Pierre Mirel, Docteur en Droit public (Université de Poitiers), a servi dans les ambassades de France au Caire (1971-1974) et à Saïgon (1974-1976), ainsi qu’à l’Institut international d’Administration publique, Paris (1979-1981).
Entré à la Commission européenne en 1981, il y a été Directeur pour les négociations d’adhésion avec Hongrie, Slovaquie, Tchéquie et Slovénie, puis Croatie et Turquie, avant d’avoir la responsabilité des Balkans occidentaux jusqu’à sa retraite fin 2013.
Chargé d’enseignement à Sciences Po-Paris depuis 2010 sur l’UE et ses voisinages, il a publié des articles à la Fondation Robert Schuman sur ces thèmes. Il continue à intervenir dans les Balkans (formation, séminaires, missions). Il a également publié « L’Egypte des ruptures », Ed. Sindbad, 1982.
En déclarant que « l’Ukraine appartient à notre famille européenne », le Conseil européen n’a pas promis son adhésion mais élaboré une formule de compromis entre les États membres qui le souhaitent et ceux qui restent prudents. Quels sont les règles, critères et la pratique en matière d’adhésion à l’Union ? Quelles sont les conditions et les obstacles à cette voie ? Non seulement à l’obtention de ce statut mais aussi, à plus long terme, aux conséquences potentielles de ces adhésions. Quelles réponses de l’UE : grand saut, petits pas ou une alternative ? Fort d’une exceptionnelle expérience des élargissements de l’UE, Pierre Mirel présente un tableau remarquablement documenté. Il termine sa démonstration par une proposition.
« Le vieux monde se meurt, le nouveau tarde à apparaître et dans ce clair obscur surgissent les monstres ». Antonio Gramsci
Le 24 février 2022, Vladimir Poutine annonce sa décision de « mener une opération militaire spéciale » en Ukraine pour répondre à la demande d’aide des Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk qu’il a reconnues le 21 février et avec lesquelles la Fédération de Russie vient de signer deux « traités d’amitié, de coopération et d’entraide ». Au moment où il prononce son discours, les troupes russes viennent d’envahir l’Ukraine dans une guerre qui va durer et se révéler brutale et sanglante.
Le Conseil européen condamne cette « agression militaire non provoquée et non justifiée et soutient sans réserve l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine ». Venant après la reconnaissance des provinces géorgiennes de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie en 2008, et l’intégration de la Crimée à la Russie en 2014, c’est une nouvelle violation grave du droit international et des engagements de la Russie. L’Union européenne réagit avec force et célérité en adoptant un paquet de sanctions sévères et inédites contre la Russie.
Célérité aussi dans sa réaction à la demande d’adhésion de l’Ukraine que signe le président Volodymyr Zelinsky le 28 février 2022, suivie par celles de la Géorgie et de la Moldavie le 3 mars 2022. Le 10 mars 2022, en effet, le Conseil européen informel réuni à Versailles invite la Commission européenne à soumettre ses Avis sur ces trois candidatures.
De l’émotion à la prudence
C’est un geste politique fort dans l’émotion suscitée par l’agression russe d’un pays indépendant et souverain, agression qui attaque aussi « la dignité, la liberté et la démocratie de l’Europe entière » et que défend l’Ukraine, comme le déclare le président du Conseil européen Charles Michel. Émotion encore lorsque le président Zelinsky s’adresse aux députés européens le 1er mars 2022 de son bunker à Kyiv : « Nous appelons l’UE à lancer immédiatement la procédure conduisant à l’octroi du statut de candidat à l’Ukraine pour son adhésion. Prouvez que vous êtes avec nous ». Avec une écrasante majorité de 637 voix – 13 contre et 26 abstentions – la résolution du Parlement européen appelle les institutions de l’Union à œuvrer à accorder le statut de pays candidat à l’Ukraine.
Le Parlement n’en rappelle pas moins qu’une éventuelle adhésion obéit à des conditions et repose sur les mérites propres du candidat. Lors du débat, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, souligne qu’il y a un long chemin à parcourir, alors qu’il existe « différentes positions et sensibilités dans l’Union sur son élargissement » comme le rappelle opportunément Charles Michel. Le Conseil européen n’a d’ailleurs pas repris l’idée d’une procédure expresse comme demandée par des États membres puisqu‘il n’existe pas de voie expresse vers l’adhésion, comme l’a indiqué le premier ministre des Pays-Bas, Mark Rutte. Il n’a pas ouvert la procédure d’adhésion mais s’en est remis d’abord aux Avis de la Commission. Le président Macron a d’ailleurs bien exprimé le sentiment général en déclarant : « Ouvrir une procédure avec un pays en guerre, je ne le pense pas. Lui fermer la porte et dire jamais, ce serait injuste ».
Ne pas prendre en considération la demande de l’Ukraine eut été en effet une victoire pour le maître du Kremlin, et comme un reniement de la révolution de la dignité avec son choix européen à Maïdan en février 2014. La décision du Conseil est donc une réponse symbolique forte au besoin de ces trois pays de s’ancrer plus que jamais dans l’Union européenne en ces jours d’une guerre sanglante, et alors que leur adhésion à l’OTAN n’est plus à l’ordre du jour. Leurs candidatures illustrent l’attrait que représente l’Union pour les États du continent désireux de partager librement et volontairement des éléments de leur souveraineté et les valeurs avec les 27 États membres, afin de ne pas succomber à l’intégration dans la Fédération de Russie ou à l’alignement forcé sur le régime politique poutinien.
En déclarant que « l’Ukraine appartient à notre famille européenne », le Conseil européen n’a pas promis son adhésion mais élaboré une formule de compromis entre les États membres qui le souhaitent et ceux qui restent prudents. Ce qui n’a pas empêché le président lituanien d’affirmer : « Nuit historique à Versailles. Les leaders européens ont dit oui à l’intégration européenne de l’Ukraine. Le processus a commencé ». Déclaration qui reflète bien le soutien déterminé de huit pays d’Europe centrale et orientale à l’octroi rapide du statut de candidat, dans une lettre à la Commission. Ces huit pays d’Europe centrale et orientale sont : Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Tchéquie, Slovaquie, Slovénie et Bulgarie. Alors que l’Allemagne, la France et le Benelux, entre autres, vont mettre en avant l’impréparation des candidats, les conséquences géopolitiques et la capacité d’absorption de l’Union. Ces candidatures représentent effectivement de grands défis pour l’Union européenne. Avant de les examiner, posons les termes du débat : quels sont les règles, critères et la pratique en matière d’adhésion à l’Union ?
