Podcast et synthèse rédigée

Planisphère. Le renseignement peut-il être démocratique ? Avec S-Y Laurent

Par Emilie BOURGOIN, Pierre VERLUISE, Sébastien-Yves LAURENT, le 13 mars 2025  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Sébastien-Yves Laurent, lauréat du Grand Prix de l’Académie du renseignement 2024 pour son livre : « Etat secret, Etat clandestin : essai sur la transparence démocratique », édition Gallimard. Professeur à l’Université de Bordeaux (UB, Faculté de droit et de science politique), vice-président de l’UB et enseignant à Sciences Po Paris.
Interview organisée et conduite par Pierre Verluise, docteur en Géopolitique, fondateur du Diploweb, il produit Planisphère sur Radio Notre Dame et RCF depuis septembre 2024. Cette émission a été diffusée en direct le 11 mars 2025.
Synthèse par Emilie Bourgoin, étudiante en quatrième année au BBA de l’EDHEC et alternante au sein de la cellule sûreté d’un grand groupe. Elle est en charge du suivi hebdomadaire de l’actualité des livres, revues et conférences géopolitiques comme de la rédaction des synthèses des épisodes de l’émission Planisphère pour Diploweb.

Le renseignement est un moyen géopolitique, mais peut-il être démocratique ? Que peut nous apprendre une recherche comparative sur le temps long consacrée à trois pays démocratiques, la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis ? Pour le savoir Planisphère a invité Sébastien-Yves Laurent, lauréat du Grand Prix de l’Académie du renseignement 2024 pour son livre : « État secret, État clandestin : essai sur la transparence démocratique », édition Gallimard.

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Synthèse de cette émission, Planisphère, Le renseignement peut-il être démocratique ? Avec S-Y. Laurent. Rédigée par Emilie Bourgoin pour Diploweb.com. Relue et validée par S-Y Laurent.

LE RENSEIGNEMENT joue un rôle essentiel dans la stratégie des États, mais il pose une question centrale pour les démocraties : comment concilier la nécessité du secret avec les principes de transparence et de publicité ? Dans son ouvrage « État secret, État clandestin. Essai sur la transparence démocratique », récompensé par le Grand Prix de l’Académie du Renseignement 2024, Sébastien-Yves Laurent analyse cette tension à travers une étude comparative de trois grandes démocraties : la France, le Royaume-Uni et les États-Unis.

Comprendre le renseignement

Le renseignement correspond à la collecte, l’analyse et la transformation de l’information pour orienter les décisions des autorités. Il peut concerner la diplomatie, la sécurité intérieure ou encore la stratégie militaire. Pourtant, il est souvent perçu de manière négative, associé à des pratiques opaques voire sales. Sébastien-Yves Laurent insiste sur le fait qu’il ne faut pas moraliser cette activité : elle est.

Une contradiction entre renseignement et démocratie ?

A première vue, renseignement et démocratie sont difficilement compatibles. La démocratie repose sur la publicité et la transparence, alors que le renseignement exige la discrétion. Toutefois, cette contradiction n’est pas insoluble. Au fil des siècles, les démocraties ont progressivement encadré le renseignement, cherchant à le rendre compatible avec l’État de droit tout en maintenant un certain niveau de secret indispensable à son efficacité.

L’évolution du renseignement dans les démocraties

Dans son ouvrage, l’auteur fait une distinction entre l’État secret et l’État clandestin. L’État secret désigne un renseignement régulièrement encadré par des lois et soumis à des contrôles institutionnels. A l’inverse, l’État clandestin correspond à des pratiques qui échappent à tout encadrement et qui ne sont pas officiellement reconnues.

Depuis la loi de juillet 2015, adoptée après les attentats contre Charlie Hebdo, la France a tenté de rattraper son retard en matière de contrôle des services de renseignement. Cette loi leur a donné un cadre juridique clair et les a soumis à des instances comme la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), garantissant un minimum de supervision.

