Géopolitique de l’Union européenne. Le traité de Lisbonne renforcerait indéniablement les moyens de puissance de l’Union européenne tant sur la scène internationale que sur le plan interne, à travers des instruments nouveaux, des institutions renouvelées et des procédures élargies qui viendraient affermir sa dimension supranationale. Ce texte révèle aussi la complexité du système géopolitique européen. Il dessine en effet un paysage marqué par l’indétermination du projet de puissance et induit un certain nombre de rapports de forces entre les différents acteurs du système communautaire.
Ce mémoire de géopolitique a été rédigé au Collège interarmées de défense dans le cadre du séminaire dirigé par Pierre Verluise.
Ce texte a été clos le 21 mars 2008. Il ne peut donc pas aborder les suites du "non" irlandais de juin 2008. C’est pourquoi, à la fin de cet article, un encadré présente un court texte de la Commission européenne qui fait le point à ce sujet en décembre 2008, avec des liens pour suivre l’évolution de la ratification.
INTRODUCTION
« Traité européen : les outils sont exactement les mêmes, seul l’ordre a été changé dans la boîte à outils » [1]. C’est sous ce titre, qui sonne comme une reconnaissance de filiation, que le Président Valéry Giscard d’Estaing a publié une tribune visant à démontrer que le traité de Lisbonne reprenait l’essentiel des dispositions contenues dans le projet de Constitution européenne dont il a dirigé la rédaction [2]. C’est en effet sur les cendres de ce projet constitutionnel, avorté depuis le rejet par les peuples français et néerlandais en mai et juin 2005, qu’est né ce texte. Pour sortir de l’impasse institutionnelle et en partie sous l’impulsion de la France, les Etats membres se sont mis d’accord au Conseil européen de Bruxelles des 21 et 22 juin 2007 sur les grandes lignes d’un projet dont la rédaction juridique a été confié à une conférence intergouvernementale. Officiellement approuvé au Portugal lors d’un sommet européen informel les 19 et 20 octobre 2007, ce nouveau traité a été signé par les chefs d’Etats et de gouvernements des Etats membres de l’Union européenne le 13 décembre 2007 à Lisbonne.
Initialement présenté comme un « mini-traité » puis comme un « traité simplifié », ce texte a été rebaptisé « traité modificatif ». On parle désormais de traité de Lisbonne [3], dans la lignée des traités de Maastricht (1992), d’Amsterdam (1997) et de Nice (2001). Contrairement à ce qu’on pouvait attendre d’un projet « simplifié », ce traité est un texte difficile d’accès, quasiment illisible en tant que tel pour le citoyen ordinaire. A l’inverse du projet de Constitution européenne qui présentait un ensemble consolidé, il s’agit ici d’un texte de plus de cent cinquante pages qui est en réalité un catalogue d’amendements aux traités antérieurs. D’où son nom de traité « modificatif », car il vient modifier les traités de Rome (traité de 1957 instituant la Communauté européenne qui devient traité sur le fonctionnement de l’Union-TFUE) et de Maastricht (qui garde son nom de traité sur l’Union européenne-TUE). Au total, ce sont plus de trois cent cinquante dispositions de droit primaire, assorties de treize protocoles et de soixante-cinq déclarations annexes. Le traité de Lisbonne n’est donc nullement un « mini-traité ». Il ne peut se comprendre qu’à la lumière des traités précédents qu’il vient modifier. Le total représente un ensemble de plus de trois mille pages.
Au-delà de l’analyse juridique qui a son importance, plus intéressant, nous semble-t-il, est de s’interroger sur la portée géopolitique de ce texte pour l’Union européenne. Autrement dit, il s’agit de développer une approche articulée autour du concept de puissance, tant sur la scène européenne qu’au plan extra-communautaire. La problématique sera centrée sur les nouveaux rapports de forces que devraient engendrer ce traité entre les principaux acteurs que sont l’Union européenne, acteur supranational, et les Etats membres, acteurs nationaux. La principale difficulté de cette démarche réside dans sa dimension essentiellement prospective.
