Après avoir été à la tête du Commandement des opérations spéciales françaises (COS), le général de corps d’armée André Ranson démontre ici pourquoi et comment les opérations spéciales sont aujourd’hui un outil géopolitique. Sa démonstration est étayée par cinq exemples : République Centrafricaine, Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Afghanistan, République Démocratique du Congo.
Les opérations spéciales représentent un apport significatif dans la panoplie des options offertes au décideur quand les circonstances ne sont pas favorables à une intervention massive, coûteuse ou trop visible.
Dans tout appareil d’Etat, l’armée est bien l’institution dont l’analyse et la compréhension relèvent par excellence de l’analyse géopolitique, c’est à dire de la démarche qui permet de mieux comprendre les rivalités de pouvoir sur des territoires. Amiral Lacoste
EN CE DEBUT de mois de mars 2007, la ville de Birao où se trouve un détachement français d’assistance aux Forces armées centrafricaines (FACA), est la cible d’une attaque d’un mouvement rebelle d’opposition au gouvernement[1]. A ce moment, cette région au nord de la Centrafrique est de fait une zone peu contrôlée par le régime du président Bozizé, zone où cohabitent des mouvements armés de « libérateurs » de la RCA et des éléments rebelles tchadiens. Sa déstabilisation risque par contagion de déborder dans des zones déjà sensibles du Tchad et du Soudan. Déjà, en octobre 2006, une première chute de la ville avait justifié une action française en soutien des FACA. Une intervention d’urgence est à nouveau jugée nécessaire, tant pour soutenir le détachement français que pour assurer la crédibilité de nos engagements vis-à-vis de la RCA et éviter l’extension d’une nouvelle zone de non-droit dans une région déjà instable aux portes du Darfour. Moins de 48 heures après l’attaque, un assaut vertical sur l’aérodrome de Birao est mené par une soixantaine de chuteurs parachutistes du Commandement français des opérations spéciales (COS), largués en pleine nuit à 4000 mètres. Peu après le poser d’assaut d’avions du COS avec un élément plus important sur l’aérodrome ainsi dégagé, ils permettent grâce à un effet de surprise maximum de rétablir en quelques heures la situation. La rapidité de réaction du dispositif d’opérations spéciales et la compétence des opérateurs a encore une fois été un gage de réussite.
Le dispositif d’intervention d’un Etat sur la scène géopolitique s’incarne essentiellement dans un dispositif diplomatique complété par un dispositif militaire et un dispositif regroupant les moyens secrets d’action et de coercition. Les dispositifs militaires sont généralement compris comme regroupant des moyens terrestres, maritimes et aériens et, depuis quelques années, nucléaires, balistiques et spatiaux. Cependant, depuis quelques décennies, la littérature et les media ont largement attiré l’attention sur les actions guerrières d’une nouvelle entité militaire, les « Forces Spéciales », qu’il s’agisse de l’encadrement des tribus en lutte contre le Viet-Minh par les Français du GCMA[2] lors de la guerre d’Indochine, de l’action des « Bérets verts » américains au Vietnam, plus récemment de la chasse aux SCUDs menée par les « Special Forces » américaines, australiennes et britanniques en Irak ou encore des évènements tragiques survenus lors de l’opération « Restore Hope » en Somalie et popularisés par le film Black Hawk Down. Cependant, si les chroniqueurs et historiens ont largement rapporté les aventures hors du commun et les exploits tactiques – parfois les échecs - de ces soldats d’élite, ils se sont moins attachés à mettre en lumière la spécificité des « Opération Spéciales » elles-mêmes. Pourtant, c’est bien l’évolution du rôle dévolu à ces dispositifs d’opérations spéciales, mieux adaptés à la défense des intérêts stratégiques de la nation, permettant d’élargir la panoplie des outils dont dispose un gouvernement dans la prévention et la gestion des crises et des conflits et autorisant des formes nouvelles de maîtrise de la conflictualité, qui constitue une nouveauté et à laquelle il convient de porter attention. L’étude de l’organisation et de l’emploi de ces dispositifs, conçus pour faire face à l’inattendu et dont les objectifs ont une finalité tant politique que strictement militaire, relève clairement de l’analyse géopolitique.
