Docteure en Géopolitique de l’Université de Reims Champagne-Ardenne. Agrégée d’histoire, Professeure de chaire supérieure au lycée Faidherbe (Lille) où elle enseigne la géopolitique en classes préparatoires économiques et commerciales. Auteure de nombreux ouvrages.
Voici une précieuse synthèse de l’actualité internationale d’avril 2021 qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique, suivent la spécialité #HGGSP voire finalisent un concours dans des conditions délicates. Pour ne rien manquer, et recevoir nos alertes sur des documents importants, le plus simple est de s’abonner gratuitement à notre Lettre d’information hebdomadaire ou au compte twitter de veille géopolitique @diploweb (plus de 17 175 followers privilégiés).
En Équateur, l’élection présidentielle a été remportée en avril 2021 par le conservateur Guillermo Lasso face à Andres Arauz. Le nouveau président de 67 ans est un ancien banquier alors que son rival, un économiste socialiste, est proche de l’ancien président Rafael Correa. L’ombre de l’ancien président a beaucoup pesé sur ces élections.
Au Niger la prise de pouvoir du président a été laborieuse. Élu en février 2021, Mohamed Bazoum prend ses fonctions début avril 2021 dans un contexte qui ressemble étrangement à une tentative de coup d’État. Plusieurs officiers seraient à l’origine de cette déstabilisation qui a échoué. Le plus dur reste à faire pour le président récemment élu, la montée de l’islamisme radical est une réalité dangereuse pour ce pays engagé, comme ses voisins, dans le G5 Sahel qui lutte contre ce fléau.
En Jordanie, le roi Abdallah II – fils de Hussein, charismatique roi hachémite de Jordanie – a fait arrêter en avril 2021 les proches de son demi-frère le prince Hamza ben Hussein, lui-même en résidence surveillée. Ils sont soupçonnés de vouloir déstabiliser le pouvoir, mais beaucoup de Jordaniens y voient un prétexte dans un contexte de mécontentement populaire grandissant. Mesure royale de précaution face à un prince trop populaire et trop proche des tribus ? Opération « mains propres » dans le cadre de mesures anti-corruption ?
Un nouveau scandale affecte la représentation de l’Europe communautaire. Le contexte mérite d’être rappelé. Les relations entre Bruxelles et Ankara sont tendues depuis quelques années du fait du jeu trouble de la Turquie face à l’État islamique, de la question des migrants. L’Union européenne veut en endiguer le flot et, en conséquence, paie la Turquie pour éviter une nouvelle crise migratoire. L’impasse du processus d’adhésion à l’UE d’une Turquie qui ne respecte pas tous les critères, et dont l’enthousiasme s’est refroidi fait aussi parti du cadre général, indispensable pour comprendre cette affaire. De façon plus récente, les tensions se sont cristallisées en Méditerranée entre les marines turques et françaises concernant l’accès aux côtes libyennes (cf. Actualité internationale de juin 2020) et entre la Turquie et la Grèce en Méditerranée orientale, à laquelle la France apporte son soutien. En outre, la Turquie s’est retirée de la convention du Conseil d’Istanbul sur la prévention et la lutte des violences faites aux femmes. En avril 2021, le déplacement en Turquie d’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, et de Charles Michel, à la tête du Conseil européen, avait pour but de renouer un dialogue avec Ankara tout en montrant une certaine fermeté. L’entrevue a tourné en camouflet pour l’Union. Les photographies de Madame von der Leyen restant debout alors que le président turc est assis aux côtés de Charles Michel ont rendu mondiale l’humiliation. Une humiliation renforcée par la suite puisqu’Ursula von der Leyen a dû se contenter d’un canapé en contrebas en face du ministre turc des Affaires étrangères.
