L’étude des Constitutions montre que leur texte peut engendrer des répulsions ou des attractions migratoires. Même si leur contenu juridique n’est qu’un facteur s’exerçant sur les migrations, les Constitutions exercent un double effet migratoire. Gérard-François Dumont signe ici une recherche innovante et un texte de référence.
SI l’on exclut les exodes où la volonté de survivre pousse à fuir son domicile, la décision d’émigrer est le plus souvent plurifactorielle, combinant des facteurs politiques [1], économiques et démographiques. S’il serait donc excessif de penser que des textes constitutionnels puissent engendrer à eux seuls des migrations internationales, il serait tout aussi erroné de considérer que ces textes émettent des signaux neutres quand vientla décision de migrer ou de ne pas migrer. En réalité, en raison de ce que signifie leur contenu dans le pays de départ comme dans le pays d’arrivée, ils exercent un rôle dans l’émigration et dans la destination retenue. Ils influencent donc les deux composantes générales de la migration : les facteurs de répulsion qui s’exercent dans le pays de départ et les facteurs d’attraction du pays de destination. Il convient donc d’analyser d’abord les effets que les Constitutions peuvent exercer sur la répulsion migratoire, avant d’étudier leurs conséquences en matière d’attraction migratoire.
Selon leur contenu, les Constitutions peuvent avoir des effets répulsifs ou anti-répulsifs. Enfin, certains articles constitutionnels peuvent ne pas freiner et, donc, favoriser l’émigration des nationaux dans la mesure où ils préservent leurs droits quel que soit le pays où ils résident.
Des Constitutions facteurs de répulsion
Dans certains pays, les textes constitutionnels privilégient la place d’une partie de la population autochtone, généralement de la partie relativement la plus nombreuse ; implicitement, les personnes appartenant aux autres groupes humains [2] sont alors considérées comme des habitants de rang inférieur. Ceux-ci, constatant que leurs droits sont moindres, peuvent alors être poussés à émigrer. Autrement dit, la Constitution, du fait de son caractère discriminant, supprimant un éventuel frein à l’émigration, s’avère un facteur de répulsion ; cela engendre ce que je propose d’appeler une « répulsion constitutionnelle ». Une typologie permet d’en distinguer trois types, plus un quatrième tenant non à la Constitution proprement dite mais à des décisions constitutionnelles.
Le refus explicite de considérer une région ethniquement et linguistiquement différente
Depuis son indépendance en 1962, les textes fondateurs de l’Algérie – Charte d’Alger de 1965, Charte Nationale et Constitution de 1976, Constitution de Chadli en 1989, Constitution de Liamine Zeroual de 1996 – ignorent l’existence du fait linguistique amazighe en Algérie, pays où la population de langue amazighe est pourtant majoritaire dans certaines régions comme la Kabylie. En revanche, ils affirment tous la primauté de la langue arabe sur toute autre langue usitée dans le pays. Ainsi, la Constitution algérienne de 1996 comprend un titre premier intitulé « Des Principes Généraux régissant la Société Algérienne ». Dans son chapitre I, intitulé « De l’Algérie », l’article 1er précise : « L’Algérie est une République Démocratique et Populaire. Elle est une et indivisible ». Puis suivent deux articles très courts : l’article 2 indique que « L’Islam est la religion de l’État », et l’article 3 : « L’arabe est la langue nationale et officielle ». Une telle formulation affirme la volonté de diffuser la langue de la majorité de la population. Mais elle implique aussi une méconnaissance des autres langues et sans doute une volonté de les sous-estimer, voire de les éradiquer. D’ailleurs, en Algérie, l’arabisation, c’est-à-dire l’imposition de l’arabe classique dans les médias, les conférences et les correspondances avec l’étranger, a tourné parfois à la chasse au français, au berbère ou à l’arabe algérien.
Ainsi, depuis 1962, les Kabyles, qui ont pourtant été des éléments moteurs dans la guerre pour l’indépendance de l’Algérie, se trouvent-ils dominés par une volonté arabe de nier leur existence. Cela se constate dans de nombreux discours, dont ceux de chefs d’État algériens affirmant par exemple : « Tous les Algériens sont des arabes », dans nombre de décisions politiques et d’abord dans la Constitution. Sa version de 1996 comprend en outre un « chapitre II » intitulé « Du Peuple », dont voici l’article 8 : « Le peuple se donne des institutions ayant pour finalité : la sauvegarde et la consolidation de l’indépendance nationale, la sauvegarde et la consolidation de l’identité et de l’unité nationales. »
Dans sa façon de formuler « le peuple » au singulier, de souligner « l’identité et l’unité nationale », la Constitution veut insister sur l’inexistence de différences, l’absence d’un groupe humain minoritaire et de spécificités régionales, puisque la mise en évidence de celles-ci est interdite par l’article 9 suivant : « Les institutions s’interdisent : les pratiques féodales, régionalistes et népotiques, les pratiques contraires à la morale islamique et aux valeurs de la Révolution de Novembre. »
Autrement dit, la Constitution impose à l’Algérie une gouvernance jacobine, niant par exemple la différence kabyle. Cette négation s’est trouvée implicitement exprimée à de nombreuses reprises, et même explicitement. Par exemple, le 16 novembre 2005, le ministre de l’éducation Boubekeur Benbouzid déclare : « Il est fait obligation aux écoles privées d’utiliser la langue arabe comme unique instrument linguistique pour l’enseignement des programmes scolaires ». Il n’est donc plus question ni de la langue française, ni de la langue tamazight des Berbères de Kabylie [3].
Malgré le souci des Berbères d’être des Algériens héritiers de leur culture propre, les textes constitutionnels de l’Algérie, depuis l’indépendance, ont donc tendance à ignorer ce groupe humain minoritaire, pourtant majoritaire dans certaines régions d’Algérie comme la Kabylie, ce qui peut encourager des membres de ce groupe à émigrer [4]. Toutefois, dans ce pays, la répulsion constitutionnelle pourrait se réduire avec le projet de révision constitutionnelle de l’Algérie, déjà annoncé en 2011, puis relancé en décembre 2015. L’article 3 deviendrait : « L’arabe est la langue nationale et officielle. L’arabe demeure la langue officielle de l’État. Il est créé auprès du Président de la république un Haut Conseil de la langue arabe. Le Haut Conseil est chargé notamment d’œuvrer à l’épanouissement de la langue arabe et à la généralisation de son utilisation dans les domaines scientifiques et technologiques, ainsi qu’à l’encouragement de la traduction vers l’arabe à cette fin »
Et un article 3bis serait ajouté : « Le tamazight est également langue nationale et officielle. L’État œuvre à sa promotion et à son développement dans toutes les variétés linguistiques en usage sur le territoire national ». Mais certains craignent que ce nouveau projet ne soit qu’un effet d’annonce sans consécration constitutionnelle finale ou, dans le cas contraire, sans véritables moyens donnés à la langue tamazight.
Selon un deuxième type, la répulsion constitutionnelle agit moins sur des territoires spécifiques que sur certains habitants.
Une Constitution qui fait de certains habitants des citoyens inférieurs
En Égypte, la Constitution de 2014 de la « République arabe d’Égypte » comporte quatre facteurs répulsifs. D’abord, dans l’adjectif « arabe » de son intitulé, puisque nombre d’Égyptiens n’ont pas pour ascendants ou pour seuls ascendants des arabes.
Ensuite, examinons l’article 2 « L’islam est la religion de l’État, l’arabe sa langue officielle et les principes de la sharia islamique constituent la source principale de la législation. » La religion copte dont se réclament des millions d’Égyptiens n’est donc pas citée comme source possible, ce qui permet par exemple de justifier l’absence de liberté religieuse.
En troisième lieu, les cheiks de la mosquée Al-Azhar (référence suprême de l’islam sunnite) énoncent les fatwas sur le côté licite, du point de vue religieux ou non, de toute production intellectuelle, culturelle et artistique, qu’elle provienne d’un musulman ou d’un copte. Cela est validé par l’article 7 : « Al-Azhar est un organisme islamique scientifique indépendant. Il lui revient exclusivement de gérer ses propres affaires ; il constitue la référence principale pour ce qui concerne les sciences religieuses et les affaires islamiques ». Ainsi Al-Azhar a donc autorité sur tout ce qui est religieux, même non musulman.
Quatrième élément : la seule fois où la Constitution utilise le mot « copte », elle présente cette religion, bien qu’existant toujours aujourd’hui, presque comme appartenant à l’histoire dans l’article 50 : « Le patrimoine de l’Égypte en tant que civilisation et culture, matériel et immatériel, dans toute sa diversité et ses grandes étapes, soit l’Égypte ancienne, copte et islamique est une richesse nationale et humaine, dont l’État assure la préservation et la protection. »
Dans ce contexte, la Constitution de l’Égypte fait des coptes des citoyens de seconde zone, puisqu’elle affirme que l’islam est la religion de l’État et la charia la source principale de la législation. Parmi les nombreuses déclarations niant l’existence des coptes, citons Anouar El Sadate déclarant à la télévision : « Je suis le président musulman d’un État musulman ». Il n’est donc pas étonnant que se soit déployée une émigration copte d’autant que, en outre, les coptes font l’objet de facto de diverses discriminations. Un copte ne sera jamais commandant en chef de l’armée, parce que son patriotisme est mis en doute, ni ministre de l’intérieur, parce qu’il est suspect de semer la discorde, ni recteur d’une faculté des Lettres, parce qu’il n’a pas appris le Coran.
