www.diploweb.com Géopolitique de l'Europe La situation migratoire de l'Union européenne: enjeux et perspectives, par le Chef d'escadron Christian Janus (Gendarmerie nationale, France, 12 e promotion du CID)
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L’avenir de l’UE dépend en grande partie de la gestion de sa situation migratoire. Par conséquent, toutes les mesures qui concourent à l’optimiser revêtent un caractère essentiel. Il importe de finaliser la politique communautaire en matière d’immigration. Cette politique est élaborée conformément aux dispositions du Traité d’Amsterdam et s’appuie sur les conclusions du Conseil européen de Tampere (1999). Elle doit s’attacher à trouver un équilibre entre les aspects humanitaires et économiques des flux migratoires des pays tiers. Son efficacité repose sur un traitement équitable des ressortissants des pays tiers. En particulier, il importe de leur accorder des droits et des obligations comparables à ceux des ressortissants locaux. La maîtrise des flux passe également par une politique équitable de partenariat et de coopération avec les pays de départ des migrants. Ces ambitions nécessitent l’engagement de moyens financiers conséquents ainsi que l’élaboration d’un cadre juridique adapté. La réussite de cette politique communautaire dépendra de la capacité des Etats membres à transcender leurs intérêts (politique du chacun pour soi) et à remettre en cause le principe de souveraineté nationale.
Ce mémoire de géopolitique a été rédigé au Collège Interarmées de Défense dans le cadre du séminaire "Géopolitique de l'Europe", dirigé par Pierre Verluise. |
Bibliographie du sujet et biographie de l'auteur en bas de page. Sommaire: 1. LA SITUATION MIGRATOIRE DE L’UE : DES DEFIS A RELEVER. Maîtriser l’immigration : un enjeu démographique. Réduire les demandes d’asile et lutter contre l’immigration clandestine. Finaliser une politique migratoire communautaire. La gestion des frontières extérieures. Assurer la libre circulation des personnes : les limites actuelles de Schengen.
2. QUEL AVENIR POUR L’UE ET SES MIGRATIONS ?Vers une nouvelle Europe des migrations. Vers une politique d’intégration européenne ? Vers un partenariat avec les pays tiers ? Quelles perspectives pour les nouveaux Etats membres ? Vers une Europe espace.
Voir une carte du solde migratoire de l'espace UE25 en 2003, réalisée par C. Janus
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IntroductionLes migrations ont de tout temps contribué à la structuration et au développement des sociétés humaines. Les flux migratoires traditionnels ont pendant longtemps trouvé leurs origines dans des conflits armés, des catastrophes naturelles ou climatiques, la misère ou encore la malnutrition. Les relations migratoires se formaient essentiellement à partir de liens historiques coloniaux et linguistiques. Au cours des années 1980 et 1990, l’Europe est devenue un continent d’immigration. Des tendances nouvelles ont fait leur apparition qui bouleversent en profondeur les mouvements migratoires. En premier lieu, nous citerons la mondialisation des échanges avec pour corollaire une accélération de la mobilité des personnes et un élargissement du nombre de pays et des catégories d’individus concernés par la migration. Il convient également d’évoquer le passage de pays d’émigration à des pays d’immigration en Europe du Sud et de l’Est. La dernière tendance recensée est la persistance d’une pression migratoire vers l’Europe et une amorce « d’européanisation » des politiques migratoires. Parallèlement, les taux de natalité enregistrés dans l’Union européenne (UE) sont à la baisse alors que l’espérance de vie des Européens est à la hausse. La convergence de tous ces facteurs place la situation migratoire au cœur des préoccupations de l’UE. L’Europe communautaire est aujourd’hui le 1er continent d’immigration et attire une part importante du flux migratoire mondial. En 2000, les estimations s’établissent autour de 700 000 migrations officielles (travail, études, regroupement familial) et 400 000 entrées illégales dans une fourchette annuelle de 300 000 à 500 000 personnes. En mai 2004, l’UE a ouvert ses portes à dix nouveaux Etats membres. Elle possède désormais la troisième population au monde, derrière la Chine et l’Inde, et accroît sa superficie d’un quart pour la porter à presque quatre millions de km². Un tel changement dans la configuration de l’UE suscite cependant des craintes. L’UE sera-t-elle en mesure de maîtriser une immigration qui apparaît indispensable à sa pérennité ou sera-t-elle confrontée à une immigration exponentielle ? Sera-t-il possible de circuler librement au sein d’une « Europe espace » ou sera-t-il nécessaire d’ériger des barrières aux frontières orientales et du sud, transformant de fait l’UE en une « Europe forteresse » ? Quelles seront les perspectives offertes aux 25 Etats membres, aux pays candidats à l’adhésion, aux pays limitrophes et à ceux dont les populations constituent le vivier des migrations licites ou non vers l’UE ? Enfin, cette nouvelle Europe, forte de plus de 450 millions d’habitants, jouera-t-elle un rôle majeur sur l’échiquier mondial et deviendra-t-elle une Europe puissance ? La situation migratoire de l’UE est porteuse d’enjeux qui sont autant de défis à relever et lui offre des perspectives intéressantes. L’élargissement de l’UE, actuel et futur, crée un espace plus vaste de stabilité et de prospérité qui ne manquera pas attirer de nouveaux migrants qui chercheront à s’y établir, légalement ou non. Le droit de circuler librement en son sein et de vivre et travailler dans l’Etat membre de son choix est un défi essentiel que l’UE doit être capable d’offrir à tous ses ressortissants. Cet enjeu reconnu par le traité de Maastricht (1992) et développé lors du sommet de Tampere (1999) doit s’appuyer sur une politique migratoire communautaire en voie de consolidation et requiert des outils juridiques communs. L’Europe a besoin d’une immigration forte pour assurer son avenir même s’il est déjà prévisible que cette politique d’immigration isolée ne sera pas suffisante pour enrayer un déclin démographique qui paraît inéluctable à terme. Afin d’estomper les réticences naturelles que suscite toute politique d’immigration, il importe d’en maîtriser les aspects collatéraux que constituent les demandes d’asile et l’immigration illégale. Pour se préserver de toute forme d’immigration illégale massive, il importera à l’UE d’assurer une gestion concertée et cohérente de ses frontières extérieures. Pour autant, la solution qui consisterait à ériger des barrières aux frontières extérieures, transformant ainsi l’UE en une « Europe forteresse » constituerait une stratégie perdante. Au contraire, l’UE doit et souhaite établir des partenariats avec ses voisins au sud et à l’est, ainsi que des relations de coopération avec les pays qui constituent des berceaux d’émigration. L’un des meilleurs moyens de garantir la liberté, la justice et la sécurité à l’intérieur de ses frontières est d’exporter ces valeurs en dehors de ses frontières et contribuer ainsi au rayonnement de l’UE. Ce juste équilibre à trouver entre « Europe forteresse » et suppression des frontières, constitue le socle de l’espace Schengen, préalable incontournable à une véritable « Europe espace ». Chaque Etat membre pourra alors retirer les dividendes de ses investissements et efforts consentis et entrevoir des perspectives avantageuses aux plans économique, social et humain. L’UE est aujourd’hui à la croisée des chemins. De son aptitude à influer sur sa situation migratoire, dépendra son avenir. Nous envisagerons dans une première partie les enjeux qui découlent de sa situation migratoire. Nous examinerons ensuite ses évolutions probables.
I/ La situation migratoire de l’UE : des défis à releverL’UE est confrontée simultanément à une crise démographique et au vieillissement de sa population. Cette situation met en péril son avenir. A court terme, la croissance démographique de l’Europe est conditionnée par l’immigration. La problématique pour l’UE consiste à maîtriser cette immigration (11). Elle y parviendra en luttant contre l’immigration illégale et en réduisant les demandes d’asile (12). Pour concilier ces deux premiers paramètres, l’UE doit impérativement finaliser sa politique migratoire commune (13). En outre, la gestion des frontières extérieures (14) représente un préalable à la libre circulation des personnes. Ceci explique les limites actuelles de « Schengen » (15).
11/ Maîtriser l’immigration : un enjeu démographique L’élargissement de l’UE à dix nouveaux Etats membres en mai 2004, se traduit par un ralentissement de la dynamique démographique. Sans l’immigration, la population des pays de l’UE déclinerait : d’environ 450 millions d’habitants aujourd’hui, elle pourrait tomber à 428 millions en 2050[i]. Catherine Wihtol de Wenden[ii] estime que « pour l’UE, à l’instar de l’Amérique du Nord, l’enjeu consiste à trouver un compromis entre la satisfaction des besoins de main d’œuvre, les perspectives démographiques et le respect des engagements internationaux.» L’immigration pourrait alors se présenter comme une composante majeure de l’avenir de l’Europe. Pour autant, il importe de maîtriser ces flux. Nous analyserons les objectifs que peut remplir l’immigration avant d’examiner les modalités adéquates à mettre en œuvre qui permettent de maîtriser cette immigration essentielle pour l’UE. 111/ L’immigration : une solution partielle au déclin démographique européen Les anciens Etats membres de l’UE15 se caractérisent par un taux d’accroissement naturel très faible, voire négatif. Tableau: Statistiques de population 2002.
Réalisation: C. JANUS. Source : EUROSTAT, 2004, Le guide statistique de l’Europe. Données 1992-2002. Le faible accroissement naturel est la conjonction d’une faible fécondité comprise entre 1,26 et 1,90[iii], et d’une espérance de vie qui augmente régulièrement. L’immigration constitue aujourd’hui dans la plupart des pays le principal facteur de croissance. En outre, la proportion élevée de personnes âgées représente une charge financière qui ne cesse d’augmenter. L’élargissement de l’UE de 15 à 25 Etats membres accentue cette problématique avec une fécondité basse (comprise, si l’on excepte Malte et Chypre, entre 1,14 et 1,34 enfants par femme), un faible niveau d’immigration et une croissance démographique négative. La population dans les nouveaux pays diminue (-1 pour 1000) et l’accroissement naturel est négatif (-1,1 pour 1000) y compris dans le plus peuplé des pays entrants : la Pologne (-0,1 pour 1000). L’élargissement se traduit donc par un ralentissement aggravé de la dynamique démographique de l’UE (Cf. Tableau, le solde migratoire des pays de l’UE25). L’Europe, qui vient de gagner 74 millions d’habitants, s’essouffle plus qu’elle n’accroît sa puissance. Avec 454 millions d’habitants, elle a quasiment atteint son « maximum démographique. » Les projections faites par le « Population Reference Bureau » américain, font état d’une très légère croissance jusqu’en 2025. L’UE culminerait alors à un peu plus de 460 millions d’habitants, avant d’attaquer la pente descendante et perdre 27 millions d’habitants en vingt-cinq ans pour s’établir à 435 millions d’habitants en 2050. En cinquante ans, elle passerait de 7,7% de la population mondiale à 4,7%. Dans le même temps, nombre de grands pays poursuivraient leur dynamique démographique (Inde, Chine,…). L’Europe, puissance économique, doit être comparée, selon le démographe Jean-Claude Chesnais, à d’autres ensembles géographiques comme l’ALENA, l’association de libre échange nord-américaine (Etats-Unis, Canada, Mexique). Cependant, l’écart se creuse entre la communauté européenne et d’autres ensembles. En 2002 l’ALENA comptait 428 millions d’habitants. Elle représenterait 528 millions en 2025 et 612 en 2050, soit 41% de plus que l’UE25. L’ASEAN, association des nations du sud-est asiatique, représenterait, pour sa part, 790 millions en 2050 pour 530 aujourd’hui. Dans un monde en pleine croissance démographique, l’Europe apparaît en retrait, en raison de sa faible natalité et de son vieillissement. Depuis vingt-cinq ans, les migrations constituent le moteur de la croissance de l’UE15. Ces dernières années, la croissance européenne repose aux trois-quarts sur l’immigration et pour un quart sur la natalité. Désormais, tous les pays de l’ancienne UE15, y compris l’Espagne, le Portugal, l’Italie et l’Irlande qui ont inversé leurs tendances, sont des pays d’immigration. L’évolution des dix nouveaux Etats membres constitue, pour l’instant, une inconnue et le démographe Alain Monnier se demande si les nouveaux pays deviendront à leur tour attractifs pour les migrants. L’UE connaît un déficit de travailleurs qualifiés mais également non qualifiés. Les Etats membres se montrent favorables à l’entrée de travailleurs très qualifiés, en particulier dans le secteur des nouvelles technologies. Ainsi en 2003, l’Allemagne a accordé 12000 permis de travail renouvelables à des informaticiens étrangers. Cependant, les Etats membres n’admettent pas toujours la contribution positive en termes économiques et sociaux de l’immigration de travailleurs peu spécialisés. Pourtant, certains secteurs économiques : agriculture, viticulture, travaux domestiques, hôtellerie, construction, manutention, petite industrie,… ont des besoins en personnes qui sont actuellement satisfaits par le recours aux migrations clandestines. Immigration clandestine et travail illégal sont en partie alimentés par des organisations maffieuses qui profitent du manque de coordination communautaire. Selon l’office européen de police (EUROPOL), l’immigration clandestine s’élèverait à 500 000 personnes par an. Ce chiffre devra être revu à la hausse en raison de l’élargissement qui ne manquera pas drainer de nouveaux candidats à l’immigration illégale. Selon le Comité Economique et Social Européen (CESE)[iv], « l’immigration, tant de personnes très qualifiées que de celles qui ont peu de qualifications, y compris de celles qui se trouvent en situation irrégulière, a cependant des effets positifs qu’il y a lieu de mettre en évidence.» Ainsi, la phase actuelle de croissance économique peut être prolongée grâce à l’apport des immigrés. Dans de nombreuses régions et dans différents secteurs, les entreprises ont besoin d’une main-d’œuvre qu’elles ne trouvent pas sur le marché du travail. La présence d’immigrés permet, notamment, de maintenir certaines productions pour lesquelles il n’y a plus de main-d’œuvre locale disponible et, partant, de garantir la vitalité économique et sociale de certaines parties du territoire de l’UE. L’avenir de la protection sociale et des retraites dépend en grande partie du développement de l’économie et de l’emploi ainsi que de l’évolution démographique. Pour l’ensemble de ces facteurs, la contribution de l’immigration légale peut se révéler positive. Il importe toutefois d’en assurer la maîtrise. 