Hervé Théry, Directeur de recherche émérite au CNRS-Creda, Professeur au Brésil à l’Université de São Paulo (USP). Hervé Théry publie « Amazone. Un monde en partage », collection « Géohistoire d’un fleuve », CNRS Éditions.
Interview organisée et conduite par Pierre Verluise, docteur en Géopolitique, fondateur du Diploweb.com, il anime Planisphère sur Radio Notre Dame et RCF depuis septembre 2024. Cette émission avec H. Théry a été diffusée en direct le 17 septembre 2024.
Synthèse par Émilie Bourgoin, étudiante en quatrième année au BBA de l’EDHEC et alternante au sein de la cellule sûreté d’un grand groupe. Elle est en charge depuis septembre 2024 du suivi hebdomadaire de l’actualité des livres, revues et conférences géopolitiques comme de la rédaction des synthèses des épisodes de l’émission Planisphère pour Diploweb.com.
L’Amazonie est bien plus qu’une vaste étendue de forêt tropicale. S’étendant sur neuf pays et couvrant une superficie équivalente à douze fois celle de la France, elle abrite environ 390 milliards d’arbres. Cependant, ce territoire mythique suscite à la fois fascination et inquiétude à l’échelle mondiale, son image oscillant entre le paradis terrestre et l’enfer vert. Ce podcast explore les perceptions globales, les dynamiques géopolitiques et les défis environnementaux et sociaux de l’Amazonie.
Vous trouverez ci-dessous les liens vers l’émission, sa synthèse rédigée, la présentation du nouvel ouvrage d’Hervé Théry et le concept de l’émission Planisphère.
Cette émission, Planisphère. L’ Amazonie, un monde en partage ? Avec H. Théry sur RND
Cette émission, Planisphère. L’ Amazonie, un monde en partage ? Avec H. Théry, sur RCF
Lien direct vers cette émission sur RCF
Synthèse de cette émission, Planisphère. L’ Amazonie, un monde en partage ? Avec H. Théry. Rédigée par Emilie Bourgoin, relue et validée par Hervé Théry
L’AMAZONIE, souvent qualifiée – abusivement – de « poumon du monde », est bien plus qu’une vaste étendue de forêt tropicale. S’étendant sur neuf pays et couvrant une superficie équivalente à douze fois celle de la France, elle abrite environ 390 milliards d’arbres. Cependant, ce territoire mythique suscite à la fois fascination et inquiétude à l’échelle mondiale, son image oscillant entre le paradis terrestre et l’enfer vert. Ce podcast explore les perceptions globales, les dynamiques géopolitiques et les défis environnementaux et sociaux de l’Amazonie.
La forêt amazonienne est la plus grande forêt tropicale du monde et constitue un réservoir inestimable de biodiversité. Cependant, sa réputation de « poumon du monde » est souvent mal comprise. Contrairement à un poumon humain qui absorbe de l’oxygène et rejette du dioxyde de carbone, l’Amazonie fonctionne à l’inverse, absorbant du CO2 et libérant de l’oxygène, jouant ainsi un rôle crucial dans la régulation du climat mondial. Cette région est perçue différemment à travers le monde : d’une part comme un jardin d’Éden regorgeant de mystères, d’autre part comme un enfer vert peuplé de dangers tels que les insectes et les maladies. Cette double perception reflète l’intérêt intense, parfois excessif, que le monde porte à l’Amazonie, au détriment d’autres forêts tropicales moins médiatisées.
L’Amazonie s’étend sur neuf pays : Brésil, Pérou, Colombie, Venezuela, Équateur, Bolivie, Guyana, Suriname et la France (par la Guyane française). Historiquement, ces pays se sont longtemps ignorés sur le plan de la gestion de l’Amazonie, mais les choses ont évolué, notamment avec la construction par le Brésil des routes Transamazoniennes dans les années 1970, ce qui a provoqué des inquiétudes parmi ses voisins. Pour apaiser ces tensions, le Traité de coopération amazonienne a été signé, permettant une collaboration transfrontalière et renforçant l’intégration régionale. La France, via la Guyane, est impliquée en tant qu’observateur, bien que sa demande d’adhésion pleine et entière soit encore en discussion.
La Guyane française, bien qu’intégrée dans le bassin amazonien, n’est pas toujours considérée comme un territoire légitime par certains mouvements nationalistes des pays voisins, qui la voient encore comme une colonie. Cependant, sa reconnaissance formelle n’est pas contestée par les gouvernements des pays amazoniens. Des projets d’infrastructure, comme le pont sur l’Oyapock reliant la France au Brésil, illustrent la coopération géopolitique, même si l’absence d’inauguration officielle au plus haut niveau reflète les tensions persistantes entre les deux pays, notamment sur les questions de souveraineté et de ressources naturelles.
Avec une population de 30 millions d’habitants, dont 80 % vivent en milieu urbain, l’Amazonie n’est pas qu’une forêt vierge mais aussi un espace de vie complexe. Les habitants aspirent à un développement qui leur permette d’améliorer leurs conditions de vie sans pour autant sacrifier l’écosystème. La question du développement durable reste un point de tension majeur, avec des positions extrêmes : certains prônent une conservation stricte tandis que d’autres soutiennent l’exploitation intensive, notamment pour l’agriculture et l’élevage. La conciliation de ces intérêts passe par des compromis difficiles, impliquant des stratégies de zonage et d’arbitrage entre les différentes parties prenantes.