Autre exemple de répulsion constitutionnelle : le dimanche 20 septembre 2015 [5], le Népal, petit pays himalayen situé entre l’Inde et la Chine, devient une république fédérale, après la promulgation d’une nouvelle Constitution qui proclame le sécularisme. Le président Ram Baran Yadav la signe en déclarant qu’elle « ouvre la voie au développement du pays ». Or, cette nouvelle Constitution précise que les enfants nés d’une mère népalaise ne pourront pas hériter de sa nationalité si leur père est étranger. Cela revient à les pousser à émigrer [6].
Un troisième type de répulsion constitutionnelle relève de Constitutions apparemment non répulsives mais incluant une rhétorique qui les conduit en définitive à l’être.
Une Constitution dont l’apparence non répulsive est contredite par des nuances et des pratiques
L’Irak est un exemple de ce type. Déjà, en 1970, bien que se disant république « laïque », ce pays porte atteinte à sa diversité en inscrivant, dans un article 4 de sa Constitution, l’islam comme religion d’État. Et les chrétiens, très minoritaires, restent des citoyens aux droits limités, soumis à des vexations. De façon générale, les cultes chrétiens ne bénéficient pas des aides allouées au culte islamique tandis que le droit irakien, puisant nombre de ses dispositions aux sources de la charia, marque nettement des différences religieuses. Ainsi, un chrétien ne peut épouser une musulmane, et une chrétienne, même si elle peut se marier avec un musulman, doit élever ses enfants dans la seule religion de Mahomet. Le mariage religieux musulman est valide pour l’état civil alors que le mariage chrétien impose un passage devant l’autorité administrative. La donation d’un chrétien à un musulman est licite, non l’inverse [7]. À partir de 1991, le régime baasiste de Saddam Hussein recule encore davantage sur la laïcité affichée, faisant de nouvelles concessions aux autorités de l’islam : une loi interdit ainsi les prénoms chrétiens [8].
Après le renversement de Saddam Hussein en 2003 par une coalition occidentale, l’Irak se dote, le 28 décembre 2005, d’une Constitution [9] qui proclame, dans l’alinéa 1 de l’article 2, que « l’islam est la religion officielle de l’État et une des sources des fondements de la législation ». La seconde partie de cet alinéa est, a priori, essentielle car, pour simplifier, deux formules se distinguent dans les pays à majorité musulmane : ceux où l’islam est l’une des sources principales de la législation (comme l’Égypte évoquée ci-dessus) et celles où c’est la source de la législation [10].
Mais les deux alinéas suivants interrogent. En effet, l’alinéa 2 précise qu’« aucune loi ne peut être promulguée qui contredirait les dispositions établies par l’islam ». Et, parallèlement, l’alinéa 3 indique « qu’aucune loi ne peut être promulguée qui contredirait les principes de la démocratie ». Puis la Constitution reconnaît le caractère pluri-religieux du pays dans le dernier alinéa de l’article 2 : « Cette Constitution garantit l’identité islamique de la majorité du peuple irakien et garantit les pleins droits de liberté religieuse et de pratique de toutes les personnes, telles que chrétiens, yézidis, sabéens ou mandéens ».
Au plan ethnique, la Constitution de 2005 reconnaît aussi la pluralité dans un article 3 qui insiste aussi, toutefois, sur des éléments d’unité : « L’Irak est un pays comportant plusieurs ethnies, religions et sectes. Il est fondateur et membre actif de la Ligue des États arabes et est engagé par sa charte, et il fait partie du monde islamique ». Mais le caractère pluriethnique est davantage souligné via les questions linguistiques. Certes, « la langue arabe et la langue kurde sont les deux langues officielles de l’Irak ». Cet article 4 semble donc limitatif mais il se prolonge ainsi : « On garantit le droit des Irakiens à éduquer leurs enfants dans leur langue maternelle, comme le turkmène, le syriaque, l’arménien dans les établissements publics d’enseignements conformément aux directives éducatives, ou dans une autre langue dans des établissements privés ». Allant plus loin dans le souci de reconnaissance de la diversité, le point quatrième de l’article 4 est ainsi rédigé : « La langue turkmène et le syriaque sont deux autres langues officielles dans les unités administratives dans lesquelles la majorité de la population parle ces langues. »
Toutefois, les principes de la Constitution reconnaissant la diversité du peuplement de l’Irak doivent être relativisés tant par des réalités réglementaires que par les multiples événements, souvent violents, qui nuisent à une diversité vécue, même si cette dernière est moins mal respectée dans les provinces kurdes de l’Irak.
Par exemple, comme l’appartenance religieuse fait partie de l’état civil et apparaît publiquement sur les papiers d’identité de tous les citoyens, les chrétiens ou les yézidis sont facilement identifiables, ce qui les rend d’autant plus victimes d’injustices et d’inégalités de traitement. Les enfants sont considérés comme ayant automatiquement la même religion que leur père. Mais si le père se convertit de l’islam au christianisme, ce qui est pourtant quasiment impossible, l’enfant est toujours officiellement enregistré en tant que musulman. Aussi, par exemple en 2007, l’archevêque de Bagdad pour les Latins, auditionné par le Sénat français, déclare : « Le statut de dhimmi (instauré au VIIe siècle) continue à régir la société irakienne » [11].
Et, en 2013, Mgr. Bashar Warda, archevêque chaldéen d’Erbil, dans le Kurdistan irakien, déclare : « La liberté religieuse est garantie par la Constitution, mais la liberté de conscience n’est pas garantie... La loi islamique tient compte des autres religions, mais le droit de changer de religion n’existe pas, sauf quand il s’agit de se convertir à l’islam. De plus, les chrétiens continuent de souffrir parce qu’ils sont chrétiens, même si la situation au Kurdistan est nettement meilleure qu’ailleurs dans le pays » [12].
Dans ce contexte, l’Irak connaît depuis des décennies l’émigration de ses chrétiens, à un rythme certes différent selon les années, et voit la présence de ce groupe humain minoritaire, pourtant autochtone et apostolique, se tarir [13].
Outre ces trois types de répulsion constitutionnelle, la dernière peut résulter de décisions des autorités chargées de juger la constitutionnalité des lois.
Des décisions constitutionnelles facteurs de répulsion et… d’attirance
En 1976, dans la province à majorité francophone du Canada, le Parti Québécois gagne les élections législatives. Un an plus tard, le parlement vote la loi 101 qui donne au français le statut de seule langue officielle du Québec. Cette loi 101 édicte une Charte de la langue française. En conséquence, toutes les inscriptions publiques (affichage public et publicité commerciale) doivent être rédigées en français, qui devient la langue de l’affichage commercial ; toutefois, l’écriture de l’anglais n’est pas interdite, mais elle doit être deux fois plus petite que la version française. Tous les produits vendus au Québec doivent au moins proposer des textes en version française. Les panneaux stop deviennent « arrêt », les hot-dogs « chiens chauds », etc. Le français devient aussi une langue du travail, avec des programmes de francisation pour toutes les entreprises employant cinquante personnes ou plus, ainsi que la langue de la législation et de la justice, puisque seule la version française des lois est officielle. La partie la plus ambitieuse de la loi 101 concerne la langue d’enseignement à l’école, avec une législation impliquant l’accès à l’école française pour les enfants d’immigrants : les habitants du Québec n’ont le droit d’envoyer leurs enfants à l’école anglaise que si l’un des parents a suivi lui-même sa scolarité dans une école anglaise du Québec. Pour tous les autres, c’est l’école française obligatoire, avec un enseignement du catéchisme qui n’est plus obligatoire.
Différents procès se sont déroulés pour tenter de faire reconnaître le caractère inconstitutionnel de la loi 101 au Canada. Les juges suprêmes ont apporté des corrections sur tel ou tel aspect, mais reconnu la validité de la loi 101 sur son point essentiel, la restriction de l’accès à l’école anglaise aux seuls enfants dont l’un des parents a reçu son enseignement primaire en anglais au Québec. Les juges suprêmes ont donc jugé constitutionnel le choix du français comme langue d’enseignement obligatoire pour les immigrants.
Cette loi 101 a concouru à deux effets migratoires inverses. D’une part, des immigrants potentiels pratiquant le français ont appris que la connaissance de l’anglais n’était plus nécessaire au Québec, dont les entreprises se trouvaient désormais obligées d’utiliser le français, ce qui n’était pas le cas auparavant. La loi 101 a ainsi rendu le Québec plus attirant pour des ressortissants de pays du Sud à importante population francophone, comme les Maghrébins [14]. D’autre part, soumis à un certain effet répulsif, des Québécois anglophones ont émigré vers des provinces anglophones du Canada, comme l’Ontario.
À rebours des Constitutions ou de décisions constitutionnelles à dominante répulsive, d’autres sont anti-répulsives.
Des Constitutions anti-répulsives en raison des droits reconnus aux minorités
Cinq types de Constitutions anti-répulsives peuvent être distingués. Le premier tient à la reconnaissance de langues minoritaires.
Reconnaissance de langues minoritaires
La Constitution suisse du 18 avril 1999 [15], par exemple, implique l’absence de traitement discriminatoire en matière linguistique et, donc, la coexistence de quatre langues nationales, précisée dans l’article 4 de cette Constitution fédérale de la Confédération suisse : « Les langues nationales sont l’allemand, le français, l’italien et le romanche ».