112/ Comment maîtriser l’immigration ? La première démarche pour maîtriser l’immigration est de s’intéresser aux besoins de chaque Etat membre de l’UE25. En effet, les situations diffèrent. Ainsi, en France un simple doublement du flux net d’entrants, suffirait à conserver une population d’âge actif constante sur le long terme. A l’inverse selon l’OCDE, des migrants aux Pays-Bas « risquent plus d’émarger à l’aide sociale et venir grossir la troupe des inactifs.» Enfin, l’Italie, faute d’une immigration forte, verrait sa population diminuer de 42% d’ici à 2050. Il s’agit donc pour les Etats de l’UE d’anticiper les problèmes en recensant les besoins de chacun. L’analyse des difficultés auxquelles sont confrontés les Etats membres doit alors permettre d’envisager des flux migratoires adaptés ou de recourir à la formation d’immigrés non qualifiés déjà présents, voire de régulariser des individus en situation irrégulière. C’est ainsi que l’Italie a enregistré, en 1999, 268 000 nouvelles entrées. En fait, il s’agit de personnes entrées depuis plusieurs années et qui vivaient illégalement jusqu’alors. Il apparaît également nécessaire de développer et simplifier les possibilités de mobilité des migrants entre le pays d’origine et le pays d’accueil, mais aussi au sein des pays de l’UE. Les procédures d’admission devront être harmonisées (recommandation du CESE)[v] et gagner en clarté et en simplification. Parmi ces procédures, la Commission européenne envisage d’étudier l’utilité d’un visa de demandeur d’emploi. Il convient donc de tendre vers plus de pragmatisme afin que l’UE soit attractive en terme de migration, à un moment où les politiques d’immigration se développent sur d’autres continents. Une politique de communication doit être mise en œuvre dans ce sens. L’avenir démographique de l’UE25, plus encore que l’UE15, passe par une politique d’immigration massive. Outre l’appel à de nouveaux migrants et à d’éventuelles régularisations, d’autres pistes doivent être explorées. A ce titre, le regroupement familial est une piste intéressante. A l’avenir, l’utilité économique pour le pays d’accueil ne pourra constituer le seul critère de l’immigration. Aussi, le regroupement familial est très présent dans certains pays comme la France et la Suède où il représente entre 70 et 80% des flux. Une directive communautaire relative au droit au regroupement familial a été adoptée le 22 septembre 2003[vi]. Cette directive fixe les conditions d’exercice de ce droit pour les ressortissants de pays tiers résidant légalement dans un Etat membre. Cependant, les règles d’application diffèrent d’un pays à l’autre au sein de l’UE. En outre, des pays comme le Portugal, l’Italie ou le Royaume-Uni, connaissent une situation économique qui les amène à favoriser une immigration de travail. A titre d’exemple, le Portugal accueille aujourd’hui une main d’œuvre non qualifiée en provenance d’Afrique et une main d’œuvre qualifiée provenant d’Europe orientale. Cette catégorie de migrants génère un apport économique immédiat mais ne constitue pas une solution démographique à long terme. En effet, ces travailleurs aspirent à retourner dans leur pays d’origine dès que possible. Une harmonisation des procédures communautaires et un développement de la politique de regroupement sont donc d’actualité, tant le champ d’application actuel est restreint. En particulier, le droit au regroupement pourrait être étendu, sous certaines conditions, aux demandeurs d’asile et aux réfugiés. Enfin le problème de l’immigration ne doit pas s’apprécier seulement en termes quantitatifs. Les simulations partent du principe que les immigrés seront, selon l’OCDE, du point de vue de la composition par âge et du taux d’activité, identiques à la population d’accueil. Un flux de nouveaux retraités ne se compense pas par un flux d’immigrés. En revanche un afflux net de compétences peut constituer un apport migratoire beaucoup plus important. Il sera en outre, susceptible de faire baisser très sensiblement les dépenses liées au vieillissement de la population. Le CESE « préconise de promouvoir une large diffusion d’informations sur les avantages que représente une immigration régulière maîtrisée pour le développement économique. »[vii] Pour autant les migrations ne permettront pas à elles seules de remédier au vieillissement des populations européennes. Kofi Annan[viii] estime pour sa part que : « en ce XXIe siècle, les migrants ont besoin de l’Europe. Mais l’Europe a aussi besoin des migrants. Une Europe repliée sur elle-même, ce serait une Europe plus dure, plus pauvre, plus faible, plus vieille. Une Europe ouverte et capable de gérer l’immigration, ce sera une Europe plus juste, plus riche, plus forte, plus jeune.»
12/ Réduire les demandes d’asile et lutter contre l’immigration clandestine Selon Haffad Tahar[ix], « les flux migratoires proviennent directement des inégalités de développement. L’écart ne cesse de se creuser entre niveau de vie des pays riches et des pays pauvres. Ainsi, 20% de la population mondiale détient 80% du revenu mondial.» On peut en déduire que les migrants sont le produit du système économique mondial actuel. Ils aspirent tous à rejoindre un Eldorado, en Europe ou ailleurs. Aussi, tant que l’UE n’aura pas harmonisé sa politique migratoire, il sera difficile de lutter contre l’immigration clandestine et de réduire sensiblement et durablement le nombre de demandeurs d’asile. En effet, il faut une politique claire sur l’immigration légale pour que les migrants économiques qui cherchent à entrer légalement dans l’UE ne soient pas tentés d’emprunter la voie de l’asile ou d’autres chemins détournés. 121/ Immigration clandestine : explications et solutions L’immigration clandestine est alimentée en partie par les entrées irrégulières sur le territoire des pays de l’UE. Ces entrées s’effectuent souvent dans des conditions dangereuses, par l’Europe du Sud. Les nombreux drames recensés ces dernières années en témoignent. Cependant, elle est aussi alimentée par les restrictions qui freinent les migrations économiques, par le non renouvellement des titres de séjour ainsi que par des demandeurs d’asile déboutés. Il n’existe pas de statistiques fiables qui permettent de mesurer avec précision ces flux. Pour autant, les clandestins que l’office des migrations internationales (OMI) estime à trois millions et qui pénètrent à raison de 500 000 par an au sein de l’UE, ont un rôle difficile à apprécier, mais important dans certains secteurs économiques. Les enquêtes réalisées autour des opérations de régularisation mises en œuvre permettent de cibler les emplois exercés par les clandestins. Ces derniers sont principalement employés dans le secteur tertiaire, dans le domaine de la sous-traitance. Cette pratique permet aux entreprises peu scrupuleuses de réduire leurs charges et d’échapper aux contraintes du droit du travail. En outre, il est difficile d’appréhender la composition exacte de la population clandestine. En effet, il est probable qu’une partie, plus ou moins conséquente, de cette population soit composée d’individus originaires de pays avec lesquels l’UE entretient des relations amicales, comme l’Amérique du Nord. Cette analyse s’appuie sur une étude fine réalisée en Australie[x], aux résultats surprenants, où les clandestins sont majoritairement des occidentaux. Cependant, l’immigration clandestine constitue une menace pour l’UE à plusieurs titres. Des organisations criminelles profitent des faiblesses des systèmes économique et judiciaire européens. Des trafiquants d’êtres humains, terroristes, fraudeurs de toutes sortes, abusent du vaste espace de libre circulation européen pour perpétrer leurs crimes. La nécessité d’une politique européenne commune relative à cette immigration illégale a été réaffirmée au Conseil de Thessalonique (juin 2003). Elle était déjà au cœur des débats à Tampere (1999), à Laeken (2001) et à Séville (2002) où un plan global de lutte contre l’immigration clandestine et la traite des êtres humains au sein de l’UE a été adopté. Le bilan reste malgré tout insuffisant. On note des sanctions financières à l'encontre des transporteurs coupables d’un manquement aux obligations de contrôle des documents de voyage. Une autre directive destinée à lutter contre les filières de passeurs et la traite des êtres humains est en discussion. La lutte contre l’immigration passe également par une politique européenne de retour. C’est dans ce cadre que s’inscrivent les négociations d’accords de réadmission avec les pays tiers. Ces négociations, qualifiées de priorité européenne, avancent difficilement. Seuls quelques accords ont été signés avec Hong Kong, Macao, le Sri Lanka, et l’Albanie. Freiner l’immigration clandestine suppose également le renforcement des frontières extérieures de l’UE25. Les pays ayant des côtes ou des frontières extérieures bénéficieront d’une aide financière à ce titre. Enfin, la Commission souhaite mettre en œuvre une approche intégrant les réalités sociales et économiques des pays émetteurs d’immigration. Elle affirme même que : « le meilleur moyen de lutter contre l’immigration motivée par l’absence de perspectives économiques passe par l’emploi dans les pays en voie de développement.» L’UE, en développant une politique de coopération et de partenariat avec ces pays, pourrait infléchir, au moins partiellement, l’immigration clandestine. Pour plus d’efficacité les programmes de coopération seront déclinés à l’échelle régionale. L’UE doit également parvenir à distinguer entre demandeurs d’asile et fraudeurs. 122/ l’exercice du droit d’asile et ses limites Malgré la tentative européenne d’instituer une politique commune de l’asile, les pays de l’UE continuent d’aborder la question des réfugiés avec d’énormes divergences. Chaque Etat applique à sa manière la Convention de Genève (1951) en fonction des contraintes géopolitiques, des relations diplomatiques qu’il entretient et des accords bilatéraux qu’il a établis. Cette diversité de traitement des migrations forcées peut apparaître contradictoire avec les dispositions de Schengen relatives à la lutte contre les demandeurs d’asile. Les critères de la Convention de Genève qui consacre le droit d’asile, ne sont plus adaptés aux exigences du nouvel ordre mondial. L’accentuation dramatique des tensions sociales, religieuses et ethniques engendre des guerres civiles et produit des réfugiés. Dès lors, l’objectif majeur de l’UE, confrontée à un afflux de demandeurs d’asile, se résume à contrôler pour repousser vers d’autres pays ces migrants indésirables. L’UE a recensé 288 000 demandeurs d’asile en 2003[xi]. Ce chiffre élevé est toutefois inférieur de 22% par rapport à 2002. S’il est en baisse dans les principaux pays de l’ex UE15, en revanche il est en hausse chez les dix nouveaux Etats membres (+16% - 37 300 dossiers en 2003). Dans l’ensemble les demandeurs sont majoritairement tchétchènes (32 000), irakiens (24 300) et afghans (13 800). Ces réfugiés cherchent majoritairement à rejoindre les pays d’Europe du Nord et de l’Ouest en raison de systèmes de protection sociale et d’une politique d’accueil favorables. La politique actuelle de l’UE est essentiellement orientée vers un contrôle des flux et une restriction du droit d’asile. Pourtant, la convention de Dublin[xii] relative au droit d’asile et entrée en vigueur en 1997 semblait marquer une amorce d’harmonisation communautaire. Le bilan est cependant modeste. On notera les sanctions décidées à l’encontre des compagnies aériennes qui transportent des illégaux, des résolutions sur le regroupement familial et une action en faveur d’un modèle type de titre de séjour. Concrètement, les politiques européennes sont toujours aussi peu solidaires[xiii]. Ainsi, l’Allemagne a donné le statut de réfugiés à de très nombreux ex-Yougoslaves, alors que la France ne leur accorde généralement qu’un statut provisoire. A l’inverse, 20% des Tamouls obtiennent le statut en France quand ils ne sont que 5 à 6% à le recevoir en Grande-Bretagne et 7% en Allemagne. En Allemagne le droit au travail est accordé au réfugié car l’opinion publique ne comprend pas qu’un individu puisse toucher des subsides sans travailler. En France, inversement, le droit au travail est refusé aux réfugiés sous prétexte qu’il constitue un facteur attractif pour de faux demandeurs. Le comble est atteint lorsque la politique de l’asile constitue, ici ou là, un instrument de maîtrise des flux migratoires. Au bilan, on note une grande diversité des situations qui se traduit tantôt par un statut de protection temporaire de six mois, tantôt par un permis de résidence temporaire. Elle se traduit parfois par l’octroi de l’asile territorial sans y assortir les droits de Schengen, mais également par des assignations en camp ou encore par la création de zones internationales dans les aéroports. La convention de Genève est largement oubliée. Il apparaît dès lors que la clé de la maîtrise des flux liés à l’asile réside dans l’harmonisation de la politique commune. L’application des accords de Schengen en atteste. Ainsi, un demandeur d’asile débouté dans un pays signataire ne peut formuler une demande dans un autre pays de l’espace Schengen. En outre, le Système d’Information Schengen (SIS) qui recense plus d’un million de personnes indésirables fonctionne efficacement. Le pendant de cette situation est la tendance des réfugiés potentiels à vouloir rejoindre un pays où les conditions restent favorables et leur fixation sur des points de transit. L’instauration de critères communautaires en matière de demandeurs d’asile devrait permettre de réguler les flux actuels et aboutir à une répartition plus équilibrée au sein de l’UE. La rapidité de traitement des procédures est un de ces critères. Elle doit contribuer à réduire le nombre de demandes. Elle devrait, toutefois, être combinée à une politique effective d’expulsion et de rapatriement des demandeurs d’asile déboutés. Il convient de mener cette politique d’expulsion et de retour au pays en liaison avec le pays d’origine. Préalablement à cette accélération du traitement des procédures, il semble judicieux de généraliser l’octroi d’un visa afin que le réfugié potentiel « puisse entrer légalement pour introduire sa requête » selon Peer Baneke[xiv]. « Ils ne seraient plus aussi nombreux à être obligés d’utiliser les canaux illégaux.» Par conséquent, pour maîtriser les flux légaux et lutter contre les autres, l’UE doit s’appuyer sur une politique migratoire commune.