Ce ne sont pas la complexité croissante du monde moderne ni les nouvelles formes de menaces asymétriques qui ont ouvert la voie à des opérations militaires non conventionnelles. Sans remonter à l’Antiquité, le qualificatif de « spécial2 » est apparu en 1941 chez les Britanniques lorsque David Stirling a jeté les bases du Spécial Air Service (SAS), alors que, de son côté, le Premier ministre Winston Churchill poussait à la mise sur pied du Special Operations Executive (SOE) ayant pour mission de coordonner l’action subversive et le sabotage derrière les lignes ennemies. Aux Etats-Unis, le président Roosevelt créait en 1942 l’Office of Strategic Services (OSS), placé sous la responsabilité du chef de l’état-major combiné[3], avec comme objectifs le renseignement opérationnel dans le cadre des batailles en cours, la guerre psychologique contre l’ennemi et l’aide à la résistance dans les territoires occupés. Au sein de l’OSS, une section Opérations spéciales (OSS/SO) devait organiser des groupes de résistance opérant derrière les lignes ennemies, mais également monter à l’intérieur du théâtre des opérations toutes les opérations clandestines qui n’auraient pas été assignées à l’armée.
Entre la section SO de l’OSS et le SOE, un accord avait été conclu en juin 1942, aux termes duquel la planète était répartie en zones d’action sous contrôle américain ou britannique en fonction des commandements militaires en vigueur. L’OSS se vit ainsi attribuer la Chine, la Mandchourie, la Corée, l’Australie, la Finlande et l’Afrique du nord, tandis que le SOE s’arrogeait le reste du monde dont la France[4]. Ces diverses organisations, placées à la césure entre les forces conventionnelles et les services secrets (en particulier le Secret Intelligence Service britannique) étaient conçues pour permettre, non sans conflits d’intérêts entre elles, d’assurer au meilleur coût/efficacité une adaptation des objectifs de la grande stratégie au niveau des théâtres d’opérations[5]. Elles conservaient cependant une forte connotation militaire, venant simplement en appui des opérations classiques conduites par les Etats-majors, notamment grâce à des actions de renseignement, de sabotage ou de harcèlement contre l’occupant.
De nos jours, la nouvelle « conflictualité » à laquelle les décideurs doivent faire face n’est plus faite d’un péril majeur et caractérisé mais de menaces et de risques tout à la fois diffus et fortement imbriqués. Comme le souligne Aymeric Chauprade[6] « l’environnement international est particulièrement instable, marqué par des menaces multiformes et diffuses. Les risques de crises perdurent, liés aux désaccords frontaliers, au statut de certaines minorités, aux passions religieuses ou à la présence d’arsenaux militaires importants et mal contrôlés. L’instabilité de certains Etats, les ambitions de certaines puissances régionales ou les tensions interethniques ainsi que développement du crime organisé et des trafics et l’apparition d’un terrorisme agissant à l’échelle de la planète représentent des risques réels ». Et même si l’emploi de la force armée n’est plus susceptible à elle seule d’apporter des réponses à ces nouvelles formes de chaos, les gouvernants cherchent à introduire dans leur panoplie militaire des dispositifs souples, légers, réactifs, actionnés en boucle courte, qui garantissent aux plus hautes autorités une liberté d’action accrue et leur offrent des options opérationnelles nouvelles et imaginatives, en complément des opérations conventionnelles.