Dans d’autres pays, comme l’Italie ou l’Espagne, une langue est officielle pour le pays, mais d’autres langues sont officielles à l’échelon régional. En Italie, s’appuyant sur la Constitution, une loi du 15 décembre 1999 concernant les « Règles en matière de protection des minorités linguistiques historiques » protège des langues minoritaires selon la rédaction suivante : « Article 1 : 1) La langue officielle de la République est l’italien. 2) La République, qui valorise le patrimoine linguistique et culturel de la langue italienne, fait la promotion et la valorisation des langues et des cultures protégées par la présente loi. »
Puis l’article 2 précise : « En vertu de l’article 6 de la Constitution et en harmonie avec les principes généraux établis par les organisations européennes et internationales, la République protège la langue et la culture des populations albanaise, catalane, germanique, grecque, slovène et croate, et de celles qui parlent le français, le franco-provençal, le frioulan, le ladin, l’occitan et le sarde. »
Au Royaume-Uni, la langue cornique est légalement reconnue. À Maurice, la Constitution du 12 mars 1992 protège l’emploi de la langue française au sein de l’organe législatif dans un article 49 qui précise : « La langue officielle de l’Assemblée est l’anglais, mais tout membre peut s’adresser à la présidence en français. » Dans ce pays, comme les minorités linguistiques ne subissent pas de vexations du fait de leur langue vernaculaire, cela réduit leur éventuelle envie d’émigrer. Un autre facteur anti-répulsif pour des groupes humains minoritaires peut tenir au fait qu’ils bénéficient d’une reconnaissance politique.
Représentation des minorités au Parlement
En Slovénie, par exemple, la Constitution de la république du 23 décembre 1991 contient l’Article 80 suivant : « Composition et élections : l’Assemblée nationale est composée de députés des citoyens slovènes et compte quatre-vingt-dix députés. Les députés sont élus au suffrage secret, direct, égal et universel. Un député pour chaque communauté nationale italienne et hongroise est toujours élu à l’Assemblée nationale ». La Slovénie dispose donc d’une reconnaissance institutionnelle de deux groupes humains minoritaires en leur accordant au moins un député chacun.
Autre exemple : la Croatie. D’une part, ce pays définit, dans les « fondements » de sa Constitution du 25 avril 2001, sa diversité humaine en précisant : « La République de Croatie se constitue comme État national du peuple croate et l’État des personnes appartenant aux minorités nationales autochtones : des Serbes, des Tchèques, des Slovaques, des Italiens, des Hongrois, des Juifs, des Allemands, des Autrichiens, des Ukrainiens, des Russes et autres, qui sont ses citoyens, à qui l’on garantit l’égalité en droits avec les citoyens appartenant à la nation croate, ainsi que la réalisation des droits nationaux conformément aux normes démocratiques de l’ONU et des pays du monde libre ». D’autre part, sa « loi constitutionnelle des droits des minorités nationales » du 13 décembre 2002 définit la « minorité nationale » comme : « un groupe de citoyens croates dont les personnes qui y appartiennent sont traditionnellement installées sur le territoire de la République de Croatie et dont les personnes appartenant à cette minorité nationale ont des caractéristiques ethniques, linguistiques, culturelles et/ou religieuse différentes des autres citoyens et sont menées par le désir de préserver ces caractéristiques » (article 5). Plus loin, l’article 19 de la même loi constitutionnelle organise une représentation spécifique des groupes humains minoritaires : « La République de Croatie garantit aux personnes appartenant aux minorités nationales les droits d’une représentation dans le Parlement croate. Les personnes appartenant aux minorités nationales élisent au moins cinq, tout au plus huit, représentants dans les unités électorales particulières, conformément à la loi qui organise l’élection des représentants au Parlement, et pour lesquels les droits acquis ne peuvent être diminués. »
En Roumanie, les minorités sont également protégées par la Constitution, avec une présence garantie au Parlement. L’article 6 de la Constitution, intitulé « Le droit à l’identité », précise « (1) L’État reconnaît et garantit aux personnes appartenant aux minorités nationales le droit de conserver, de développer et d’exprimer leur identité ethnique, culturelle, linguistique et religieuse. (2) Les mesures de protection prises par l’État pour la conservation, le développement et l’expression de l’identité des personnes appartenant aux minorités nationales, doivent être conformes aux principes d’égalité et de non-discrimination par rapport aux autres citoyens roumains ».
De son côté, l’article 59, intitulé « L’élection des chambres » comporte un alinéa (2) « Les organisations des citoyens appartenant aux minorités nationales, qui ne réunissent pas aux élections le nombre de voix nécessaire pour être représentées au Parlement, ont droit chacune à un siège de député, dans les conditions fixées par la loi électorale. Les citoyens d’une minorité nationale ne peuvent être représentés que par une seule organisation » [16].
Cette protection des minorités est également linguistique, comme le précise l’article 127 de la Constitution de la Roumanie intitulé « Le droit à un interprète » : « (1) La procédure judiciaire se déroule en langue roumaine. (2) Les citoyens appartenant aux minorités nationales ainsi que les personnes qui ne comprennent pas ou ne parlent pas la langue roumaine ont le droit de prendre connaissance de tous les actes et des documents du dossier, de parler lors de l’instance et de déposer des conclusions, par l’intermédiaire d’un interprète ; dans les affaires pénales, ce droit est assuré gratuitement ». En Roumanie, ces protections concernent notamment les minorités allemande, environ 35 000 personnes, turque (32 000), serbe ou russe.
Autre exemple : l’Iran. Le dernier alinéa du 64e article de la Constitution de la République islamique d’Iran précise : « Les zoroastriens et les juifs élisent chacun un député et les chrétiens assyriens et chaldéens élisent ensemble un député et les chrétiens arméniens du Sud et du Nord élisent chacun un député. Les limites des circonscriptions électorales et le nombre de leurs députés seront déterminés par la loi. »
Dans les cas cités en exemple ci-dessus, la reconnaissance constitutionnelle de groupes humains minoritaires a un effet anti-répulsif pour les membres de ces groupes. Parce toute sa population appartient à des groupes minoritaires, un autre pays, le Liban, présente un troisième type de Constitution anti-répulsive.
Droits pour chaque minorité à sa propre législation
Au Liban, l’indépendance se concrétise, le 7 octobre 1943, par un pacte national et une Constitution dont l’article 7 établit une répartition, fondée sur le recensement de la population de 1932, des postes dirigeants entre les diverses communautés composant la population du pays [17] : le Président de la république doit être maronite, le président du Conseil sunnite, et celui de la Chambre, chiite. Quant à l’article 9 de la Constitution libanaise, il reconnaît aux différentes communautés religieuses une liberté totale de culte et leur accorde le droit de régir leur statut personnel par des lois particulières. Le Liban est en effet un pays où les règles propres à chaque groupe humain sont si différentes qu’il y apparaît extrêmement difficile, par exemple, de fonder un droit civil commun à tous. Le consensus consiste donc à accepter que chaque groupe humain applique à ceux qui en sont membres les règles propres au groupe. Cet article 9 de la Constitution est ainsi rédigé : « La liberté de conscience est absolue. En rendant hommage au Très-Haut, l’État respecte toutes les confessions et en garantit et protège le libre exercice, à condition qu’il ne soit pas porté atteinte à l’ordre public. Il garantit également aux populations, à quelque rite qu’elles appartiennent, le respect de leur statut personnel et de leurs intérêts religieux ». Notons qu’il n’y a guère de mariages mixtes entre ces communautés, donc peu de relations familiales intercommunautaires. Les communautés se cantonnent souvent par village, ou par quartier dans les grandes villes.
Le quatrième type de Constitution anti-répulsive accorde un statut d’autonomie à l’un des territoires du pays, reconnaissant ainsi la spécificité de sa population.
Droit à un territoire autonome
Par exemple, en Moldavie, une partie de la population est formée de Gagaouzes, descendants de mercenaires de l’empire byzantin, qui n’ont pas été islamisés mais sont restés chrétiens. Selon la Constitution, ils bénéficient d’un territoire autonome et d’une représentation permanente au Parlement.
En effet, l’article 110 de la Constitution, intitulé « l’organisation administrative territoriale », précise : « 1. Le territoire de la République de Moldavie est organisé, sous son aspect administratif, en départements, villes et villages et un territoire autonome de Gagaouzie ».
Plus loin, l’intitulé de la Constitution « territoire autonome de Gagaouzie » précise : « 1. La Gagaouzie constitue un territoire autonome établi par un statut spécial et représentant une forme d’auto-détermination du peuple gagaouze, qui est partie intégrante et inaliénable de la République de Moldavie et règle de manière indépendante, dans les limites de ses compétences, et conformément aux dispositions de la Constitution de la République de Moldavie, les questions politiques, économiques et culturelles, dans l’intérêt de toute la société.
2. Dans le territoire autonome de Gagaouzie, tous les droits et libertés énoncés par la Constitution et la législation de la République de Moldavie sont garantis.
3. Le territoire autonome de Gagaouzie est dirigé par des organes représentatifs et exécutifs conformément à la loi.
4. Le sol, le sous-sol, les eaux, la flore, la faune, ainsi que les autres ressources naturelles du territoire autonome de Gagaouzie appartiennent au peuple de la République de Moldavie et constituent simultanément les bases de l’économie de la Gagaouzie.
5. Le budget du territoire autonome de Gagaouzie est établi conformément aux dispositions de la loi qui règle le statut spécial de la Gagaouzie.
6. Le contrôle du respect de la législation de la République de Moldavie par le territoire autonome de Gagaouzie est assuré par le Gouvernement, conformément à la loi.