Le Traité de Lisbonne est clair en son article 49 : « Tout État européen qui respecte les valeurs visées à l’article 2 et s’engage à les promouvoir peut demander à devenir membre de l’Union ». A l’exception de la référence aux valeurs, la phrase n’a pas changé depuis le Traité de Rome. Dans l’esprit même du messianisme de Jean Monet, l’Union a bien vocation à accueillir tous les États européens qui le souhaitent, pour assurer paix et prospérité sur le continent. Le caractère européen de la Moldavie et de l’Ukraine est non seulement indéniable, il est formellement consacré par le préambule aux accords d’association signés par les deux pays respectivement en 2013 et 2014. Le préambule fait d’ailleurs référence à l’ensemble de l’article 49, mais sans le dire, plaçant les deux pays dans la position de demandeurs potentiels à l’adhésion :
« les parties contractantes, conscientes du fait que l’Ukraine (ou la Moldavie), en tant que pays européen, partage une histoire et des valeurs communes avec les États membres de l’Union européenne et est attachée à promouvoir ces valeurs. »
Quelles sont les valeurs auxquelles se réfère l’article 2 ? Elles sont au fondement même de l’Union : « valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que du respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes. »
L’adhésion à l’Union est en fait depuis longtemps la priorité affichée de la Moldavie et de l’Ukraine, cette dernière l’ayant même inscrite dans sa constitution en 2019, avec le soutien de plusieurs États membres. La Lituanie et la Pologne notamment pressent l’Union depuis plusieurs années de leur reconnaître une « perspective européenne ». On peut d’ailleurs supposer que ce sont ces deux pays qui ont suggéré au président Zelinsky de saisir l’opportunité de l’agression russe pour poser la candidature de son pays à l’Union. La Commission, le Secrétariat du Conseil et quelques grands États membres, ont-ils été consultés au préalable comme il est coutume de le faire quant à l’opportunité du moment où une candidature peut être déposée ? Opportunité politique qui tient à la fois à la situation du candidat et à l’état de ses réformes, ainsi qu’à la situation de l’Union elle-même. Ce sondage est important pour éviter que le silence du Conseil, ou pire son refus d’une candidature, ne place le candidat dans une position difficile. On peut supposer, à tout le moins, que la présidente de la Commission en a été informée.
La Géorgie est dans une situation différente puisque le préambule à son accord d’association de 2013 prend acte des aspirations européennes de la Géorgie et de son choix de se tourner vers l’Europe, reconnaît la détermination de la Géorgie, pays d’Europe orientale, à traduire ces valeurs dans les faits et à les promouvoir. Son engagement européen est reconnu par l’Union mais il n’est pas partagé dans les termes forts des accords avec la Moldavie et l’Ukraine. On voit bien que c’est sa position géographique dans l’Europe orientale qui fait la différence. Et si sa présidente, Salomé Zourabichvilli, œuvre sans compter à l’adhésion depuis des années, le premier ministre, Irakli Garibachvilli, garde une attitude plus neutre entre la Russie et l’Union, même s’il a signé l’acte de candidature.
Il est une autre règle, non écrite, à laquelle ces trois pays satisfont– le Trio, comme ils se sont nommés eux-mêmes – c’est le fait d’avoir un accord d’association avec l’Union avant de pouvoir poser leur candidature. Ils sont donc effectivement fondés à demander leur adhésion à l’Union européenne sur base de l’article 49 du Traité. Quelles en sont les conditions ?
Avant l’adhésion des pays d’Europe centrale et orientale dans le 5ème élargissement le 1er mai 2004, deux conditions générales étaient requises pour une adhésion, non écrites mais implicites : être une démocratie et avoir une économie de marché, conformément aux principes et valeurs mêmes des pays fondateurs. C’est bien sûr la première condition qui a retardé l’acceptation de la candidature de la Grèce, de l’Espagne et du Portugal jusqu’à la fin de leurs régimes militaires. Quant à l’état d’économie de marché, il a été accepté a priori pour les trois pays, et a fortiori pour les adhésions précédentes du Royaume-Uni, du Danemark et de l’Irlande en 1973, membres de l’Association européenne de Libre-échange. Et bien sûr également pour l’adhésion en 1995 de l’Autriche, de la Finlande et de la Suède. La nécessité de définir la double condition implicite d’être une démocratie et d’avoir une économie de marché ne s’est donc pas posée avant les années 1990.
Dès le début de ces dernières, la Pologne et la Hongrie, puis progressivement les autres pays d’Europe centrale et orientale, ont clairement indiqué leur intention d’adhérer à l’Union. Or, ils étaient en transition d’un système de régime à parti unique et d’économie dirigée. De plus, la réunification de l’Allemagne avait montré que l’intégration rapide de l’économie de l’ex-République démocratique d’Allemagne (RDA) dans une Union de facto élargie avait conduit à la fermeture de nombreuses entreprises d’État devenues non compétitives, sans transition de restructuration suffisante. Aussi le Conseil européen a -t-il jugé nécessaire de poser des conditions d’adhésion spécifiques pour garantir une adaptation politique et pour assurer une transition économique limitant les risques d’adaptation brutale. C’est ce qu’il fit à Copenhague en décembre 1993 en posant les conditions suivantes, devenues droit primaire pour toute nouvelle adhésion auxquelles renvoie l’article 49 du Traité, selon lesquelles un pays candidat doit avoir :
. « Des institutions stables garantissant la démocratie, l’état de droit, les droits de l’homme, le respect des minorités et leur protection ;
. Une économie de marché viable et la capacité à faire face aux forces du marché et à la pression concurrentielle à l’intérieur de l’UE ;
. L’aptitude à assumer les obligations découlant de l’adhésion, notamment la capacité à mettre en œuvre avec efficacité les règles, les normes et les politiques qui forment le corpus législatif de l’UE (l’« acquis ») et à souscrire aux objectifs de l’union politique, économique et monétaire. »
A ces critères, l’Union a ajouté des conditions spécifiques aux Balkans occidentaux dans le cadre du Processus de Stabilisation et d’Association adopté au Sommet de Thessaloniki en juin 2003 : « relations de bon voisinage et coopération régionale ». La relation de bon voisinage implique de résoudre tout litige bilatéral avant de pouvoir adhérer, voire avant de pouvoir obtenir l’ouverture des négociations d’adhésion si un État membre de l’Union est partie au litige puisque l’unanimité est requise. La Macédoine en a été victime pendant plus de dix ans en raison de l’opposition de la Grèce sur son nom, jusqu’à l’accord de Prespa en 2018 où elle est devenue la République de Macédoine du Nord. Elle en reste pourtant victime avec l’opposition de la Bulgarie pour des raisons d’identité et de langue.
C’est aussi la Serbie qui est soumise à cette condition de bon voisinage tant qu’elle n’aura pas conclu, selon la demande de l’Union, un accord juridiquement contraignant avec le Kosovo qui s’est séparé d’elle par une déclaration unilatérale d’indépendance en février 2008 et qu’elle ne reconnaît pas. Or, cet accord devrait logiquement conduire à la reconnaissance du Kosovo et à son acceptation comme membre des Nations Unies. C’est ce à quoi la Serbie s’oppose à ce stade avec le plein soutien de Moscou. Sergueï Lavrov a certes dit que Moscou suivrait aux Nations Unies la position de Belgrade. Mais il est à craindre que la guerre en Ukraine n’ait rebattu les cartes. Comment ne pas penser que la Russie utilisera le Kosovo comme élément d’échange dans la négociation d’ensemble qui pourrait s’engager avec la Russie après la guerre en Ukraine ? Alors que Poutine vient à nouveau de faire un parallèle entre l’indépendance du Kosovo et celle des républiques auto-proclamées de Donetsk et Louhansk qu’il a reconnues. Cette condition de bon voisinage a été développée pour éviter à nouveau la malheureuse adhésion d’un pays divisé, la République de Chypre, après le refus de Nicosie par référendum d’un plan de réunification de l’île accepté par Chypre Nord avec l’accord de la Turquie. Depuis lors, l’Union européenne est otage d’Ankara. Et l’on comprend dès lors la volonté de l’Union de ne plus accepter de pays divisés. Ce qui va lui poser un grand défi avec le Trio.
