Étudiant en Master 2 “Armées, guerres et sécurité dans les sociétés de l’Antiquité à nos jours” de l’Université Paris IV, avec un mémoire sur le concept de “Guerre Hybride” sous la direction du Professeur Olivier Forcade
Comment expliquer la survie du régime syrien déserté par ses soldats, au territoire exsangue et dénoncé par la communauté internationale pour crime de guerre ? Une partie de la réponse réside dans la supériorité aérienne de l’État syrien. L’arme aérienne qui, par sa réactivité, sa puissance de feu et son rayon d’action a assuré l’ascendant psychologique et la continuité de l’État sur des territoires qu’il ne contrôlait plus. Voici comment. Illustré d’une carte des bases aériennes en Syrie.
DEPUIS le 15 mars 2017, le conflit syrien est entré dans sa 7ème année. Ce qui n’était qu’une intifada locale contre un gouverneur à Deraa s’est depuis cristallisée en une guerre civile un théâtre d’affrontement entre les puissances régionales et internationales. Le bilan, accablant, est évalué à plus de 400 000 morts avec plus de 3,8 millions de réfugiés sur une population d’avant-guerre de 20 millions d’habitants. Avec la chute d’Alep, le 22 décembre 2016, et l’échec de l’offensive sur Hama au printemps 2017, la rébellion est acculée dans toutes les zones qu’elle contrôle, du gouvernorat d’Idleb au nord-ouest, au sud autour de Deraa et dans les quartiers de la Ghouta où elle est assiégée depuis 2012. L’État Islamique perd ses capitales de Rakka et de Mossul et les Kurdes poursuivent, dans une trêve implicite avec le régime, l’établissement de leur région autonome : la Rojava.
Le basculement du conflit en faveur des troupes de Bachar Al-Assad semble être acté, mais comment expliquer la survie d’un régime déserté par ses soldats, au territoire exsangue et dénoncé par la communauté internationale pour crime de guerre ? Une partie de la réponse réside dans la supériorité aérienne de l’État syrien. Si l’assistance de l’Iran, du Hezbollah et l’intervention russe en 2015 ont indéniablement permis d’endiguer l’insurrection, c’est bien l’arme aérienne qui, par sa réactivité, sa puissance de feu et son rayon d’action a assuré l’ascendant psychologique et la continuité de l’État sur des territoires qu’il ne contrôlait plus. À la fois service de sécurité et garde prétorienne du régime, l’armée de l’air syrienne (AAS), originellement conçue pour intercepter les aéronefs israéliens dans un conflit de haute intensité, a ainsi évoluée en un instrument de subjugation des populations et une arme de siège. Imposer la terreur et incarner la vengeance de l’État devinrent les nouvelles missions de l’AAS dans un contraste saisissant avec l’emploi occidental de l’arme aérienne. Alors que depuis Desert Storm en 1991 et les guerres d’ex-Yougoslavie les aviations américaines ou européennes ont été engagées au nom de la responsabilité de protéger (R2P) et privilégient la précision notamment pour éviter des victimes civiles, l’armée de l’air syrienne semble façonner sa stratégie contre-insurrectionnelle sur l’expérience russe en Tchétchénie : pilonnage massif des infrastructures économiques, des populations et de leurs ressources. Cette politique de terre brûlée généralisée a imposé un rythme opérationnel écrasant pour son personnel et ses appareils, s’est accomplie au détriment du soutien des troupes au sol et s’est effectuée au prix de destructions matérielles et de pertes civiles considérables. Pourquoi et “comment l’armée de l’air syrienne a conduit cette stratégie ?