7. La loi organique qui règle le statut spécial du territoire autonome de Gagaouzie peut être modifiée par un vote à la majorité des trois cinquièmes de tous les membres élus du Parlement [18] ».
Outre la Moldavie, l’Italie relève aussi de ce quatrième type, plus particulièrement avec la région Trentin-Haut-Adige, au nord-est du pays, dotée d’un « statut spécial » depuis la Constitution de 1946, mais élargi depuis. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, l’intention des puissances victorieuses était de dépecer l’empire austro-hongrois. Le 28 juin 1919, le traité de Versailles met un terme à cet empire, puis le traité de Saint-Germain-en-Laye (1919) rattache à l’Italie le Sud du Tyrol et la province de Trente [19], un ensemble largement germanophone [20], tout particulièrement dans la partie Tyrol du Sud. En effet, selon le recensement de 1910, le dernier précédant le rattachement de 1919, ce Tyrol du Sud que les Italiens décident d’appeler Haut-Adige est germanophone à presque 90 % de la population : sur 251 451 habitants recensés, 223 913 se déclarent appartenir au groupe linguistique allemand, 9 429 au groupe ladin (3,8 %) et seulement 7 339 (2,9 %) sont italophones. À la suite des déplacements de population consécutifs à la fin de la Première Guerre mondiale, la répartition évolue en défaveur des germanophones, mais ceux-ci composent toujours la grande majorité de la population. Le recensement de 1921, sur 254 735 habitants, indique pour le Haut-Adige (l’appellation « Sud-Tyrol » est alors interdite) 193 271 germanophones, soit 75,9 % de la population, un chiffre de ladins équivalant à celui de 1910, 9 910 précisément, soit 3,9 % de la population, mais, suite à l’installation d’italophones, une hausse de ceux-ci à 10,6 % de la population, soit 27 048 personnes.
Sous Mussolini, les fascistes italiens entreprennent une politique d’italianisation du territoire en imposant l’italianisation des toponymes et même des patronymes et, surtout, en installant des milliers de travailleurs italophones venus de toute la péninsule. Pour favoriser cette migration, Mussolini encourage les grandes entreprises à s’installer dans la région, grâce à une série de mesures fiscales avantageuses. Cette politique pousse des germanophones à quitter le Haut-Adige.
À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, seulement une partie de ces émigrés germanophones retourne habiter au Haut-Adige, mais les germanophones restent majoritaires. Toutefois, le poids démographique relatif du groupe linguistique italophone, petite minorité en 1910, atteint une proportion significative, soit le tiers de la population. Par le traité de Paris de 1946 et le traité de Saint-Germain-en-Laye de 1947, la souveraineté de l’Italie sur le Trentin-Haut-Adige est confirmée, mais Rome doit s’engager à y assurer l’égalité des langues allemande et italienne. Des mesures particulières et des lois à promulguer doivent permettre le libre choix linguistique, notamment pour les « citoyens de langue allemande », puisqu’il s’agit, après l’époque de la répression fasciste, de retrouver « le droit à l’usage des langues allemande et italienne dans les services publics et les documents officiels ». Le 5 septembre 1946, les accords entre le gouvernement italien et le gouvernement autrichien, signés par de Gasperi et Gruber [21], contiennent une annexe IV qui précise notamment :
« Les habitants de langue allemande de la province de Bolzano et ceux des voisins communs bilingues de la province de Trente jouiront de la complète égalité des droits par rapport aux habitants de langue italienne, dans le cadre des dispositions spéciales destinées à sauvegarder le caractère ethnique et le développement culturel et économique du groupe de langue allemande ».
Puis, en vertu du statut d’autonomie de 1948 attribué à la région Trentin-Haut-Adige par la nouvelle Constitution de l’Italie, des compétences importantes sont attribuées au niveau régional, mais guère au niveau provincial (de Bolzano et de Trente), ce que déplorent les germanophones. Les mécontentements des germanophones s’expriment notamment à la fin des années 1950 et au début des années 1960 [22], avec plus de 300 attentats commis par des germanophones. En outre, des représentants de la communauté germanophone manifestent devant le parlement de Vienne en demandant leur rattachement à l’Autriche et en dénonçant le non-respect par l’Italie des accords internationaux.
Parallèlement, le 23 novembre 1969, l’Assemblée plénière de la province de Bolzano (Haut-Adige ou Sud-Tyrol) adopte une série de mesures pour la mise en vigueur d’une administration autonome, mesures approuvées par les gouvernements italien et autrichien. Puis un nouveau statut d’autonomie, institué en 1972 pour assurer l’égalité de droits linguistiques, confère aux provinces de Bolzano et de Trente une assez grande autonomie à l’égard des autorités de la Région autonome du Trentin-Haut-Adige et de l’État italien.
En mai 1989, le président de la République italienne promulgue un décret sur la parité des langues italienne et allemande, et pour l’utilisation de la langue allemande dans les administrations publiques, dans la justice, dans la police, etc. Les services gouvernementaux régionaux et provinciaux sont désormais tenus, dans la province de Bolzano/Bozen, lors de leurs relations avec les germanophones, d’utiliser la langue allemande.
Ainsi, chacune des provinces de la région autonome du Trentin-Haut-Adige a obtenu un statut particulier [23], à nouveau renforcé en 2001, qui lui donne un important pouvoir institutionnel au détriment du niveau régional et, également, du pouvoir de l’État italien. Le symbole de cette situation est la décision officielle prise en 2001 selon laquelle la province de Bolzano peut se désigner Sud-Tyrol (Südtirol), soit sous nom autrichien, quitte à délaisser le choix italien pour Haut-Adige.
Le texte constitutionnel de 2001 précise dans son article 116 (loi de révision n° 3 du 18 octobre 2001) : « Des formes et des conditions particulières d’autonomie sont attribuées au Frioul-Vénétie Julienne, à la Sardaigne, à la Sicile, au Trentin-Haut Adige/Südtirol et au Val d’Aoste, selon les statuts spéciaux respectifs adoptés par loi constitutionnelle. La région autonome du Trentin-Haut Adige/Südtirol se compose des provinces autonomes de Trente et de Bolzano ».
Ainsi, la Constitution italienne de 2001 a accru son caractère anti-répulsif pour les germanophones du Trentin-Haut Adige/Südtirol par rapport aux textes antérieurs, à l’inverse de la politique de la période fasciste qui engendrait de l’émigration.
Un cinquième type de Constitutions anti-répulsives concerne les minorités religieuses.
Reconnaissance de l’existence de petites minorités religieuses
En Iran, par exemple, la Constitution de la République Islamique du 24 Octobre 1979 précise que l’islam est « une source principale de la législation ». Ainsi le « quatrième Principe » précise : « L’ensemble des Lois et règlements civils, pénaux, financiers, économiques, administratifs, culturels, militaires, politiques et autres doit être basé sur les préceptes islamiques. Ce principe prime sur le caractère général et absolu de tous les principes de la Loi constitutionnelle et des autres Lois et règlements, l’appréciation de cette prescription incombe aux jurisconsultes religieux du Conseil des Gardiens ».
Toutefois, le treizième Principe de la Constitution précise : « Les Iraniens zoroastriens, juifs et chrétiens sont reconnus comme les seules minorités religieuses qui, dans les limites de la Loi, sont libres d’accomplir leurs rites religieux et, quant au statut personnel et à l’éducation religieuse, agissent en conformité avec leur liturgie ». Il résulte de cet énoncé que trois religions non islamiques ne devraient pas être persécutées, contrairement aux fidèles d’autres religions, comme la religion bahaï, pourtant née en Iran au XIXe siècle.
Puis le Quatorzième Principe énonce : « Conformément au noble verset : "Dieu ne vous défend pas d’être bons et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Dieu aime ceux qui sont justes et équitables", le Gouvernement de la République Islamique d’Iran et les musulmans ont le devoir d’agir envers les personnes non musulmanes, avec une bonne conduite et avec justice et équité, et respecter leurs droits en tant qu’êtres humains. Ce principe est valable à l’égard de ceux qui ne complotent et n’agissent pas contre l’Islam et la République Islamique d’Iran ».
Selon l’interprétation donnée à ce principe, au cours des deux premières années de la révolution khomeyniste, des structures de l’Église latine, suspectées de nourrir des sympathies envers l’Occident, ont certes été démantelées : quatorze écoles catholiques ont ainsi été fermées (dont de prestigieux instituts), des pensionnats et des dispensaires confisqués, des prêtres et des religieuses expulsés. Le prosélytisme est interdit aux chrétiens et les conversions sont proscrites.
Toutefois, l’Iran, bien qu’étant une République islamique, autorise le culte chrétien, la culture de la vigne, la consommation d’alcool et parfois la construction d’édifices religieux aux chrétiens. Le pays prévoit même une représentation automatique de ces chrétiens (essentiellement arméniens) au sein du Parlement iranien.
Après avoir distingué les Constitutions répulsives des Constitutions anti-répulsives, il ne faut pas oublier que nombre de régimes politiques ont réduit la liberté d’émigrer [24], de la France de Colbert à de nombreux pays communistes, comme Cuba [25]. En revanche, diverses Constitutions laissent une grande liberté d’émigrer en assurant des droits à ceux qui émigrent.
Des constitutions légitimant l’émigration des nationaux par des droits maintenus ou spécifiques
Le fait d’accorder des droits électoraux aux émigrés, d’accepter la double nationalité, voire de leur accorder des droits spécifiques est de nature à ne pas décourager ceux qui trouvent opportun d’émigrer.