Privé de la dimension symbolique dont était revêtue le projet de Constitution européenne, le traité de Lisbonne est présenté par certains observateurs comme un texte finalement peu ambitieux, de nature essentiellement institutionnelle et dont la vocation unique serait de remettre techniquement sur les rails le fonctionnement de l’Union européenne. S’il ne faut certes pas sur-interpréter ce traité, il serait contestable de se limiter à une lecture superficielle et de ne pas y voir les déterminants de puissance qui lui confèrent une réelle dimension géopolitique.
A la question des conséquences du traité de Lisbonne sur la puissance de l’Union européenne, le souci d’éviter toute interprétation excessive et le respect d’une démarche intellectuelle réaliste, nous invitent à donner une réponse nuancée.
Si l’on regarde les principales évolutions, le traité de Lisbonne renforce indéniablement les moyens de puissance de l’Union européenne (1ère partie) tant sur la scène internationale que sur le plan interne, à travers des instruments nouveaux, des institutions renouvelées et des procédures élargies qui viennent affermir sa structure supra-étatique.
Au chapitre des limites, on peut voir que ce traité révèle aussi la complexité du système géopolitique européen (2ème partie). Il dessine un paysage marqué par l’indétermination du projet de puissance et induit un certain nombre de rapports de forces entre les différents acteurs du système européen.
Afin de ne pas produire de déterminisme quant à l’issue du processus de ratification qui vient de commencer en décembre 2007, nous utiliserons par convention le conditionnel pour présenter les incidences de ce traité en cas de mise en œuvre effective à partir du 1er semestre 2009. Par ailleurs et afin de ne pas créer de confusion, la numérotation des articles correspond à celle de la dernière version officielle du traité de Lisbonne, telle que présentée par la Conférence des représentants des gouvernements des Etats membres le 3 décembre 2007 à Bruxelles [4].
Cette première partie de l’étude s’attache à mettre en lumière les innovations particulièrement significatives introduites par le traité de Lisbonne, innovations qui viennent renforcer la puissance de l’Union européenne sur les scènes internationale (1.1.) et européenne (1.2.).
1.1. De nouvelles capacités d’action sur la scène internationale
Le traité de Lisbonne introduit trois instruments nouveaux qui peuvent, à terme, renforcer la visibilité et l’efficacité de l’Union européenne sur la scène mondiale. Il est intéressant de constater que cette montée en puissance n’est pas sans conséquence possible sur les politiques extérieures des Etats membres.
1.1.1. Une personnalité juridique propre
La structure en trois piliers [5] introduite par le traité de Maastricht est abolie. La Communauté européenne disparaît au profit de l’Union européenne. Cette dernière est désormais dotée de la personnalité juridique [6]. En 2007, seule la Communauté européenne la détient officiellement, essentiellement dans les domaines économiques et commerciaux. Elle devrait donc avoir la capacité de conclure, en son nom propre et non plus simplement au nom des Etats membres, des accords internationaux et siéger au sein des institutions internationales dans tous les domaines de l’action extérieure relevant de sa compétence, domaines qui s’élargissent constamment [7].
Cette innovation est beaucoup significative qu’il n’y paraît à première vue. Dotée d’une personnalité distincte de ses Etats membres, l’Union européenne ne dirait plus « nous » mais « je ». Autrement dit, ce statut lui permettrait de ne plus recourir aux Etats membres pour assurer ses engagements vis-à-vis de l’extérieur. Le cadre juridique se trouverait dès lors clarifié. Identifiée désormais comme interlocuteur unique, l’entité « Union européenne » bénéficierait ainsi d’une plus grande autonomie de négociation et de représentation sur le plan international. Cela revêt une importance particulière pour les opérations relevant de la politique européenne de sécurité et de défense, en facilitant potentiellement l’établissement de certains actes juridiques dans les Etats tiers sur le territoire desquels elles interviennent. [8]
Selon une jurisprudence désormais bien établie [9], les Etats membres restent libres de conclure des accords internationaux, pour autant qu’ils soient compatibles avec ceux conclus par l’Union européenne. De plus, le « principe d’attribution » garantit que l’Union européenne ne puisse étendre ses compétences aux dépens de celles des États membres sans leur accord.