13/ Finaliser une politique migratoire communautaire La nature des flux migratoires ayant varié quantitativement et qualitativement, les enjeux des migrations internationales ne sont plus les mêmes. Au sein de l’UE, plusieurs facteurs militent en faveur d’une politique migratoire communautaire. Ainsi, l’immigration se présente aujourd’hui comme une composante majeure de l’avenir de l’UE25. La pression migratoire persistera en raison des inégales répartitions de la richesse entre les pays du Nord et ceux du Sud. L’immigration doit être maîtrisée et régulée pour être acceptée par les opinions publiques. L’UE doit lutter contre l’immigration clandestine et la traite des êtres humains. Pour autant les pays de l’UE25 ne parviennent pas vraiment à s’entendre et les politiques migratoires oscillent entre européanisation et repli intérieur. Est-ce à dire que l’européanisation de la politique migratoire a échoué ? La réponse est non. Malgré les intérêts divergents, les obstacles et les réticences qui freinent sa réalisation, elle est engagée. Sa construction est lente, et assimilée à une politique des petits pas. Cependant, replacée à l’échelle de l’édification de l’UE, cette politique migratoire avance raisonnablement. 131/ La politique migratoire communautaire ou la politique des petits pas Jusqu’au Traité d’Amsterdam (TA), entré en vigueur le 1er mai 1999, le bilan de l’action communautaire se résume à des textes non contraignants. En l’occurrence, on note trois résolutions adoptées en 1994 qui opèrent des distinctions entre trois formes d’immigration selon les buts poursuivis : la recherche d’un emploi salarié, l’exercice d’une activité professionnelle indépendante, ou encore les études ou la volonté de rejoindre des membres de la famille. Dans ces textes, l’immigration est envisagée de façon restrictive. C’est le TA qui jette véritablement les bases d’une politique migratoire commune[xv]. Globalement, les objectifs du TA visent à trouver, sur une période de cinq ans, des solutions communautaires à la nouvelle situation aux frontières générée par le transfert du contrôle des frontières intérieures aux frontières extérieures. La politique des visas pour les séjours de courte durée, les demandes d’asile, l’accueil des réfugiés, les immigrés clandestins et leur rapatriement, sont autant d’objectifs évoqués par le TA. Des progrès sont enregistrés. La Cour de justice des Communautés Européennes (CJCE) est désormais compétente en matière d’immigration. En outre, le TA a dissocié les questions migratoires, intégrées au premier pilier, de la coopération policière, demeurée dans le troisième pilier. Ce transfert a permis de doter les institutions communautaires de pouvoirs pour réglementer l’immigration. Enfin et surtout, l’acquis majeur réside dans l’intégration de l’accord de Schengen dans le cadre juridique de l’UE. Six mois après l’entrée en vigueur du TA, des engagements sont pris lors du sommet de Tampere (octobre 1999). Outre la mise en place d’un tableau de bord sur cinq ans, quatre orientations majeures sont retenues[xvi] . Les objectifs sont ambitieux mais les moyens financiers limités. Les sommets de Laeken (2001) et le Conseil européen de Séville (2002) s’inscrivent dans la continuité de Tampere en regard de l’importance attachée à la stratégie globale définie précédemment. Ces sommets se situent toutefois après les attentats du 11 septembre 2001 ; ils sont dès lors marqués par un accent notoirement sécuritaire donné à la politique migratoire. Les priorités sont désormais la lutte contre l’immigration clandestine, le contrôle des flux migratoires et des frontières. Lors du Conseil européen de Thessalonique (juin 2003) les notions « d’intégration des étrangers en situation régulière » et de « partenariat responsable avec les pays tiers » sont évoquées. Aujourd’hui, les effets du 11 septembre 2001 semblent s’estomper et la réalisation de la politique migratoire commune doit reprendre son cours. 132/ Un bilan mitigé mais porteur d’espoir Au bilan, cette européanisation des politiques migratoires ne parvient pas à avancer à la vitesse espérée. Cela résulte d’une accumulation de problèmes. Le fonctionnement européen est lourd et complexe. Un décalage persiste entre la concertation européenne et l’exercice des souverainetés nationales. Ces souverainetés sont à la fois symboliques et géopolitiques. Elles divergent selon l’histoire propre à chaque Etat membre, les différentes conceptions du droit, et les accords et relations entretenues par les Etats. Les politiques de migration des Etats membres ne sont pas empreintes de solidarité. Les besoins démographiques et économiques diffèrent. De fait, la politique du « chacun pour soi » domine. Même si les objectifs des ministères de l’Intérieur semblent converger, les cultures légales présentent trop de différences pour permettre des négociations productives. Les politiques actuelles de contrôle migratoire manquent de cohérence à l’échelle européenne. Elles ont par conséquent des effets pervers et engendrent des trafics d’êtres humains et des réseaux d’immigration clandestine. Des progrès, porteurs d’espoir, sont pourtant enregistrés dans les domaines de la maîtrise des flux et des demandes d’asile. En 2000, on note la création d’un Fonds Européen pour les Réfugiés (FRE), en charge de l’accueil, de l’intégration et de l’aide au retour. Egalement, pour faciliter les procédures d’asile et débusquer les fraudeurs, une convention EURODAC, relative à la comparaison des empreintes digitales, a été adoptée en 2003. Quelques idées ont, peu à peu, fait leur chemin. Catherine Wihtol de Wenden cite ici la confiance réciproque des Etats dans le contrôle des frontières et la solidarité dans le traitement des clandestins et des déboutés du droit d’asile. Elle évoque également l’alignement progressif du droit des étrangers sur celui des nationaux, fondé sur la résidence et le droit de vivre en famille et non plus sur le travail, ainsi que le principe du droit de vote local comme corollaire de la citoyenneté de résidence. Il faut également citer ici une avancée constitutionnelle importante. En effet, le projet de traité constitutionnel généralise le vote à la majorité qualifiée aux mesures touchant au contrôle aux frontières extérieures, à l’asile et à l’immigration. Il importe aussi de trouver un juste équilibre entre les pouvoirs de la Commission européenne et le rôle dévolu aux Etats membres. Or, une politique d’immigration constitue avant tout un ensemble de mesures adaptées aux réalités d’une situation variable d’un pays à l’autre. Il convient, dès lors, de laisser aux Etats une marge de manœuvre. Aussi le principe de subsidiarité trouve-t-il, dans les questions liées à l’immigration, un point d’application privilégié. De Maastricht à aujourd’hui, plus de 20 ans se sont écoulés et l’UE compte désormais 25 Etats membres. Certes, la politique migratoire européenne avance à petits pas, mais force est de reconnaître que 20 ans, à l’échelle européenne, c’est très peu. L’harmonisation des politiques d’immigration est engagée. Elle se forgera avec le temps. Le projet de Constitution européenne permettra, s’il est ratifié par tous les Etats membres, de renforcer la politique européenne d’immigration. Outre l’extension du vote à la majorité qualifiée, il affirme la solidarité et le partage équitable des responsabilités entre les Etats membres, y compris sur le plan financier. Une disposition nouvelle doit également permettre la mise en place d’un système commun de gestion des frontières extérieures dont les différents aspects méritent attention.
14/ La gestion des frontières extérieures La libre circulation des personnes est inscrite dans les traités de l’UE. Elle est devenue une réalité avec la création de l’espace Schengen. L’objectif, à terme, sera de permettre aux citoyens européens de circuler librement dans l’ensemble des pays membres, transformant ainsi l’UE en une véritable « Europe espace.» Pour y parvenir, l’UE doit tout d’abord maîtriser les flux migratoires. Cela passe par un contrôle de ses frontières extérieures. L’élargissement de l’UE aux dix nouveaux Etats membres a sensiblement modifié la problématique des frontières de l’UE. En effet, la réunification de l’Europe déplace les frontières orientales de l’UE et augmente leur longueur d’environ 3 000 kilomètres. La gestion des frontières extérieures de l’UE est devenue un élément important de la politique migratoire communautaire. Il importe d’y consacrer les moyens nécessaires et adaptés pour que ces frontières, qui relèvent désormais d’une grande partie des nouveaux pays de l’UE, jouent leur rôle. 141/ Un équilibre à trouver entre « Europe forteresse » et liberté totale de circulation Les années 1990 ont un temps laissé croire que toutes les barrières en Europe avaient été mises à bas. La chute du mur de Berlin symbolisait même la fin de la division entre l’Europe de l’Ouest et l’Europe de l’Est. Paradoxalement, l’adhésion de nouveaux pays membres, en particulier les huit Etats issus des pays d’Europe Centrale et Orientale (PECO), marque la fin de cette politique d’ouverture. En effet, les nouveaux Etats membres, doivent réintroduire l’obligation de visa pour leurs voisins orientaux. Cette politique génère frustration et désarroi de la part des autres PECO, nouveaux voisins de l’UE25. D’aucuns ont même décrié l’érection d’un « rideau de papier »[xvii] après la chute du rideau de fer. Les facteurs sont pourtant nombreux qui militent en faveur d’une fermeture des frontières et qui conduisent à une Europe forteresse. Les citoyens européens craignent, en effet, de voir déferler des immigrés, par milliers, venant des PECO hors UE25. Les gouvernements y voient le risque d’une perte de la maîtrise des flux migratoires, ainsi que la possibilité offerte à des terroristes de pénétrer en Europe par les frontières orientales. Ces théories sont pourtant en grande partie peu fondées. Les études établies par l’OCDE et EUROSTAT permettent de démontrer, hormis une réserve relative aux mouvements des terroristes, que la théorie d’une « Europe forteresse » repliée sur elle-même n’est pas réaliste[xviii]. D’une part, l’histoire des élargissements précédents et l’étude des migrations internationales permettent de dire que les flux migratoires illégaux n’augmentent pas dans des proportions inquiétantes. D’autre part, nous savons que l’avenir de l’UE25 passe par une politique migratoire active et que des flux maîtrisés seront indispensables à sa pérennité. Enfin, l’Europe ambitionne devenir un espace de libre circulation des personnes. Elle aspire également à occuper un rôle économique majeur. Elle n’y parviendra pas si de nouvelles lignes de division émergent sur le continent européen. L’harmonisation des politiques européennes de migrations ne doit pas aggraver l’écart des droits entre Européens et citoyens non-Européens. Les accords de Schengen ne doivent pas être détournés de leur finalité initiale. Ils ont pour objectif de rendre plus aisée la circulation interne et non pas de protéger les Etats contre les migrations externes. Certes, la tentation existe, comme le relève Jelle Van Buren[xix], « de créer un cordon sanitaire autour des frontières communes » et de transférer aux PECO et à d’autres pays à la périphérie de l’UE la charge de retenir les réfugiés et de traiter leurs demandes. L’idée a fait son chemin et les pays de l’UE25 débattent actuellement de la création de camps de réfugiés à la périphérie de l’UE, en Libye et en Ukraine par exemple, pour trier les migrants. Ces centres d’accueil permettraient de « faire le tri entre les demandes justifiées et celles qui ne le sont pas.» Les candidats à l’asile déjà parvenus en Europe pourraient même y être transférés. Cette proposition soutenue par Londres, Berlin et Rome ne fait toutefois pas l’unanimité. La France et la Suède y sont fermement opposées[xx]. Pourtant, avec la caution du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), ce projet de camps de transit devrait voir le jour après quelques aménagements[xxi]. Cette polémique démontre l’importance prise par la gestion des frontières extérieures dont l’efficacité et l’affichage dépendront des stratégies et moyens mis en œuvre. 