Droits électoraux
Le fait de permettre à ses émigrés de voter aux élections nationales signifie que l’émigration n’a pas pour conséquence la mise à l’écart de la communauté nationale et qu’elle est parfaitement légitime. C’était partiellement le cas en France jusqu’en 2012, puisque les Français de l’étranger n’étaient représentés au Parlement que par des sénateurs élus au suffrage indirect.
Avec la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, les Français établis hors de France disposent, comme l’ensemble des Français résidant à l’étranger, d’une double représentation parlementaire, au Sénat et à l’Assemblée nationale. En effet, l’article 24 du titre IV de la Constitution de 1958 a été modifié et dispose désormais que « les Français établis hors de France sont représentés à l’Assemblée nationale et au Sénat ». Les élections de mai 2012 ont consacré cette modification avec l’élection, pour la première fois, de onze députés représentant les Français de l’étranger.
Plus généralement, la légitimation de l’émigration par l’extension de droits électoraux (vote dans les consulats ou par le Web) et d’une représentation parlementaire à des nationaux vivant à l’étranger se présente comme un processus qui se généralise dans les démocraties au XXIe siècle. Ainsi en Italie, la loi de révision n° 1 du 23 janvier 2001 arrête l’article 56 suivant : « La Chambre des députés est élue au suffrage universel et direct. Le nombre des députés est de six cent trente, dont douze élus dans la circonscription électorale "Étranger" ». Depuis les élections législatives de 2006, les Italiens de l’étranger disposent effectivement d’une représentation spécifique.
Dernier exemple : en Tunisie, la Constitution promulguée le 10 février 2014 apporte la précision suivante concernant le Parlement, intitulé « Assemblée des représentants du peuple », dans un article 55 : « Les membres de l’Assemblée des représentants du peuple sont élus au suffrage universel, libre, direct et secret, intègre et transparent selon les modalités et les conditions prévues par la loi électorale. La loi électorale garantit le droit de vote et de représentativité des Tunisiens à l’étranger au sein de l’Assemblée des représentants du peuple. »
Une autre absence de frein à l’émigration se constate lorsque des textes conformes à la Constitution donnent la possibilité de conserver sa nationalité d’origine même si la personne acquiert la nationalité du pays où elle réside. L’émigration se traduit alors non par une diminution de droits mais par une augmentation, avec la possibilité de bénéficier d’une double nationalité.
Droit à la double nationalité
Ainsi, de manière générale, la France autorise la double nationalité, ce qui ne peut freiner le souhait d’émigrer d’un Français à Londres, par exemple. Si ce dernier acquiert la nationalité britannique, ce qui lui est possible au bout de cinq ans de présence, il conservera également son passeport français. Cela s’applique depuis le 5 mars 2009. Auparavant, l’acquisition volontaire de certaines nationalités (dont la nationalité allemande) entraînait la perte automatique de la nationalité française. Depuis, la France a dénoncé le chapitre I de la Convention du conseil de l’Europe du 6 mai 1963 relative aux cas de pluralité de nationalités et aux obligations militaires en cas de pluralité de nationalités. La procédure d’obtention de la double nationalité franco-allemande s’en trouve assouplie ; il est désormais aisé d’acquérir la nationalité française sans perdre la nationalité allemande, et inversement.
Autre exemple : en Amérique latine, l’article 39 de la Constitution de la Bolivie de 1967 précisait : « La nationalité bolivienne se perd en acquérant une autre nationalité…, sauf pour ceux qui adoptent la double nationalité d’un pays possédant des accords bilatéraux avec la Bolivie » [26]. En 2002, cet article a été modifié afin de permettre aux Boliviens de l’étranger d’acquérir dans tous les cas la nationalité de leur pays de résidence. « La nationalité bolivienne ne se perd pas en acquérant une nationalité étrangère. Celui qui acquiert la nationalité bolivienne ne sera pas obligé de renoncer à sa nationalité d’origine » [27].
Outre les droits électoraux ou la double nationalité rendus possibles en cas d’émigration, des pays peuvent, en vertu de législations par définition non contraires à leur Constitution, comme des droits spécifiques à leurs diasporas, marquer qu’ils ne jugent pas négativement l’émigration et qu’ils la considèrent même comme positive, voire bénéfique lorsque l’émigré apporte aussi quelque chose à son pays d’origine.
Existence de droits spécifiques pour les diasporas
Un frein possible à l’émigration peut provenir de la perte des garanties en matière de retraites et d’assurance maladie pour la personne qui émigre. La signature d’un accord concernant la sécurité sociale, au plan bilatéral ou dans le cadre d’accords régionaux, lève ce type de frein. Allant plus loin, le pays d’origine peut élaborer des textes qui valorisent leurs diasporas, renforçant davantage la légitimation de l’émigration.
Dans les pays donnant à leurs diasporas, au sens de personnes résidant dans un autre pays que celui dont eux-mêmes ou leur famille sont originaires, des droits spécifiques, ces derniers peuvent être de nature très diverses. Une première possibilité est de permettre aux diasporas d’acheter des terres et d’autres propriétés, ce qui est interdit aux étrangers qui ne sont pas membres de la diaspora. Parfois, les investissements de la diaspora sont exonérés de taxes qui seraient imposées à des étrangers. D’autres possibilités consistent à offrir des déductions fiscales sur les dons de bienfaisance effectués par les diasporas ou à autoriser les diasporas à exécuter des fonctions publiques tout en maintenant leur résidence à l’étranger.
En outre, certains pays produisent des incitations fiscales susceptibles d’encourager la migration de retour : cela peut consister à réduire les taux de l’impôt sur le revenu pour les citoyens de retour qui ont travaillé à l’étranger pendant un certain nombre d’années.
Dans d’autres pays, la place de la diaspora ou de l’émigration en général comme partie intégrante du développement national constitue une reconnaissance de la légitimité de l’émigration. Pour citer quelques pays, les décisions prises au Maroc, au Rwanda ou au Togo [28] ces dernières années vont dans ce sens.
Quant à l’Inde [29], outre les droits donnés aux personnes de nationalité indienne vivant à l’étranger, elle a établi un droit à un « document d’identité » spécifique pour les personnes d’origine indienne (person of indian origin ou PIO) qui ont la nationalité d’un autre pays où la double nationalité n’est pas possible car interdite. Un tel document d’identité facilite le passage de la frontière, exclut le besoin de demande de visas et favorise les conditions de résidence temporaire.
La définition des personnes d’origine indienne s’applique à tous ceux à qui l’Inde affecte une part d’identité indienne. Elle prend notamment en compte le fait que les Indiens ayant émigré peuvent avoir dans leur pays de résidence des enfants qui seraient nés en Inde si elles n’avaient pas migré. Pour l’Inde, les personnes d’origine indienne, pour lesquelles le ministère des Affaires étrangères est disposé à délivrer un document prouvant leur origine, n’ont donc pas la nationalité indienne mais sont d’origine indienne ou descendantes d’Indiens. L’Inde les répartit en 3 groupes :
. Toute personne qui a possédé auparavant un passeport indien ; cette règle s’applique surtout à des personnes ayant obtenu un passeport dans un pays de résidence qui, contrairement à la France, n’admet pas la double nationalité ;
. Toute personne dont les parents, un des grands-parents ou un des arrière-grands-parents sont nés, ou ont eu une résidence permanente, sur le territoire de l’Inde tel que défini par les lois indiennes (donc à l’exclusion du Pakistan et du Bangladesh) ;
. Le conjoint d’un citoyen indien ou d’une personne d’origine indienne entrant dans l’une des deux catégories ci-dessus.
Les personnes d’origine indienne sont notamment les descendants des diverses vagues migratoires. L’Inde les estime à 17,1 millions en janvier 2015 contre 8,7 millions en 2002.
Ainsi, l’examen des Constitutions des États et les lois qui en découlent permet de déceler des effets de répulsion, de non-répulsion migratoire et de légitimation de l’émigration selon les pays. Les Constitutions doivent aussi être analysées pour comprendre leurs effets sur l’attraction migratoire.
Certaines Constitutions stimulent l’attraction migratoire du pays, d’autres la freinent, voire la rendent quasiment nulle.
Des Constitutions facteurs d’attraction migratoire
Les Constitutions favorisant l’attraction migratoire peuvent relever de deux champs démographiques, soit spécifiques, donc concernant certaines populations résidant dans d’autres pays, soit général, donc concernant l’ensemble des populations résidant dans d’autres pays du monde.
Attraction vis-à-vis de populations spécifiques
Des Constitutions ou des textes équivalents désignent clairement les personnes dont les pays acceptent, voire souhaitent, la venue dans leur pays.
Octroi de droits d’installation à certains étrangers
Un exemple historique se situe outre-Atlantique. Le 4 mars 1681, une charte royale signée par Charles II d’Angleterre attribue une région d’Amérique du Nord à William Penn [30] afin d’honorer une créance royale de 12 000 livres. En 1682, le quaker William Penn arrive sur ce territoire et décide de l’ouvrir à tous ceux qui se sentent persécutés en Europe pour leurs idées ou pour leur foi. Alors que la Nouvelle-Angleterre pend une quakeresse pour hérésie, William Penn fonde une ville qu’il nomme Philadelphie, la « ville de l’amour fraternel ». De nombreuses minorités se sentent attirées par ce territoire auquel William Penn donne une Constitution, avec un gouvernement démocratique garantissant la liberté de culte et la protection de la propriété. La colonie se peuple de nombreux immigrants protestants (anglais, allemands, hollandais, irlandais, huguenots français…) et catholiques anglais. Parmi eux, arrivent les mennonites, qui refusent résolument toute mécanisation et continuent d’atteler leurs carrioles.