Toutefois, pour ces derniers, le principal risque est de voir l’Union européenne s’engager dans une logique maximaliste et revendiquer de plus en plus de prérogatives au nom d’une légitimité supérieure. Poussé à l’extrême, ce processus pourrait à terme conduire l’Union européenne à se substituer aux Etats membres sur la scène internationale dans de nombreux domaines de compétence.
L’attribution de la personnalité juridique porte ainsi en germe la question de la représentation de l’Union européenne au Conseil de sécurité des Nations-Unies. On peut alors envisager, lorsque les conditions politiques seront réunies, la création d’un siège unique de l’Union européenne au Conseil de sécurité et dans d’autres organisations internationales, les Etats membres titulaires de ces sièges, notamment le Royaume-Uni et la France, devant peu à peu s’effacer…
1.1.2. Un Président stable du Conseil européen
Le traité de Lisbonne propose de donner un visage et une voix à l’Union, en la personne d’un Président [10], élu à la majorité qualifiée par les vingt-sept chefs d’Etats et de gouvernements, pour une durée de deux ans et demi, renouvelable une fois. Il s’agit d’une avancée en termes d’identification de l’Union européenne devant les Européens et le reste du monde. Ce Président coordonnerait les travaux du Conseil européen et serait chargé de donner les impulsions et les orientations nécessaires à l’Union.
Il est intéressant de voir que ce Président serait élu par le Conseil, mais non en son sein, puisqu’il ne peut exercer de mandat national. Dans le système actuel de la présidence tournante semestrielle, le Président du Conseil européen est en même temps chef d’Etat ou de gouvernement d’un des Etats membres. Son identité politique nationale l’emporte le plus souvent sur son identité européenne. Dans le cas qui nous intéresse, il s’agit au contraire d’un Président à temps plein, indépendant de toute contingence nationale, qui deviendrait ainsi un véritable personnage politique européen, au même titre que les Présidents de la Commission et du Parlement.
La création de ce poste est censée donner une meilleure visibilité à l’action de l’Union européenne. Le Président du Conseil européen assurerait, à son niveau et en sa qualité, la représentation extérieure de l’Union pour les matières relevant de la politique étrangère et de sécurité commune.
Il est à noter qu’il risque toutefois d’entrer en concurrence avec plusieurs autres acteurs de l’Union : le Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité que nous présenterons plus loin, le Président de la Commission et les Etats membres, ces derniers continuant à assurer la présidence semestrielle des formations du Conseil, à l’exception de celle des affaires étrangères.
1.1.3. Un Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
Cette personnalisation de la politique extérieure de l’Union européenne se manifeste également par la création d’un poste de Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité [11]. Ce poste regrouperait les fonctions de l’actuel haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune [12] et du commissaire européen aux relations extérieures [13]. Pour la première fois la diplomatie européenne aurait un visage unique. Ce Haut représentant aurait donc un double statut. En tant que membre du Conseil, il proposerait et conduirait la politique étrangère et de sécurité commune et présiderait le Conseil des ministres des affaires étrangères. De plus, il serait l’un des vice-présidents de la Commission, chargé de l’action extérieure.
Il est important de noter que ce Haut représentant disposerait d’un service européen pour l’action extérieure [14]. Ce véritable service diplomatique serait composé de fonctionnaires de la Commission, du Conseil [15] et des États membres, chacun apportant son expertise au service d’une véritable culture diplomatique commune. Il s’appuierait géographiquement sur le réseau des cent quatre-vingt-six délégations de l’Union européenne de part le monde, représentant près de cinq mille fonctionnaires européens.
La répartition par grandes zones géographiques s’établit, en mars 2008, de la manière suivante :
. Amérique du Nord : 3 délégations ;
. Amérique centrale et Caraïbes : 22 délégations ;
. Amérique du Sud : 10 délégations ;
. Europe occidentale : 8 délégations ;
. Europe orientale et Asie centrale : 19 délégations ;
. Méditerranée et Moyen-Orient : 20 délégations ;
. Afrique : 48 délégations ;
. Asie du Nord-est et du Sud : 16 délégations ;
. Asie du Sud-est : 11 délégations ;
. Australie-Pacifique : 16 délégations ;
. Organisations internationales et régionales [16] : 13 délégations.
