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" Quelle France dans le monde au XXI e siècle ?
", par Pierre
Verluise 1. COMMENT LES FRANCAIS VOIENT-ILS LE MONDE ? Partie 1.2. Les Français se donnent-ils la peine d'ouvrir les yeux sur la moitié de l'humanité, l'Asie ?
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Introduction - 1. Comment les Français voient-ils le monde ? - 2. Quelles sont les images de la France à l'étranger ? - 3. Quels sont les outils disponibles ? - 4. Quelle politique étrangère ? - 5. Quelle mondialisation construire ? - Conclusion - Postface de Gérard Chaliand : Stratégie d'influence |
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précédente Sauf exception, la couverture médiatique française de lAsie donne encore volontiers dans le cliché, constatent les spécialistes de cette région émergente. Les Japonais " travaillent comme des fourmis " et les Indiens " vivent dans des bidonvilles dans lesquels les vaches sacrées bloquent la circulation". Clichés qui prétendent pallier le manque détudes sérieuses. Reste que la population chinoise a depuis longtemps dépassé le milliard dhabitants et que lInde atteindra ce chiffre dici quelques années. L'archipel ignoré ? Même le pays prépondérant dans la région, le Japon, demeure singulièrement méconnu. Grâce à plusieurs décennies de forte croissance, celui-ci sarroge pourtant le rang de deuxième puissance économique mondiale. Ses performances technologiques étonnent les Occidentaux, par exemple dans le domaine des radars embarqués. Le Japon est déjà le premier créditeur net du monde. Tokyo nentend pas se contenter du rôle de banquier et demande un siège de membre permanent au Conseil de Sécurité de lOrganisation des Nations unies. Exigence dont la satisfaction, à plus ou moins long terme, ne pourra quamoindrir le rang de la France en ce petit cercle. Le Japon est ainsi devenu pour lAsie un modèle économique et social, voire culturel. Il importe donc de prendre en compte le Japon si lon prétend comprendre lAsie. Dautant que larchipel constitue un excellent poste dobservation de la région. Pourtant, la France demeure physiquement très peu présente au Japon. Le nombre de Français y avoisine 4 000 personnes, dont à peine 500 savèrent économiquement actifs. Encore faut-il prendre en compte quune cinquantaine seulement de ces derniers manie correctement la langue japonaise. Contrairement à une idée préconçue, langlais ne peut pas toujours compenser, puisque beaucoup de japonais le lisent mais ne le parlent pas. En revanche, plusieurs dizaines de milliers de japonais uvrent en France, faisant leffort de chercher de linformation sur ce pays, notamment dans le domaine économique. Même si la majorité de la population japonaise conserve aujourdhui une vision nombriliste du monde, le grand public japonais est globalement mieux informé de lactualité française que le grand public français nest au fait des réalités contemporaines de larchipel. Dissymétrie des connaissances Ancien Conseiller Scientifique près lAmbassade de France à Tokyo et consultant sur le Japon, Jean-François Mariani tire à ce propos la sonnette dalarme. " Face à un pays dont le rôle régional et mondial saffirme chaque jour davantage, les Français restent tragiquement ignorants. Il est vrai que linformation disponible dans lHexagone à propos du Japon reste proche de zéro. Ainsi, il nest mentionné au journal télévisé quen cas de crise économique, politique ou sismique. Résultat, le volume de temps dantenne consacré à la deuxième puissance économique du monde semble dérisoire. Depuis la fin des années 1980, aucune chaîne de télévision française ne dispose dun correspondant particulier permanent à Tokyo. Cette régression signifie très concrètement que lintérêt supposé des Français pour le Japon ne justifie pas aux yeux des rédactions le coût dun journaliste spécialisé dans un lieu aussi stratégique. Hors de brefs flashs liés à des événements ponctuels ou à des sujets récurrents, le Japon napparaît donc guère dans les médias français. A croire quil nexiste pas. Même le correspondant dun quotidien réputé confie combien il lui est difficile de faire accepter des sujets sortant des sentiers battus. L'Empereur du Japon. Crédits: Ministère des Affaires étrangères, F. de la Mure