L’AAS a été conçue comme une armée de Guerre froide, façonnée par la doctrine soviétique. Celle-ci subordonnait l’aviation aux opérations terrestres qu’elle devait couvrir et appuyer sans aucune liberté de manœuvre. L’armée de l’air syrienne était de fait constituée en majorité d’intercepteurs (Mig-21, 23, 25 et 29) qui devait compléter sa défense anti-aérienne terrestre et d’une aviation “de front” consacrée à la couverture rapprochée des éléments blindés (chasseurs-bombardiers Su-22 et 24). Si, avant la révolution, 500 appareils sont déclarés, la majorité date des années 1970 et 1980. Acquise dans l’optique d’un conflit de haute intensité avec Israël (qu’elle combattit trois fois : en 1967, en 1973 et en 1982), cette flotte aérienne est ainsi imposante mais obsolète et inadaptée à la contre-insurrection. Seule sa trentaine de chasseurs-bombardiers Su-24 reçus en 1990 et ses quelques 24 Su-22M4 possèdent les systèmes d’acquisition des cibles requis pour l’usage d’armes de précision guidées, cruciaux pour rester hors de portée des MANPADS [1] ou autres armes anti-aérienne légères. Son importance ne se limite pas cependant à ses appareils. L’AAS s’est muée depuis la prise de pouvoir en 1970 d’Hafez Al-Assad, ancien pilote et père du président actuel, en un organe de sécurité et de renseignement influent et craint, qui lui permit tout au long du conflit d’instaurer un climat de suspicion généralisée chez les rebelles et de pallier les manques de moyens techniques pour identifier ses cibles.
Ses premiers engagements contre l’insurrection ont été ainsi largement effectués par sa flotte d’hélicoptères de combat Mi-24 et Mi-25 et des appareils d’entraînement L-39 Albatros reconvertis. L’inadéquation des chasseurs Mig à du soutien rapproché au sol et la peur de représailles occidentales avec l’antécédent libyen l’ont forcé à rester en retrait alors que l’effritement des troupes loyalistes s’accélérait et que les capacités anti-aériennes rebelles montaient en puissance. Pressé par l’avance des rebelles, le régime a dû étendre progressivement la gamme de ses appareils engagés, recourant notamment à ses intercepteurs Mig-23 et Mig-29 à Alep pour opérer des frappes au sol dès août 2012. Cette période coïncida avec le début des bombardements à l’aide de “bombes-barils” lâchées depuis les hélicoptères de transport Mi-8/17. Alors qu’on estimait en 2011 que 50% de la flotte de Mi-8/17, des chasseurs Mig-21, Mig-23 et des précieux Su-22 devaient être révisée en profondeur, plus de 2000 frappes aériennes furent répertoriées de novembre 2012 à avril 2013. La période de juillet 2012 à juillet 2013 fut par ailleurs la plus catastrophique pour l’AAS avec quelques 350 pilotes perdus, soit par capture, par désertion ou par perte au combat avec 45 hélicoptères et 30 jets abattus. La moitié de son potentiel aurait été perdu [2].
À l’été 2013, alors que l’aéroport international de Damas se trouve à la portée des tirs de mortier de la rébellion et que les forces pro-Assad à Alep voient leur principal axe de ravitaillement, l’autoroute M5, coupé, deux évènements changent la donne. La victoire du régime lors de la bataille d’Al-Qusayr, le 5 juin 2013, avec l’aide du Hezbollah, lui permet de sécuriser ses voies de ravitaillement vers le Liban au moment où il perd le contrôle du reste de ses poste-frontières vers la Turquie, l’Irak et la Jordanie. Enfin l’absence de réponse occidentale à l’usage de gaz dans la banlieue est de Damas, la Ghouta, incarne une rupture décisive. Grâce à la couverture diplomatique russe, l’hypothèse d’une intervention occidentale devient improbable. L’armée de l’air syrienne peut dès lors compenser l’usure de sa flotte d’hélicoptères de combat par le recours à ses chasseurs-bombardiers Su-22 et Su-24 sans peur de représailles. L’attaque sur la Ghouta est ainsi un moment clé : elle marque le début de l’escalade aérienne et la transformation définitive de l’AAS en une arme de terreur.
À partir de l’été 2013, les positions des rebelles et du régime resteront peu ou prou les mêmes qu’en début d’année. Ce qui s’était annoncé comme une course aux frontières et aux ressources s’enlise et devient une longue guerre d’attrition le long de l’autoroute M5, l’axe stratégique fondamental du conflit [3]. Celle-ci relie en effet la capitale politique de la Syrie (Damas) à son centre économique (Alep) en passant par le “berceau” historique de l’insurrection (Deraa) et les villes de Homs et de Hama, épicentres des répression de 1982.