142/ Vers une concrétisation des projets et la mise en place de moyens adaptés Le transfert du contrôle des frontières extérieures aux nouveaux Etats membres constitue un défi majeur pour ces pays. Pour les aider à y parvenir, l’UE a engagé une stratégie et mis en place des moyens. Le processus s’est engagé avant l’élargissement. Il a consisté en un cahier des charges à respecter. Les pays candidats ont ainsi présenté un « plan d’action Schengen » indiquant le calendrier et la nature des mesures prises pour permettre la suppression du contrôle des personnes aux nouvelles frontières intérieures. En 2003, la Commission européenne, en charge du suivi de cette phase préalable, a invité la Hongrie, Malte, la Slovaquie et la Pologne, à améliorer le contrôle des frontières extérieures. La Pologne, qui contrôle la plus longue frontière terrestre extérieure (1 258 kilomètres), a dû renforcer ses effectifs en gardes-frontières (recrutement de 5 300 nouveaux agents d’ici 2006) et développer la professionnalisation de ce corps. Un programme d’aide, d’un montant de 963 millions d’euros sur trois ans, a été créé pour pallier les difficultés. Il est destiné à sept des nouveaux Etats membres[xxii]. Le Conseil européen a adopté en juin 2002, un « plan pour la gestion intégrée des frontières extérieures des Etats membres de l’Union.» Il reprend les travaux de la Communauté européenne et avalise l’idée de création d’un corps européen de gardes-frontières. Pour atteindre, à terme, cet objectif, la Commission préconise de structurer la politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures autour de cinq composantes : un corpus commun de législation ; un mécanisme commun de concertation et de coopération opérationnelle ; une évaluation commune et intégrée des risques ; un personnel formé à la dimension européenne et des équipements « inter-opérationnels »; un partage du fardeau financier entre les Etats membres et l’UE. Cette ambition reste cependant, pour l’instant, à l’état de projet. D’autres études sont menées, à la demande de la Commission. Ainsi, à la suite d’une étude relative au contrôle des frontières maritimes, un programme de mesures de lutte contre l’immigration clandestine par voie maritime a été adopté. Un centre opérationnel pour les frontières terrestres a été mis en place à Berlin. Un centre d’analyse des risques a été crée à Helsinki, tandis qu’un centre de développement des technologies de détection a été installé à Douvres. La création de deux centres de coordination de la surveillance des frontières maritimes est envisagée. Des opérations conjointes, concernant le contrôle des frontières maritimes, terrestres et aériennes, ont été organisées[xxiii]. Cette multiplication des opérations conjointes et des centres et projets pilotes appelle une coordination accrue. La création d'une agence européenne des frontières pourrait répondre à cette ambition. La Commission souhaite constituer une structure légère, de coordination et d’assistance. Enfin, deux autres propositions sont à l’étude et visent à améliorer la sécurité. Il s’agit d’une part, de l’introduction d’éléments d’identifications biométriques dans les visas et les titres de séjour des ressortissants de pays tiers. D’autre part, le Conseil européen souhaite qu’un système commun d’information sur les visas soit mis en place. A plus long terme, la création de bureaux communs en charge des visas de l’UE est envisagée par la Commission européenne. Au bilan, la crainte de l’arrivée de flux incontrôlés de migrants paraît aussi improbable que la transformation de l’UE en forteresse aux murs infranchissables. Avec l’élargissement, les nouveaux Etats membres sont désormais responsables de vastes tronçons de frontières extérieures de l’UE. Le contrôle aux frontières revêt une importance primordiale. Il constitue, en effet, le préalable à la suppression des frontières intérieures entre anciens et nouveaux membres et donc à la libre circulation des personnes dans l’espace Schengen.
15/ Assurer une libre circulation des personnes : les limites actuelles de Schengen L’adhésion des dix nouveaux pays entraîne une nouvelle architecture européenne. Par son ampleur, cet élargissement principalement orienté à l’Est soulève quelques inquiétudes. La liberté de circuler octroyée aux ressortissants des pays membres de l’espace Schengen, peut-elle être étendue aux nouveaux membres et sous quelles conditions ? Qu’adviendra-t-il des relations entretenues entre ces nouveaux adhérents et leurs voisins ? Trouver des réponses à ces problématiques constitue un enjeu important pour l’UE. Les réponses se trouvent tant dans l’architecture institutionnelle européenne que dans l’évolution des accords de Schengen. L’édification d’un espace Schengen cohérent a nécessité une dizaine d’années. Son ouverture à dix nouveaux membres passera par une période probatoire (7 ans au maximum) et de nouveaux aménagements. La création d’un espace de liberté, de sécurité et de justice constitue un objectif majeur du traité sur l’UE. Les Etats membres ont commencé à coopérer dans le domaine de la Justice et des Affaires Intérieures vers le milieu des années 1970. Cette coopération informelle se situait en dehors du cadre communautaire. En 1990, l’Allemagne, la France et les pays du Benelux ont conclu l’accord de Schengen, qui a constitué un pas important sur la voie de la coopération entre les Etats membres. Durant les années qui ont suivi, plusieurs Etats membres ont adhéré à l’accord de Schengen. L’objectif de ce dernier était de mettre en place une véritable liberté de circulation des personnes en supprimant les contrôles aux frontières intérieures. Avec l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam en mai 1999, les dispositions de l’accord de Schengen ont été intégrées dans le cadre institutionnel de l’UE. Il convient de noter que le Royaume-Uni et l’Irlande ne participent pas à la mise en œuvre des dispositions de l’accord de Schengen relatives à la libre circulation des personnes, aux contrôles aux frontières extérieures et à la politique en matière de visas. Par conséquent, les représentants de ces pays ne votent pas sur ces questions au sein du Conseil. En revanche, la Norvège et l’Islande qui ne sont pas membres de l’UE25, ont signé ces accords. L’Islande et la Norvège appartiennent à l’Union douanière nordique. Ils sont dès lors tenus d’adopter l’intégralité de l’acquis de Schengen et de la coopération en matière de Justice et d’Affaires Intérieures. A l’échelle européenne, Schengen se traduit par la suppression des frontières intérieures. L’abolition des contrôles aux frontières intérieures facilite la libre circulation en Europe des citoyens respectueux de la loi. Cependant, ces facilités accordées profitent également aux criminels et aux candidats à l’immigration illégale. La convention de Schengen a, par conséquent, introduit des mesures telles que la coopération entre les autorités judiciaires et policières nationales. Une banque de données informatisées, le SIS, complète le dispositif. Des accords de réadmission signés avec les pays tiers viennent parachever le concept avec pour objectif de lutter contre l’immigration clandestine. Cependant, seuls quelques pays ont signé ; des négociations sont en cours avec d’autres[xxiv]. La problématique Schengen est donc de trouver un équilibre entre liberté de circuler et capacité à endiguer l’immigration clandestine. Elle se complique nettement avec l’adhésion de dix nouveaux pays membres, tant par l’ampleur de cette extension que par la situation historique et géographique de ces Etats. Depuis le 1er mai 2004, la majeure partie de la réglementation européenne est applicable aux nouveaux Etats membres. La citoyenneté européenne accorde à leurs ressortissants des droits et renforce la protection de leurs intérêts. Les ressortissants des dix nouveaux pays membres de l’UE peuvent séjourner librement dans le pays de l’UE de leur choix, à condition d’accomplir les démarches administratives nationales du pays d’accueil. Les conditions de séjour de n’importe quel citoyen européen s’appliquent aux ressortissants des nouveaux Etats membres de l’UE. Toutefois, tout comme le Royaume-Uni et l’Irlande, les dix nouveaux adhérents ne font pas partie de l’espace Schengen. Les contrôles aux frontières communes entre Etats membres de la zone Schengen et nouveaux Etats membres demeurent. La signature du traité d’adhésion était assortie de conditions. Les nouveaux membres ont accepté un délai d’au moins deux ans. Ce délai technique doit permettre à la Commission de mettre sur pied le SIS 2. La base de donnée SIS actuelle ne peut fonctionner qu’avec 16 pays. SIS 2 doit être prêt fin 2006. Ce délai doit permettre aux nouveaux entrants de finaliser la mise en œuvre des règles Schengen. Ces améliorations portent sur le contrôle des frontières extérieures, enjeu majeur, mais aussi sur le respect des droits fondamentaux. Enfin, les fonctionnements du système judiciaire et de la police sont à perfectionner. Fin 2006, après avis d’un comité technique, le Conseil des ministres décidera, au cas par cas et à l’unanimité, des pays autorisés à entrer dans l’espace Schengen. A l’issue, les ressortissants de ces Etats pourront circuler de l’Estonie au Portugal avec un simple document d’identité. Pour autant, ils ne seront pas autorisés à travailler partout, à l’exception de la Suède et de la Grèce où ce droit leur est accordé dès à présent[xxv]. Ces mesures restrictives d’accès au marché du travail demeureront au maximum sept ans. Leur adoption résulte, tant de la crainte d’une immigration massive, que de la volonté de rassurer les opinions publiques des pays de l’UE15. Cette période transitoire ne s’appliquera pas à Chypre et à Malte. Elle ne s’applique pas nos plus à l’Irlande où la libre circulation des travailleurs est effective depuis le 1er mai 2004. Cette situation génère un sentiment d’iniquité chez les nouveaux adhérents et soulève des difficultés de voisinage. En effet, les nouveaux membres ont l’obligation d’appliquer strictement l’acquis Schengen mais n’en seront pas véritablement membres avant un délai de probation. Parallèlement, les citoyens des PECO voient leur liberté de circulation réduite. Il faut rappeler ici les liens culturels et historiques uniques qui unissent certaines communautés ethniques que se sont retrouvées, après l’éclatement des grands empires, réparties sur les territoires de différents Etats. Ces communautés ont en commun une tradition de libre circulation qui leur a permis jusqu’à présent de préserver les liens qui les unissent, ainsi que leur identité culturelle. L’obligation de visa peut porter un coup fatal à ces liens si précieux et engendrer un véritable drame humain pour certaines familles dont les membres ne pourraient plus se voir aussi fréquemment et librement qu’auparavant. Les accords de Schengen ont constitué une avancée incontestable dans la construction de l’UE15. L’élargissement de l’UE à 25 membres emporte des implications géostratégiques nouvelles. Il est dès lors raisonnable de mettre des conditions préalables à l’intégration de ces pays dans Schengen. La réussite de cet élargissement et de ceux à venir, repose sur un équilibre savant entre sécurité et liberté de mouvement. Il convient également de communiquer largement en la matière afin d’éviter qu’apparaissent de nouvelles lignes de division en Europe et de léser ou priver de leur liberté de mouvements, les nouveaux voisins de l’UE. Les flux d’immigration vont sans doute s’accroître et ils seront plus que jamais nécessaires. L’immigration peut contribuer à couvrir les besoins économiques et démographiques de l’UE25. De plus, elle pourrait constituer, au moins partiellement, une solution au vieillissement de la population européenne. L’immigration présente donc des enjeux pour l’avenir de l’Europe. Elle requiert une coopération internationale accrue, dans les domaines institutionnels, politiques et judiciaires. L’adhésion des dix nouveaux pays au sein de l’UE offre des perspectives nouvelles à l’Est et au Sud. Une « Europe espace » est entrain de se dessiner d’autant que de nouveaux élargissements sont attendus. Il importe de réussir ces élargissements, et de réussir une politique migratoire européenne satisfaisante pour tous. Cette politique doit être globale et s’appuyer sur la coopération et l’intégration. Elle doit profiter aux Etats membres mais également aux pays voisins et aux pays tiers.
II/ Quel avenir pour l’UE et ses migrations ?L’UE25, malgré ses 450 millions d’habitants, se caractérise par un faible accroissement démographique et une accentuation du vieillissement de la population. Les projections établies jusqu’en 2050 par de nombreux organismes européens et internationaux, traduisent la poursuite du vieillissement et la diminution de la population européenne. Tous les travaux montrent également le rôle important dévolu aux migrations dans l’évolution démographique de l’UE. Pour infléchir, au moins partiellement, le déclin démographique, l’Europe pourrait recourir à l’immigration et élaborer une politique migratoire communautaire globale. L’avenir de l’UE passe par des migrations dont l’origine et la composition évolueront (21). L’UE parviendrait à infléchir l’immigration clandestine par une politique d’intégration (22) et en développant un véritable partenariat avec les pays tiers (23). Elle offrirait alors des perspectives attrayantes à ses nouveaux et futurs Etats membres (24) et pourrait ambitionner devenir une « Europe espace » (25).