Les populations indigènes de l’Amazonie, qui se chiffrent à environ 700 000 personnes (42,5 % de la population autochtone brésilienne, 0,3% de la population du pays), continuent de vivre selon des modes de vie traditionnels et sont souvent en première ligne des luttes pour la protection de la forêt. Toutefois, une partie de ces populations reste inconnue, vivant sans contact avec le monde extérieur. La préservation de leurs modes de vie est cruciale pour la diversité culturelle et écologique de la région.
La déforestation de l’Amazonie est accompagnée d’incendies, dont une grande partie est intentionnelle pour défricher des terres, une pratique qui a longtemps été nécessaire pour revendiquer la propriété. Ces feux sont particulièrement fréquents durant la saison sèche, de juillet à août, et sont aggravés par des phénomènes climatiques comme El Niño, rendant la forêt extrêmement vulnérable. Ces incendies constituent non seulement une menace pour l’écosystème mais aussi un défi majeur pour les politiques environnementales locales et internationales.
Membre des BRICS, le Brésil est le plus grand pays d’Amérique latine et possède l’une des dix premières économies mondiales. En tant que « pays émergé », il joue un rôle central dans la gestion de l’Amazonie. Le pays est un acteur géopolitique majeur avec un soft power significatif, notamment par sa culture, mais il est également confronté à de graves problèmes internes. Le pays juxtapose modernité et archaïsme, affichant des réussites comme le vote électronique généralisé, tout en restant marqué par de profondes inégalités et une violence omniprésente. Environ 50 000 à 60 000 homicides sont enregistrés chaque année, en grande partie dus aux conflits de gangs liés au trafic de drogues.
Pour approfondir la connaissance de l’Amazonie et du Brésil, plusieurs ressources sont disponibles. La revue franco-brésilienne de géographie « Confins » (http://journals.openedition.org/confins/) et le blog « Braises » (http://braises.hypotheses.org/) offrent des perspectives détaillées sur ces sujets. Des ouvrages comme « Environnement et développement en Amazonie brésilienne », coordonné par Hervé Théry, ainsi que « Amazonie brésilienne et le développement durable » de Martine Droulers et François-Michel Le Tourneau, apportent des analyses approfondies sur les défis auxquels fait face l’Amazonie.
Copyright pour la synthèse Septembre 2024-Bourgoin/Diploweb.com
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Hervé Théry, Amazone. Un monde en partage, CNRS éditions
4e de couverture
Au cœur de l’Amazonie et de son immense forêt, précieuse par sa biodiversité mais menacée par un déboisement massif, on oublierait presque que coule le plus grand fleuve au monde. Or, comme l’a écrit le romancier brésilien Leandro Tocantins, en Amazonie, « le fleuve commande la vie ». C’est à la découverte de l’Amazone, de ses habitants, mais aussi de son histoire heurtée que nous invite Hervé Théry, à la rencontre de ce monde en partage.
Car l’immense bassin du fleuve a été et est encore beaucoup convoité. Par les empires coloniaux de l’Espagne et du Portugal d’abord, qui se sont chacun approprié une part de cet espace, souvent au mépris des peuples autochtones. Par neuf États-nations aujourd’hui, très attachés à leur emprise territoriale, dont le Brésil qui en possède les deux tiers, et la France, qui y est présente grâce à la Guyane. Les conflits n’y ont pas disparu, notamment entre les populations locales et les colons venus des métropoles voisines (voire d’autres continents) pour extraire du pétrole, élever des bovins ou planter du soja.
Si l’Amazone a été au cœur de toutes les activités régionales pendant plus de cinq siècles, la brusque irruption des routes et l’urbanisation massive à partir des années 1960 ont complètement changé la donne. Quels nouveaux partages s’y font aujourd’hui ? Comment préserver ce fleuve des excès de l’humanité ?
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Présentation du concept de l’émission Planisphère par Pierre Verluise
Planisphère est une émission de géopolitique proposée par Radio Notre Dame et RCF. Planisphère est animée par Hugo Billard jusqu’au 31 août 2024 ; par Pierre Verluise (Diploweb.com) depuis le 3 septembre 2024. Chaque semaine des historiens, des géographes, des géopoliticiens, des diplomates, des stratèges et des acteurs des relations internationales prennent le temps de mettre en perspective les soubresauts du monde. Planisphère cherche à comprendre l’actualité mondiale dans l’espace et dans le temps, en privilégiant la clarification des jeux des acteurs comme des résultats sur les territoires. Pierre Verluise cherche à mettre à jour l’interaction des échelles et les dynamiques de la puissance, définie comme une capacité de faire, de faire faire, de refuser de faire ou d’empêcher de faire.
Cette émission est disponible en podcast sur les sites et les applications de ces deux radios, comme sur le Diploweb.com qui offre en bonus une synthèse rédigée, validée dans la mesure du possible par l’intervenant.
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