Si la Commission suit les règles et la pratique jusqu’alors, ses Avis devraient donc dire si les trois pays satisfont aux critères d’adhésion et sinon sous quelles conditions et délais ils le pourraient. Ou bien envisager une toute autre association à l’Union. Ils devraient aussi proposer une approche quant à leur occupation et division par la Russie.
L’article 49 est très succinct à cet égard : « L’État demandeur adresse sa demande au Conseil, lequel se prononce à l’unanimité après avoir consulté la Commission et après approbation du Parlement européen qui se prononce à la majorité des membres qui le composent. Les critères d’éligibilité approuvés par le Conseil européen sont pris en compte. Les conditions de l’admission et les adaptations que cette admission entraîne … font l’objet d’un accord entre les États membres et l’État demandeur. Ledit accord est soumis à la ratification par tous les États contractants, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives. »
Il en ressort quatre points essentiels : le Conseil a l’obligation de consulter la Commission, ce que le Conseil européen de Versailles a fait avec les demandes du Trio ; l’adhésion n’est acquise qu’à l’unanimité des États membres ainsi qu’à la majorité du Parlement européen ; chaque État membre et l’État candidat doivent ratifier le traité d’adhésion.
Le traité ne donne pas plus d’indications. C’est pourquoi, le processus concret suivant a été développé à la faveur des adhésions précédentes :
. Dès que le Conseil demande à la Commission de préparer son Avis, celle-ci adresse un questionnaire à l’État demandeur pour connaître la façon détaillée dont il remplit les critères de Copenhague ou prévoit de le faire, ainsi que les périodes de transition dont il estime avoir besoin pour adhérer. A ce questionnaire remis très rapidement par la Commission au Trio fin mars 2022, l’Ukraine a répondu sur la partie politique le 18 avril 2022 et sur la partie acquis le 9 mai 2022, la Moldavie respectivement le 22 avril 2022 et le 12 mai 2022, et la Géorgie les 2 et 10 mai 2022. Soulignons que le questionnaire sur l’acquis comporte près de 3 000 questions.
. Sur base des réponses, la Commission présente au Conseil ses Avis sur les mérites des demandes. Elle doit dire si les conditions sont réunies pour conférer le statut de pays candidat ou bien si des réformes spécifiques devraient être faites au préalable. L’Albanie n’a obtenu ce statut que quatre ans après l’avis de la Commission. La Bosnie Herzégovine est en attente de ce statut trois ans après l’Avis parce que les conditions fixées à son octroi n’ont toujours pas été remplies. La Commission envisage de rendre ses Avis sur les demandes du Trio le 15 juin 2022.
. Quand bien même l’État demandeur reçoit ce statut, l’ouverture des négociations d’adhésion peut être conditionnée à l’achèvement de certaines réformes. Quatre années se sont ainsi écoulées pour l’Albanie. Et elle a dû attendre encore deux années supplémentaires, après d’autres réformes, avant que les 27 ne décident à l’unanimité de l’ouverture des négociations.
. Une fois cette décision prise, un cadre de négociations est agréé à l’unanimité entre les 27 et l’État demandeur. Ce n’est pas une formalité puisque la Bulgarie bloque aujourd’hui cet acte avec la Macédoine du Nord. Ce cadre découpe les négociations en 33 chapitres regroupés en clusters qui sont autant de domaines de l’acquis, complétés par deux chapitres sur les institutions (34) et autres questions éventuelles (35). Et, comme on ne peut imaginer les 27 négociant des centaines de directives et de règlements avec l’État demandeur, les États membres donnent mandat à la Commission de leur préparer les propositions de position sur base des positions de négociations de l’État demandeur.
. Négociation est un abus de langage. Il y a en fait bien peu à négocier en dehors de quelques domaines spécifiques, du budget post-adhésion et des demandes de transition éventuelles du candidat. Il s’agit avant tout de s’assurer que l’État demandeur a effectivement adopté la législation européenne et qu’il a la capacité de la mettre en œuvre de « façon efficace et effective » comme l’a demandé le Conseil européen de Madrid en 1995. D’où un exercice continu de monitoring et de contrôle par une interaction entre la Commission et cet État, avec missions sur le terrain pour s’assurer de la véracité des déclarations et auxquelles les États membres peuvent déléguer des experts.
. Les États membres doivent se prononcer à l’unanimité sur chaque proposition des 33 chapitres, pour leur ouverture et leur clôture, outre des références/benchmarks intermédiaires. Ce qui signifie au minimum 66 opportunités de blocage par l’un des 27 ! Cette unanimité est la règle parce qu’il s’agit de conférences intergouvernementales de 1 + 27 et non pas ces derniers siégeant en formation « Conseil » au sens du Traité. C’est d’ailleurs la présidence tournante qui a la prééminence.
. Une fois l’ensemble des négociations terminées, la Commission rend un nouvel avis pour dire si le candidat est prêt à adhérer. Il requiert à nouveau l’unanimité des États membres et l’accord du Parlement européen. La ratification du traité d’adhésion par les États membres et le candidat vient clore le processus.
La prompte décision du Conseil européen à Versailles, le 10 mars 2022, la rapidité avec laquelle la Commission a adressé son questionnaire au Trio et surtout la rapidité avec laquelle ses membres ont répondu aux milliers de questions ne laissent pas d’interroger. D’où la question des délais.
Le tableau ci-dessous montre clairement qu’il n’y a pas de délais fixes et qu’ils varient considérablement entre la candidature et l’avis de la Commission, ainsi qu’entre celle-ci et l’adhésion de l‘État demandeur. Les délais sont d’autant plus longs entre l’Avis et l’ouverture des négociations qu’un État membre s’y oppose. Ce fut le cas de la Grèce pendant dix ans avec la Macédoine du Nord. C’est à nouveau le cas aujourd’hui avec la Bulgarie.
Tableau : Les délais variables du processus d’adhésion
Candidature de l’État | Avis de la Commission | Adhésion de l’État |
---|---|---|
Espagne, 3e candidature 28 juillet 1977 |
29 novembre 1978 | 1er janvier 1986 |
Pologne 5 avril 1994 |
15 juillet 1997 Ouverture négoc. mars 1998 |
1er mai 2004 |
Serbie 22 décembre 2009 |
14 octobre 2011 Statut candidat mars 2012 |
Négociations ouvertes Janvier 2014 |
Macédoine du Nord 22 mars 2004 |
9 novembre 2005 Statut candidat décembre 2005 |
Ouverture négociations ? |
Albanie 24 avril 2009 |
9 novembre 2011 Statut candidat 2014 |
Ouverture négociations ? |
Réalisation du tableau : Pierre Mirel pour Diploweb.com, mai 2022.
Aussi ne peut-on qu’être surpris par les délais très courts avec le Trio jusqu’alors. Comment répondre aussi rapidement à ce qui constitue le cœur même des fondements complexes de l’Union. Il est vrai que leur accord d’association avec l’Union facilite à la fois leurs réponses au questionnaire de la Commission et le traitement des réponses par celle-ci.