Ce regroupement des responsabilités aurait très probablement pour effet de renforcer la cohérence de l’action extérieure de l’Union européenne. Il permettrait, par exemple, de mettre fin aux luttes d’influences que l’on constate souvent sur le terrain entre le Conseil (Représentant spécial de l’UE) et la Commission (chef de délégation de la Commission européenne). Le nouveau Haut représentant / Vice-président de la Commission disposerait à la fois de la diplomatie de l’ex-2ème pilier (politique étrangère et de sécurité commune), des moyens financiers relevant de la Commission et du réseau diplomatique précité.
Pour autant, le « numéro de téléphone » unique de l’Europe, que cherchait en vain dans les années soixante-dix le Secrétaire d’Etat américain Henry Kissinger, n’est pas pour demain. Comme nous l’avons vu précédemment en évoquant la création d’un Président du Conseil européen, la question de la représentation de l’Union européenne sur la scène internationale n’est pas totalement réglée par le traité de Lisbonne. Des adaptations structurelles devraient très probablement intervenir.
Comme on le sait, la politique étrangère proprement dite constitue un domaine sensible et stratégique. Elle continuera, au moins à moyen terme, à relever de la compétence souveraine des Etats membres. Toutefois, sans être remis en cause à ce jour, cette autonomie serait doublement encadrée par le traité modificatif.
D’une part, par l’obligation faite à chaque Etat membre, avant d’entreprendre toute action sur la scène internationale, de consulter les autres au sein du Conseil européen, au titre d’une solidarité européenne [17]. Dans le même esprit, les ambassades des Etats membres et les délégations de l’Union dans les pays tiers seraient invitées à coopérer pour contribuer à la formulation et à la mise en œuvre d’une approche commune [18].
D’autre part, par l’obligation faite au Royaume-Uni et à la France de demander à ce que le Haut représentant soit invité à présenter la position de l’Union au Conseil de Sécurité des Nations-Unies, chaque fois que l’Union européenne aurait défini une position sur un thème inscrit à l’ordre du jour dudit Conseil [19].
Par ailleurs, à plus long terme, la montée en puissance du service diplomatique européen poserait inévitablement la question de l’aménagement du réseau des ambassades de chacun des vingt-sept Etats membres. Plusieurs solutions sont envisageables, allant de la mutualisation des moyens jusqu’au regroupement sous la bannière unique de l’Union européenne.
Avec le traité de Lisbonne, l’Union européenne devrait donc disposer d’un potentiel d’influence lui permettant de jouer un rôle d’acteur global à part entière dans le jeu mondial.
Sur le plan interne, on peut également observer cette dynamique de montée en puissance.
1.2. Des institutions de plus en plus indépendantes des Etats membres
Le traité de Lisbonne apporte des modifications substancielles au triangle institutionnel constitué par le Conseil des ministres, la Commission et le Parlement. On notera que ces institutions européennes apparaissent comme de plus en plus indépendantes des Etats membres.
1.2.1. Le nouveau Conseil des ministres de l’Union européenne
L’objectif du traité de Lisbonne consiste à renforcer la capacité de l’Union européenne, élargie à vingt-sept membres, à prendre des décisions et à agir. Cette simplification du processus de décision passe essentiellement par l’adoption d’une nouvelle règle de vote au Conseil des ministres.
A la différence du Parlement européen, où l’on vote à la majorité simple, la règle de vote au Conseil prend en compte le poids respectif de chaque État membre, de manière à ce que les décisions votées reflètent à la fois la volonté de la majorité des citoyens européens mais aussi la réalité du poids des États membres. C’est ce que l’on appelle la « double majorité » des États et des citoyens. Cette question est particulièrement délicate sur le plan politique.
Jusqu’à maintenant, la majorité qualifiée est définie par un système de pondération des voix selon lequel les États membres bénéficient d’un certain nombre de voix, pour une large part en fonction de leur poids démographique. Le traité de Lisbonne y substitue un système qui se veut théoriquement plus transparent et plus démocratique mais qui reste très complexe.
Jusqu’en octobre 2014, le système actuel, issu du traité de Nice, serait utilisé. Il prévoit trois critères nécessaires pour obtenir la majorité qualifiée : le seuil des voix pondérées (au moins deux cent cinquante-cinq voix sur trois cent quarante-cinq, soit 73,9 %), exprimant le vote favorable de la majorité des membres (quatorze sur vingt-sept) et représentant 62 % de la population de l’UE [20].