Par ailleurs, le vivier de spécialistes informés de lactualité nippone semble particulièrement restreint. Il nexiste probablement à l'heure actuelle dans lHexagone quune dizaine de Français qui lisent quotidiennement la presse japonaise en version originale et peuvent ainsi essayer de distinguer les évolutions sous-jacentes qui deviendront demain dominantes. La muraille invisible Les livres écrits en français à propos de larchipel deviennent de plus en plus rares et se bornent trop souvent à reprendre des lieux communs, sous la plume dauteurs qui nen parlent généralement même pas la langue. La plupart des traductions douvrages japonais en langues occidentales sont le fait des japonais eux-mêmes. La langue forme donc autour de larchipel une muraille invisible. Résultat remarquable : les Japonais contrôlent lessentiel de linformation diffusée dans le monde à propos du Japon. Ce phénomène est facilité par la faible diffusion de cette langue à létranger. En France, les traditions universitaires entretiennent une dichotomie contre performante. Dun côté, les " vrais " étudiants passent des années à étudier les moindres détails grammaticaux. De lautre côté, quelques " amateurs " le plus souvent autodidactes sefforcent dapprendre un japonais opérationnel utile pour les échanges économiques et scientifiques ". Alors que les entreprises françaises auront de plus en plus à affronter sur le marché français ou dans le monde des relations de concurrence et coopération avec des firmes japonaises (1), cette situation parait dangereuse. En effet, les Japonais nous connaissent beaucoup mieux que nous ne les connaissons. La dissymétrie des connaissances ne peut que jouer à leur avantage et en notre défaveur. Année du Japon, 1997 a marqué une modernisation des représentations françaises de larchipel. Les jeunes sintéressent de plus en plus aux bandes dessinées japonaises. Avec près de 10 000 étudiants en Japonais, la France serait devenue le premier pays européen pour lapprentissage de cette langue. Bénéficient-ils dun apprentissage adapté à une connaissance des ressorts contemporains de la société nippone ? Caricatures Yasushi Masaki observe que " le Japon reste souvent caricaturé comme une société sans morale. Larchipel serait un pays violent dans laquelle des mouvements extrémistes sopposeraient à une société trop normative et conservatrice. Cette vision paraît excessivement simpliste. Il importe de complexifier les représentations françaises du Japon ". Pour les Japonais, la France possède beaucoup datouts, mais les Français connaissent encore trop peu le Japon. Lintérêt demeure donc inégalement partagé. Il serait pourtant dans lintérêt des Français de rééquilibrer cette balance, parce que si la France reste un pays important en Europe, le Japon simpose comme un pays clé en Asie, voire dans le monde. Quand le pouvoir politique reste sourd Au-delà du cas japonais, les mêmes défis se posent pour toute lAsie. Pourtant, de 1981 à 1995, Robert Fossaert na cessé de tirer la sonnette dalarme. Ancien Président dune banque nationalisée, il raconte : " Durant quatorze ans, je nai cessé de dire au Premier ministre et aux ministres concernés quil importait de renforcer les structures dapprentissage des langues de lAsie en développement. Cela ne coûte pas plus cher de donner une bourse à un étudiant qui apprend le chinois de Hongkong que de lentretenir dans une des formes de laide sociale. Rien nen est sorti ! Il a été impossible de modifier lidée que les responsables concernés se faisaient des modalités daction de la France. Il aurait été plus facile de leur vendre lidée de multiplier les bourses aux étrangers que ce projet dapprendre aux Français les langues de lAsie en développement ". Si léloignement géographique expliquait nos difficultés à appréhender lAsie, nous devrions mieux connaître nos voisins européens. Quen est-il ? Partie suivante> Note: 1: Les Japonais ne sont plus seulement performants dans les secteurs de lélectronique, de lautomobile et de la robotique. Leur concurrence devient de plus en plus sérieuse dans les secteurs suivants : laérospatial, larmement, les grands travaux, lagroalimentaire et les cosmétiques. Copyright janvier 2001-Pierre Verluise/ www.diploweb.com |
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