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www.diploweb.com Union soviétique - Séisme du 7 décembre 1988 "Arménie, la fracture", par Pierre Verluise
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Ed. Stock, 1989 Ce livre a été réalisé en collaboration avec l'organisation non gouvernementale Médecins sans Frontières, Prix Nobel de la Paix 1999. Le 7 décembre 1988, près de 100 000 arméniens meurent en quelques instants, écrasées sous les décombres de bâtiments inadaptés pour résister à un séisme. En dépit de leurs efforts, les sauveteurs arméniens et étrangers - pour la première fois autorisés en pénétrer en URSS - n'arrachent des décombres pas plus de 80 survivants. Cette tragédie marque pour longtemps les 500 000 à 700 000 sinistrés, ainsi que les 6 millions d'Arméniens vivant en Union soviétique ou en diaspora. Ce livre a été publié en anglais, en 1995 : "Armenia in crisis : the 1988 earthquake", preface Levon Chorbajian, professor at the University of Massachusetts, ed. Wayne State University Press, Detroit, Michigan USA. Disponible sur http://www.amazon.com L'histoire du livre Le projet du livre se forme aux alentours du 15 décembre 1988. Alors président de Médecins sans Frontières, Rony Brauman lui apporte rapidement son soutien, envisageant déjà une préface de Gérard Chaliand. Celui-ci, également, répond à l'appel. La première intention est alors d'analyser les réactions du système soviétique en situation de crise, parce que de tels moments s'avèrent souvent révélateurs des véritables priorités d'un système. Convaincu qu'il est nécessaire que le malheur soit dit et reconnu pour que son deuil puisse se faire, une seconde motivation s'ajoute bientôt : contribuer à la mémoire d'un événement historique majeur. Que ce tremblement de terre frappe un peuple dont certains nient - en dépit des preuves indiscutables - le génocide en 1915, rend ce travail d'autant plus nécessaire. Afin de conserver la disponibilité nécessaire pour collecter, confronter et mettre en forme l'information, j'ai choisi de ne pas devenir l'énième à me rendre en décembre 1988 en Arménie. Mon séjour sur place date de septembre 1989. A cette occasion je publie dans Le Monde, le premier article alertant l'opinion internationale à propos de la guerre du Haut-Karabagh. Entre temps, j'ai consacré mes efforts à rencontrer de nombreux participants aux secours, pour la plupart partis en Arménie avec Médecins sans Frontières ou la Sécurité civile française. Le sommaire du livre Les faits rapportés dans ce livre s'étendent du 7 décembre 1988, jour du séisme, au 7 janvier 1989, date de l'arrestation de la totalité des membres du Comité Karabagh. La dimension humaine du séisme fait l'objet des quatre premiers chapitres.
Les deux derniers chapitres présentent le contexte historique et les aspects politiques post-séisme.
Enfin, le livre présente une chronologie, le programme du Comité Karabagh, un texte de Claude Mutafian consacré à l'histoire du Karabagh de la fin du XIX e siècle à l'avènement de M. Gorbatchev, une bibliographie succincte, un des personnes et un des lieux. Que s'est-il passé à Leninakan le 7 décembre 1988 ? Un photographe d'Armen-Presse, arrivé sur les lieux de la catastrophe confie à un témoin : "Les gens étaient tellement affolés par l'importance des dégâts que chacun s'occupait de sa propre famille. Ceux qui étaient à l'usine ou au bureau couraient chez eux. On marchait sur les corps. A un moment, un gars de vingt-cinq ans m'a attrapé le pantalon. Il était par terre, sous une plaque de béton. Il m'a supplié en hurlant de soulever la plaque qui l'écrasait. "Je ne peux pas la déplacer seul, je vais chercher de l'aide", lui ai-je répondu. J'ai réussi à réunir 6 gars après deux heures de recherche. Nous avons soulevé la plaque. Malheureusement, le jeune homme est décédé quelques heures après des suites de ses blessures. J'ai également vu un homme qui a soutenu moralement pendant deux jours une petite fille enfouie en lui parlant à travers les gravas. Finalement, le 9 décembre, des secouristes l'ont dégagée. La petite fille s'est agrippée à lui pendant quatre heures, refusant tout soin". Un autre témoin confie : "Un soir, invité à dîner chez des Arméniens, un homme m'a dit : "Mon oncle était prisonnier sous les pierres, sa jambe était écrasée et nous n'arrivions pas à le tirer de là. Il m'a dit : "Le mieux que tu aies à faire, c'est d'aller chercher une hache et de me tirer de là, sinon je vais perdre tout mon sang". L'homme m'a montré une hache et à ajouté : "c'est avec cette hache que j'ai tranché la jambe de mon oncle. Il est encore vivant plusieurs jours après". "Tous ceux qui ont participé aux premiers secours, raconte un témoin chirurgien, ont été brisés de n'avoir pratiquement rien pu faire. Certains montés d'Erevan à Leninakan sont rentrés chez eux le soir même, je ne me permettrai pas de les juger". Pourquoi un tel drame ? Le très lourd bilan humain du séisme du 7 décembre 1988 ne résulte pas de la seule magnitude des secousses sismiques - prévisibles à terme pour des raisons géologiques - mais de l'anticipation insuffisante de la catastrophe par les autorités soviétiques. Celles-ci n'ont pas pris en compte le risque sismique dans la construction de nombreux bâtiments, dans l'organisation et la qualité médicale des premiers secours. Le 7 décembre 1988, la compression entre la plaque arabique et la plaque continentale russe atteint des forces dépassant la résistance de la roche et provoque une rupture de la croûte terrestre se traduisant par un chevauchement de deux compartiments. La rupture, appelée faille, longue de 25 kilomètres, est visible en surface sur 8 kilomètres. Elle commence au sud de la ville de Spitak - pratiquement totalement détruite - et se dirige vers l'ouest nord-ouest. Le rejet maximal atteint 1, 5 mètre en verticale et 0, 4 mètre en horizontale. Avec un épicentre situé entre 10 et 15 kilomètres de profondeur, le séisme comporte deux secousses, à 11 h 41 et 11 h 45, respectivement de magnitude 6,9 et 5,8. La dimension majeure de la catastrophe du 7 décembre 1988 résulte de la combinaison de deux causes essentielles. La cause principale, de très loin la plus meurtrière, est l'incapacité de nombreuses constructions à sauvegarder leurs habitants en absorbant les sollicitations du séisme, voire en ménageant des zones de survie, c'est à dire des volumes dégagés au sein des décombres. La cause secondaire réside dans les insuffisances de l'organisation et de la qualité des premiers secours. L'une comme l'autre renvoient à un déficit de priorité accordé à la vie par le système soviétique. Au vu de bilan de la catastrophe du sous-marin russe durant l'été 2000, la rupture des comportements reste relative. Autre livre de Pierre Verluise: "Le nouvel emprunt russe", éd. O. Média, 1996. Disponible sur http://www.alapage.com |
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