Les questions protocolaires (l’un a-t-il bien la préséance sur l’autre ? La coutume veut que les deux représentants de l’Union soient traités de la même façon lors d’une visite officielle hors de l’Europe communautaire…) ne sont pas en fait le fond du problème. Le président Erdogan, connaissant les mauvaises relations entre la présidente de la Commission et le président du Conseil, s’est offert le luxe de jouer un bien mauvais tour aux Européens. Il a envoyé un message clair à vocation interne, en direction des conservateurs turcs qui n’ont pas manqué d’apprécier le caractère sexiste de la situation. Et alors qu’à Bruxelles la question protocolaire est vivement débattue, le message qu’une puissance secondaire comme la Turquie puisse se permettre de traiter ainsi l’Union, après le camouflet diplomatique infligé en Russie à Josep Borrell (représentant de la diplomatie européenne), est révélateur des insuffisances de l’Europe puissance. Le monde découvre, aussi, que la Commission et le Conseil disposent tous deux de leur propre service protocolaire qui, visiblement, ne travaillent pas en bonne intelligence. Rappelons que ce sont les États membres qui fixent par traités les institutions européennes dont les éventuelles insuffisances sont d’abord un produit des contractions des États membres par rapport à l’UE.
L’Union européenne est aux prises avec un environnement changeant. Après l’entrevue d’Ankara, elle est à la manœuvre pour trouver une solution à la crise politique que traverse la Géorgie. Celle-ci court depuis les élections législatives d’octobre 2020 et la victoire du parti « rêve géorgien », contestée par le parti d’opposition Mouvement National Uni (MNU). La médiation européenne a permis un accord accepté par les deux camps, dans un pays où les Géorgiens espèrent adhérer à l’OTAN et entrer dans l’Union européenne.
Le Conseil de l’Union européenne est en passe de donner corps au souhait d’Ursula von der Leyen d’une UE plus « géopolitique ». Après le Royaume-Uni, sorti de l’UE le 31 janvier 2020, le Conseil envisage l’Indopacifique comme un théâtre stratégique pour l’avenir. Il s’agit pour l’UE, traumatisée par le terrible constat de sa dépendance multiforme mise au jour avec la crise sanitaire, de diversifier ses zones d’approvisionnement, tout en défendant la libre circulation sur les mers.
Le Danemark encourage les immigrés syriens arrivés sur son sol depuis 2015 à regagner leur pays d’origine, estimant qu’ils peuvent désormais le faire puisque les pires pages de la guerre sont tournées.
Au Soudan, la région du Darfour a de nouveau été en avril 2021 le théâtre de violences. Elles auraient coûté la vie à plus d’une centaine de personnes dans la région d’El-Geneina.
La partie septentrionale du Nigéria reste également le théâtre d’une violence endémique. On se souvient des multiples enlèvements de jeunes perpétrés par des djihadistes qui nourrissent un trafic d’êtres Humains très rentable. De nouvelles violences y ont fait en avril 2021 plusieurs dizaines de victimes et plus de soixante mille personnes ont préféré fuir la région de Damasak.
Le président tchadien Idriss Déby est mort en avril 2021. Il venait d’être réélu pour un sixième mandat, il est mort de blessures reçues lors de combats contre des rebelles dans la partie septentrionale du pays. Son fils, le général Mahamat Idriss Deby Itno, a pris la tête d’un conseil militaire de transition qui a déclaré organiser des élections dans dix-huit mois. Dans ce pays où les rebellions sont structurelles depuis l’indépendance de 1960, avec des rebelles qui s’organisent depuis le territoire soudanais ou depuis la Libye (dans le cas présent) la population de la capitale N’Djamena craint une guerre civile. Cette crainte est d’autant plus forte que le pays lutte dans sa partie méridionale contre Boko Haram dont la base est située au Nord du Nigéria. Le Tchad est aussi, jusqu’ici, un des membres les plus importants de la force G5 Sahel qui, épaulée par la France, tente d’éviter que le Sahel ne se transforme en « Sahélistan ». C’est d’ailleurs à N’Djamena qu’est basée l’opération Barkhane menée par Paris, qui perd avec la mort d’Idriss Déby son allié le plus précieux dans la région. Emmanuel Macron s’est rendu aux obsèques.