Les formations rebelles, trop vulnérables à l’action de l’AAS, décident de progressivement délaisser la capture et l’occupation des territoires pour se concentrer sur une stratégie de déni d’accès, d’abord contre les voies logistiques terrestres à l’aide d’Engins Explosifs Improvisés (EEI) et d’embuscades, ensuite par la prise des bases aériennes afin d’abattre au sol les appareils de l’armée. De novembre 2012 avec la capture de l’héliport As-Sultan à août 2014 et la chute de l’aéroport de Tabqa, ce n’est pas moins de 7 aéroports majeurs qui tombent aux mains des rebelles [4]. Cette stratégie est payante : elle prive le régime de certains noeuds logistiques et permet aux rebelles de récupérer de l’armement anti-aérien voire des appareils en état de marche comme à Ksehsh, le 12 février 2013, avec la capture de 8 L-39. Les MANPADs commencent alors à proliférer dans les rangs de ces derniers. Des Fn-6 chinois, des SA-7 Strela et même des modèles récents comme des SA-16 ou SA-24 [5] apparaissent au côté de DCA plus traditionnelles de l’ère soviétique telles les auto-canons Zu-23 ou des canons anti-aériens de 57 mm [6]. Dans la Ghouta, serait même fonctionnel depuis 2012 un SA-8 Gecko, plateforme de missiles anti-aériens avec radar incorporé [7]. Ces prises, certes d’importances inégales, ne privent pas moins le régime de ses principaux centres d’entraînement de Mennegh et de Kshesh ainsi que de Kweres, rendu inutilisable par son encerclement jusqu’en 2017. Elles exacerberont le déficit en pilotes expérimentés avec un important fléchissement du rythme des sorties à 50 par jour pour l’année 2014. Cet appauvrissement tactique se voit renforcé par la peur du régime de voir ses pilotes faire défection. Les lectures et débats doctrinaux sont interdits et les sorties aériennes sont impitoyablement micro-gérées, réduites bien souvent à un seul appareil qui doit suivre l’itinéraire le plus direct vers sa cible avec des moyens de navigation sommaires, tels Google earth [8].
Commentaire de la carte. Avec la prise de Raqqa par les Forces Démocratiques Syriennes au début de la seconde quinzaine d’octobre 2017 et la rupture du siège de Der es-Zor par l’armée syrienne (rouge), le 12 septembre 2017, la guerre en Syrie semble voir Daesh disparaître sous sa forme territorialisée. Rien ne prédit cependant une fin rapide du conflit sans accord politique avec la rébellion à l’ouest (vert) fortement retranchée dans ses fiefs d’Idleb et autours de Deraa.
L’État syrien, ainsi confronté à la supériorité numérique des rebelles mais stabilisé par sa victoire à Al-Qusayr et la reprise consécutive de Homs, entreprend alors de se retrancher dans le Heartland syrien autour de Damas et dans la région côtière de Lattaquié peuplée majoritairement d’Alaouites, l’ethnie religieuse qui forme son ossature administrative et militaire. Parallèlement, il pallie l’épuisement de son armée régulière par la levée de milices pro-régime. Il y parvient par l’armement des minorités chrétienne, palestinienne et druze, ou encore par l’équipement de ses réseaux clientélistes et mafieux tels les Chabiha [9]. Ces milices, au recrutement local, lui permettent ainsi de jouer des intérêts locaux et d’enraciner sa présence à faible coût. Difficilement manœuvrables sur d’autres théâtres que leurs localités, ces groupes n’offrent certes pas de grandes capacités offensives. Cependant, ils assurent un maillage défensif suffisamment dense pour absorber les attaques rebelles en attendant l’arrivée des troupes d’élites et surtout loyales du régime, à l’instar des Forces du Tigre ou les Desert Falcon [10], qui mèneront les contre-attaques.
L’armée de l’air syrienne devient ainsi la véritable “clé de voûte” de cette stratégie “d’enclavement” des positions de l’État syrien. Elle joue d’abord un rôle d’interdiction pour préserver ses positions d’une concentration suffisante des formations rebelles pour les envahir. Surtout, elle incarne le seul lien logistique pour ravitailler ces différentes enclaves de plus en plus isolées. La survie des forces du régime à Deir-ez-Zhor autour de son aéroport militaire, totalement assiégées depuis 2012, démontre à la fois l’efficacité et le coût faramineux en vies humaines et en matériels d’une telle stratégie [11]. L’AAS finit par incarner en quelque sorte le ciment du dispositif. Enfin son emploi comme arme de siège, déjà remarqué lors des prises de Homs ou autour d’Alep se systématise tout au long du conflit pour suppléer au manque de mobilité et de pièces d’artillerie lourde. Pour répondre à cette stratégie, elle se recentre sur ses appareils capables de bombardement, reconvertit ses Mig-21UM d’entraînement en bombardiers et décommissionne ses MIG-25 autour de mars 2014 [12].