21/ Vers une nouvelle Europe des migrations La géographie des flux migratoires internationaux a été bouleversée par les grands événements géopolitiques de ces dernières années. On citera : la chute du mur de Berlin et l’ouverture à l’Est, l’émergence des pays d’Asie du Sud-Est et de la Chine, les changements économiques et politiques en Amérique latine et enfin, la multiplication des conflits en ex-Yougoslavie, en Afrique et au Moyen-Orient. Parallèlement, la simultanéité des facteurs démographique et économique qui touchent l’Europe, milite en faveur d’une politique européenne d’immigration. Cette corrélation entre, d’une part des facteurs d’émigration, et d’autre part des besoins avérés d’immigration, se traduit par une persistance de la pression migratoire en Europe. 211/ Persistance de la pression migratoire L’examen des chiffres de l’immigration en France pour l’année 2003[xxvi] livre quelques informations qui méritent attention. Le nombre d’immigrés s’établit à 173 000 (+11%) dont 136 400 non européens. Les étrangers non européens proviennent majoritairement du Maghreb : 136 400 (+8,7%). La progression des étrangers ressortissants européens s’élève à +13,6% pour un total de 36 700. 74% des immigrants arrivent au titre du regroupement familial. Le nombre d’étudiants s’installant en France est de 54 569 ; il accuse une baisse de 10%. Enfin, les mesures d’éloignement du territoire augmentent : 8 604 en 2001, 10 067 en 2002 et 11 692 en 2003. Cette situation n’est pas spécifique à la France. Il est plus que probable que les flux d’immigration continus vont s’accroître et qu’ils seront plus que jamais nécessaires à l’Europe. Pour autant, cette immigration ne devrait pas provenir exclusivement des dix pays qui ont intégré l’UE en mai 2004. En effet, selon plusieurs études, le nombre de ressortissants des nouveaux Etats membres en âge de travailler et susceptibles de migrer dans les pays de l’UE15, est estimé à 220 000 par an[xxvii]. Sur cinq ans, ce chiffre correspond à 1% de la population des nouveaux pays. En outre, seulement 2% des chômeurs de ces pays ont fait part de leur intention d’émigrer. On recense néanmoins quatre nouveaux adhérents qui présentent des caractéristiques de pays d’émigration : Lituanie, Slovaquie, Pologne, Lettonie. En revanche, il est beaucoup plus probable que les flux migratoires proviennent, à l’avenir plus encore qu’aujourd’hui, du Sud. Cette persistance de la pression migratoire vers l’Europe, à partir du Sud principalement et de l’Est accessoirement, s’explique en raison des déséquilibres économiques, politiques, démographiques et culturels qui y subsistent. Les couples migratoires traditionnels, hérités du colonialisme ou des relations internationales, (France/Maghreb – Allemagne/Turquie et Balkans - Royaume-Uni/Commonwealth) perdurent mais perdent de leur force. De nouvelles zones de départ apparaissent, à destination de pays européens, sans que des liens les expliquent. Il semble surtout que le facteur « pull » (attraction) est désormais plus fort que le facteur « push » (expulsion). La pression migratoire est liée à des perspectives de vie meilleure en Europe. Cette attractivité est même renforcée par le passage de pays traditionnellement d’émigration (Italie, Grèce, Espagne) en pays d’immigration, en raison de la baisse de fécondité qu’ils connaissent. La même démarche pourrait se produire chez certains nouveaux membres de l’UE. La République tchèque en est un exemple. La multiplication des réseaux économiques, médiatiques et culturels a développé les imaginaires migratoires. Il en résulte une diversification des nationalités et des types de migrations. 212/ Des changements dans l’origine et la composition des flux On note en effet, l’émergence de pays de départ qui n’ont aucun lien traditionnel avec les pays de destination. De nouveaux courants migratoires, à destination de l’Europe, font leur apparition. On constate ainsi un accroissement du nombre de ressortissants asiatiques, notamment originaires de Chine et des Philippines. Ces migrants sont principalement employés dans les services domestiques et les soins aux personnes. Les flux issus des pays de l’Est devraient se renforcer à partir de pays frontaliers des nouveaux membres de l’UE25 (Biélorussie, Moldavie, Ukraine,…). Enfin, des ressortissants des PECO exclus de l’élargissement de 2004 (Roumanie, Bulgarie, Albanie, et ex-Yougoslavie) se tournent vers des pays frontaliers (Pologne, République tchèque, Hongrie, Italie, Grèce) pour y émigrer, légalement ou non. Parallèlement, de nouveaux types de migrations apparaissent ou se développent. Ainsi, l’UE25 enregistre une augmentation importante des migrations à des fins d’emploi, saisonnier ou permanent (exemple : Polonais vers Allemagne et France). Les migrations à destination de l’UE, liées à des conflits, ont connu un pic important au début des années 1990 (crise de l’ex-Yougoslavie) avant de diminuer très sensiblement. Elles sont reparties nettement à la hausse avec la multiplication des conflits récents (Moyen-Orient, Afrique, Asie mineure). Ces flux sont en particulier orientés vers le Royaume-Uni qui accueille plus d’un cinquième des migrants[xxviii]. Cependant, c’est la féminisation des flux migratoires qui représente le changement le plus marquant. Selon la division de la population des Nations unies, les mouvements de femmes représentent 48% de l’ensemble de flux migratoires actuels. Ils sont largement associés aux regroupements familiaux mais sont aussi le fait d’une aspiration à des conditions de vie meilleure. Pour autant, des pays de l’UE (Italie, Pays-Bas, Danemark) ont pris des mesures pour limiter les entrées au titre du regroupement familial. Enfin, les étudiants constituent un flux migratoire dont le développement mérite attention. Ce mouvement est initié tant par le besoin de main d’œuvre qualifiée dans les pays développés, que par les perspectives d’avenir entrevues par les « cerveaux ». A titre d’exemple, seulement un tiers des étudiants ayant obtenu leur doctorat en France, retourne dans leurs pays d’origine[xxix]. Cette fuite des « cerveaux » est également ressentie chez les nouveaux adhérents de l’UE. En effet, 2 à 3% des diplômés et des étudiants affichent leur volonté d’émigrer vers un autre pays de l’UE développant une politique d’immigration sélective liée à des besoins particuliers. L’accueil d’informaticiens en France et en Allemagne, selon des quotas qui correspondent à des besoins générés soit par une pénurie, soit par des départs à la retraite non compensés, en est une illustration. L’UE25 connaît donc une nouvelle donne migratoire. Pour autant, la poursuite de la politique migratoire, aussi diversifiée soit-elle, produira à terme, une situation similaire à celle que l’on connaît aujourd’hui. Pour en atténuer l’impact, il convient de tendre vers une politique européenne d’intégration et de coopération.
22/ Vers une politique d’intégration européenne ? Pendant longtemps, l’immigration était assimilée à un phénomène conjoncturel. Il ne semblait donc pas nécessaire de s’occuper de l’insertion des populations issues de l’immigration. Les faits donnaient en partie raison à cette théorie. En 1999, les conclusions du Conseil de Tampere mentionnaient qu’ « il convient de mettre en place une approche commune pour assurer l’intégration[xxx] dans nos sociétés des ressortissants de pays tiers résidant légalement dans l’Union.» En 2004, alors que l’UE vient de s’ouvrir à dix nouveaux Etats membres, la politique européenne d’intégration n’a pas avancé, bien au contraire. En France, la parution en novembre 2004, du rapport de la Cour des Comptes sur l’intégration ne porte pas plus à l’optimisme. Pourtant, l’avenir de la situation migratoire de l’UE passe par sa capacité à intégrer les immigrés installés et les nouveaux arrivants. L’intégration constitue un défi majeur pour l’UE. Elle requiert une coopération internationale accrue. 221/L’intégration : une problématique oubliée de l’UE L’intégration des immigrés connaît aujourd’hui une médiatisation importante. En effet, une partie de l’opinion publique associe immigration, insécurité, délinquance et chômage. Pourtant, la Commission européenne, dans un rapport du 14 mars 2003, a conclu qu’ « il n’y a aucun rapport de cause à effet entre immigration, criminalité et chômage.»[xxxi] Cette conclusion n’est pas vraiment une surprise dans la mesure où, à l’instar des problèmes de chômage ou de travail illégal, les problèmes d’insécurité et de délinquance concernent l’ensemble des pays de l’UE. De fait, ils dépassent très largement le cadre de l’immigration. Les étrangers et les immigrés constituent désormais, dans la majorité des pays de l’UE, une part importante et croissante de la population et de la force de travail. A titre d’exemple, les étrangers représentent 43,2% des actifs au Luxembourg, 9,9% en Autriche, 8,9% en Allemagne et 6,2% en France[xxxii]. Ces pourcentages connaissent même une accélération en Espagne, en Italie, au Portugal, en Grèce ainsi qu’en Irlande. Cependant, dans la plupart des pays, les étrangers ou les immigrés sont plus touchés que les nationaux par le chômage. Ce constat est valable, tant pour les hommes que pour les femmes. Le phénomène touche particulièrement les jeunes (30% des actifs étrangers âgés de 15 à 24 ans en France sont à la recherche d’un emploi) et les personnes peu qualifiées. Ce sont donc les secondes générations d’immigrants qui connaissent des difficultés d’insertion dans le monde du travail et donc d’intégration dans la société. Parallèlement, le coût social de l’immigration s’accroît avec l’allongement de la durée du séjour des migrants, les flux de regroupement familial et l’afflux des réfugiés. La problématique de l’intégration est par conséquent devenue une priorité européenne. C’est même « le principal défi de la politique commune d’immigration.»[xxxiii] On note, dans les conclusions du sommet de Tampere (1999) qu’ « il convient de mettre en place une approche commune pour assurer l’intégration dans nos sociétés des ressortissants des pays tiers résidant légalement dans l’Union.»[xxxiv] Les objectifs alors définis visaient à intégrer les immigrés, à leur accorder des droits voire leur accorder la nationalité de l’Etat membre dans lequel ils résident. Cinq ans plus tard, le bilan est maigre. Les discussions achoppent régulièrement en raison de la persistance des souverainetés nationales et de l’application du principe de subsidiarité. Même le projet de Constitution européenne ne transcrit pas d’avancée notable en la matière. La mise en œuvre d’une politique commune d’intégration devient une véritable gageure avec l’adhésion des dix nouveaux pays en 2004 et les perspectives d’adhésion à venir. Or, l’avenir de l’UE25 passe probablement par de nouvelles immigrations et surtout par la fixation, au moins partielle, de ces migrants. Réussir leur intégration et celle de leurs prédécesseurs constitue donc un impératif pour l’UE. 222/ Réussir l’intégration : un impératif pour l’UE Immigration légale et intégration doivent désormais être envisagées ensemble. Selon Marco Martiniello[xxxv] « il faut réfléchir l’intégration au moment même de l’immigration. L’erreur de la plupart des pays européens a été de penser que l’immigration serait un phénomène conjoncturel […] Accueillir des migrants, cela signifie aussi, prévoir davantage d’écoles, d’hôpitaux, de logements, de transports en commun.» Une première avancée notable a été enregistrée avec l’adoption de deux textes importants : la directive sur le regroupement familial et celle relative au statut des résidants de longue durée. La directive sur le droit au regroupement familial, adoptée en septembre 2003, après trois ans de négociations difficiles, fixe les conditions d’exercice de ce droit. Les Etats restent libres d’adopter des dispositions plus favorables[xxxvi]. Le regroupement familial constitue dans presque tous les Etats membres, le canal principal de l’immigration légale. Il favorise l’intégration des étrangers en leur permettant de mener une vie de famille. La règle de l’unanimité qui prévaut toujours a cependant conduit à un compromis peu satisfaisant. Le degré d’harmonisation des législations apporté par le texte reste très faible, en raison des multiples dérogations introduites. Eu égard aux dispositions discriminatoires contenues dans le texte, un recours en annulation a été introduit le 16 décembre 2003 par la présidence du Parlement européen. La négociation de la directive relative aux résidents de longue durée a fait apparaître les mêmes clivages que pour la précédente[xxxvii]. En particulier, les négociations ont achoppé sur les droits accordés et sur la possibilité de s’établir dans un autre Etat membre. La proposition initiale visait à accorder des droits identiques à ceux des nationaux en matière d’accès au travail, à l’éducation et à la formation professionnelle, ainsi que dans les domaines de la protection sociale et de l’accès au logement. Le compromis adopté en novembre 2003 permet aux Etats membres d’introduire des restrictions en matière d’accès à l’emploi, à la formation et à l’éducation. La protection sociale peut être limitée aux prestations essentielles. En outre, les Etats ne s’accordent pas sur le principe de la libre circulation dans les autres Etats membres. Le développement d’une politique d’intégration au niveau européen a fait l’objet d’une communication de la Commission européenne, en juin 2003[xxxviii]. Ces orientations ont été partiellement reprises par les chefs d’Etat et de gouvernement lors du Conseil européen de Thessalonique des 19 et 20 juin 2003. La Commission suggère d’explorer d’autres voies, telles que l’approfondissement de la notion de « citoyenneté civile.» Celle-ci se définit comme l’octroi aux immigrants de droits et d’obligations fondamentaux qu’ils acquerront graduellement. Ces droits leur assureront, dans l’Etat d’accueil, le même traitement qu’aux ressortissants de cet Etat, sans être naturalisés. La Commission recense également les différents domaines sur lesquels une politique d’intégration efficace doit porter, comme l’accès au marché du travail, à l’éducation, au logement, aux services sociaux et de santé, ou à la vie associative et sportive. Elle suggère de développer les échanges d’informations et de bonnes pratiques sur ce sujet. Cette politique, qui ne s’est pas encore traduite par des propositions concrètes, doit respecter le principe de subsidiarité : les Etats membres resteront responsables au premier chef en matière d’intégration. La base juridique nouvelle figure dans le projet de Constitution européenne (art. III-168,4). La réussite de la politique européenne d’intégration passe également par la sensibilisation des opinions publiques à l’octroi de droits économiques et sociaux aux immigrés. Cette politique nécessitera également que des moyens financiers importants soient consentis ainsi que la mise en œuvre de programmes déconcentrés[xxxix]. C’est ainsi à une approche renouvelée de l’immigration qu’invite la communication de la Commission : « Alors que l’intégration relève en premier lieu de la compétence des Etats membres, les gouvernements devraient partager leurs prérogatives en la matière avec la société civile, notamment à l’échelon local, où des mesures d’intégration doivent être mises en œuvre. La clé du succès réside dans la mise en place d’actions à des niveaux très bas, s’appuyant sur des partenariats entre l’ensemble des nombreux acteurs devant être impliqués : les autorités régionales et locales ainsi que leurs responsables politiques, en particulier ceux des villes les plus grandes, où de nombreux immigrants s’installent, les personnes chargées de l’enseignement, de la santé publique et de la sécurité sociale, la police, les médias, les partenaires sociaux, les organisations non gouvernementales et les immigrants eux-mêmes ainsi que leurs associations. Chacun des acteurs a un rôle à jouer dans l’élaboration et la mise en œuvre de programmes d’intégration, auxquels des ressources suffisantes devront être affectées. » L’histoire du Monde est marquée par des exemples d’intégration réussie : Européens aux Etats Unis entre 1800 et 1920 ; Italiens, Portugais et Polonais en France au cours du 20ème siècle. Pourtant, les problèmes d’intégration et d’éducation n’étaient pas abordés à ces époques. On peut dès lors raisonnablement penser qu’avec du temps et de la bonne volonté de part et d’autre, une politique européenne d’intégration peut réussir. Toutefois, la réussite de cette politique européenne d’intégration passe nécessairement par une politique de partenariat avec les pays tiers.
