Géographe et photographe, travaille en indépendant à la réalisation de récits documentaires, notamment photographiques et vidéographiques, ainsi qu’à des articles de fond. Alexandre Mouthon développe également une activité d’analyste consultant et de formateur à la fabrique des images dans leurs interrelations avec les sociétés.
Cette contribution propose aux lecteurs du Diploweb.com cinq infographies téléchargeables. Elles placent la ville canadienne de Toronto (Ontario), centre économique du pays, dans les dynamiques migratoires chinoises. Ces documents éclairent autant sur la place de la Chine dans le monde d’aujourd’hui que sur l’attractivité du Canada.
La métropole canadienne (carte 1) est devenue depuis la décennie 1990 la plus importante « Chinatown » d’Amérique du Nord.
La dernière campagne du Recensement canadien (2016) vient de s’achever. Les résultats seront communiqués, par étapes, tout au long de l’année 2017. Les données des recensements précédents, ceux de 2006 et de 2011, mettent clairement en évidence la part croissante des immigrants originaires de Chine dans le flux des entrées légales au Canada et la place prépondérante qu’occupe Toronto dans leurs choix de destinations. Les 5 années écoulées ne laissent en rien présager que les chiffres du Recensement de 2016 annonceront une diminution ou un ralentissement de l’immigration chinoise au Canada en général et à Toronto en particulier. Les langues chinoises sont les plus parlées des langues immigrantes (Schéma 1).
Nous serons fixés à l’automne 2017, lorsque Statistique Canada publiera les données 2016 relatives à l’immigration. Au-delà de l’exactitude des statistiques, le « Fait chinois », est devenu incontournable dans le paysage des principales métropoles canadiennes, notamment à Toronto, à Vancouver et à Montréal. La diversité des origines géographiques apparaît comme un facteur essentiel à la compréhension de l’histoire des différentes vagues migratoires (Schéma 2) et de la répartition spatiale des immigrants à Toronto (Schéma 3).
En effet, à partir des années 1980, les Hongkongais sont les plus nombreux à arriver à Toronto avec les réfugiés de Tienanmen. Puis, au cours des décennies 1990 et 2000, on observe une inversion de la tendance au profit des immigrants de Chine continentale. Ces dernières générations sont plutôt des diplômés de l’ouverture économique récente. La distribution spatiale des quartiers chinois de Toronto fait apparaître un modèle centre-périphérie. A la Chinatown historique du centre, principalement peuplée par des Chinois du continent et des Sino-vietnamiens, en situation souvent précaires, s’oppose une « Chinatown » suburbaine, organisée par des migrants plus aisés, originaires de Hong Kong, de Taiwan et de plus en plus de Chine continentale. C’est sur cette dernière origine géographique et sur sa présence croissante en banlieue que les futures données statistiques nous éclairerons surtout. Ce modèle spatial s’observe dans toutes les métropoles nord-américaines. La littérature anglo-saxonne les désigne par le terme « ethnoburbs » (des quartiers ethniques de banlieue).
À l’échelle de Toronto, la géographie de ces quartiers est pourtant plus originale. Au centre, la Chinatown historique se divise en 3 quartiers, très proches les uns des autres. En périphérie, le « chinese ethnoburb » se partage principalement en deux grandes concentrations (carte 2).
La Chinatown historique longtemps perçue comme une enclave ethnique refuge, est devenu, dans les représentations des Chinois suburbains, un espace d’ordre patrimonial. Son poids démographique est en constante diminution au profit des banlieues.
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Pour accompagner la lecture de ces cinq documents, il est intéressant d’avoir quelques repères historiques sur les politiques successives d’encadrement de l’immigration chinoise au Canada.
Les premiers chinois débarquèrent à l’Ouest du pays au milieu du XIXe siècle. C’est à Vancouver-Victoria que l’on trouve les plus anciennes Chinatowns. Une loi d’exclusion entre en vigueur en 1923-1924 et perdure jusqu’en 1947. Entre 1947 et 1962-1967, elle évolue en une politique de restriction, plus souple. L’immigration des origines jusqu’aux années 1950-1960 concerne principalement des Chinois du continent. Les Hongkongais et les Chinois d’Asie du sud-est amorcent leur arrivée dans ces deux décennies. Après 1967, l’immigration est plus sélective, elle se base sur des critères socio-économiques. Les années 1970 et 1980 sont un tournant majeur, elles permettent le rapprochement familial pour les Chinois du continent et l’ouverture économique des réformes de Deng Xiaoping permet une reprise des sorties. En parallèle, les Hongkongais affluent. La rétrocession de la colonie britannique à la Chine en 1997 marque un ralentissement de cet exil.
Nos travaux, débutés à Toronto en 1999-2000 (par l’étude du Recensement de 1996), nous ont permis d’observer, à la fois, la croissance très forte des banlieues hongkongaises de Toronto, et la tendance très marquée des arrivées de Chine continentale vers les banlieues. Nous avions alors mené une étude qualitative, sur les représentations des Chinatowns centrales, véhiculées par les immigrants Hongkongais. Il conviendrait, à l’avenir, de renouveler cette étude, sur un nouveau corpus, constitué d’immigrants en provenance de Chine continentale, en résonance avec la place que leur accordera le résultat du Recensement 2016.
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