La période de 2013 à 2014 était ainsi celle de l’endiguement. Cependant, la chute d’Idleb en mars et de Palmyre en mai 2015 révèlent que le point de rupture des forces du régime et de sa flotte aérienne a été atteint : sa survie est à nouveau en jeu. L’intervention russe en septembre 2015 incarne un vrai game changer : elle assure la récupération du régime et lui permet de reprendre pied. Un nouveau chapitre du conflit s’ouvre alors dont le dénouement se déroule encore 2017 : le régime ne joue plus sa survie mais gagne progressivement. Il s’agit désormais pour lui de punir et de conquérir.
Début 2015, l’armée syrienne est gravement diminuée par ses engagements [13] et profite tout d’abord de l’intervention russe pour se rééquiper et approfondir l’entraînement de ses pilotes. Le dégagement de l’aéroport international d’Alep en 2013 permet en effet l’accès à l’atelier principal de l’armée de l’air syrienne, The Work ou “la fabrique” et put de 2014 à 2015, grâce à l’achat en Biélorussie de pièces de rechange par l’Iran, restaurer une quarantaine de L-39 et de Su-22. C’est pendant cette période que les avions d’entraînement L-39, mis en réserve avec la prolifération des MANPAD, sont dotés des kits de vision nocturne pour reprendre leurs missions de bombardement, notamment sur Alep en 2016. Les bombes-barils deviennent de plus en plus sophistiquées avec l’installation d’ailerons, de détonateurs et parfois même de gaz chloré [14]. Les vols d’entraînement, déjà réinitiés en 2013 peuvent enfin bénéficier de la fin du siège de Kweres en novembre 2015 qui libéra de nombreux pilotes et instructeurs. En 2016, l’AAS est ainsi revenue à un rythme de plus de 60 sorties par jour et atteint même les 70 à la fin de 2016.
Grâce à l’intervention russe, l’État syrien reprend dès lors l’initiative et peut appliquer méthodiquement la même stratégie opérée en 1982 contre Homs et Hama au pays entier : nettoyer et tenir les centres urbains par sa puissance de feu. Il s’agit tout d’abord de relier ses diverses enclaves, devenues autant de points d’appui, jusqu’à isoler les localités rebelles par des offensives blindées. Ensuite, dans une certaine réminiscence des “chaudrons” soviétiques, l’armée régulière assiége la zone et opére un bombardement systématique. Seulement, celui-ci vise sciemment les infrastructures civiles : les hôpitaux, les boulangeries, les “centres de presse” et de gouvernance (judiciaire, policier et politique). La vie doit être rendue impossible et l’exode encouragé : la famine est institutionnalisée comme une arme de soumission [15], les tentatives d’organisations politiques (djihadistes comme modérées) sont autant d’alternatives au régime devant être éradiquées et des corridors “humanitaires” sont établis pour faciliter la fuite des habitants. La logique est celle de n’importe quelle stratégie contre-insurrectionnelle : priver la rébellion du soutien de la population et opérer la distinction militants/non-combattants en “asséchant” le milieu occupé par la rébellion. La différence majeure est qu’elle est appliquée ici selon les canons de la guerre conventionnelle et tend in fine au nettoyage ethnique. Les zones conquises restent désertes, dévastées avec de nombreux villages fantômes, à l’instar de Rastan, abandonnée depuis 2012. Cette politique d’épuration une fois jugée suffisante, la nasse est alors réduite par l’infiltration des unités d’élites (Hezbollah, Forces du Tigre, etc) qui brisent la cohésion de la défense adverse puis par l’envoi des milices “populaires” qui procèdent à l’éradication des poches de résistance et à l’occupation de la zone.