Les opérations spéciales sont des « opérations militaires menées par le commandement des opérations spéciales et des unités des forces armées spécialement désignées, organisées, entraînées et équipées, appelées forces spéciales, pour atteindre des objectifs militaires ou d’intérêt militaire présentant un caractère stratégique et imposant un contrôle politico-militaire étroit et permanent. Ces actions, qui utilisent des techniques opérationnelles et des modes d’action inhabituels aux forces conventionnelles [..] sont conduites en temps de paix, crise ou guerre, indépendamment des opérations conventionnelles ou en coordination avec celles-ci. [..] Elles s’en distinguent par un cadre espace-temps différent, la nature et la sensibilité de leurs objectifs, des modes opératoires particuliers et la discrétion qui entoure leur préparation et leur exécution. Elles peuvent s’exercer sans aucune notion d’exclusive dans les champs physiques et immatériels[7] ».
Ainsi, les opérations spéciales renvoient à des objectifs pour lesquels les capacités, procédures et techniques employées ou principes d’engagement des forces conventionnelles n’apportent pas de réponse appropriée, qu’il s’agisse par anticipation de rechercher du renseignement dès l’apparition de signes de tension, de répondre dans l’urgence à un début de crise tout en préparant l’engagement ultérieur de forces plus conséquentes, de s’attaquer à des objectifs de haute valeur ajoutée, de contraindre un adversaire à la négociation dans une ambiance hostile, ou d’acquérir une supériorité temporaire et localisée.
Mais les opérations spéciales ne se définissent pas seulement par leurs objectifs mais aussi par leur pratique, dont les principales caractéristiques sont l’acceptation d’un risque physique, politique et militaire généralement plus élevé que pour d’autres troupes, l’emploi d’opérateurs parfois en nombre, mais aussi souvent en petites équipes qui compensent alors leur vulnérabilité par la discrétion dans la préparation et l’exécution de leurs actions, opérateurs faisant preuve à la fois de réflexion et d’agressivité, d’imagination et de jugement, de non-conformisme et de stabilité psychique et émotionnelle, maîtrisant des procédés d’infiltration et de combat multiples et spécifiques.
Dans ce contexte, il faut distinguer, au sein du ministère de la défense français, plusieurs opérateurs « spéciaux » dont il importe de préciser les domaines et limites d’action et les interactions possibles. Alors que la Direction Générale de la Sécurité Extérieure (DGSE) traite du renseignement de sécurité au sens large et reste seule habilitée à l’action clandestine à l’étranger, pour le renseignement comme pour l’action, la Direction du Renseignement Militaire est la « tête de chaîne » de tous les moyens de renseignement des armées qui s’informent sur les dispositifs militaires étrangers dans les zones d’engagement actuelles ou potentielles. Le dispositif d’opérations spéciales des armées, auquel nous nous intéressons, agit pour sa part uniquement sur les théâtres d’opérations en dehors du territoire national et de manière ouverte, et donc avec des personnels en uniforme, ce qui n’exclut pas très souvent une grande discrétion. Il peut arriver qu’une action clandestine précède une opération spéciale, à laquelle elle passe à terme le relais. Aux Etats-Unis, un exemple clair en a été donné par l’action des forces paramilitaires de la CIA infiltrées en Afghanistan dès octobre 2001, qui ont négocié avec l’Alliance du Nord l’accord pour insertion ultérieure d’équipes militaires de l’USSOCOM[8] en vue d’aider l’Alliance à renverser le régime Taliban[9].
Le dispositif d’opérations spéciales des armées s’articule autour du Commandement des opérations spéciales (COS), un commandement interarmées à vocation uniquement opérationnelle, et des Forces Spéciales, soit environ 3000 personnes des formations ou éléments de forces des trois armées et du service de Santé et quelques dizaines de réservistes sélectionnés qui jouent un rôle particulier du fait de leurs compétences civiles et professionnelles. L’officier général commandant des opérations spéciales, répondant directement aux ordres du chef d’état-major des armées, peut puiser selon les besoins dans le réservoir des Forces Spéciales, constitué pour l’armée de terre par un régiment à vocation d’action spécialisée et un régiment à vocation de renseignement[10] appuyés par une unité d’hélicoptères spécialement conçus pour l’appui aux opérations spéciales, pour la marine par cinq commandos marine[11] dont un commando d’action sous-marine, alors que l’armée de l’air entretient les aéronefs et personnels[12] nécessaires aux actions aériennes spécialisées.