Les résultats de la politique de voisinage initiée en 2004 avec les nouveaux voisins de l’Union à l’Est ne furent pas à la hauteur des attentes. Pour y remédier, le Partenariat oriental est lancé le 7 mai 2009 à Prague sous l’impulsion de la Pologne et de la Suède. Bien qu’il inclut six pays (Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie, Géorgie, Moldavie, Ukraine), seuls ceux du Trio acceptèrent ces accords d’association (AA) couplés à des « accords de libre échange complets et approfondis » (ALECA). La Géorgie et la Moldavie les signèrent en 2013. On se souvient que le président ukrainien Ianoukovitch le refusa sur pression de Moscou, ce qui déclencha les évènements dramatiques de la place Maïdan à Kyiv. Destitué après sa fuite en Russie, il fut remplacé par Petro Porochenko élu le 25 mai 2014 et l’accord signé le 27 juin 2014. Entre temps, les oblasts de Donetsk et de Louhansk étaient entrés en rébellion avec le soutien de Moscou et la Crimée rattachée à la Russie dès mars 2014, laquelle lança aussi une guerre hybride contre l’Ukraine.
Quel est donc la nature de ces accords capables de déclencher de tels bouleversements ? Ils visent à une association politique avec l’Union et à une intégration économique à son marché intérieur, dans le respect des valeurs communes. L’association politique va très loin puisque l’article 7 envisage la « convergence dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité, y compris la politique de sécurité et de défense commune ». La partie « libre échange » est ambitieuse puisqu’elle prévoit l’élimination graduelle des droits de douane et des restrictions quantitatives, l’adoption des normes et standards de l’Union, la libre prestation de services et le droit d’établissement, ainsi que l’adoption des règles de marchés publics, concurrence et propriété intellectuelle. Ce qui implique l’intégration dans l’ordre juridique des candidats de plus de 120 directives et règlements de l’Union. S’y ajoute une coopération économique qui couvre tous les domaines où l’Union a des compétences, notamment transports, énergie et environnement.
Le volet commercial de ces accords est entré en vigueur le 1er janvier 2016 et l’accord d‘association lui-même le 1er septembre 2017. Ces accords vont donc au-delà de ceux conclus au début des années 1990 avec les pays d’Europe centrale, puis avec les Balkans occidentaux, mais sans envisager l’adhésion. Leur étendue est toutefois telle qu’une fois mis en œuvre, le Trio serait proche de la situation de la Norvège avec l’Union. Ils sont, en effet, le résultat d’un compromis entre les États membres qui souhaitaient offrir au Trio une « perspective européenne » et plusieurs membres fondateurs qui s’y opposaient.
Leur demande d’adhésion va relancer le débat entre les États membres. Mais cette fois sous la lumière crue de la guerre où raison et émotion, morale et politique, vont s’affronter pour offrir ou non le statut de pays candidat, c’est-à-dire ouvrir ou non dès maintenant la route qui conduira à leur adhésion. A la lumière du cadre que nous avons posé, quelles sont les conditions et les obstacles à cette voie ? Non seulement à l’obtention de ce statut mais aussi, à plus long terme, aux conséquences potentielles de ces adhésions.
La Commission européenne dresse régulièrement un état de la mise en œuvre des accords d’association avec les membres du Trio. Et les réunions régulières dans le cadre du Partenariat oriental mettent aussi l’accent sur les progrès et les faiblesses. Le Service de recherche du Parlement européen a établi une évaluation de l’Ukraine en 2020. Le CEPS est allé plus loin en publiant une notation sectorielle détaillée pour la Moldavie et l’Ukraine et en les comparant aux Balkans occidentaux [1].
Pour ces deux pays, il en ressort une image contrastée quant aux critères politiques. Les élections sont libres et équitables. Les libertés individuelles et les droits satisfaisants. En revanche, l’État de droit est faible et la corruption élevée auquel un système judiciaire dépendant contribue. Transparency International y note à 32/100 la perception de la corruption. En Ukraine, la réévaluation des magistrats est restée erratique. La lutte contre la corruption était l’une des priorités du président Zelinsky élu en 2019. Un an plus tard, il limogeait le procureur général qu’il avait nommé et son gouvernement réformiste. La culture politique a bien peu à voir avec celle des membres de l’Union. On assiste aussi au mariage incestueux de l’oligarchie et de l’information – souvent dans sa main – avec la politique. Il s’ensuit des régimes hybrides, en transition entre démocratie et autoritarisme, pris entre forces post-soviétiques aux méthodes éprouvées et réformateurs qui luttent avec les outils des accords européens et leur conditionnalité.
Ce conflit est exacerbé en Géorgie où le parti au pouvoir, le Rêve Géorgien, a succombé à la tentation de contrôler le jeu politique lors des élections et à l’interférence dans des procès politiques. Seul l’héritage anti-corruption du l’ancien président Saakachvili y donne une perception plus positive de 55/100. La mise en œuvre de l’acquis y est bonne, mais globalement, la Géorgie se distingue des deux autres pays par une dérive anti-démocratique qui l’éloigne des principes et valeurs de l’Union.
Des progrès notables ont été accomplis dans les différents volets sur l’acquis des accords de libre échange avec l’Ukraine et la Moldavie. Mais les réformes dans les domaines sensibles restent faibles ou requièrent de grands efforts de mise en œuvre : marchés publics, concurrence et propriété intellectuelle. La corruption n’y est pas étrangère, de même qu’une administration publique insuffisamment réformée et efficace. La vulnérabilité économique est un sérieux problème, les deux pays étant largement dépendants des financements extérieurs, du FMI et de l’UE. L’Ukraine a reçu 16 milliards € d’aide budgétaire et de prêts entre 2014 et 2021. Il est évident que l’occupation de la Crimée, de la Transnistrie et le conflit au Donbass, outre la lenteur de certaines réformes, créent une insécurité et freinent les investissements.
L’évaluation de l’état des Balkans occidentaux en négociations d’adhésion (Monténégro, Serbie) ou sur le point d’y entrer (Albanie et Macédoine du Nord) est globalement supérieure à celle des membres du Trio. Notamment en ce qui concerne la corruption et le système judiciaire. Sur base des seuls critères de Copenhague, si la Commission s’en tient à son approche avec l’Albanie et la Macédoine du Nord, elle devrait conditionner l’obtention du statut de candidat à de vraies réformes en ces deux domaines clés pour que les candidats démontrent leur volonté et capacité d’améliorer réellement la situation.
Bien des analyses sur les conditions d’adhésion à l’UE omettent ce que d’aucuns ont appelé le 4ème critère de Copenhague :
« La capacité de l’Union à assimiler de nouveaux membres tout en maintenant l’élan de l’intégration européenne constitue également un élément important répondant à l’intérêt général, aussi bien de l’Union que des pays candidats. »
Cette capacité doit être évaluée à l’aune des politiques internes. C’est bien évidemment le coût de l’adhésion qui est important. Le tableau suivant donne des éléments de comparaison par rapport à la Pologne et à la Bulgarie qui ont adhéré en 2004 et 2007 respectivement (Sources : Eurostat et DG Trade).