Au détriment du soutien au sol qu’elle ne maîtrise plus [16], l’AAS est devenue ainsi une véritable arme de siège, réduit à un rôle d’artillerie autoportée extrêmement brutale et primaire. Elle s’avère autant capable de frapper avec précision les infrastructures jusqu’aux centres de commandements rebelles dans des missions de décapitation, que de façon indiscriminée dans une logique de terreur. Elle jouit, en effet, d’un avantage important sur l’artillerie qui ne possède pas sa réactivité mais surtout son impact psychologique. En effet, pour briser l’activité socio-économique des zones insurgées, l’intensité est moins importante que la constance des frappes. Il s’agit de matérialiser la présence du régime et de manifester sa vengeance auprès des populations. Le modèle appliqué est celui de la seconde guerre de Tchétchénie et tout particulièrement du siège de Grozny opéré par la Russie du 25 décembre 1999 au 6 février 2000 où les moyens (bombes thermobariques, incendiaires et à sous-munitions), les étapes et le tempo des opérations sont les mêmes : encercler, subjuguer et occuper. Mis en lumière lors du siège d’Alep, ce modèle est désormais en œuvre à l’échelle du pays.
Les frappes américaines dans la nuit du 6 au 7 avril 2017, qui ont effectivement sanctionné le régime pour son attaque à l’arme chimique sur la localité de Khan Cheikhoun, n’ont en rien altéré les dynamiques du conflit ou l’équilibre des forces. Certes, le régime voit sa flotte de Su-22 réduite à une dizaine d’appareils avec un de ces jets encore abattu, le 18 juin 2017, par un Super Hornet américain, mais ces pertes deviennent exceptionnelles. Elles ne remettent pas en question une stratégie aérienne qui aux yeux du régime est efficace mais qui se révèlera à double-tranchant. Les territoires sont conquis mais dévastés, pacifiés mais vidés de leurs habitants soit par l’exode, soit par accord avec le régime. Ces bombardements transforment ces métropoles en villes-martyres qui radicaliseront maintenant et sur plusieurs années leurs habitants et la rébellion. Ainsi, si la défaite militaire de celle-ci devient de plus en plus certaine, sa transformation en mouvement clandestin ou semi-clandestin de guérilla est assurée, avec la garantie de relais dans la population au long terme selon une ligne sectaire. La victoire du Front Al-Cham (ex-Front Al Nosra, ancienne branche d’Al-Qaïda en Syrie) à Idleb face aux autres factions rebelles, les 23 et 24 juillet 2017 atteste de la prise de pouvoir des plus radicaux et de l’évincement des groupes dit modérés. D’un point de vue capacitaire, le rythme pour la flotte aérienne a été éreintant et lui aurait été même fatal sans le soutien iranien ou russe. Dans une perspective plus large, cette résolution du conflit syrien selon les objectifs russes et ou iraniens annoncent un usage indiscriminé de l’arme aérienne beaucoup plus fréquent car banalisé, un délitement du cadre juridico-moral et des règles du jus in bellum. Enfin, la fin du conflit par la victoire d’Assad ne règle en rien les tensions dans la région et exacerbe l’appel à la discipline dans chaque camps. Avec la tentative de mise au pas du Qatar par l’Arabie Saoudite, il semble que les alliances régionales se durcissent et la possibilité de médiation se réduise... Le début d’une Guerre froide ou d’une guerre de 30 ans pour le Moyen-Orient ?
Manuscrit clos septembre 2017
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[1] “Man-Portable Air-Defense systems”, système de missiles anti-aériens de basse altitude, souvent à guidage laser infrarouge, d’une portée de quelques kilomètres et d’une altitude comprise entre 1 500 mètres pour les modèles soviétiques SA-7 Strela et SA-18 Igla à 3000, 4500 mètres pour les français Mistral et Américain Stinger.
[2] Tom Cooper, "What’s left of the Syrian Arab Air Force", War is Boring, 11 may 2016, url : http://warisboring.com/whats-left-of-the-syrian-arab-air-force/#.hw2sc7vfo
[3] Michel Goya, “Le massacre d’Alep et la victoire d’Assad“, La voie de l’épée, 03/10/2016, url : https://lavoiedelepee.blogspot.fr/2016/10/la-bataille-dalep-actuellement-en-cours.html
[4] 25 novembre 2012 : capture d’As Sultan ; 11 janvier 2013 : capture de Taftanaz ; 12 février 2013 : capture de Kshesh ; 18 avril 2013 : capture de Dhab’ah (Al-Qusayr) ; 30 avril 2013 : capture d’Abu Ad-Duhor ; 6 août 2013 : capture de l’héliport de Mennegh et 24 août 2014 : capture de Tabqa.