Toutes ces unités disposent d’équipements spécifiques et bénéficient d’un entraînement intensif. Constituant une ressource rare, elles ne doivent donc être employées qu’à bon escient, et en toute priorité dans des missions que les forces conventionnelles ne peuvent remplir du fait de la nature ou de la sensibilité de leurs objectifs, de l’ambiance de secret dans lequel elles doivent être menées, des modes d’actions auxquels elles font appel ou encore d’un environnement particulier lorsqu’il faut agir en unité isolée dans un milieu fortement hostile. Cependant, l’efficacité et l’économie des forces commandent que ces forces spéciales puissent également être parfois employées pour des opérations conventionnelles, agissant alors dans une logique de « métier » liée à leurs aptitudes particulières. C’est le cas par exemple lorsqu’un commando de la marine arraisonne, au large des Canaries, un cargo chargé de stupéfiants[13] dans le cadre de l’action de l’Etat en mer contre les narcotrafiquants ou bien lorsque des commandos de l’air assurent en Afghanistan, au profit de la coalition, la permanence du sauvetage et de la récupération de pilotes abattus[14] .
On comprend dès lors qu’il existe deux grands champs d’action, non exclusif l’un de l’autre, pour les opérations spéciales : d’une part des opérations qui requièrent des compétences particulières non encore détenues au sein des forces conventionnelles, d’autre part des opérations parfois plus classiques mais qui justifient néanmoins le cadre approprié des opérations spéciales en raison de leur extrême sensibilité. Ce qui fait le spécial, en définitive, c’est la nature ou le niveau de l’objectif à traiter ou bien la nature, la sensibilité des conséquences d’un succès ou d’un échec de ces opérations, qui recouvrent un vaste éventail de missions possibles : reconnaissances effectuées dans des zones où ne sont pas déployées de forces conventionnelles, actions destinées à affaiblir les moyens et la volonté de l’adversaire telles que sabotages, propagande ou soutien à mouvements de partisans, extractions de ressortissants menacés en mettant à profit le rapport agressivité/effectifs élevé spécifique aux Forces Spéciales, ou encore entrée en premier dans une zone de conflit en préliminaire d’un engagement plus massif (action connue sous le vocable « d’ouverture de porte ») , mais aussi missions à caractère plus politico-militaire tels l’encadrement de forces militaires locales à la demande d’un pays ami, la négociation et les contacts avec diverses factions antagonistes lors d’une interposition ou bien encore missions centrées sur l’information dans le cadre d’une politique d’influence.
Ces diverses missions sont accomplies sous contrôle direct du général commandant le COS, ou bien sous contrôle délégué à un commandant d’opération sur un théâtre extérieur. Dans ce dernier cas, il faut désormais s’habituer à découvrir dans les états-majors une composante « opérations spéciales » à côté des trois composantes traditionnelles Terre – Air – Mer[15]. Les diverses combinaisons possibles offrent finalement au décideur politique un vaste choix d’options mais également l’assurance d’un contrôle strict des actions menées et d’un cadre juridique clair. De plus, la renommée d’efficacité des forces spéciales et l’aura qui les entoure sont elles mêmes facteurs de dissuasion sur une scène internationale ou des perturbateurs sont toujours tentés de profiter de la faiblesse de certains Etats amis qui savent alors pouvoir compter sur l’intervention de leur allié.
Quelques situations tirées d’opérations militaires récentes illustrent divers rôles spécifiques des opérations spéciales sur la scène géopolitique.
