Docteur en géographie et géopolitique de l’Institut Français de Géopolitique (IFG, Université Paris 8). Chercheur au Centre de Recherches et d’Analyses Géopolitiques (EA 353 - Université Paris 8). Chercheur associé au CRESAT (EA 3436- Université de Haute-Alsace). Attaché Temporaire d’Enseignement et de Recherche en Géographie, Département "Histoire & Patrimoine".
Voici une recherche originale sur la géopolitique de l’énergie. Forte d’un complexe atomique en expansion, hérité de l’Union soviétique, l’industrie nucléaire russe cherche à exporter ses réacteurs dans les nouveaux marchés émergents pour consolider ou créer des liens de dépendance à l’importation de combustibles de Russie, obligeant alors les industriels à chercher de nouvelles sources d’uranium. Teva Meyer présente ici un carte inédite, disponible en pied de page.
L’utilisation des exportations d’énergie comme outil de coercition diplomatique par la Russie est un des serpents de mer de la géopolitique européenne. Tandis que l’attention s’est extensivement portée sur les hydrocarbures, l’énergie nucléaire est devenue un autre outil de la puissance russe.
De l’URSS, la Russie a hérité d’un complexe atomique industriel complet, de la fabrication du combustible à la manufacture de réacteurs, dont les sites de production, situés pour certains dans d’anciennes villes fermées de Sibérie (Novouralsk, Seversk, Zelenogorsk, etc.), sont restés les mêmes et connaissent aujourd’hui d’importants travaux d’expansion. Avec 35 réacteurs exploités par une unique entreprise, Rosenergoatom, le nucléaire ne constitue qu’une part minoritaire (18,4%) de la production électrique russe, loin derrière les ressources fossiles qui fournissent près des deux tiers du courant. Les objectifs à moyen et long termes affichés par le gouvernement russe sont toutefois plus qu’ambitieux et visent à mener la part du nucléaire à 45% de la production électrique en 2050 et à 70%, voire 80%, en 2100. Dans sa stratégie d’expansion, l’industrie russe a également initié le développement d’une flotte de centrales flottantes dédiées à alimenter les régions enclavées en Arctique et en Extrême-Orient.
L’industrie nucléaire russe a été entièrement réorganisée en 2007 autour d’une unique entreprise, Atomenergoprom, placée sous le contrôle de Rosatom (qui remplace l’Agence fédérale de l’énergie atomique), contrôlant un ensemble de filiales dédiées chacune à un segment du complexe atomique. L’objectif affiché de cette restructuration était de servir l’effort de développement de la filière à l’étranger. Déjà présent en Europe de l’Est, l’industrie russe vise aujourd’hui à exporter ses réacteurs vers les marchés non nucléarisés en Asie du Sud-Est et en Afrique. Depuis 2014, le gouvernement russe a ainsi signé 17 conventions avec des pays émergents afin d’y développer des parcs nucléaires, proposant parfois de financer entièrement les projets. Le but n’est pas uniquement de vendre des réacteurs, mais aussi de s’assurer que les exploitants de ces futures centrales s’approvisionnent en Russie pour leur combustible. L’industrie russe est ainsi devenue un acteur incontournable dans la production de combustibles nucléaires, d’une part en fournissant directement des exploitants de centrales de technologie occidentale ou en proposant des services intermédiaires nécessaires à la production du combustible tel que l’enrichissement de l’uranium. Toutefois, alors que la plupart des mines soviétiques d’uranium se trouvaient en dehors de la Russie, cette stratégie oblige les industriels russes à chercher de nouveaux gisements à l’intérieur du pays ainsi qu’à l’étranger, en Afrique, en Asie centrale et en Amérique du Nord, au risque de s’y confronter alors à l’actuel expansionnisme nucléaire intensif de la Chine.
Titre du document : Carte de l’industrie nucléaire civile : l’autre énergie de la puissance russe dans le monde Cliquer sur la vignette pour agrandir cette carte de l’industrie nucléaire civile : l’autre énergie de la puissance russe dans le monde. Réalisation : Teva Meyer pour Diploweb.com Document ajouté le 9 septembre 2017 Document JPEG ; 1351048 ko Taille : 3325 x 3514 px Visualiser le document |
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