A partir de novembre 2014 [21], un nouveau système se mettrait en place. Il serait fondé sur le double critère des États et des populations : une proposition de la Commission est adoptée si elle obtient au moins l’accord de 55% des États membres (soit quinze États membres dans une Union européenne composée à ce jour de vingt-sept États membres) représentant au moins 65% de la population de l’Union européenne. Une minorité de blocage doit inclure au moins quatre États membres.
Il est à noter que, lorsque le Conseil ne statue pas sur proposition de la Commission ou du Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, le critère des « Etats » passe de 55% à 72 %, le critère de la « population » restant lui inchangé. Ce point est important car il devrait modifier indirectement l’équilibre au sein du triangle institutionnel au profit de la Commission dont il serait plus difficile de bloquer les propositions.
Enfin, entre novembre 2014 et mars 2017, tout État membre pourrait demander, au cas par cas, que ce soient les règles du traité du Nice qui s’appliquent [22].
Le système de la double majorité est supposé être plus efficace en comparaison du système inscrit dans le traité de Nice, puisqu’il facilite la formation des majorités, donc la prise de décision [23].
Le renforcement de l’efficacité du dispositif décisionnel passe aussi par une extension du vote à la majorité qualifiée à de nouveaux domaines.
Avec le traité de Lisbonne, la majorité qualifiée deviendrait le mode décision ordinaire. Son champ d’application s’élargirait considérablement. Le traité prévoit ainsi l’extension à trente-trois nouveaux articles. Avec les soixante-trois articles qui relèvent déjà de la majorité qualifiée s’agissant d’affaires communautaires, quatre-vingt-seize articles devraient être concernés par ce type de vote, qu’il s’agisse de nouvelles compétences explicitement transférées à l’Union européenne [24] ou du passage de la règle de l’unanimité à celle de la majorité qualifiée.
De plus, le mécanisme des « clauses passerelles » [25] permettrait au Conseil européen de décider, à l’unanimité et sauf en matière de défense, le passage au vote à la majorité qualifiée dans tel ou tel domaine.
Le recours à l’unanimité, où chaque Etat membre conserve son entière liberté de prise de décision, serait donc considéré comme l’exception. Seuls les domaines sensibles (fiscalité, sécurité sociale, coopération policière opérationnelle, régime linguistique, sièges des institutions, ratification des traités et adhésion de nouveaux membres) y resteraient soumis.
On peut souligner que le domaine de la PESD continuerait à relever, sur le principe, du champ de l’unanimité mais que certains « îlots » de majorité qualifiée commenceraient à surgir çà et là : désignation du Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité [26], décisions concernant le statut et le siège de l’Agence européenne de défense [27], décision en matière de coopération structurée permanente [28] (établissement, admission ou suspension d’un Etat membre).
La nature du Conseil se trouverait profondément modifiée par ces nouvelles dispositions. En votant à la majorité qualifiée, le Conseil deviendrait de moins à moins intergouvernemental et de plus en plus supranational [29]. L’extension générale des décisions à la majorité qualifiée est en effet un critère sûr de progression de la supranationalité : « la prise de décision à la majorité qualifiée distingue l’Union européenne de toute autre organisation internationale et fait qu’elle peut être considérée comme une organisation supranationale. Le vote à la majorité qualifiée en constitue en quelque sorte son signe de fabrique » [30].
1.2.2. La nouvelle Commission européenne
Depuis le traité de Nice, la Commission est composée d’un représentant issu de chaque Etat membre, soit vingt-sept commissaires depuis janvier 2007. Ce système a deux conséquences. Tout d’abord, un risque de nationalisation de la Commission, pourtant chargée de défendre l’intérêt général européen, chaque commissaire ayant la tentation de représenter son Etat d’origine. Ensuite, une sur-représentation des Etats faiblement peuplés par rapport aux puissances démographiques.