[5] Lt Col S. Edward Boxx, USAF, “Observations on the air war in Syria”, Air and Space Power Journal, Mars-Avril 2013. Le SA-24 (2004), de fabrication russe, peut engager des cibles à plus de 3000 mètres d’altitude.
[6] À noter que la rébellion dans sa frange djihadiste a pu très tôt bénéficier d’un financement et d’armements livrés par les pays du golfe.
[7] Oryx Blog, “Hide and Seek, the story of Jaish al-Islam’s 9K33 Osa SAMs”, 31 Octobre 2016, url : http://spioenkop.blogspot.fr/2016/10/hide-and-seek-story-of-jaish-al-islams.html
[8] Tom Cooper, “Air Power in decline - Syrian Army Report”, Air Forces Monthly (AFM), Juin 2017.
[9] Ces groupes paramilitaires, appelés dans un premier temps “l’Armée du peuple” (Jaysh Al-Sha’bi) furent réorganisés avec l’aide de l’Iran en unités des “Forces de Défense Nationales” (Quwāt ad-Difāʿ al-Watanī). Ils ne répondent pas de la hiérarchie militaire mais directement de la présidence.
[10] Ces forces sont moins des troupes régulières que des armées privées qui constituent une garde prétorienne directement subordonnée à l’autorité de Bachar Al-Assad. Elles capitalisent les meilleurs hommes issus de l’armée ou des milices et les meilleurs armements, notamment ceux russes ou iraniens. Elles officient comme troupes de chocs et comme unités de stabilisation. Cette conception élitiste présente cependant un sérieux désavantage : sollicitées sur tous les fronts, leur usure est très importante et contribue à priver l’armée régulière de ses meilleurs éléments.
[11] Comme pertes notables et à titre d’exemple, l’AAS a perdu un de ses chasseurs bombardiers les plus avancées : un Su-24 le 28 novembre 2012. De même, le 2 juillet 2017, un hélicoptère Mi-17, crucial pour le transport des troupes, du matériel et l’évacuation sanitaire, a été détruit par un missile guidé antichar sur une flotte qui ne compterait plus que 12 appareils opérationnels.
[12] Malgré la tentative d’utiliser les Mig-25 pour tirer des missiles R-40 air-air sur des cibles au sol, sans résultat probant : Oryx, “Fortress T4 : An Airbase at War“, 29 Juin 2015, url : https://www.bellingcat.com/news/mena/2015/06/29/fortress-t4-an-airbase-at-war/
[13] Tom cooper estimait que déjà début 2014, seulement une soixantaine d’hélicoptères et moins de 150 chasseurs restaient opérationnels. Tom Cooper, "What’s left of the Syrian Arab Air Force", War is Boring, 11 may 2016, url : http://warisboring.com/whats-left-of-the-syrian-arab-air-force/#.hw2sc7vfo
[14] Bellingat, “A brief open-source history of the syrian barrel bomb”, 08/07/2015, url : https://www.bellingcat.com/news/mena/2015/07/08/a-brief-open-source-history-of-the-syrian-barrel-bomb/ et Le Monde, "En Syrie, la guerre des bombes barils", 20/11/2014, url :
http://abonnes.lemonde.fr/proche-orient/visuel/2014/11/20/en-syrie-la-guerre-des-bombes-barils_4525991_3218.html
[15] Les convois humanitaires sont bloqués et, le 19 septembre 2016, au plus fort du siège d’Alep, l’un d’entre eux a été même bombardé. Anne Barnard, Nick Cumming-Bruce, “U.N investigators say Syria bombed convoy and did so deliberately”, New York Times, 1er mars 2017, url : https://www.nytimes.com/2017/03/01/world/middleeast/united-nations-war-crimes-syria.html.
[16] Avec des conséquences dramatiques, comme lors de l’offensive du régime sur Tabqa, le 26 juin 2016, qui se transforme après la contre-attaque de l’EI en une débandade. L’armée de l’air syrienne s’est montrée incapable de fournir un soutien au sol équivalent à celui des Russes. Oryx Blog ; "No end in sight : failed Tabqa offensive reveals underlying shortcomings of regime forces", 26 juin 2016, url : http://spioenkop.blogspot.fr/2016/06/no-end-in-sight-failed-tabqa-offensive.html
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