23/ Vers un partenariat avec les pays tiers ? Les mouvements migratoires à destination de l’UE résultent d’un besoin démographique avéré. Cependant, ils sont également la conséquence des énormes déséquilibres politiques, sociaux, économiques et écologiques de la planète. L’intensification des flux migratoires à destination de l’Europe constitue une solution partielle à son déclin démographique. Elle est toutefois indispensable à son avenir mais doit impérativement être maîtrisée. Elle repose sur une politique migratoire équilibrée. En effet, cette politique migratoire européenne doit se concevoir dans la perspective d’un bénéfice mutuel entre les pays d’origine et les pays d’accueil. 231/ Politique de voisinage, coopération et partenariat Le processus de Barcelone[xl], lancé en 1995, a pour ambition de réduire les pressions migratoires au sud. En liant les deux rives de la Méditerranée par un partenariat basé sur le libre-échange, le programme est audacieux. En effet, il s’inscrit dans un contexte d’inégalité économique particulièrement marqué. Le revenu annuel moyen par habitant s’établissait en 2000 à 4 100 euros au Sud contre 29 600 euros en Europe[xli]. Ces accords de Barcelone ont été signés par l’UE représentée par la Commission européenne et les pays au sud de la Méditerranée. Le partenariat se compose de trois volets : politique et sécuritaire ; économique ; culturel, social et humain. Les migrations sont abordées dans le 3ème volet. Les objectifs visent à réduire la pression migratoire par la création d’emplois, lutter contre l’immigration clandestine et accorder des droits aux migrants légalement installés. A court terme, seul le volet économique devrait aboutir avec l’établissement de la zone de libre-échange en 2010. Toutefois, pour constituer un palliatif à la tendance migratoire Sud-Nord, il faudrait que l’instauration du libre-échange s’accompagne d’une augmentation rapide des niveaux de vie et d’emploi. Le résultat n’est pas acquis. Le processus de Barcelone favorise également l’investissement de capitaux dans les pays tiers. Cependant, les migrants rapatrient une partie de leur épargne, sous forme de devises, dans leur pays d’origine. A titre d’exemple, au Maroc, cette manne représente annuellement entre deux et trois milliards d’euros, soit un quart des recettes extérieures[xlii]. Le royaume dispose même d’un ministère dédié aux résidents à l’étranger, qui autorise les comptes ouverts en euros. Dès lors, il faudrait que les pays occidentaux, en particulier l’UE, investissent des sommes considérables dans les pays du Sud pour atteindre un rendement annuel comparable. Cette forme de partenariat « euro méditerranéen » n’est donc pas satisfaisante, car inéquitable. Pourtant l’UE développe des relations avec d’autres groupes de pays. On citera la politique de voisinage ou « wider Europe »[xliii], les accords de coopération et de partenariat conclus avec une dizaine de pays de l’ancienne Union soviétique. L’UE a également signé un accord avec la Russie et entretient des liens forts avec l’Amérique latine, l’Asie et l’Afrique. A travers ces accords, la politique européenne de coopération s’appuie sur quatre objectifs pour améliorer les niveaux de vie des populations et exporter les valeurs démocratiques. Tout cela contribue à s’attaquer au problème des réfugiés et des demandeurs d’asile à la racine. A mesure que la situation s’améliore dans des pays en proie à des troubles, leur population ressent moins le besoin de s’expatrier. Désormais, la dimension migratoire est prise en compte dans les négociations d’accords de coopération. Ainsi, à titre d’exemple, les accords de Cotonou (UE-71 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. ACP) entrés en vigueur le 1er mai 2003 prônent le dialogue plutôt que la coercition[xliv]. Le Conseil européen souligne régulièrement l’importance de ces accords de partenariat. L’UE adoptera désormais une approche globale des migrations, intégrant les aspects politiques, les droits de l’homme et les questions de développement. 232/ Réduire les inégalités pour maîtriser les flux : l’esprit du partenariat Le premier moyen pour parvenir à réduire l’écart Nord-Sud est d’ordre financier. En particulier, il s’agit, dans le cadre de la politique migratoire européenne, d’aider les pays tiers à surmonter les problèmes soulevés par les migrations légales et illégales. Une aide communautaire directe de 935 millions d’euros a été affectée à cet objectif pour la période 2000-2006[xlv]. Par ailleurs, le Parlement européen a approuvé, en avril 2004, une proposition de financement de 600 millions d’euros[xlvi]. Cet argent servira à améliorer les services d’accueil aux réfugiés, les procédures d’asile ainsi que le retour et la réintégration des demandeurs dont la demande a été refusée. Enfin, l’UE envisage d’établir un programme d’assistance technique et financière en faveur des pays tiers dans les domaines de l’asile et de l’immigration. Doté de 250 millions d’euros pour la période 2004-2008[xlvii], ce programme est particulièrement destiné aux pays tiers qui œuvrent avec l’UE à la réalisation d’accords de réadmission. Tous ces financements concourent à permettre aux pays tiers de mieux gérer les candidats aux migrations et de réinsérer dans de bonnes conditions les candidats refoulés. En l’absence du soutien financier de l’UE, les personnes réadmises constituent des poids supplémentaires pour des pays déjà confrontés à des situations difficiles. On constate donc le besoin d’agir au plus tôt et au plus près du point de départ de l’émigration. Il s’agit donc d’agir en amont pour ensuite réguler voire maîtriser les flux migratoires. La Commission estime que « le meilleur moyen de lutter contre l’immigration motivée par l’absence de perspectives économiques passe par l’emploi dans ces pays en développement.»[xlviii] A cette fin, selon la Commission, « l’UE doit continuer à améliorer l’accès des exportations de ces pays aux marchés de l’UE et d’autres nations industrialisées, et œuvrer à l’intégration des pays en développement au système commercial multilatéral. La famine étant un facteur de déclenchement de l’immigration, la Commission estime que l’élaboration de politiques de développement axées sur la sécurité alimentaire et l’accès à l’eau potable limitera l’émigration des pauvres. L’histoire de l’Europe nous a enseigné que l’intégration régionale constitue le meilleur garde-fou contre la guerre et les conflits. C’est pourquoi l’UE devrait appuyer, si possible, des programmes de coopération régionale. En ce qui concerne l’immigration déclenchée par un dysfonctionnement des structures démocratiques, la faiblesse des institutions, l’absence de l’état de droit ou une mauvaise gestion des affaires, la Commission adhère à l’objectif du renforcement institutionnel visé dans l’actuelle politique du développement. » Les inégalités Nord-Sud ne se résument donc pas au volet économique. Elles sont également engendrées par des facteurs écologiques et sociaux ainsi que par la persistance de déséquilibres politiques. Pour autant, l’équation migration/politique de coopération est fausse ou du moins incomplète. Elle ne produit pas des résultats immédiats. En effet, le temps des migrations ne coïncide pas avec les stratégies de développement et de coopération. Les résultats de la politique de partenariat prennent du temps et il faut examiner ce paramètre avec le recul nécessaire. Il faut donc agir sur le long terme. Il convient, par exemple, de développer des actions de formation et de recherche dans les pays tiers, voire de mener des programmes d’échanges d’étudiants et de chercheurs. Ces programmes pourraient déboucher selon le CESE « sur des réinvestissements humains au service du pays d’origine de ces étudiants et chercheurs.»[xlix] La coopération avec les pays tiers et les pays d’origine participe bien à réguler les flux migratoires. En outre, le partage équitable des bénéfices de la mobilité entre pays d’accueil, pays de départ et les migrants eux-mêmes, est un gage de sa pérennité. Par conséquent, le renforcement de la cohérence entre les politiques migratoires et les politiques d’aide au développement est plus que jamais une nécessité pour l’Europe. L’UE devra opérer un choix entre deux positions tranchées. Soit elle s’évertuera à construire une forteresse de prospérité, repliée sur son patrimoine culturel, humain et économique et se protègera des flux migratoires du Sud. Soit elle étendra sa conception du partenariat en développant un éventail de politiques de voisinage. Elle aboutira alors à la création d’un « espace de prospérité et de valeurs partagées.»[l]
24/ Quelles perspectives pour les nouveaux Etats membres ? Traditionnellement les pays d’Europe centrale et orientale sont des pays d’émigration. Ainsi, depuis le milieu du 19ème siècle, plusieurs dizaines de millions de ressortissants ont émigré. Ensuite, les frontières se sont fermées pendant la période du communisme. Aujourd’hui, l’adhésion de huit PECO au sein de l’UE soulève des interrogations. Ces nouveaux membres vont-ils générer des flux d’immigration à destination des pays de l’UE15 ? Au contraire, vont-ils devenir des pays d’immigration comme les pays du sud de l’UE le sont devenus ? Il est d’ores et déjà acquis que quels que soient les mouvements migratoires qui se dessineront à l’est de l’Europe, ils n’influenceront que très modérément la situation démographique de l’UE. En outre, de nombreux facteurs tendent à démontrer que l’élargissement de 2004 n’entraînera pas d’immigration massive vers l’ouest. C’est ce que nous verrons dans une première partie avant d’examiner les différentes tendances migratoires que connaîtront les nouveaux Etats membres dans le futur. 241/ Absence de migrations massives vers l’Ouest L’élargissement de 15 à 25 Etats membres soulève des inquiétudes auprès des populations de l’UE15. Parmi les peurs suscitées par l’adhésion des nouveaux pays, la crainte d’une immigration massive d’est en ouest est très présente. Pour autant, plusieurs facteurs concomitants permettent de dire que ces flux massifs d’émigrés ne se réaliseront pas. Tout d’abord, il convient de noter que les nouveaux membres vont probablement connaître une période de croissance économique. En outre, l’amélioration progressive du niveau et des conditions de vie ne milite pas en faveur d’une forte envie de migrer. Les élargissements réalisés par le passé en attestent. Les nouveaux membres connaissent des situations économiques relativement stables. Ils ne sont pas confrontés à des situations de misère ou de précarité. Leurs situations politiques ne présentent pas plus d’inquiétude. Dès lors, ils devraient connaître des taux de croissance élevés qui favoriseront leurs économies et développeront le marché du travail localement. De plus, les pays de l’UE15 ont adopté des mesures limitant la liberté de circuler et donc de travailler, accordée aux ressortissants des nouveaux Etats membres. Ainsi pendant cinq à sept ans, sauf accords ou conventions entre pays, les nouveaux citoyens de l’UE15 ne profiteront pas pleinement de l’espace Schengen. En outre, les nouveaux Etats membres sont caractérisés par un solde migratoire négatif ou faiblement positif à l’exception de Chypre et Malte. Pour les huit PECO, le taux d’accroissement naturel est de –1,1 pour 1000 et le solde migratoire moyen de 0,1 pour 1000. Le taux de croissance de ces pays s’établit à –1 pour 1000. Dès lors, le potentiel migratoire de ces pays reste très faible. Toutes les études convergent vers un potentiel migratoire de 1% environ. Ce chiffre représente un flux annuel Est-Ouest de quelques 220 000 personnes à rapporter aux 450 millions d’habitants de l’UE[li]. Par ailleurs, il est généralement vérifié que les intentions de migrations manifestées sont supérieures aux flux constatés. Dès lors, le seul risque d’immigration non maîtrisée entre l’Est et l’Ouest est lié à la porosité possible des nouvelles frontières orientales de l’UE. Après la chute du mur de Berlin et l’éclatement de l’URSS, les PECO sont devenus un espace migratoire. Ils ont bénéficié de la suppression des visas de court séjour à destination de l’UE, en échange des conventions de réadmission des clandestins ayant franchi les frontières de l’UE[lii]. Aujourd’hui, les candidats à l’immigration clandestine issus des pays non signataires des accords de Visegrad, pourraient transiter par les nouveaux Etats membres pour rejoindre des pays de l’UE15[liii]. Les nouveaux Etats membres situés à la périphérie orientale de l’UE auront à gérer des flux de différents types. 