Le traité de Lisbonne prévoit de maintenir cette architecture jusqu’en 2014, notamment pour satisfaire les pays faiblement ou moyennement peuplés. A partir de cette date, la Commission aurait un format plus réduit. Le nombre de commissaires correspondrait aux deux tiers des États membres, soit dix-huit dans une Union européenne composée de vingt-sept pays. Les membres seraient sélectionnés selon un système de rotation égalitaire entre les États, fondé sur le principe de stricte égalité de traitement entre pays pour l’ordre de passage et le temps de présence [31].
Autrement dit, tous les deux mandats, un tiers des Etats membres n’aurait aucun commissaire pendant cinq ans. Même si théoriquement les commissaires ne représentent pas leur Etat, ce nouveau système représenterait, sur le plan pratique, la perte d’un certain pouvoir d’influence pour les Etats membres.
En modifiant la composition de la Commission, le traité de Lisbonne est en train de transformer ce collège à responsabilité collective en une véritable institution de nature gouvernementale. En supprimant l’automaticité de la règle « un Etat, un commissaire », le traité modificatif renforcerait la place centrale et le caractère supranational de la Commission qui continuerait de jouer un rôle moteur dans le processus décisionnel de l’Union européenne.
1.2.3. Le nouveau Parlement européen
Avec le traité de Lisbonne, le Parlement européen, qui est la seule institution de l’Union européenne à être élue au suffrage universel direct, voit ses pouvoirs et son poids politique fortement accrus au sein du triangle institutionnel.
Les pouvoirs du Parlement [32] sont renforcés en matière législative, budgétaire et de contrôle politique.
En matière législative, le principe de codécision législative entre le Conseil des ministres et le Parlement européen est étendu à près de cinquante nouveaux domaines comme le contrôle des personnes aux frontières, l’accueil et le traitement des demandeurs d’asile et la lutte contre l’immigration clandestine. Cette procédure donne au Parlement européen des pouvoirs législatifs comparables à ceux du Conseil des ministres.
En matière budgétaire, le Parlement européen se verrait reconnaître un droit de décision égal à celui du Conseil des ministres, notamment pour l’adoption de l’ensemble du budget annuel, alors que le Conseil a aujourd’hui le dernier mot sur les dépenses dites« obligatoires » qui représentent une large part du budget européen et notamment les dépenses agricoles.
En matière de contrôle politique et sur le modèle d’un Parlement national investissant un gouvernement, le Parlement européen élit le Président de la Commission sur proposition du Conseil européen. Le Parlement doit tenir compte des résultats des élections européennes et de la majorité sortie des urnes. Cela doit conduire à donner au Président de la Commission une légitimité démocratique plus grande. Cela contribuerait également à la politisation des élections européennes et donc à donner du poids au vote des citoyens européens qui pourront dès lors influencer le cours de la vie politique européenne.
Le Parlement européen n’apparaît plus comme l’assemblée représentative des « peuples d’Europe » mais comme celle des « citoyens de l’Union ». Cela constitue une rupture philosophico-politique très importante, traduisant le passage d’une logique des Etats à une logique des populations.
Le nouveau Parlement européen, qui sera élu en juin 2009, sera composé de sept cent cinquante députés (plus le Président du Parlement) élus pour cinq ans. Chaque Etat membre aura entre six députés, seuil inférieur, et quatre-vingt-seize députés, seuil supérieur.
1.2.4. La nouvelle Cour de justice de l’Union européenne
Ce panorama institutionnel ne serait pas complet si on ne disait pas quelques mots de la Cour de justice de l’Union européenne.
A l’instar du Parlement ou de la Commission, la Cour de Luxembourg est aussi une des grandes gagnantes de l’évolution institutionnelle contenue dans le traité de Lisbonne. Abandonnant son ancienne appellation de Cour de justice des Communautés Européennes, elle deviendrait la Cour de justice de l’Union européenne [33].
Cette institution juridictionnelle reste chargée du respect et de l’interprétation du droit de l’Union européenne sur l’ensemble de son territoire, du règlement des différends entre les États membres, mais aussi entre l’Union et les États membres ainsi qu’entre les institutions et entre les citoyens de l’Union européenne.
Elle acquiert un statut comparable à une cour suprême du fait de la primauté absolue du droit européen sur les droits nationaux, y compris constitutionnels, que vient confirmer une déclaration annexe au traité de Lisbonne [34].