Bosnie – Herzégovine 1995-2007
Si à la suite des accords de Dayton les pays de la coalition ont confié la chasse des criminels de guerre inculpés par le tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) non aux forces classiques de l’IFOR puis de la SFOR[16] mais à leurs dispositifs d’opérations spéciales, c’est moins en raison de la dangerosité des fugitifs et de leurs gardes rapprochées qu’en raison de la sensibilité politique d’arrestation de leaders qui conservent encore dans une partie de la population un prestige intact et des risques d’embrasement qui en découlent dans certaines communautés. Ces missions nécessitent alors un contrôle politico-militaire extrêmement étroit de la part des autorités de l’OTAN comme des autorités nationales qui veillent à la stabilité politique fragile de la Bosnie-Herzégovine, ainsi qu’une liaison permanente avec les activités du TPIY que les opérations spéciales sont par nature aptes à garantir.
Kosovo 1999-2000
Au moment de la campagne aérienne menée par l’OTAN en 1999, des spécialistes du COS ont pu participer aux opérations d’information en direction de la population serbe afin d’expliquer la position de la communauté internationale. En juin de cette même année, après la signature des accords et alors que se met en place la KFOR[17], force internationale chargée de veiller à leur application, l’action discrète d’un petit groupe d’hommes des Forces Spéciales précédant de plusieurs heures à Mitrovica l’arrivée des chars Leclerc de la brigade française, obtient du chef local de l’UCK[18] qu’il diffère l’avancée de ses partisans et du commandement local serbe qu’il fasse retraite sans combat ni exactions d’arrière garde. Cette « ouverture de porte », sans recours à la violence mais dans une ambiance extrêmement tendue, est caractéristique des capacités intrinsèques aux opérations spéciales.
Plus tard, en août 2000, alors que la mine et l’usine de plomb de Zvecan, dans la partie serbe du Kosovo, rongés par la rouille et la négligence, sont devenus « une bombe à retardement », un Tchernobyl chimique potentiellement catastrophique pour les populations, les Serbes ne veulent pas entendre parler de fermeture. Il faut donc intervenir par surprise. Le 14 août, vers 3 heures du matin, l’opération Vulcain est déclenchée En moins de trois quarts d’heures, les Forces Spéciales investissent discrètement la place, inspectent chaque recoin et contrôlent les points les plus sensibles, dépôt d’hydrocarbures et transformateur à pyralène. Les gardes ensommeillés n’ont pas eu le temps de mettre la main à leur arme ou d’activer les pièges. Quand le jour se lève, le complexe industriel est sous le contrôle de l’administration de l’ONU [19] sans casse ni effusion de sang.
Voir aussi Comment se fait le recueil du renseignement ? Entretien avec Y. Lledo-Ferrer
Afghanistan 2003
Dans le cours de l’année 2003, un détachement important de Forces Spéciales françaises s’installe à Spin Boldack, dans le sud-est de l’Afghanistan. Mais alors que les forces françaises conventionnelles déployées depuis quelque temps à Kaboul le sont dans une logique d’efficacité militaire au sein d’une coalition internationale, la décision de mener une opération spéciale dans le sud-est à une portée politique plus fondamentale. Certes les aptitudes des forces spéciales font merveille dans une région où talibans, trafiquants et bandits font bon ménage, située de plus sur les routes d’infiltration en provenance du Pakistan. Mais surtout la présence de forces françaises à cet endroit, dans une relation bilatérale sous leadership américain, est un signal donné au plus fort de la tension entre la France et les Etats-Unis, signifiant que l’on peut être en désaccord frontal sur le sujet Irakien tout en continuant d’être des alliés fidèles pour la lutte contre le terrorisme entamée à la suite des attentats du 11 septembre 2001. Cette option politique avait été rendue techniquement possible sur le plan militaire grâce à la certification acquise par le COS en 2002 de la part de ses homologues américain et britannique qui avaient alors vérifié son niveau de compétence et d’intéropérabilité avec leurs propres procédures. [20]
République Démocratique du Congo, 2003
En juin 2003 dans l’Est du Congo à Bunia, les massacres inter ethniques poussent la communauté internationale à agir. Il faut rétablir la sécurité dans la ville, puis élargir le périmètre dans une région infestée de centaines de miliciens armés et d’enfant soldats, ce qu’on appelle pudiquement un environnement non permissif. Il s’agit dès lors de montrer sa force d’entrée, de prendre l’ascendant sur l’adversaire sans se laisser entraîner par les nombreuses provocations ni risquer de donner des prétextes à intervenir aux milices de la région, voire aux pays voisins. Surtout, il est impératif de réussir la mission sans dérapages, il en va de la crédibilité de l’Union européenne pour laquelle il s’agit de la première véritable opération militaire. C’est donc tout naturellement qu’une opération spéciale est organisée en phase préliminaire de l’opération ARTEMIS, faisant appel à des forces spéciales françaises, britanniques et suédoises pour investir la ville, redonner confiance aux populations, puis assurer l’arrivée en sûreté de contingents plus nombreux qui assureront la mission dans la durée.