Le premier ministre japonais, Yoshihide Suga, est le premier chef d’État à être reçu par le président Joe Biden, cette même marque honorifique avait été réservée à son prédécesseur à Shinzo Abe. Les enjeux sont importants tant pour les Etats-Unis que pour un Japon. Leurs économies sont très étroitement liées à celle du géant chinois. Celui-ci pourrait se muer en adversaire, et dans ce cas l’alliance avec les Etats-Unis est d’autant plus précieuse pour le Japon que Washington a réaffirmé la souveraineté nippone sur l’archipel des Senkaku convoité par Pékin. Taiwan, le Japon et les États-Unis se retrouvent ici dans le même camp géopolitique face à la Chine tout en ayant une dépendance économique avérée à l’Empire du Milieu.
Alors que l’économie chinoise affiche une santé qui peut apparaitre insolente à ses partenaires, Pékin signe en avril 2021 un vaste accord de coopération avec l’Iran pour une durée d’un quart de siècle. L’Iran est un pays où la majeure partie des infrastructures sont à rénover. C’est aussi un moyen pour ce pays de contourner les sanctions occidentales et pour la Chine de défier les Etats-Unis.
L’Ukraine se replace sur l’échiquier européen entre Russie, Union européenne et Etats-Unis. Son président Volodymyr Zelensky est venu en Europe de l’Ouest- notamment en France – pour chercher un soutien face à la Russie qui a non seulement annexé la Crimée en 2014 mais alimente aussi une « guerre de basse intensité » dans le Donbass russophone et russophile mais juridiquement ukrainien, et en plus qui masse des troupes à la frontière. L’Union européenne et les Etats-Unis ont décidé de sanctions économiques contre la Russie au lendemain de l’annexion de la Crimée, mais M. Zelenski veut un soutien plus marqué de la part des Occidentaux qu’il considère comme ses alliés avec une aspiration à intégrer l’alliance militaire de l’OTAN et l’Union européenne. Les Etats-Unis ont pris de nouvelles sanctions contre les intérêts russes en rétorsion des cyberattaques dont ils ont été victimes : expulsion de diplomates russes, sanctions contre certaines entreprises, difficulté pour Moscou à emprunter auprès de banques américaines… Moscou a, à son tour, expulsé des diplomates américains. Les implications de l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN sont très loin d’être neutres. Cependant, faut-il accepter une forme de « souveraineté limitée » à la mode Brejnev imposée aux pays que la Russie post-soviétique désigne comme son « étranger proche » ? Les Occidentaux sont-ils réellement prêts à engager un possible conflit – et de quelle nature - contre la Russie ? De même, une adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne n’en serait pas moins lourde de conséquences. Or, dans la réorganisation de l’échiquier géopolitique mondial, est-il opportun pour les Etats-Unis de s’aliéner davantage la Russie quand elle est en plein bras de fer avec la Chine ? La même question se pose pour les Européens. Après des déclarations sans ambiguïté de l’OTAN et de l’UE, Vladimir Poutine annonce fin avril 2021 un retrait de l’armée russe des abords de la frontière avec l’Ukraine.
Pour réussir les oraux, voir l’étude de Laura Brincourt sur Diploweb.com : Le "Cloud Act", trois ans après : révélateur du besoin de définition de notre souveraineté dans l’espace numérique
Les Etats-Unis de Biden reviennent dans le jeu du développement durable après la décision prise par Donald Trump de retirer son pays des accords de Paris. Chine et Etats-Unis sont les principaux émetteurs de gaz à effet de serre (GES). A Washington, Joe Biden annonce en avril 2021 que son pays vise la neutralité carbone pour 2050, c’est aussi l’objectif du Brésil. Xi Jinping fixe cet objectif à atteindre pour son pays à l’horizon 2060. La décision américaine va probablement faire entrer sur cette voie d’autres pays.
Washington se repositionne aussi sur le dossier des droits de l’homme. Après avoir dénoncé sévèrement le sort réservé par Pékin à la minorité ouïgoure, Joe Biden reconnait en avril 2021 l’existence du génocide des Arméniens perpétré en 1915, lors de la Première guerre mondiale, par l’empire ottoman. Il a coûté la vie à près d’un million et demi d’Arméniens. Depuis l’Uruguay en 1965, une vingtaine de pays ont reconnu ce premier génocide du XXème siècle … pour le plus grand dam de la Turquie. La France l’a fait en 2001.