Considérons un exemple plus récent, né au milieu du XXe siècle. Au Moyen-Orient, bien que la Déclaration d’indépendance d’Israël ait énoncé l’intention de réunir une Assemblée constituante qui aurait dû adopter une Constitution avant le 1er octobre 1948, ce pays ne possède pas de Constitution formelle. Mais un caractère constitutionnel [31] est reconnu à trois documents : la déclaration d’indépendance de 1948, la loi du retour (1950), ainsi que le statut de l’Agence juive et de l’Organisation sioniste mondiale (1952).
Or, la Déclaration d’indépendance du 14 mai 1948 précise notamment : « L’État d’Israël sera ouvert à l’immigration des juifs de tous les pays où ils sont dispersés ». Complété par la loi du retour, cette Déclaration d’indépendance a contribué [32] à ce que la population juive d’Israël soit passée de 600 000 personnes en 1948 à plus de 6 millions en 2015, le solde migratoire cumulé 1950-2015 étant évalué à 2,1 millions [33].
Au Royaume-Uni, différents textes favorisent (et donc facilitent) l’immigration des ressortissants du Commonwealth. Par exemple, les étrangers originaires du Commonwealth, même s’ils n’ont pas la nationalité britannique, ont, comme citoyens du Commonwealth, le droit de vote aux élections parlementaires.
Quant à la France, elle s’est trouvée, pendant une quinzaine d’années, attirante pour les membres des familles polygames ou devenant polygames. En effet, le Conseil d’Etat a reconnu, par un arrêt du 8 décembre 1978, que le droit à une famille normale constituait un principe général du droit découlant des dispositions du préambule de la Constitution de 1946 et s’appliquait aux étrangers résidant en France comme aux nationaux.
Cette attirance spécifique a permis aux polygames de bénéficier du regroupement familial en vertu d’une décision du Conseil d’État (Montcho, 11 juillet 1980) [34], jusqu’à ce qu’en 1993 une loi décide l’illicéité du regroupement polygamique dont l’État a considéré qu’il constituait un obstacle à l’intégration des intéressés.
En Europe, une importante migration ethnique due à une Constitution attractive a concerné les Allemands vivant dans les pays d’Europe de l’Est et souhaitant regagner les territoires inclus dans les frontières dévolues à l’Allemagne depuis 1949, et particulièrement l’Allemagne de l’Ouest. En effet, aux termes de la Loi fondamentale de la République fédérale d’Allemagne votée en 1949, équivalente d’une Constitution, les personnes de souche allemande sont considérées comme citoyens allemands. [35] Ils ont automatiquement droit à un passeport allemand et bénéficient de la sécurité sociale comme des assurances chômage. Leurs retraites sont garanties et l’on prend même en compte leurs années de cotisation dans le pays d’origine. Leur accueil en RFA était donc licite, et a concerné environ dix millions de personnes dans les années 1950. Puis, avec les années 1960, la migration a nettement diminué. Elle était rythmée pour l’essentiel par les accords économiques que la RFA avait signés avec les pays d’origine. Un dédommagement, variant en général entre 800 et 1200 DM par tête, était versé au pays d’émigration, très souvent la RDA (Allemagne de l’Est).
À la fin des années 1980 et au début des années 1990, l’immigration des rapatriés en République fédérale d’Allemagne augmente sensiblement, notamment après la chute du rideau de fer terminée par celle du mur de Berlin [36]. Cette immigration des rapatriés tardifs (Spätaussiedler) concerne les groupes d’origine allemande en provenance d’Europe centrale, orientale et du sud-est (URSS, Pologne, Tchécoslovaquie, Hongrie, Yougoslavie). De 1950 à 2000, 4,5 millions de rapatriés sont venus s’installer en République fédérale et dans l’Allemagne réunifiée.
Les Constitutions, ou les textes qui en découlent, qui se veulent attractifs pour des populations spécifiques peuvent, en même temps, induire une attraction générale.
Octroi de droits vis-à-vis de tous les humains
Cette attraction générale peut résulter directement des textes constitutionnels ou des lois qui s’y conforment. Prenons l’exemple de la France.
Droit général à l’immigration de refuge et familiale
Le préambule de la Constitution française du 27 octobre 1946, toujours valable aujourd’hui, ouvre un droit à l’immigration en France pour toute personne persécutée dans les termes suivants : « 4. Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur les territoires de la République. » Il n’est donc pas étonnant que la France ait signé la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés puis ait créé, par la loi du 25 juillet 1952, un établissement public administratif, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) en charge de l’application de cette Convention de Genève de 1951. En outre, l’article 53-1 de la Constitution [37] précise que la France peut octroyer des droits, quel que soient par ailleurs les accords qu’elle a signé ou signerait avec d’autres pays (comme les accords de Dublin [38]) selon la formulation : « les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif. »
Outre le droit d’asile pour toute personne d’une nationalité étrangère subissant effectivement des persécutions, la France s’est engagée à permettre la vie familiale. Ceci ressort d’abord de l’article 10 du préambule de la Constitution : « La nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». Conformément à ce texte, la France a signé la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 dont l’article 8, intitulé « Droit au respect de la vie privée et familiale », précise dans son alinéa 1 : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ». En conséquence, la France rend possible la venue de la famille d’une personne résidant légalement en France quelle soit sa nationalité ou celle des membres de sa famille la rejoignant en France. Ce droit est d’autant plus effectif qu’il bénéficie de la protection de la Cour européenne des droits de l’homme qui peut condamner un pays signataire qui ne respecterait pas la convention.
D’autres caractéristiques conformes à sa Constitution peuvent rendre un pays comme la France attractif.
Bénéfice des conditions d’un État de droit et naturalisation possible et relativement aisée
En effet, plus généralement, la France est attractive parce que toute personne qui y immigre sait qu’il s’agit d’un État de droit, que les lois qui s’appliqueront à elle – droit de propriété, droit social… – sont des lois générales pour toute la population résidente et que son origine, sa race ou sa religion n’entre pas en ligne de compte dans l’application de ces lois. Même si elle n’a généralement pas lu la Constitution, la personne qui souhaite émigrer en France connaît implicitement la majeure partie de l’article premier qui est la suivante : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances… ». Au titre de ces principes, par exemple, la loi du 20 octobre 2010 sur le voile intégral qui précise que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage » est fondée sur des questions de sociabilité, non sur des critères religieux. En conséquence, en juin 2013, la Cour européenne des droits de l’homme a validé cette loi, estimant dans un arrêt que « la préservation des conditions du “vivre ensemble” était un objectif légitime » des autorités françaises, qui disposent à cet égard d’une « ample marge d’appréciation ».
En outre, un des facteurs d’attractivité de la France tient à son droit de résidence et à son droit de la nationalité. Un enfant né en France ou un mineur né à l’étranger ne peuvent être expulsés ; cette règle représente en conséquence une voie possible de régularisation [39] pour ses parents qui seraient en situation illégale ; un enfant d’âge scolaire, même s’il est en situation illégale, bénéficie de la scolarisation.
Concernant la nationalité française [40], un enfant né en France de parents étrangers l’acquiert s’il y réside depuis les cinq années qui précèdent cette majorité. S’ajoutent plusieurs types d’acquisition de la nationalité par déclaration, et un système d’attribution automatique de la nationalité, le double jus soli, institué au XIXe siècle, selon lequel la nationalité française est attribuée automatiquement à toute personne née en France si l’un de ses parents est lui-même né en France.
Tous ses éléments réglementaires qui, bien que non inscrits dans la Constitution, en découlent largement, font de la France un pays attractif. Cela vaut pour la métropole, même si cela est davantage mis en évidence à Mayotte [41] qui attire surtout des populations comoriennes, notamment de l’île d’Anjouan, ou en Guyane française pour les populations du Surinam [42].
L’existence d’éléments juridiques rendant un pays attractif n’est pas propre à la France. Cela vaut, au moins partiellement, pour d’autres pays démocratiques, dont ceux qui appliquent complètement les textes relatifs à la Convention de Genève de 1951 sur le statut des réfugiés et ait créée, et ceux relatif à Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. À l’opposé, dans d’autres pays, les Constitutions sont des facteurs de limitation de l’attraction migratoire.
Des constitutions limitant l’attirance
Deux types de textes constitutionnels impliquent une certaine fermeture à l’immigration, lorsque la formulation de la Constitution laisse comprendre que le pays n’octroie guère de droits aux éventuels immigrants ou lorsque la Constitution suggère des droits réduits ou une limitation du droit d’asile.
Constitutions très contraignantes pour les éventuels immigrants
Certaines Constitutions ont un contenu qui exprime une discrimination vis-à-vis de ceux qui ne s’y reconnaissent pas.
