 12 : "Une certaine attitude individuelle faite de pragmatisme, de gentillesse tolérante, de narcissisme, de décontraction, de moralisme gnan-gnan, de culte du moderne et du technique garantit contre la tentation de " guerre civile. ""
  17. "Un groin de folie dans le consensus.", Télérama, 11 novembre 1998.
  18. Mots croisés, France 2, lundi 25 octobre 1999.
  19. CHALAS Yves. – Vichy et l’imaginaire totalitaire. -, Arles, Actes Sud, 1985, pp. 92-93.
  20. Dans les prochains chapitres, nous reviendrons plus longuement sur les implications du libéralisme dans l’élaboration de la pensée sur l’Europe.
  21. RAMONET Ignacio. – La pensée unique. -, Le Monde diplomatique, janvier 1995.
  22. HALIMI Serge. – Les nouveaux chiens de garde. -, Paris, Liber-Raisons d’agir, 1997, p. 103.
  23. JULLIARD Jacques. – Le moralisme a envahi la politique. - in CHARDON Jean-Marc et LENSEL Denis (dir.). – La pensée unique, le vrai procès. -, Paris, Economica, 1998.
  24. RÉMOND René. – Les identités de la droite. -, Faire la politique, série Mutations, n° 122, mai 1991, Autrement.
  25. Ainsi pour la campagne des élections européennes de juin 1999, où la droite française revendiquait la liberté d’entreprendre, de créer, liberté menacée par les socialistes, ces "dirigistes héritiers d’une idéologie ayant montré son échec à l’Est" ; la gauche, de son côté, dénonçant le laisser-faire prôné par les chantres du libéralisme, du règne de l’argent et des marchés, etc. Ce retour en force de l’idéologie peut faire sourire, compte tenu de l’enjeu européen, où gauche et droite sont loin d’être à couteaux tirés.
  26. "La France renonce à contrôler les communications sur Internet.", Le Monde, 21 janvier 1999.
  27. Ainsi, en France, parmi les plus importants, on retrouve Hachette-Filipacchi (détenu par M. Jean-Luc Lagardère, également P.D.G de Matra, fabricants d’armements et de matériel électronique) ; le groupe TF1 (détenu par Bouygues, originellement constructeur et promoteur immobilier) ; Vivendi-Universal-Canal + (à l’origine détenu par la Compagnie Générale des Eaux, devenue Vivendi après fusion avec, entre autres, l’agence publicitaire Havas, puis récemment, le rachat d’Universal).
  28. COTTERET Jean-Marie. – Gouverner c’est paraître, réflexions sur la communication politique.-, Paris, PUF, 1991, p. 9.
  29. BOURDIEU Pierre. – L’opinion publique n’existe pas. -, Médiaspouvoirs, n° 38, avril 1995.
  30. Ibid. # 28, p. 56.
  31. BRUNE François et RUFFIN François. – Apolitisme très politique des journaux municipaux. -, Le Monde diplomatique, mars 2001.
  32. Cf. les travaux de Vilfredo PARETO sur la loi d’" airain " de l’oligarchie, Traité de sociologie générale., Paris, Droz, 1968.
  33. Ibid. # 28, p. 20.
  34. Concernant les origines de la technocratie, voir infra.
  35. BELLIER Irène. – Vocation ou goût du pouvoir. –, Faire la politique, série Mutations, n° 122, mai 1991, Autrement.
  36. Devenu lui-même conseiller personnel de Jacques Chirac.
  37. "Répondre à la demande sans bouleverser les grands équilibres semble moins le fruit d’une politique fondée idéologiquement qu’une réponse pragmatique gouvernée par le souci de pérenniser un système porteur qui s’appuie sur une nouvelle forme de nomenklatura dans laquelle les énarques occupent de bonnes positions.", Ibid. # 35.
  38. Nous donnerons des exemples concrets de think-tanks dans notre dernier chapitre.
  39. L’objectif des médias n’est malheureusement pas que financier. Ils participent activement à la diffusion et à l’enracinement dans le corps social d’un modèle de société particulier, comme nous aurons l’occasion de le souligner dans cet essai.
  40. "La recette du meurtre médiatique aujourd’hui est connue : la ruine et le déshonneur désormais inopérants, il s’agit simplement, tout sourire, de chiper aux camarades, face à Field ou Durand, la meilleure, la seule place qui vaille, celle du " parler vrai ", du langage du cœur et de la tripe, contre la froide raison politique.", "Le Comte de Monte-Bendit.", Le Monde Télévision, Radio, Multimédia, 22-23 novembre 1998.
  41. "Qui sont les journalistes ?", Marianne, 23-29 avril 2001.
  42. MORIN Edgar. "Le grand dessein." in MORIN Edgar, BOCCHI Gianluca, CERUTI Mauro. - Un nouveau commencement. - , Paris, Le Seuil, 1991, p. 201.
  43. FROMM Erich. "Pour la prédominance de l’homme." in - De la désobéissance et autres essais.- Paris, Robert Laffont, 1983, p. 89.
  44. MATTELART Armand. - L’information contre l’Etat. -, Le Monde diplomatique, mars 2001.
  45. Nous vous conseillons notamment un documentaire intitulé "Le cartable de Big Brother", diffusé sur France 3, en janvier 2000. Cette émission montre notamment comment la Commission européenne, "fortement aidée" par des lobbies de l’éducation et du multimédia, élabore une politique éducative commune aux pays Membres basée sur l’enseignement à distance, moyennant finance bien sûr…