En Israël, près de six millions de personnes ont déjà été vacciné, le pays est en avril 2021 proche de l’immunité collective si on ajoute ceux qui, après avoir contracté le virus, ont développé des anticorps.
Aux Etats-Unis, les objectifs de la vaccination ont largement été atteints. Avec deux cents millions de doses (plus de la moitié des adultes ont reçu au moins une dose) et plus de 78 millions de personnes ayant reçu leurs deux doses, le pays fait figure d’exemple.
Alors que l’Inde annonce l’ouverture à la vaccination pour toutes les personnes de plus de dix-huit ans, une nouvelle vague d’une grande virulence touche le pays avec jusque 200 000 contaminations comptabilisées certains jours. La plus grande usine de vaccin du monde appartient à Adar Poonawalla, à la tête de Serum institute of India, celui-ci estime qu’il est urgent d’augmenter la production et fait appel à l’aide de l’État indien. Plusieurs pays s’apprêtent à livrer des appareils respiratoires à un système de santé indien débordé par l’ampleur de la crise sanitaire.
Au Bhoutan, plus de la moitié de la population a été vaccinée en quelques jours avec le vaccin Astra Zeneca. La population s’élève à moins d’un million d’habitants. Seychelles et Maldives ont aussi réussi à vacciner une part très importante de leur population, faisant encore mieux qu’Israël ou le Royaume-Uni.
En Europe, l’approvisionnement en vaccin Astra Zeneca continue à susciter de nombreux remous. Le vaccin Johnson-Johnson, qui ne nécessite qu’une seule dose, doit arriver au mois de mai 2021. La Commission européenne a commandé cinquante millions de doses supplémentaires auprès de Pfizer-BioNTech. L’Allemagne va acheter environ trente millions de doses du vaccin russe Spoutnik-V.
En Iran, une explosion a endommagé le site nucléaire de Natanz, ce qui devrait ralentir le programme nucléaire. Le gouvernement iranien y voit la main des services israéliens.
Au Pakistan, les émeutes anti-françaises ne faiblissent pas. Les autorités ont décidé d’interdire le parti islamique TLP responsable du blocage des principales villes du pays pour obtenir l’expulsion de l’ambassadeur de France.
Jakarta a accueilli un sommet de l’ASEAN (Association des pays de l’Asie du Sud-Est), le premier sommet depuis le putsch en Birmanie qui a déjà fait plus de sept cents morts. Si l’ASEAN n’a pas les moyens d’infléchir la situation en Birmanie, ce sommet est un appel à la tempérance lancé aux nouvelles autorités birmanes.
L’Australie annonce en avril 2021 renoncer aux « nouvelles routes de la soie » chinoises. Cela fait suite aux mesures de rétorsion que la Chine a décidé après que l’Australie ait demandé de faire toute la lumière sur les origine du coronavirus. Canberra estime que ces « nouvelles routes de la soie » sont un moyen pour Pékin détendre toujours plus son influence.
Le canal de Suez est débloqué, la circulation maritime peut reprendre et redonner de l’oxygène à l’économie mondiale.
Toujours l’espace. Thomas Pesquet, le spationaute français rejoint en avril 2021 pour la seconde fois la station orbitale internationale ISS. La nouveauté, c’est le transporteur. De façon tout à fait inédite, la station spatiale est ralliée par un engin qui n’appartient pas à une agence nationale, mais à une compagnie privée, en l’occurrence Space X d’Elon Musk. Six autres astronautes participent avec Thomas Pesquet à la mission alpha qui doit multiplier les expériences scientifiques.
Ingenuity a survolé en avril 2021 le sol de Mars, une première tout à fait remarquable.
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Plus pour réussir
Extraits du catalogue des livres géopolitiques publiés par Diploweb pour la réussite aux concours.
. Patrice Gourdin, "Manuel de géopolitique, éd. Diploweb via Amazon"
. L. Chamontin, "Ukraine et Russie : pour comprendre"
. G-F Dumont, P. Verluise, "The Geopolitics of Europe : From the Atlantic to the Urals"
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