Par exemple, l’Arabie saoudite dispose d’une la loi fondamentale octroyée le 1er mars 1992 par le roi Fahd. Son article premier précise : « Le royaume d’Arabie saoudite est un État islamique arabe souverain. Sa religion est l’islam ; le Saint Coran et la sunna (Tradition) du prophète (que la paix soit avec lui) forment sa Constitution ». Son article 23, au Titre V « Droits et devoirs », est ainsi rédigé : « L’État protège la foi islamique et applique la Charia islamique. L’État impose le bien et combat le mal ; il accomplit les devoirs auxquels l’appelle l’Islam ». Il apparaît clairement que des immigrants attachés à une autre religion ne peuvent être protégés ou que ceux qui n’accepteraient pas que le pays applique la « Charia islamique » ne sont pas considérés. Effectivement, les immigrants présents en Arabie saoudite ne peuvent pratiquer une spiritualité non musulmane [43], y compris dans un domicile privé. L’Arabie saoudite est certes attractive pour des raisons économiques, soit pour des personnes qualifiées souhaitant bénéficier durant une période de revenus substantiels, soit pour des millions de personnes sans qualification ou peu qualifiées qui s’y procurent des revenus pour satisfaire les besoins de leur famille restée au pays. Mais il est impossible pour les immigrants de bénéficier de véritables droits ou d’acquérir la nationalité saoudienne, sauf exceptions très rares.
Autre exemple : en Corée du Nord, l’article premier de la Constitution, au chapitre premier intitulé « Politique », précise : « La République populaire démocratique de Corée est un État socialiste souverain qui représente les intérêts de tout le peuple coréen ». Et l’article 5 indique : « Tous les organismes de l’État en République populaire démocratique de Corée sont constitués et fonctionnent selon le principe du centralisme démocratique ». Il en résulte clairement que tout immigrant qui douterait de l’efficience du socialisme nord-coréen serait malvenu et ne bénéficierait d’aucun droit. Et, effectivement, ce pays n’est pas attractif mais plutôt répulsif pour ses habitants, qui doutent des nombreuses affirmations contenues dans la Constitution, comme l’article 3 qui promet une émancipation collective signifiant l’absence de toute liberté individuelle : « La République populaire démocratique de Corée se guide dans ses activités sur les idées du Juche, conception du monde axée sur l’homme et idées révolutionnaires ayant pour but l’émancipation des masses populaires ».
Outre des textes constitutionnels dont la lecture laisse transparaître que la présence de tout immigrant qui n’accepterait pas la règle officielle inscrite dans ces textes est inenvisageable, donc exprimant une répulsion générale, d’autres textes constitutionnels induisent des répulsions ou des possibilités de décider des répulsions spécifiques qui visent seulement à limiter ou à décourager l’éventuelle arrivée de migrants de tel ou tel pays ou de telle ou telle croyance.
Des limitations implicites ou explicites à certains types d’immigrants
Par exemple, le treizième article de la Constitution de la République islamique d’Iran précise : « Les Iraniens zoroastriens, juifs et chrétiens sont reconnus comme les seules minorités religieuses qui, dans les limites de la loi, sont libres d’accomplir leurs rites religieux et, quant au statut personnel et à l’éducation religieuse, agissent en conformité avec leur liturgie ». A contrario, cet article signifie que toute personne dont la religion ne serait ni islamique ni l’une des trois citées serait guère bienvenue en Iran puisqu’elle ne pourrait exercer ses rites religieux.
Autre exemple : l’Allemagne, où la loi fondamentale rend légales de possibles répulsions spécifiques. En 1992, la courbe des demandes d’asile dans l’Allemagne réunifiée atteint le chiffre de près de 440 000, dans le contexte des guerres de l’ex-Yougoslavie [44]. L’Allemagne décide alors de se donner le pouvoir de limiter le nombre de personnes demandeuses d’asile en ajoutant à sa loi fondamentale l’article 16a [Droit d’asile], dont voici le texte :
« (1) Les persécutés politiques jouissent du droit d’asile.
(2) L’alinéa 1er ne peut être invoqué par celui qui entre sur le territoire fédéral en provenance d’un État membre des Communautés européennes ou d’un autre État tiers dans lequel l’application de la Convention relative au statut des réfugiés et de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales est assurée. Les États non membres des Communautés européennes remplissant les conditions de la première phrase seront déterminés par une loi qui requiert l’approbation du Bundesrat. Dans les cas prévus à la première phrase, des mesures mettant fin au séjour peuvent être exécutées indépendamment du recours engagé contre elles.
(3) Une loi qui requiert l’approbation du Bundesrat peut déterminer les États dans lesquels il paraît assuré en raison de l’état du droit, de l’application du droit et de la situation politique générale, qu’il n’y a ni persécution politique, ni peines ou traitements inhumains ou dégradants. Un étranger originaire d’un tel État est présumé n’être pas persécuté, tant qu’il ne produit pas des faits fondant l’hypothèse que, contrairement à cette présomption, il est politiquement persécuté.
(4) Dans les cas prévus à l’alinéa 3 et dans les autres cas de demandes manifestement infondées ou considérées comme telles, le tribunal ne prononcera le sursis à l’exécution des mesures mettant fin au séjour que s’il existe des doutes sérieux sur la régularité de la mesure ; l’étendue du contrôle peut être restreinte et les moyens tardifs peuvent être écartés. 2Les modalités doivent être réglées par la loi.
(5) Les alinéas 1 à 4 ne font pas obstacle aux traités internationaux conclus par des États membres des Communautés européennes entre eux et avec des États tiers, qui fixent des règles de compétences pour l’examen des demandes d’asile, y compris la reconnaissance mutuelle des décisions en matière d’asile, dans le respect des obligations découlant de la Convention relative au statut des réfugiés et de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, dont l’application doit être assurée dans les États parties à ces traités. »
Cette modification constitutionnelle signifie que les personnes originaires de pays déclarés comme ne pratiquant pas l’oppression ou entrées en Allemagne en passant par un « pays tiers sûr » n’obtiendraient pas, en général, l’asile. Elle permet donc de définir ce qui est considéré comme un « pays sûr », c’est-à-dire un pays dont les ressortissants ne peuvent déposer une demande d’asile. Depuis la fin des années 1990, le nombre de demandes d’asiles a baissé chaque année pour descendre en dessous de 19 000 en 2007. Puis, en 2015, l’exode syrien, plus précisément la réémigration vers l’étranger de Syriens réfugiés en Turquie, au Liban ou en Jordanie a changé la donne. Mais, en 2015, l’Allemagne a fait jouer cet article constitutionnel pour diminuer les demandes d’asile provenant de pays des Balkans, et notamment du Kosovo.
En effet, pendant l’hiver 2014-2015, des dizaines de milliers de Kosovars quittent leur pays pour Munich ou Berlin, dans la perspective d’y trouver des revenus et/ou d’obtenir le statut de réfugié.
Au cours du premier trimestre 2015, les Kosovars déposent 48 870 demandes d’asile dans l’ensemble UE + Suisse et Norvège, dont 21 095 en Allemagne [45]. Pourtant, En 2014, les demandeurs d’asile du Kosovo n’avaient déjà obtenu le statut que dans 6,6 % des cas. Mais, au fil de l’année 2015, le flux du Kosovo vers l’Allemagne perdure car la gouvernance du Kosovo se traduit par une situation économique déplorable et parce que les Kosovars peuvent y migrer aisément depuis l’ouverture des frontières de la Serbie pour les ressortissants du Kosovo, en vertu de l’accord conclu à Bruxelles au printemps 2013 entre Belgrade et Pristina.
Aussi, en application l’article 16A précité, le samedi 24 octobre 2015 [46], l’Allemagne, ainsi qu’elle l’avait annoncé, place sur la liste des « pays sûrs » le Kosovo, l’Albanie et le Monténégro. Ceci implique que les ressortissants de ces pays ne peuvent pratiquement plus déposer de demandes d’asile. L’Allemagne accentue l’organisation pour les Kosovars en situation irrégulière soit d’un retour volontaire, soit d’un retour contraint mis en œuvre par les policiers. Face à l’ampleur de l’exode syrien, stimulé par la promesse d’accueil général de la chancelière Merkel, fin août 2015, mais comprenant à la fois de vrais Syriens et des personnes ayant acheté de faux passeports syriens, certains se demandent si les Kosovars ne sont pas chassés pour faire place aux Syriens [47].
Ainsi, la lecture des Constitutions montre que leur texte même peut engendrer des répulsions ou des attractions migratoires. Même si leur contenu juridique n’est qu’un facteur s’exerçant sur les migrations, les Constitutions exercent un double effet migratoire.
Le premier concerne la décision d’émigrer ou de ne pas émigrer. En effet, certaines Constitutions énoncent des éléments significatifs d’un État de droit, donc sans effet répulsif général. Quant aux Constitutions qui édictent des droits protecteurs pour certains groupes humains, elles expriment la volonté de lever ou minorer d’éventuels effets répulsifs pour les groupes humains concernés. À l’inverse, les Constitutions qui laissent transparaître un caractère liberticide soit vis-à-vis de la totalité de la population du pays, soit à l’égard de certains groupes humains qui font l’objet de vexations, sont répulsives.
Le second effet migratoire des Constitutions est d’orienter le choix de la destination des émigrants. Soit leur formulation témoigne d’un esprit de fermeture qui minore ou annule l’attraction, pour tous les étrangers ou seulement pour certaines catégories. Soit les Constitutions fondent pour les immigrants des droits – droit au refuge, droit à la vie familiale, droits sociaux, etc. –, engendrant de l’attraction. Ce second effet explique certaines réémigrations susceptibles de se produire notamment suite à des exodes.