242/ Diversité des tendances migratoires pour les nouveaux Etats membres Depuis 1990, la zone des PECO est devenue un espace migratoire qui génère des mouvements interrégionaux. Ainsi, en 2000, on note la présence de Slovaques, de Polonais, de Russes et d’Ukrainiens en République Tchèque. De même la Hongrie enregistre la présence de slovaques, russes, roumains et ukrainiens sur son sol. Les mouvements enregistrés dans cet espace sont en augmentation régulière. En 1995, la Pologne recensait 11,5 millions d’entrées d’étrangers en provenance de l’Est. Ils sont 15 millions en 2001[liv]. Les nouveaux pays de l’UE25 ont également à gérer les retours d’exilés de la période communiste. La période actuelle est propice au retour sur leurs terres d’origine de groupes ethniques déportés à l’époque de Staline. Ces flux peuvent aller jusqu’à provoquer un solde migratoire positif. C’est le cas pour la Hongrie et la République tchèque. Selon Anne de Tinguy, la perméabilité des frontières à l’est de la nouvelle UE entraînera une augmentation des demandes d’asile et du nombre de clandestins. « La clandestinité recouvre des phénomènes différents les uns des autres et qui parfois se recoupent : le transit, d’une part ; l’emploi, de l’autre.» Les PECO de l’UE25 constituent désormais une étape pour de nombreux candidats à l’immigration clandestine. Ce transit concerne plus particulièrement des ressortissants d’Asie et du Proche-Orient, mais également des Africains. Les flux liés à l’emploi sont particulièrement nourris. Il convient de distinguer entre les flux temporaires et les mouvements définitifs. Les premiers, également appelés mouvements pendulaires sont le fait de travailleurs qui vont effectuer des séjours de courte durée à l’étranger. En revanche, ces séjours peuvent être répétés. Phénomènes souvent régionaux, ils concernent soit des nouveaux membres de l’UE25, soit leurs voisins. Ainsi, ils concernent de 150 à 300 000 polonais qui travaillent pour des bas salaires et sans compter leurs heures dans l’agriculture, l’hôtellerie, le bâtiment[lv]. On note, parallèlement, la présence en 2000 de quelques 200 000 ukrainiens en République tchèque. Les ressortissants des pays de la Communauté des Etats Indépendants sont probablement encore aujourd’hui plusieurs millions à trouver les moyens de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille grâce à cette migration pendulaire. Cette migration temporaire à destination de pays de l’UE15 concerne, outre la Pologne, la République tchèque, la Hongrie, l’Estonie et les deux candidats à l’adhésion de 2007 : Bulgarie et Roumanie[lvi]. Parmi les nouveaux Etats membres qui accueillent également des flux pendulaires on peut citer la République tchèque, la Pologne et la Hongrie. Ces flux proviennent alors de pays voisins tels que la Biélorussie, la Roumanie, la Russie et l’Ukraine. Ils proviennent cependant aussi de pays en voie de développement : Chine et Vietnam[lvii]. Les PECO de l’UE25 sont également concernés par des mouvements de longue durée ou définitifs liés au travail. Ainsi, selon plusieurs études, la Pologne pourrait connaître une émigration de 1 à 1,6 millions de ressortissants entre 2005 et 2010. Enfin, il faut également noter que des pays tels que la République tchèque, la Hongrie et la Pologne accueillent à leur tour des flux migratoires. Ces flux, limités, concernent des personnes hautement qualifiées, issues des pays occidentaux[lviii]. La réalisation des objectifs préalables à l’adhésion européenne a contribué à la stabilisation politique et économique des nouveaux pays membres. Pour autant, ces pays vont continuer à être des pays de transit et même, pour certains d’entre eux, devenir des pays d’immigration. Ils auront à gérer les nouvelles frontières orientales de l’UE et les tensions régionales qui y apparaîtront. Il importera dès lors de tenir compte des efforts consentis et des progrès réalisés. L’espace Schengen devra leur être ouvert dans les meilleurs délais. La réalisation d’une véritable « Europe espace » est à ce prix.
25/ Vers une « Europe espace » Circuler librement de Tallin à Madrid ou de Dublin à Varsovie sera bientôt une formalité pour tout ressortissant de l’UE25. L’élargissement de 2004, le cinquième depuis 1973, réunifie enfin l’Europe déchirée par la Seconde Guerre mondiale, l’antagonisme Est-Ouest et la Guerre froide. Il préfigure les adhésions futures de la Bulgarie et de la Roumanie (2007), voire de la Croatie, de la Turquie et d’autres encore. L’Europe est en passe de devenir un espace ouvert à la circulation des personnes et des biens. La liberté de circuler constitue un objectif essentiel de la construction européenne. Par conséquent, il est primordial pour l’avenir de l’UE de trouver rapidement un juste équilibre entre liberté de mouvement et sécurité. 251/ Exigences et conséquences de la liberté de circulerSelon les termes du Traité d’Amsterdam, l’Europe doit devenir « un espace de liberté, de sécurité et de justice.» Cet objectif majeur est en passe de se réaliser. La création d’un vaste espace sans frontières, à l’intérieur duquel les personnes peuvent se déplacer librement, sans contrôle aux frontières, est pour demain. Pour y parvenir, l’UE doit toutefois réunir certaines conditions tout en conciliant au mieux les intérêts des nouveaux membres. En effet, les nouveaux pays de l’UE ont adhéré aux exigences communautaires. Ils ont consenti des efforts importants, en particulier au regard des dispositions « Schengen ». Ils vont désormais assurer en grande partie la gestion de la sécurité des frontières extérieures orientales de l’UE. Pour autant, leur entrée dans l’UE ne s’accompagne pas d’une suppression immédiate des contrôles aux frontières intérieures. Le Conseil statuera, au cas par cas, sur la capacité de chaque Etat à appliquer l’acquis de Schengen. La période transitoire nécessaire à la réalisation de cet objectif est estimée à sept ans. Il importe donc pour l’UE de réduire au maximum ce délai qui pénalise les nouveaux membres. Pour y parvenir, il serait souhaitable qu’elle finalise la politique migratoire communautaire et parvienne à maîtriser les flux migratoires. Elle devrait également soutenir les nouveaux membres en charge de la gestion des frontières extérieures. Enfin, ses autorités judiciaires et ses forces de police devraient travailler en étroite collaboration et lutter contre l’immigration clandestine et les trafics qui y sont liés. C’est ainsi que l’UE deviendrait un espace unique de liberté aux conséquences avantageuses. L’avènement de l’ « Europe espace » renforcerait la position de l’UE sur l’échiquier mondial, en particulier au plan économique. En effet, un marché plus vaste et plus intégré stimulerait la croissance économique de tous les Etats membres de l’UE. Le marché unique élargi offrirait des débouchés aux entreprises de l’UE et créerait des emplois. Il génèrerait des recettes fiscales que l’UE pourrait investir dans ses programmes prioritaires. En particulier, les pays les moins développés de l’UE25 devraient être largement bénéficiaires de cette croissance. Les exemples tirés du passé, tels que ceux dont ont bénéficié l’Espagne, le Portugal et l’Irlande, en attestent. L’UE25, c’est également soixante-quatorze millions de consommateurs supplémentaires dès aujourd’hui. C’est sans doute plusieurs dizaines de millions de consommateurs dans les années à venir avec les adhésions futures de la Roumanie et de la Bulgarie, voire celle de la Turquie. Les chefs d’Etat européens l’ont bien compris qui ont choisi cette option d’ « Europe espace ». Elle seule peut laisser espérer un rôle de « Puissance » à l’UE. Dans un monde désormais multipolaire, il n’existe plus de place pour les petits pays. A côté de l’Inde, de la Chine, et des Etats-Unis, l’UE pourrait à son tour devenir un pôle majeur. Cette option stratégique passerait alors par l’ouverture sur des Etats plus orientaux. Elle dépasserait ainsi l’aspect purement géographique et nécessiterait également de transcender les souverainetés nationales ainsi que les données anthropologiques. Cependant, pour exister, « l’Europe espace » doit entretenir des relations harmonieuses et de confiance avec ses voisins et surmonter les éventuelles tensions qui ne manqueront pas survenir. 252/ Surmonter les risques de rupture avec les voisins actuels et futurs Les Etats membres ont des droits, mais aussi des obligations. L’obligation pour les nouveaux pays de l’UE d’accepter intégralement l’acquis de Schengen, engendre un risque réel de ségrégation. Celle-ci pourrait opposer les Etats membres, ainsi que ceux qui adhèreront prochainement, aux autres PECO membres du Conseil de l’Europe. Les citoyens de ces derniers, sont désormais privés de la liberté de circuler dans des pays de l’UE. Cette situation ne manquera pas générer des tensions entre voisins. En outre, le fait d’introduire l’obligation de visa pour traverser les nouvelles frontières orientales pourrait avoir des conséquences négatives sur les échanges entre les populations des pays à nouveau séparés par des frontières. Dans certains cas, la fermeture de ces frontières aura pour conséquence de réduire les contacts entre des membres d’un même groupe ethnique vivant des deux cotés de la frontière. La fermeture des frontières aura également un impact négatif sur le fonctionnement des « Euro-régions ». Par ailleurs, les mouvements de proximité, frontaliers et saisonniers, représentent une source importante de revenus pour nombre de pays voisins de l'UE. Ces mouvements pendulaires sont la marque d’un processus d’intégration régionale. Ils constituent un moyen de subsistance pour un grand nombre de personnes. L’obligation de visa va entraver ce petit commerce frontalier. Elle pourrait être à l’origine de tensions sociales dans les pays concernés. Selon Anne de Tinguy, « la nouvelle frontière a aussi et surtout des conséquences pour les pays qui n’ont pas pour le moment vocation à intégrer l’UE. Pour eux, le coût de l’élargissement risque d’être très élevé. Les dirigeants polonais ont à plusieurs reprises mis en garde leurs partenaires de l’UE contre la construction d’un nouveau rideau de fer. [...] les nouveaux Etats indépendants redoutent que la frontière Schengen soit un instrument de rupture et de fermeture. »[lix] Pourtant, Romano Prodi et Chris Patten, affirmaient encore, en mars 2003, souhaiter que l’ « Europe élargie mette en place un nouveau voisinage », qu’elle « intensifie ses relations avec les pays géographiquement proches.[lx]» Pour surmonter ces tensions, l’UE doit établir une stratégie régionale. Celle-ci devrait rendre compatibles les adhésions et les coopérations régionales. La création de « ponts » en direction de pays qui n’ont pas vocation à intégrer l’UE est une nécessité. L’action dans ce domaine de la Pologne est intéressante. Dès le début 2003, elle propose à la Russie et à l’Ukraine la gratuité des visas pour entrer sur son territoire. Elle favorise également l’ouverture de nouveaux consulats[lxi]. La création d’une « Europe espace » sera une réalité dans un avenir proche. Il est du ressort de l’UE de participer et de contribuer à son édification. Dans l’immédiat, il importe de trouver des solutions au problème des visas qui sont sources de tensions avec les pays voisins de l’UE. Les mesures prises en matière de visas et de contrôles aux frontières, doivent concilier sécurité et liberté de mouvement. Elles ne doivent pas donner naissance à de nouvelles lignes de division en Europe. La finalisation de la politique migratoire européenne et la maîtrise des flux migratoires restent cependant des préalables incontournables à une « Europe espace ».