La population totale de l’Ukraine et Moldavie est équivalente à celles de la Pologne et de la Bulgarie. Or, le coût total des politiques structurelles 2021-2027 pour ces deux pays se montera à 85 milliards €. C’est dire l’ampleur des fonds budgétaires que l’Union devrait transférer au Trio compte tenu des niveaux de vie et à paramètres identiques pour faciliter leur développement et hâter le rattrapage économique avec les 27. Celui de la Pologne est impressionnant mais il a eu lieu dans une période de stabilité et sans insécurité pour les investissements. Il conviendra aussi d’y ajouter le coût gigantesque de la reconstruction en Ukraine dont une première estimation se monte, à ce stade, à 500 milliards €. [2]
Outre ces coûts macro-économiques, et sans préjuger l’analyse que la Commission conduira, mettons l’accent sur trois politiques. Plus grand pays agricole de l’Union, l’Ukraine est l’un des premiers exportateurs mondiaux de céréales, produites le plus souvent dans de très grandes exploitations. La politique agricole commune devrait nécessairement être adaptée pour en tenir compte, ce qui aura un coût. La mise en œuvre du « Green Deal » posera également des problèmes de financement. Enfin, la migration non contrôlée à partir des nouveaux voisins après l’adhésion présenterait un risque élevé si ces derniers devaient se montrer toujours aussi belliqueux, à l’exemple de la Biélorussie dans les mois passés. Le financement de ces adhésions nécessiterait à l’évidence de nouvelles ressources propres. Un impôt européen pour la paix pourrait-il être envisagé, qui se mettrait déjà en place lors de la reconstruction en Ukraine ?
Un rapport du Parlement européen en février 2006, à l’instigation du député Elmar Brock, proposait que la « capacité » d’intégration de l’Union devienne un critère formel, visant implicitement à écarter l’adhésion de la Turquie. Il demandait aussi un rapport à la Commission, laquelle proposa en novembre le « consensus renouvelé sur l’élargissement » avec trois composantes : « une consolidation impérative » selon laquelle une nouvelle adhésion ne doit pas mettre en danger le fonctionnement institutionnel de l’Union ni sa capacité à poursuivre de nouvelles politiques ; « une conditionnalité stricte » qui implique que le nouveau membre soit prêt à assumer toutes ses obligations ; « une communication renforcée » sur le processus d’adhésion. Les conclusions du Conseil européen des 14-15 décembre 2006 ont repris ces trois C.
Face à de nouvelles adhésions, la gouvernance de l’Union devra bien évidemment être réformée, alors qu’elle peine déjà à trouver un consensus sur des questions complexes ou sensibles comme l’immigration. Trois problèmes essentiels se posent ici. Tout d’abord, au-delà de l’adaptation de la répartition des voix au Conseil et des sièges au Parlement européen, l’adhésion de l’Ukraine conduirait à un renforcement notable des voix de l’Europe centrale et orientale dans les institutions européennes. Ce n’est pas faire offense au président Zelinsky ou à la présidente Sandu d’écrire que les régimes illibéraux qui prévalent aujourd’hui en Hongrie et en Pologne pourraient laisser craindre une évolution semblable chez de futurs membres au passé démocratique récent et fragile. C’est ensuite la question sensible du nombre de Commissaires. Selon l’article 17.5. du Traité, leur nombre devrait être égal à 2/3 du nombre d’États membres, sauf si le Conseil européen en décide autrement. Il devra trouver une formule appropriée car on imagine mal une Commission avec plus de 30 Commissaires si l’on inclut les Balkans occidentaux. Se poserait enfin avec encore plus d’acuité la question du vote à l’unanimité en matière fiscale ou sociale alors que les risques de « dumping » seraient réels, sauf à négocier des conditions spécifiques et des transitions longues. Sans oublier l’unanimité en matière de politique étrangère dont on voit aujourd’hui le caractère pernicieux pour les sanctions contre la Russie.
Le traité établissant une Constitution pour l’Europe fut rejeté par la France et les Pays-Bas en 2005. Le 5ème élargissement (2004) en fut une des raisons, une partie de l’opinion publique estimant qu’il était allé trop loin, trop vite et pour un coût trop élevé. La question des frontières a depuis lors souvent été posée dans des travaux académiques. La Déclaration de Laeken, le 15 décembre 2001, n’en fixait pourtant aucune : « la seule frontière que trace l’UE est celle de la démocratie et des droits de l’Homme. L’Union n’est ouverte qu’aux pays qui respectent les valeurs fondamentales ». Naïveté ? Messianisme plutôt dans l’esprit même de Jean Monnet, mais qui se heurte à l’incompréhension d’une partie de l’opinion publique et alimente les discours eurosceptiques et populistes. En 2010, un rapport, à l’instigation de la France, conforte encore cette approche : « L’Union doit rester ouverte aux nouveaux membres potentiels d’Europe et évaluer chaque candidat au cas par cas et en fonction de son degré de conformité aux critères d’adhésion. C’est en fait là que se situent ‘les véritables limites de l’Europe’ » [3]. Le président Sarkozy qui en escomptait des arguments contre l’adhésion de la Turquie n’y trouva pas son compte.
A notre connaissance, aucun document officiel de l’Union n’a jamais abordé ses limites, ni demandé de les fixer même de façon temporaire. Gageons pourtant que ces trois nouvelles candidatures vont relancer le débat sur les frontières de l’Europe, avec trois corollaires : leurs limites, l’accueil de pays divisés et occupés par la Russie, la capacité de l’Union à assurer sa propre sécurité. Mais le débat sur ses limites est aujourd’hui biaisé puisqu’il se pose à la lumière de la guerre en Ukraine, avec toute l’émotion qui l’entoure. Difficile donc d’en contester l’extension à l’Ukraine et à la Moldavie, ce qui renvoie plutôt à un débat sur le type même de liens de ces pays avec l’Union.
D’aucuns plaident pour que l’Union « reconnaisse que sa sécurité est inséparablement liée à sa capacité à projeter sa puissance en offrant une perspective d’adhésion, montrant ainsi à la Russie sa disponibilité à défendre l’ordre international qu’elle préfère » [4]. Position largement partagée en Europe centrale mais fort surprenante si l’on se rappelle que c’est à la suite de l’accord de l’UE avec l’Ukraine en 2014 – et non à des mesures de l’OTAN – que la Russie a annexé la Crimée et contribué au conflit dans le Donbass. Sous estimant les défis que lançait cet accord, l’Union n’a pas eu la capacité de réagir avec force. Comment l’aurait-elle a fortiori en étendant ses frontières jusqu’à la Russie, voire seulement si le maître du Kremlin, enfermé dans son bunker mental, prenait ombrage de l’ouverture des négociations ? Étant entendu que l’on ne peut comparer Ukraine et Finlande. A l’évidence, ce n’est pas la puissance douce (soft power) de l’Union qui suffirait. Comme l’a écrit Pierre Hassner : « la puissance par la norme ne peut jamais s’imposer seule et par elle-même, elle dépend des intérêts et du poids respectif des acteurs en même temps que de leurs valeurs ».
Bien plus, l’article 42.7 du Traité prévoit : « Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir ». Ce n’est certes pas la clause de défense collective de l’article 5 de l’OTAN. Mais les États membres, même en agissant ensemble, n’ont pas aujourd’hui cette capacité. La guerre russe en Ukraine a précisément souligné les faiblesses de l’Union et signé le grand retour de l’OTAN. La développera-t-elle d’ici aux adhésions éventuelles à la mesure d’une possible nouvelle agression de la Russie restée belliqueuse ? On ne saurait affirmer que l’expansion de l’UE serait un gage de sécurité, sauf à créer des illusions graves, comme ce fut déjà le cas avec l’ouverture des négociations d’adhésion avec la Turquie.