  46. Cité dans : SERVAN-SCHREIBER Jean-Jacques. - Le défi américain. -, Paris, Le Livre de Poche, 1967, p. 377 (Copyright Editions Denoël).
  47. Concernant les politiques éducatives et leur implication dans l’évolution de la société, nous vous conseillons la brillante analyse effectuée par Jean-Claude Michéa dans son ouvrage intitulé - L’enseignement de l’ignorance. -, Castelnau-le-Lez, Climats, 1999, 140 pages.
  48. Ibid. # 46, p. 218. Nous aurons l’occasion de citer à maintes reprises la pensée de M. Servan-Schreiber. L’habileté avec laquelle cet auteur analyse (pour ne pas dire prévoit) l’évolution de la société révèle sa foi en la Science et la raison humaine. Sa réflexion, qui est largement partagée par une majorité des "élites", montre à quel point les idées donnent logiquement suite à des actes.
  49. On parle de société post-industrielle pour qualifier le passage d’une économie basée sur la production de biens matériels à une économie basée sur les services, la communication, l’information, etc. Cette différence d’appellation nous semble de moindre importance, dans la mesure où elle ne change pas le fait que cette production de services reste industrialisée, à grande échelle. On utilise bien du reste les expressions d’industrie du spectacle, d’industrie des télécommunications, de troisième et quatrième révolution industrielle, etc.
  50. FARRACHI Armand. - Les ennemis de la Terre, réponses sur la violence faite à la nature et à la liberté. -, Paris, Exils Editeurs, 1999, pp. 132-133.
  51. L’exemple type reste sans nul doute le domaine de l’informatique et des télécommunications, où les nouveaux produits commercialisés sont aussitôt périmés, dépassés par de nouveaux produits plus puissants, plus performants (ce que Marcuse appelle l’obsolescence planifiée), et où l’on pousse le public à toujours vouloir le modèle "dernier cri", alors que la plupart des individus n’en a absolument pas besoin dans la vie courante. Autre exemple plus spécifique : il est réellement stupéfiant de voir que des individus se sont quasiment battus pour acheter une console de jeux vidéo, dont le fabricant avait volontairement organisé la pénurie, à la fin de l’année 2000.
  52. Voir à ce propos la réflexion de Paul Soriano, in FINKIELKRAUT Alain et SORIANO Paul. - Internet, l’inquiétante extase. -, Paris, Mille et une nuits, 2001.
  53. Cité par Armand Mattelart. Cf. note 44, .
  54. SERVAN-SCHREIBER Jean-Jacques. - Le défi mondial. -, Paris, Le Livre de Poche, 1981, pp. 362-363. (Copyright Editions Denoël)
  55. Mais cette expression témoigne aussi de la " choséification " (réification) croissante de l’homme, phénomène qui, au-delà de sa dimension marchande (piercing, chirurgie esthétique, etc.), révèle surtout un refus de la condition animale, naturelle, mortelle, de l’homme.
  56. A titre d’exemple manifeste de l’hyper-rationalisme de notre société, mais de son manque total de bon sens, et de sens du " raisonnable ", sachez que les traders (spécialistes chargés d’investir des capitaux sur les marchés financiers internationaux) peuvent "s’amuser" à parier des sommes gigantesques sur… les prévisions météorologiques. Cet " outil " financier s’appelle un weather, du mot anglais signifiant " temps ". Et pendant ce " temps ", des millions d’individus meurent de faim, ou plus "simplement", sont au chômage ! On pourrait nous accuser de faire ici preuve de démagogie. Dans ce cas, c’est une démagogie que nous assumons pleinement !
  57. MARTIN Hervé René. - La mondialisation racontée à ceux qui la subissent. -, Castelnau-le-Lez, Editions Climats, 1999, pp. 61-62.
  58. MARCUSE Herbert – Un nouvel ordre. –, Manière de voir, n° 56, mars-avril 2001.
  59. Ibid. # 46, p. 139.
  60. Ibid. # 46, pp. 78-79.
  61. Cité dans : SERVAN-SCHREIBER Jean-Jacques. – Le défi américain. –, Paris, Le Livre de Poche, 1967, p. 380. (Copyright Editions Denoël)

Copyright 20 décembre 2001-Matthieu Périchaud/www.diploweb.com

L'adresse URL de cette page est http://www.diploweb.com/globalisation/13.htm

 
       
    Plus avec www.diploweb.com  
       

 

  Recherche par sujet   Ecrire à l'éditeur :P. Verluise, ISIT 12 rue Cassette 75006 Paris France
Forum diplomatique Quelle France dans le monde au XXI e siècle ?   Recherche et enseignement

Copyright 20 décembre 2001-Matthieu Périchaud /www.diploweb.com

Toutes les mesures ont été prises pour établir l'antériorité de cet écrit. Pour en reproduire un extrait de plus de cent mots (100) ou obtenir un droit de publication, il est nécessaire d'obtenir l'autorisation écrite de Matthieu Périchaud. En précisant votre adresse postale et votre adresse électronique, vous pouvez écrire à l'adresse suivante: mat.perichaud@wanadoo.fr

La citation de moins de cent mots (100) est autorisée sans préalable, sous réserve d'indiquer le prénom et le nom de l'auteur, la date de la mise en ligne initiale et l'adresse url complète du site: http://www.diploweb.com/globalisation/intro.htm