ConclusionAvec l’adhésion de dix nouveaux Etats membres en mai 2004, l’UE s’est résolument engagée sur la voie de « l’Europe espace. » Aujourd’hui, dans un monde multipolaire dominé par les Etats-Unis, mais où l’Inde et la Chine sont peut-être les puissances de demain, il n’existe plus de place pour les petits Etats. Dès lors, le choix stratégique opéré par les chefs d’Etat et de gouvernement européens trouve toute sa pertinence. Il pourrait même se concrétiser par une ouverture à des Etats plus orientaux, à l’instar de la Turquie, dépassant de fait l’aspect purement géographique de l’Europe. Les retombées démographiques induites constitueraient alors une bouffée d’oxygène pour une Europe vieillissante. Pour autant, les flux ainsi générés ne solutionneraient que partiellement le problème démographique de l’UE. L’avenir de l’UE dépend en grande partie de la gestion de sa situation migratoire. Par conséquent, toutes les mesures qui concourent à l’optimiser revêtent un caractère essentiel. En premier lieu, il importe de finaliser la politique communautaire en matière d’immigration. Cette politique est élaborée conformément aux dispositions du Traité d’Amsterdam et s’appuie sur les conclusions du Conseil européen de Tampere (1999). Elle doit s’attacher à trouver un équilibre entre les aspects humanitaires et économiques des flux migratoires des pays tiers. Son efficacité repose sur un traitement équitable des ressortissants des pays tiers. En particulier, il importe de leur accorder des droits et des obligations comparables à ceux des ressortissants locaux. La maîtrise des flux passe également par une politique équitable de partenariat et de coopération avec les pays de départ des migrants. Ces ambitions nécessitent l’engagement de moyens financiers conséquents ainsi que l’élaboration d’un cadre juridique adapté. La réussite de cette politique communautaire dépendra de la capacité des Etats membres à transcender leurs intérêts (politique du chacun pour soi) et à remettre en cause le principe de souveraineté nationale. Pour autant, la mise en œuvre d’une politique commune est une condition nécessaire mais pas suffisante. La construction d’une « Europe puissance », espace de paix et de stabilité politique passe également par une politique de voisinage et de partenariat avec la Russie, l’Ukraine et les autres voisins, en particuliers ceux qui n’ont pas vocation à intégrer l’UE. Il apparaît légitime que les pays d’Europe centrale et orientale retrouvent leur place dans « l’aventure européenne dont ils auraient sans aucun doute fait partie dès le début sans les tragiques événements que l’on sait[lxii]. » Chef d'escadron Christian Janus (Gendarmerie nationale, France, 12e promotion du CID) Biographie de l'auteur en bas de page, après les notes et la bibliographie Manuscrit clos en avril 2005 Notes: [i] Source : Jean-Claude Chesnais, INED, 6 avril 2004. [ii] Catherine Wihtol de Wenden est directeur de recherche au centre de recherches internationales (CERI), centre national de la recherche scientifique (CNRS). [iii] Source : EUROSTAT, 2004, Le guide statistique de l’Europe. Données 1992-2002. [iv] Source : http://www.esc.eu.int. [v] Source : http://www.esc.eu.int. [vi] Directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 portant sur le droit au regroupement familial, JO L.251, 03/10/2003. [vii] Source : http://www.esc.eu.int. [viii] Koffi Annan, secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Article paru dans Le Monde, 29 janvier 2004, Immigration : pour une stratégie européenne. [ix] Haffad Tahar est chercheur au département de démographie de l’université de Batna (ALGERIE), Vers une nouvelle Europe des migrations et du bon voisinage, conférence prononcée le 6 juillet 2004. [x] Source : http://www.conflits.org/article [xi] Source : Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés- HCR. Site :http://www.action.refugies.org/actualites/refugies-mag-juin 04. [xii] Convention relative à la détermination de l’Etat responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des Etats membres des communautés européennes. Convention de Dublin JO N°254 19/08/1997. [xiii] Source : Catherine Wihtol de Wenden, Les obstacles à une politique européenne de l’immigration, site http://www.ecsanet.org/conférences. [xiv] Peer BANEKE : secrétaire général du Conseil européen pour les réfugiés et les exilés. [xv] TA- titre IV, libre circulation des personnes, contrôle des frontières extérieures, asile, immigration et protection du droit des ressortissants de pays tiers, coopération judiciaire en matière civile, articles 61 à 64 (ex articles 73 I à L). [xvi] Les quatre orientations retenues sont : le développement du partenariat avec les pays d’origine ; l’adoption à terme d’une procédure d’asile communautaire ; un traitement équitable pour les ressortissants des pays tiers ; une gestion plus efficace des flux migratoires.
[xvii] Source : L’UE et l’Ukraine, des intérêts mutuels pour une coopération étroite, Claudia Major, Regards sur l’Est N°23, nov-déc 2003. [xviii] Source : http://www.assemblee nat.fr [xix] Jelle Van Buren est chercheur et journaliste, spécialisée dans les questions européennes. Source : Quand l’Europe s’entoure d’un cordon sanitaire, le Monde diplomatique, janvier 1999. [xx] En particulier, la France y voit le risque d’un nouveau Sangatte et la mainmise des réseaux maffieux. [xxi] Source : Le Monde, Les vingt-cinq débattent de la création de camps de réfugiés hors de l’UE pour trier les migrants, Thomas Ferenczi, 1er octobre 2004. [xxii] Source : http://wwweuropa.eu.int [xxiii] Plusieurs opérations conjointes ont été menées : -contrôle des frontières maritimes : Ulysse, Triton, Rio IV, Orca -contrôle des frontières terrestres et aériennes : Rio III, Visa. [xxiv] Onze mandats de négociation ont été confiés à la Commission européenne à compter de 2000. Cinq accords ont été signés avec Hong Kong, Macao, le Sri Lanka et l’Albanie. Des négociations sont en cours avec le Maroc, l’Algérie, la Russie et la Chine. [xxv] Source : http://www.info.europe.fr [xxvi] Source : Rapport de l’observatoire de l’immigration et de l’intégration. Site : http://www.ladocfrancaise.gouv.fr [xxvii] Source : Le Monde, La commission exclut le risque d’une immigration massive en provenance des nouveaux pays adhérents, 28 février 2004. [xxviii] Source : http://www.hcci.gouv.fr. Migrations mondiales et européennes : évolution et nouvelle donne, juin 2002. [xxix] Source : http://www.hcci.gouv.fr. Migrations mondiales et européennes : évolution et nouvelle donne, juin 2002. [xxx] Selon la Commission européenne, l’intégration est un concept basé sur le principe de l’égalité des droits et des chances, contrepartie de l’égalité des devoirs, dans le respect de la démocratie, de la diversité culturelle et de la primauté du droit.
[xxxi] Source : Rapport de la commission européenne IP/03/380, Bruxelles, 14 mars 2003. [xxxii] Source : Population et emploi N°5, octobre 2004. http://www.statistiques.public.lu.2004/05. [xxxiii] Source : L’intégration mise aux oubliettes, Plein droit N°57, Claire Rodier, juin 2003. [xxxiv] Source : Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen, le bilan du programme de Tampere, Bruxelles, 2 juin 2004. [xxxv] Source : Alternatives internationales, « Il faut combiner intégration et diversité », Marco Martiniello, juillet-août 2004. [xxxvi] Source : Directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au regroupement familial. [xxxvii] Source : Directive 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée. La directive devra être transposée avant le 23 janvier 2006. [xxxviii] Source : http://www.europa.eu.int/comm. [xxxix] Source : http://www.europa.eu.int/comm. [xl] Déclaration de Barcelone et partenariat euro méditerranéen. Site : http://www.europa.eu.inst/scadplus/leg/fr [xli] Source : « l’émigration en Europe vue d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient », Philippe Fargues, Esprit, décembre 2003, p126. [xlii] Source : L’Europe face aux migrations, Esprit, décembre 2002, p138. [xliii] Source: Wider Europe-neighbourhood: a new framework for relations with our eastern and southern neighbours. Site: http://www.europa.euint/comm/world. [xliv] Source : http://www.ladocfrancaise.gouv.fr. [xlv] Source : http://www.europa.eu.int/comm/budjet. [xlvi] Source : Europe information N°2852, JAI : le nouveau fonds pour les réfugiés reçoit le soutien du Parlement européen. [xlvii] Source : http://www.europa.eu.int/comm/budjet. [xlviii] Source : Conseil économique et social, « Les défis de l’immigration », 29 octobre 2003, pp 282-283. [xlix]Source : Conseil économique et social, « Les défis de l’immigration », 29 octobre 2003, pp 282-283. [l] Source : Le Maroc, une priorité pour l’UE élargie, Sean Doyle Site : http://www.blad.net/infos/article [li] Source : La Commission exclut le risque d’une immigration massive en provenance des nouveaux pays adhérents, Le Monde, 28 février 2004. [lii] Source : L’Europe à 25 et les migrations, Catherine Wihtol de Wenden. Site : http://www.notre europe.asso.fr [liii]Source : L’Europe à 25 et les migrations, Catherine Wihtol de Wenden. Site : http://www.notre europe.asso.fr [liv] Source : Service central des statistiques de Pologne. [lv] Source : OCDE, SOPEMI, Tendances des migrations internationales, 2002. [lvi] Source : Europe de l’Est : quelles migrations après l’élargissement ?, Anne de tinguy, Esprit, 2003. [lvii] Source : Antonella Guarneri, Les migrations Est-ouest dans une Union européenne élargie : politiques et potentiels migratoires. Site : antonella.guarneri@uniroma1.it [lviii] Source : Philippe Wanner, Elargissement de l’Union européenne. Enjeux et implications socio-démographiques. Site : philippe.wanner@unine.ch [lix] Source : Europe de l’Est : quelles migrations après l’élargissement ?, Anne de tinguy, Esprit, 2003. [lx] Source : À côté de l’UE, un cercle de pays amis, Le Monde, 19 mars 2003. Romano Prodi : président de la Commission Chris Patten : commissaire européen en charge des relations extérieures. [lxi] Source : Europe de l’Est : quelles migrations après l’élargissement ?, Anne de tinguy, Esprit, 2003. [lxii] Source : Günter Verheugen, article cité, Le Monde, 26.11.2003.
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Date de la mise en ligne: novembre 2005 |
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Bibliographie |
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Ouvrages· BAROU Jacques, Europe terre d’immigration : Flux migratoires et intégration, Presses universitaire de Grenoble, 2001, 175 p. · BERGER N, La politique européenne d’asile et d’immigration, enjeux et perspectives, Bruxelles, Bruylant, 2000. · BOUTEILLET-PAQUET Daphné, L’Europe et le droit d’asile : la politique européenne et ses conséquences sur les pays d’Europe centrale, Editions l’Harmattan, 2001, 396 p. · BRANGER Jean-Guy, Les migrations et l’intégration : un défi pour l’Europe, Editions Sénat, 2004. · BRIBOSA E, de WEYEMBERG A, L’Union européenne face aux migrations : concurrence entre les ressortissants de l’Est et du Sud ?, Editions de l’Université de Bruxelles, 1999. · GUIRAUDON Virginie, Les politiques d’immigration en Europe, Editions l’Harmattan, 2000, 281 p. · KAYA Bulent, Une Europe en évolution. Les flux migratoires au XXème siècle, Editions du Conseil de l’Europe, 2002. · MASSON Paul, L’Europe face à l’immigration : quels objectifs ? quels moyens ? Paris, Editions Sénat, 2000, 53 p. · WIHTOL DE WENDEN Catherine, L’immigration en Europe, Editions la documentation française, 1999, 168 p.
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REVUES· La nouvelle donne de l’immigration en Europe, Migrations Société, mars-avril 2001. · Europe : ouverture à l’Est, Hommes et Migrations, N° 1230, mars-avril 2001. · Vers une politique migratoire européenne ?, Hommes et Migrations, N° 1216, novembre-décembre 1998. · Les défis de l’immigration future, Rapport du Conseil Economique et Social, octobre 2003. · Tendances des migrations internationales, OCDE-SOPEMI, rapport annuel 2001.
ARTICLES DE REVUES· DE TINGUY Anne, Union européenne : élargissement à l’Est et migrations, Migrations Société, mars 2004. · HERM Anne, Les flux migratoires internationaux en Europe ?, Futuribles, Juillet 2002. · WHITOL DE WENDEN Catherine, Union européenne : élargissement à l’Est et migrations, Migrations Société, mars 2004. · WHITOL DE WENDEN Catherine, L’Europe des migrations, La documentation française, décembre 2001. |
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Biographie du Chef d'escadron Christian Janus | ||||
Issu de l'Ecole des Officiers de la Gendarmerie Nationale (1990-1993), licencié en droit public. A occupé les fonctions de commandant d'escadron de gendarmerie mobile à Blois (41), puis de commandant de gendarmerie départementale à Reims (51) avant de servir en état-major à Lyon-Bron (69). Il était alors chef du Bureau Organisation Evaluation Contrôle de la 5ème Légion de gendarmerie mobile. 12e promotion du Collège Interarmées de Défense 2004-2005. Missions récentes: 2004: Participation aux commémorations du 60 e anniversaire du débarquement de Normandie. 2003: Participation à la sécurité du G8 à Evian. |
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