Parfois, le caractère plus ou moins ouvert ou plus ou moins fermé, à l’émigration comme à l’immigration, des Constitutions suppose une analyse des textes, lorsque certaines formulations sont indirectes. Enfin, au delà des textes constitutionnels, il conviendrait d’examiner le réel, qui peut se révéler différent du formel. Il n’en demeure pas moins que le formel a toute son importance. Cela est particulièrement mis en évidence dans les pays démocratiques où la plupart des révisions constitutionnelles donnent lieu à d’âpres débats politiques, encore plus élargis à l’ensemble des citoyens lorsque les révisions font l’objet de référendums.
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Ce texte est issu de la communication donnée par le recteur Gérard-François Dumont au colloque « Quelles perceptions extra-juridiques de la Constitution ? » qui s’est tenu à la Sorbonne le 15 octobre 2015 sous l’égide de l’Université Sorbonne Nouvelle (Paris III), de Unité de recherche Intégration et Coopération dans l’Espace Euro-péen (ICEE) Etudes Européennes, et de l’Association française de droit constitutionnel.
[1] Au sens large, intégrant donc des aspects culturels ou religieux.
[2] À distinguer des groupes diasporiques ; cf. Dumont, Gérard-François, Démographie politique. Les lois de la géopolitique des populations, Paris, Ellipses, 2007.
[3] El Watan, Alger, 16 novembre 2005.
[4] Une situation semblable se constate en Turquie avec les Kurdes.
[5] Il aura fallu sept années d’âpres débats et deux Assemblées constituantes. Tout commence en 2006, lorsqu’une rébellion d’inspiration maoïste met fin à une guerre civile de dix ans en signant un accord de paix qui conduira, deux ans plus tard, à l’abolition de la monarchie et à la création d’une Assemblée constituante. Longtemps, les discussions achoppèrent sur la structure fédérale comme sur la mention ou non du sécularisme, jusqu’au séisme d’avril 2015 qui fit près de 9 000 morts.
[6] En outre, l’Inde a instauré un blocus du Népal afin d’obliger ce pays à amender sa Constitution pour garantir la représentation des Madhesi, ce cinquième de la population d’origine indienne ; cf. « Katmandou plie face au blocus indien », Le Monde, 11 et 12 octobre 2015, p. 7.
[7] Valognes, Jean-Pierre, Vie et mort des Chrétiens d’Orient, Paris, Fayard, 1994.
[8] Sur les vexations subies par les chrétiens d’Irak, cf. le témoignage de Joseph Fadelle, Le prix à payer, Paris, L’œuvre éditions, 2010.
[9] Al Yaqoobi, Ali, La Constitution irakienne de 2005. La diversité reconnue et assumée, Éditions universitaires européennes, 2012.
[10] Dumont, Gérard-François, « L’Irak face aux questions religieuses et ethniques », Géostratégiques, n° 44, avril 2015, p. 13-37.
[11] Mgr Jean-Benjamin Sleiman, dans : Europe-Orient, Dialogue avec l’islam, colloque au Sénat, 12 juillet 2007.
[12] La Vie, 11 avril 2013.
[13] Cf. Dumont, Gérard-François, « La mosaïque des chrétiens d’Irak », Géostratégiques, n° 7, 2e trimestre 2005 ; « La longue histoire des chrétiens d’Orient », Le Figaro Histoire, n° 16, octobre-novembre 2014.
[14] Cf. Dumont, Gérard-François, Montenay, Yves, « La francophonie, géodémographie et géostratégie », Géostratégiques, n° 36, 2e trimestre 2012.
[15] Ce texte ne fait nullement novation, il est seulement le résultat d’une formulation, structurée dans un texte unique, des multiples textes antérieurs ayant valeur constitutionnelle.
[16] La Constitution de la Roumanie (article 62) et la Loi électorale confèrent donc aux organisations des citoyens appartenant à des minorités nationales, au cas où celles-ci n’auraient pu obtenir aux élections au moins un mandat de parlementaire, le droit a un mandat de député, si elles obtiennent au niveau de tout le pays un nombre de suffrages d’au moins 5 % du nombre moyen de suffrages valablement exprimés pour l’élection d’un député à l’échelon national. Chaque minorité ne peut être représentée que par une seule organisation. Les mandats attribués aux organisations des citoyens appartenant aux minorités nationales, dans les conditions fixées par la Loi électorale, s’ajoutent aux mandats de députés résultant de la norme de représentation.
[17] Cf. Dumont, Gérard-François, « Le Liban, géopolitique et populations », Outre-Terre, n° 13, Editions Érès, 2006.
[18] Article nouveau, loi n° 344-XV du 25 juillet 2003.
[19] Ainsi que la province de Trieste et le Frioul-Vénétie Julienne. C’est pourquoi le Frioul-Vénétie Julienne a aussi un statut spécial dans la Constitution italienne, comme la Sicile, la Sardaigne et le Val d’Aoste.
[20] Les germanophones du Südtirol ou Südtiroler — appelés Südtirolesi par les italophones — ne parlent généralement pas l’allemand standard (appelé Hochsprache) dans leur vie quotidienne, mais parlent plutôt l’une de ses variétés dialectales de type austro-bavarois : le tyrolien du Sud (ou Südbairisch). Cette variété austro-bavaroise est aussi influencée par la langue italienne.
[21] Respectivement ministre des Affaires étrangères de l’Autriche et d’Italie.
[22] Dont la Feuernacht (la « nuit des Feux ») du 11 juin 1961, avec 37 attentats en une seule nuit.
[23] Par ailleurs, les textes prévoient également des droits propres pour la minorité ladine.
[24] Pourtant inscrite dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 : Article 13 : Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.
[25] De façon il est vrai variable selon les années ; cf. Dumont, Gérard-François, « Cuba : histoire d’un exode », Population & Avenir, n° 725, novembre-décembre 2015.
[26] « La nacionalidad boliviana se pierde por adquirir la nacionalidad extranjera, bastando para recobrarla domiciliarse en Bolivia exceptuando a quienes se acojan al régimen de nacionalidad plural en virtud de convenios que a este respecto se firmen »
[27] « La nacionalidad boliviana no se pierde por adquirir nacionalidad extranjera. Quien adquiera nacionalidad boliviana no será obligado a renunciar a su nacionalidad de origen »
[28] Comme l’initiative « le Togo honore sa diaspora », avec plusieurs journées à Lomé les 11-16 janvier 2016.
[29] Cf. Dumont, Gérard-François, « Un nouvel acteur géopolitique : la diaspora indienne », Géostratégiques, n° 19, avril 2008.
[30] 1644-1718.
[31] Renonçant à rédiger un texte constitutionnel unique, la Knesset, le Parlement israélien, a décidé, en 1950, d’élaborer la Constitution chapitre par chapitre. Ainsi successivement, entre 1958 et 1992, 11 lois fondamentales ont été adoptées, mais certaines ont un caractère rigide (elles ne peuvent être modifiées qu’à la majorité absolue) dont les autres sont dépourvues. Un projet de Constitution a été préparé par une commission de la Knesset, et présenté à celle-ci en février 2006, mais, à ce jour, aucun vote n’est intervenu.
[32] Il faut, bien entendu, ajouter les effets des exodes contraints de différents pays du Maghreb ou du Moyen-Orient.
[33] Par le WPP de l’ONU, The 2015 revision.
[34] Jelen, Christian, La famille, secret de l’intégration, Robert Laffont, Paris, 1993.
[35] Hubert, Michel, "Le poids démographique de l’Allemagne unifiée", Allemagne d’aujourd’hui, n° 116, avril-juin 1991.
[36] Cf. Dumont, Gérard-François, « Le mur de Berlin : vie, mort et héritage géopolitique », Diploweb.com, La revue géopolitique, 18 octobre 2009 ; http://www.diploweb.com/Mur-de-Berlin-vie-mort-et-heritage.html ; « The Berlin wall : life, death and the spatial heritage of Berlin”, Active histort.cas, 6 novembre 2009. http://activehistory.ca/papers/history-paper-2/
[37] Créé par la Loi constitutionnelle n°93-1256 du 25 novembre 1993 relative aux accords internationaux en matière de droit d’asile.
[38] Règlement de l’Union européenne qui détermine l’État membre de l’Union européenne responsable d’examiner une demande d’asile en vertu de la Convention de Genève (art. 51).
[39] Précisée par une circulaire de 2006 du ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy et confirmé par la circulaire du ministre de l’intérieur Manuel Valls du 28 novembre 2012.
[40] « L’imbroglio du code de la nationalité », Iris, n° 1, 4e trimestre 1987.
[41] Dumont, Gérard-François, « Mayotte, une exception géopolitique mondiale », Outre-Terre, revue française de géopolitique, n° 11, 2005.
[42] Zouari Ilyes, « La Guyane, une mosaïque de population », Population & Avenir, n° 725, novembre-décembre 2015.
[43] En revanche, compte tenu de leurs besoins encore plus considérables en immigrants, les Émirats arabes unis et le Qatar ont dû rendre possible sur leur sol l’exercice de cultes non musulmans ; cf. Dumont, Gérard-François, « Les paramètres géopolitiques du Moyen-Orient », Géostratégiques, n° 22, 2009.
[44] Dumont, Gérard-François, « Le siècle des réfugiés », Le Figaro histoire, n° 22, octobre-novembre 2015.
[45] Eurostat, 112/2015, 18 juin 2015.
[46] En France, le 9 octobre 2015, le Kosovo a de nouveau été placé sur la liste des « pays sûrs » par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), ce qui rend très difficile l’obtention de l’asile pour les Kosovars en France.
[47] Par Laurent GESLIN, Envoyé spécial au Kosovo, Libération, 28 octobre 2015 à 19:46
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