L’occupation de parties des territoires des trois candidats dans des républiques crées et reconnues par Moscou est évidemment un autre obstacle majeur à leur adhésion : Abkhazie et Ossétie du Sud en Géorgie, Transnistrie en Moldavie, Donetsk et Louhansk en Ukraine, outre l’absorption de la Crimée. Des négociations d’adhésion ne sauraient aboutir en ignorant cet état de fait puisque ce serait accepter la politique de force qui a détaché ces territoires d’États souverains. Mais le refuser parce qu’ils sont divisés, en ligne avec la position des États membres jusqu’alors à cet égard, rendrait ces trois pays et l’Union otages de la Russie. En toute hypothèse, aucune de ces adhésions ne saurait aboutir sans une relation nouvelle entre Bruxelles et Moscou, confortée par des accords de sécurité continentaux.
Il est un autre acteur qui pourrait s’immiscer bruyamment dans des négociations d’adhésion, c’est l’opinion publique. Souvenons-nous des 300 000 citoyens Néerlandais qui ont initié un référendum consultatif contre la ratification de l’accord d’association avec l’Ukraine par La Haye en avril 2016. Son approbation par 61% des votants a conduit le gouvernement à négocier avec les autres États membres une déclaration interprétative dont le Conseil européen de décembre 2016 a pris note, en ces termes : « l’accord d’association ne confère pas le statut de candidat ni n’est un engagement à le conférer dans le futur…. ne mènera à aucune forme de coopération obligatoire dans la défense ». Au grand dam de certains pays d’Europe centrale, d’autant que seuls 32% des citoyens avaient pris part au vote. On comprend aujourd’hui la prudence du premier ministre Mark Rutte face à ces candidatures. Au-delà de ce cas, il faut s’attendre à des réactions plus nombreuses de l’opinion publique contre des mesures de politique étrangère européenne à l’avenir, comme on l’a vu déjà en matière commerciale, a fortiori sur l’extension des frontières de l’Union jusqu’à la Russie.
Dans ce qui s’apparente à une course vers l’adhésion, les Balkans occidentaux - Albanie, Bosnie Herzégovine, Kosovo, Monténégro, Macédoine du Nord, Serbie - sont théoriquement en tête puisque le Conseil européen de Thessalonique le 23 juin 2003 leur a donné une « perspective européenne ». Mais les progrès sont restés fort limités jusqu’alors. Seule la Croatie a adhéré en 2013. Le Monténégro est en négociations d’adhésion depuis dix ans mais seuls trois des trente chapitres ouverts ont été provisoirement clos. Le bilan de deux contre dix-huit n’est pas plus flatteur pour la Serbie, en négociations depuis huit ans. La Bulgarie maintient son veto sur l’ouverture des négociations avec la Macédoine du Nord pour des raisons d’identité et de langue. L’Albanie, associée à elle par le Conseil pour une ouverture conjointe, s’en trouve donc également bloquée. Quant à la Bosnie Herzégovine et au Kosovo, ils restent des États inachevés et instables, au statut de « candidat potentiel », loin de pouvoir obtenir celui de candidat. Ce dernier, parce que cinq États membres de l’Union [5] et la Serbie n’ont toujours pas reconnu son indépendance auto-proclamée en février 2008. La Bosnie Herzégovine parce que les Bosniaques, Croates et Serbes qui la composent ne trouvent pas un consensus sur le type d’État fédéral qu’ils souhaitent, ce qui se traduit par leur incapacité à satisfaire aux 14 priorités fixées par l’Union pour obtenir le statut de candidat.
Bien que les retards et obstacles soient surtout liés à la trop faible volonté politique de réformes des États concernés, il s’ensuit une perte de crédibilité de l’Union et un vide géopolitique que la Russie, la Chine et la Turquie sont heureuses de remplir en y accroissant leur influence. Alors que des craintes se font jour que Moscou, à la faveur de la guerre en Ukraine, n’y utilise ses réseaux pour déstabiliser la région. Les Balkans occidentaux sont inquiets, quant à eux, que la guerre en Ukraine ne change l’ordre des priorités, surtout depuis que le Conseil européen a demandé promptement les Avis sur la candidature de l’Ukraine, Moldavie et Géorgie. Le Kosovo a déjà plaidé pour recevoir le statut de candidat. Et la Bosnie Herzégovine pour se le voir conféré sans que les 14 priorités ne soient remplies.
Dans son « Serment de Strasbourg » au Parlement européen le 9 mai 2022, le président Macron a proposé « une Communauté politique européenne pour organiser l’Europe d’un point de vue politique et plus large que l’Union européenne ». Il visait les candidatures à l’adhésion de l’Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie. Il n’en a pas moins créé un trouble dans les Balkans occidentaux, même s’il a précisé dans sa conférence de presse que « pour les Balkans, le chemin est déjà tracé », sous-entendu celui de l’adhésion. Ce qu’il a confirmé le 20 mai 2022 : cette Communauté serait « un complément et non une alternative au processus d’élargissement ». Les ministres des Affaires étrangères d’Autriche, Hongrie, Slovaquie, Slovénie et Tchéquie ont demandé à Josep Borrell un débat au Conseil car il est « urgent de donner un élan à l’intégration des Balkans ». Appel entendu puisqu’un Sommet se tiendra avec eux le 23 juin 2022 en marge du Conseil européen.
Le processus de leur adhésion n’est plus adapté, malgré une nouvelle méthodologie adoptée par le Conseil en mai 2021 à l’instigation de la France. Le président Charles Michel a proposé le 18 mai 2022 de le changer pour le rendre « progressif, graduel et réversible, et avec des bénéfices socio-économiques durant la pré adhésion ». Il a réitéré cette idée à Belgrade le 19 mai 2022 : « Nous devons créer de nouveaux incitatifs aux réformes, ce qui signifie commencer l’intégration maintenant durant les négociations d’adhésion plutôt qu’attendre leur aboutissement ». C’est la nouvelle approche [6] que nous défendons depuis 2019. Il nous paraît utile de la détailler ici car elle pourrait inspirer aussi les relations avec les trois nouveaux candidats à l’Est. Cette approche repose sur trois principes : mettre un terme au système binaire d’une aide pré-adhésion limitée puis de fonds post-adhésion massifs une fois membre ; progresser vers l’adhésion par étapes selon les réformes accomplies, chaque étape franchie donnant accès à des fonds accrus ; établir une phase de consolidation à la fin des négociations avant l’adhésion pleine et entière. La première étape serait la mise en œuvre des accords d’association et de certaines réformes symboliques, par exemple la loi électorale en Bosnie Herzégovine. Le pays candidat recevrait alors une fraction des fonds structurels mais supérieure à ce que le programme d’aide pré-adhésion (IPA), lui aurait octroyé.
La seconde étape consisterait dans l’intégration du pays au marché intérieur de l’Union, étape clé et concrète pour arrimer solidement les économies des Balkans, alors que 66% de leurs échanges se font déjà avec elle. Ce qui, combiné à la réalisation parallèle du marché commun régional, devrait accélérer les investissements et donc freiner l’émigration. Les réformes dans les différents secteurs/chapitres induiraient le passage aux étapes suivantes. Et des progrès sur les éléments fondamentaux de l’État de droit devraient être faits tout au long du processus, par exemple dans la lutte contre la corruption en lien avec le marché intérieur (marchés publics et conflits d’intérêts notamment).