Planisphère. Le renseignement peut-il être démocratique ? Avec S-Y Laurent
Sébastien-Yves Laurent
Sébastien-Yves Laurent est lauréat du Grand Prix de l’Académie du renseignement 2024 pour son livre : « Etat secret, Etat clandestin : essai sur la transparence démocratique », édition Gallimard. Crédit photographique : Pierre Verluise
Verluise/Diploweb.com

Comparaison entre la France, le Royaume-Uni et les États-Unis

Les différences entre les pays sont notables. Aux États-Unis, les services de renseignement sont soumis à un contrôle parlementaire et judiciaire strict, avec des obligations de publicité sur certaines activités. Le Royaume-Uni, au contraire, accepte une dérogation bien plus large au principe de transparence. Historiquement, les services de renseignement britanniques ont fonctionné dans un cadre très secret, avec un contrôle limité. La France se situe entre ces deux modèles, avec un effort récent pour renforcer la surveillance des services, mais encore des lacunes, notamment sur la déclassification des documents classés secrets.


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Un enjeu de coopération internationale

Les alliances en matière de renseignement jouent un rôle crucial dans la géopolitique actuelle. Par exemple, la guerre russe en Ukraine a montré l’importance du partage d’informations entre les États-Unis et l’Ukraine, mais aussi avec les pays européens. Si les services américains arrêtaient de partager certaines informations stratégiques, cela aurait des conséquences majeures sur le conflit.

A l’échelle européenne, il existe un service de renseignement appelé EU Intelligence Center, mais il reste limité. Il ne collecte pas directement d’informations et dépend des contributions volontaires des pays membres, ce qui réduit son efficacité.

Ressources recommandées

Pour aller plus loin sur cette question, l’ouvrage de Sébastien-Yves Laurent « État secret, État clandestin. Essai sur la transparence démocratique » (éd. Gallimard) constitue une ressource de référence. Il a été récompensé par le Grand Prix de l’Académie du Renseignement 2024, une distinction qui valorise les recherches approfondies sur ces thématiques.

D’autres sources pertinentes incluent les rapports de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) ainsi que les publications du Conseil d’État et des institutions parlementaires qui supervisent les services de renseignement. Ces documents permettent de mieux comprendre l’évolution et les défis de l’encadrement du renseignement dans les démocraties modernes.

Copyright pour la synthèse Mars 2025-Bourgoin/Diploweb.com


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Plus :

. Sébastien-Yves Laurent, « Etat secret, Etat clandestin : essai sur la transparence démocratique », édition Gallimard. Lire un extrait

Nous semblons vivre à une époque où tout finit par se savoir depuis qu’en 2013 un employé de l’agence de renseignement technique des États-Unis, Edward Snowden, révéla un authentique « secret d’État » : la collecte par les États-Unis de dizaines de millions de communications échangées dans le monde. Depuis lors en tous domaines des documents secrets ont été l’objet de fuites, laissant croire que la notion de secret d’État n’existe plus. L’État aujourd’hui serait-il désormais un État transparent, dépouillé de ses mystères ?

Sébastien-Yves Laurent, dans cet ouvrage profondément original, déjoue les leurres. Dès ses commencements, l’État eut des raisons que la raison commune ignorait : la Raison d’État autorisait des agissements diplomatiques, policiers ou militaires dont le secret était la garantie du succès.

Vint le libéralisme politique au XVIIIᵉ siècle, porteur des droits de l’individu et des ferments de la démocratie grâce à la publicité, ici étudiée dans trois pays : Angleterre, États-Unis et France. Le secret fut néanmoins reconnu comme nécessaire au fonctionnement de l’État, mais institutionnalisé en services, budgets, voire commissions parlementaires d’enquête. L’État secret, légalisé, était né.

Vint au tournant de notre siècle le néo-libéralisme qui, doutant de l’efficacité du public face au privé, imposa l’idéologie de la transparence de l’action publique. Alors, le secret démocratique fut mis en cause et se créa dans l’ombre un État clandestin, acteur de liquidations physiques, déstabilisations dans l’univers numérique, emprisonnements extra-légaux.

La démocratie en est fragilisée durablement. C’est pourtant notre monde.


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[1Cette émission a été enregistrée le : 25 février 2025.

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| Dernière mise à jour le jeudi 13 mars 2025 |