VENANT en complément d’un dispositif conventionnel qui reste indispensable et s’appuyant sur des forces spécialisées disponibles immédiatement pour remplir dans l’urgence des missions souvent risquées, les opérations spéciales constituent un outil de liberté et d’action dans la main du chef d’état-major des armées et du Président de la République, chef des armées. Elles représentent un apport significatif dans la panoplie des options offertes au décideur quand les circonstances ne sont pas favorables à une intervention massive, coûteuse ou trop visible. Constituant un atout dont l’efficacité se mesure tout autant à l’aune de critères politiques que de critères strictement militaires, elles concourent au statut de puissance de la France.
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Notes
[1] Il s’agit de l’UFDR, Union des forces démocratiques pour le rassemblement.
[2] Groupe de Commandos Mixte Aéroporté
[3] JCS, Joint Chief of Staff.
[4] OSS, la guerre secrète en France 1942-1945, par Fabrizio Calvi, 1980, Hachette
[5] Il s’agissait notamment d’assurer la cohérence de la recherche concernant l’ordre de bataille allemand et la convergence des efforts des mouvements de résistance intérieure avec les opérations des armées alliées.
[6] Géopolitique : constantes et changements dans l’histoire, par Aymeric Chauprade, Paris, Ellipses, 2003.
[7] Concept des opérations spéciales du 4 décembre 2002
[8] United States Special Operations Command : commandement des opérations spéciales US.
[9] Voir à ce sujet Task Force Dagger, par Robin Moore, 2003, Jawbreaker, par Gary Bernstern, 2005, et First In par Gary C. Schroen, 2005 , éditions Random House, Inc, New-York .
[10] La Brigade des forces spéciales terre (BFST) composée du 1er régiment parachutiste d’infanterie de marine (1er RPIMa), 13°régiment de dragons parachutistes (13ème RDP) et Détachement ALAT d’Opérations Spéciales.
[11] Commandos Trepel, Jaubert, de Montfort, de Penfentenyo et commando d’action sous-marine Hubert.
[12] Commando parachutiste de l’air n°10 (CPA 10), Escadrille d’opérations spéciales, Escadron d’hélicoptères « Pyrénées »
[13] Le cargo Winner arraisonné le 13 juin 2002
[14] Mission RESCO (récupération et sauvetage de combat ) assurée de décembre 2006 jusqu’à août 2007 par le CPA20 et les hélicoptères « spéciaux » de l’Escadron d’Hélicoptères 725.
[15] La terminologie alliée parle de LCC (Land Component Command), ACC (Air Component Command) MCC (Maritime Component Command) et SOCC (Special Operations Component Command)
[16] IFOR : Implementation Force SFOR : Stabilisation Force
[17] Kosovo Force
[18] Milice Kosovare
[19] Récit dans l’Express du 9/11/2000.
[20] Certification acquise lors de l’exercice de l’OTAN Strong Resolve.
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