Chaque changement d’étape donnerait accès à une augmentation des fonds. Ainsi qu’à une participation du pays aux différents organes de la Commission et de l’UE dans les politiques concernées, d’observation puis de plein droit. Priorité devrait bien sûr être donnée aux nouvelles politiques emblématiques de l’Union, comme le Pacte vert (Green deal), ainsi qu’à une association à la politique de sécurité et de défense. Lorsque la Commission confirmerait que les critères de l’adhésion sont respectés, une dernière étape s’ouvrirait où le candidat aurait les droits afférents à sa qualité de membre, à l’exception du droit de veto et sans avoir de commissaire. Cette dernière étape de consolidation le serait à un double titre. D’une part, pour vérifier que l’acquis adopté est effectivement mis en œuvre, que le pays ne commence pas à renier les valeurs souscrites et les principes acceptés, ni ne s’oppose déjà à de nouvelles politiques communes. Mais aussi pour mettre un terme à des litiges bilatéraux complexes. Et pour permettre à l’Union, d’autre part, de finaliser une nouvelle gouvernance, y compris sur le nombre de commissaires. A l’issue de cette étape, d’une durée variable, le pays serait membre de plein droit de l’Union.
La Commission européenne est assurément face à un dilemme qu’elle n’a jamais connu dans ce domaine, alors que sa présidente, à travers plusieurs déclarations, laisse penser qu’elle est en faveur du statut de candidat pour l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie. Si la Commission s’en tient aux critères d’adhésion et à la pratique jusqu’alors, elle devrait proposer le statut de « candidat potentiel » et indiquer les conditions et réformes à accomplir pour devenir « candidat’ formel ». Elle ne saurait d’autre part ignorer les difficultés pour l’Union d’intégrer ces trois pays, en raison des coûts pour plusieurs politiques et de la nécessité de réformer l’Union elle-même. De même qu’elle ne peut passer sous silence les questions de frontières et de sécurité. Bien sûr, à ce stade, il ne s’agit que de répondre à la question du statut, mais y répondre positivement ouvre déjà la voie vers l’adhésion. D’où l’importance de signaler, à tout le moins, les éléments pertinents pour la suite du processus. Et d’en discuter une alternative.
Mais le contexte du débat est loin d’être serein lorsque Olga Stefanishyna, vice-première ministre ukrainienne en charge de l’intégration européenne dit avec émotion « nous avons déjà payé notre adhésion avec du sang ». Alors que son collègue en charge des affaires étrangères, Dmytro Kuleba, se plaint que « l’Ukraine soit traitée comme seconde classe par certains États membres ». Et que Nicolae Popescu, son homologue moldave déclare que le refus de l’Union « montrerait que son pays est otage de la Russie ». C’est en fait l’Union qui est prise en otage par l’Ukraine et la Moldavie qui considèrent que l’adhésion leur est dûe, la guerre ayant créé le droit à une adhésion rapide. Les États baltes et d’Europe centrale ainsi que le Parlement européen expriment ouvertement leur soutien. De l’autre, le ministre autrichien des Affaires étrangères, Aleksander Schallenberg, a dit son opposition, appelant à une alternative. Il ne sera pas isolé au Conseil. Le premier ministre Orban pourrait s’y opposer en raison de ses liens avec Poutine et de ses récriminations contre le traitement qu’il prétend discriminatoire réservé par Kyiv à la minorité hongroise. La prudence des Pays-Bas et les propositions de Enrico Letta et Emmanuel Macron montrent que le Conseil sera très divisé et dans une atmosphère qui risque fort d’être délétère.
L’ancien premier ministre italien a, en effet, proposé une Confédération européenne de 36 pays avec les Balkans occidentaux, qui ressemble fort à ce que François Mitterrand avait proposé à l’Europe centrale à Prague en juin 1991, mais cette fois évidemment sans la Russie [7]. Elle avait alors été rejetée, notamment par Vaclav Havel, au profit de l’adhésion à laquelle ces États estimaient avoir un droit historique. Dans son « Serment de Strasbourg » au Parlement européen, le 9 mai 2022, le président Macron a proposé une « Communauté politique européenne ». C’est-à-dire une organisation nouvelle permettant « aux nations européennes démocratiques adhérant à notre socle de valeurs de trouver un nouvel espace de coopération politique, de sécurité, de coopération en matière énergétique, de transport, d’investissements, d’infrastructures, de circulation des personnes et en particulier de nos jeunesses. La rejoindre ne préjugerait pas d’adhésions futures à l’Union européenne ». Ses arguments : « Nous avons le devoir historique, non pas de faire comme on a toujours fait et de dire la seule réponse est l’adhésion, mais d’ouvrir une réflexion historique sur l’organisation de notre continent. Car c’est la vérité de dire que le processus leur permettant l’adhésion, prendrait …. sans doute plusieurs décennies … sauf à ce que nous décidions de baisser les standards de cette adhésion ».
Les termes du débat sont donc clairs. Soit la Commission recommande de conférer aux trois pays le statut de candidat, ce qui ouvrira logiquement la voie au processus de leur adhésion. Lequel prendrait effectivement des décennies tant les pays sont loin de satisfaire aux critères, sauf à abaisser ces derniers, même dans le cas d’adhésions par étapes. Avec les risques associés à tout moment au veto d’États membres sur une aussi longue période de temps. Et ceux liés à l’extension des frontières sans accord de sécurité sur le continent. Risque aussi de créer une attente chez les citoyens avec l’illusion d’adhésions prochaines, d’où des frustrations et une perte progressive de crédibilité de l’Union, comme on le constate aujourd’hui avec les Balkans occidentaux. Risque enfin de conforter les discours eurosceptiques et populistes.
Soit la Commission propose le statut de « candidat potentiel » tant les trois pays sont loin de pouvoir entrer dans le processus. Une telle proposition correspondrait plus fidèlement à la réalité de leur situation au regard des critères. Elle se placerait toutefois dans la même logique que précédemment avec un simple décalage dans le temps pour passer d’un statut à l’autre. Et l’on peut prédire une pression politique très forte pour accélérer ce passage au fil des années. A terme, les risques seraient donc les mêmes. Dans les deux cas, le risque majeur serait celui d’adhésions prématurées et donc nécessairement assujetties à des conditions spécifiques et à de longues périodes de transition qui feraient des États des membres de seconde classe. Pire encore si des procédures de contrôle post-adhésion étaient instaurées, dont on a vu l’inefficacité avec la Bulgarie et la Roumanie. Car si la conditionnalité est inopérante avant l’adhésion, elle est vouée à l’échec après [8]. Dans les deux cas, la Géorgie ne saurait être traitée comme l’Ukraine et la Moldavie.
Candidat ou candidat potentiel, si la Commission recommande l’une de ces deux options, elle divisera de toute façon le Conseil européen. Car plusieurs États membres estimeront que l’Union ne peut se placer dans le contexte classique d’un processus qui a réussi jusqu’en 2004 mais échoué avec les Balkans et n’est a fortiori pas approprié aujourd’hui avec les nouveaux candidats. Ce qui renforcera la fracture Est-Ouest, en faisant apparaître les États fondateurs comme frileux et égoïstes. Osons esquisser une alternative.
Toute alternative devrait éviter deux écueils : ouvrir un processus qui serait porté comme un étendard de victoire additionnelle dans la guerre, facilité que l’Union et les candidats paieraient de négociations sans fin ; réaffirmer que les candidats sont membres de la famille européenne mais sans offre concrète. Or, ces derniers attendent un geste symbolique fort qui les renforce dans leur combat et confirme concrètement leur destin européen. Si le marché a joué un rôle clé dans la construction de l’Union, ses forces doivent continuer à être un levier pour l’intégration des candidats. Mais il y faut aussi une institution. C’est la combinaison des deux qui peut offrir une alternative autour des éléments suivants.
. Perspective européenne. La Commission européenne pourrait proposer d’offrir aux trois États une « perspective européenne », comme le Sommet de Thessalonique l’avait fait avec les Balkans en 2003. C’est-à-dire de reconnaître qu’ils ont vocation à adhérer à l’Union, ce qu’ils demandent depuis plusieurs années et lors de chaque sommet du Partenariat oriental. Et renvoyer l’ouverture du processus concret au moment où une forme de normalité serait revenue en Ukraine et en Moldavie. C’est à ce moment là que la Commission présenterait des propositions concrètes.
. Perspective renforcée par l’Accord d’Association/ALECA étendu. La portée de cet accord est hélas sous-estimée par les candidats et par les États qui les soutiennent, préférant la fuite en avant vers l’adhésion. La Commission proposerait de compléter et de renforcer la partie « acquis » et la coopération économique des accords pour une intégration au marché intérieur. Elle pourrait aussi envisager la création d’une Union douanière. De même qu’elle offrirait une aide accrue à la lutte contre la corruption et à l’indépendance du judiciaire.
. Agenda 2030. En 1997, la Commission avait su rassembler avec bonheur dans l’agenda 2000 avec les États baltes et l’Europe centrale, ses Avis sur leurs demandes d’adhésion et une vaste étude d’impact de celles-ci. La Commission pourrait faire de même avec l’Agenda 2030 où elle offrirait une véritable étude d’impact des trois adhésions éventuelles sur l’ensemble des politiques de l’Union, y compris les coûts de la reconstruction en Ukraine. Elle y inclurait une proposition d’extension des accords d’association, voire d’Union douanière. Car, après la guerre, l’Ukraine et la Moldavie auront plus que jamais besoin d’exportations et d’investissements. L’Agenda 2030 ferait aussi des propositions pour la Communauté politique européenne et pour une nouvelle ressource pour la paix.
. Une ressource propre pour la paix : La Commission proposerait une nouvelle ressource propre de l’Union pour la reconstruction en Ukraine, Rebuild. Elle pourrait envisager d’utiliser des fonds russes gelés. Elle serait surtout assise sur un prélèvement sur les importations de pétrole et de gaz russes – si celles-ci ne sont pas interrompues – et sur les transactions financières de l’Union.
. Communauté politique européenne. Face aux forces illibérales de Moscou à Pékin et à la volonté de certaines puissances de modifier l’ordre international libéral, il est essentiel que les 27 États membres, les 6 Balkans occidentaux et les 3 nouveaux candidats affirment les valeurs qu’ils partagent. Les membres de cette Communauté politique européenne se réuniraient en marge des Conseils européens de juin et de décembre . Son objet serait bien sûr d’expliquer les conclusions des Conseils. Il serait surtout de dresser l’état du continent, de proposer des initiatives continentales (énergie, transports, santé, par exemple) et de créer un sentiment européen d’appartenance et de solidarité. Les pays de l’Espace économique européen, la Suisse et la Turquie pourraient en être observateurs.
Manuscrit clos le 28 mai 2022
Publication initiale le 29 mai 2002
Copyright Mai 2022-Mirel/Diploweb.com
[1] European Parliament Research Service ‘Implementation of the Ukraine agreement’, July 2020.
Michael Emerson, Denis Cenusa, Steven Blockmans, Tinatin Akhvlediani : ‘Opinion on Moldova’s application for membership of the EU’, CEPS Policy Insights, N° 2022-16, April 2022.
Michael Emerson, Steven Blockmans, Veronika Movchan, Artem Remizov : ‘Opinion on Ukraine’s membership application of the EU’, CEPS 2022-18, May 2022.
Voir aussi : Michael Emerson and al ‘Balkan and Eastern European Comparisons. Building a new Momentum for the European integration of the Balkan and Eastern European associated states’, CEPS 25 February 2021.
[2] NDLR : Pour mémoire, la superficie de l’Ukraine est de 604 000 km2, soit 1,9 fois la superficie de la Pologne. Et le territoire de l’Ukraine a été abondamment bombardé par la Russie, ce qui induit des coûts significatifs de reconstruction
[3] ‘Projet pour l’Europe à l’horizon 2030, les défis à relever et les chances à saisir’. Rapport du Groupe de Réflexion au Conseil européen, mai 2010.
[4] Pavel Havlicek et Pavelina Janebova ‘EU enlargement must be conceived as a geopolitical expansion’, Interview à Euractiv, 15 mai 2022.
[5] Grèce, Chypre, Espagne, Roumanie, Slovaquie.
[6] Idée initiale de Milena Lazarevic ‘Away with the enlargement bogeyman’, the EPC, Belgrade, 30.8.2019 et Pierre Mirel : ‘Union européenne-Balkans occidentaux : pour un cadre de négociations rénové’. Questions d’Europe n° 529, 30.9.2019, La Fondation Robert Schuman. Une proposition très détaillée, mais en partie différente, a été faite par le CEPS ‘A template for staged accession to the EU’ 1.10. 2020. Voir : Pierre Mirel : ‘Pour une nouvelle approche avec les Balkans occidentaux, adhésions par étapes avec consolidation’, La Fondation Robert Schuman, Questions d’Europe n° 633, 23 mai 2022. Des éléments ont été publiés pour la première fois dans la Revue de Défense Nationale, n° 850, mai 2022.
[7] NDLR : Incluant l’URSS, la proposition de F. Mitterrand était d’avance condamnable pour des pays qui sortaient de quatre décennies sous la botte de Moscou. Il est d’ailleurs surprenant que des conseillers de l’Elysée et du Quai d’Orsay ne l’aient pas compris. En 2022, l’idée de ne pas inclure la Russie dans cette proposition de configuration en change la nature. Même si reste entière la question des relations à réinventer avec la Russie, exercice qui ne peut se faire qu’avec la Russie. Reste à savoir quelle Russie.
[8] NDLR : Pour mémoire, selon un rapport du Sénat (France), sept des treize Etats devenus membres depuis 2004 sont en délicatesse avec l’état de droit en 2021. Cf. « L’État de droit dans l’Union européenne », Rapport d’information de MM. Philippe Bonnecarrère et Jean-Yves Leconte, fait au nom de la commission des affaires européennes (du Sénat, France), n° 457 (2020-2021) - 18 mars 2021. Voir aussi « Quelles variations de l’État de droit dans l’Union européenne ? Entretien avec Jean-Yves Leconte », publié le 30 mai 2021 sur Diploweb.com à l’adresse https://www.diploweb.com/Quelles-variations-de-l-Etat-de-droit-dans-l-Union-europeenne-Entretien-avec-Jean-Yves-Lecomte.html
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