Son champ de compétences s’élargit considérablement en même temps que celles de l’entité « Union européenne » (compétences exclusives et partagées) et en raison de la fusion des trois piliers. Elle peut ainsi contrôler la légalité des actes du Conseil européen, car celui-ci devient formellement une institution de l’Union [35].
Elle devient par ailleurs une sorte de juge suprême des droits et libertés fondamentales par la force contraignante donnée à la Charte des droits fondamentaux [36] annexée au traité de Lisbonne [37]. Elle a donc vocation à décider en dernier ressort dans toute une série de contentieux relatifs à ces droits, libertés et principes. Ces droits fondamentaux se définissent comme un ensemble évolutif de droits considérés en raison de leur importance comme s’imposant au législateur et au pouvoir réglementaire. Ce sont des droits naturels inhérents à la personne humaine. Ils comprennent essentiellement les droits de l’Homme et les libertés fondamentales englobant des droits civils, politiques, sociaux et économiques.
Dotées de prérogatives supplémentaires, les institutions européennes issues du traité de Lisbonne arboreraient un visage nouveau et s’émanciperaient progressivement de la tutelle des Etats membres.
Conclusion de la première partie
En ouvrant de nouvelles brèches dans le monopole de souveraineté traditionnellement détenu par les Etats-nations [38] et en dotant l’Union européenne d’outils nouveaux, le traité de Lisbonne serait porteur de potentialités certaines en termes de puissance.
Sans pouvoir encore parler d’Etat européen supranational, force est de constater que l’Union européenne poursuivrait sa montée en puissance. Elle se doterait progressivement des attributs de la souveraineté avec des organes de décision, des structures d’exécution, des services diplomatiques et un système juridictionnel. En acquérant sa propre personnalité, l’entité politique « Union européenne » se consoliderait de plus en plus, indépendament des Etats membres.
Ceux-ci apparaitraient désormais plus en situation de dominés que de dominateurs dans le système géopolitique européen.
Si le traité de Lisbonne est porteur de nouveaux moyens de puissance au profit de l’Union européenne, il dessine aussi une réalité géopolitique européenne complexe.
Cette deuxième partie de l’étude vise à démontrer que le traité de Lisbonne ne vient pas combler le déficit de sens de l’Union européenne (2.1.). Il crée, en revanche, de nouveaux rapports de forces entre les différents acteurs du système géopolitique communautaire (2.2.).
2.1. Un projet de puissance qui reste à définir
Le traité de Lisbonne ne dit toujours pas ce qu’est l’Union européenne et quels sont ses objectifs stratégiques. La politique européenne de sécurité et de défense témoigne de cette ambition hésitante. La question de la légitimité démocratique n’est que partiellement réglée.
2.1.1. Indétermination de la nature et des objectifs de l’Union européenne
L’Union européenne apparaît comme un « objet politique non identifié » pour reprendre une formule chère à Jacques Delors. On peut constater que le mystère demeure puisque le traité de Lisbonne n’apporte finalement que peu d’éléments précis sur la nature et les finalités géopolitiques de cette entité. Les questions relatives au sens du projet européen et à ses objectifs de puissance ne trouvent donc pas de réponses satisfaisantes.
Il demeure difficile de définir ce qu’est l’Union européenne : organisation régionale, confédération, fédération d’Etats-nations, super-Etat ou structure intermédiaire sui-generis ? L’indétermination fondamentale persiste. Tout au plus, le préambule du traité précise-t-il les valeurs universelles sur lesquelles repose l’Europe : droits inviolables et inaliénables de la personne humaine, démocratie, liberté et Etat de droit. Ceci irait dans le sens de l’affirmation d’une identité européenne.
Le traité de Lisbonne ne prétend pas à une valeur plus solennelle que les traités précédents qu’il vient amender. Sous la pression d’un certain nombre d’Etats comme le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Pologne et la République tchèque, inquiets d’une possible dérive vers la création d’un Etat européen, les rédacteurs du texte ont ainsi abandonné les symboles et terminologies de nature étatique qui étaient présents dans le projet de Constitution européenne : le drapeau, l’hymne, la devise, le jour de l’Europe ainsi que les termes de « lois » [39], « lois-cadre », « ministre des affaires étrangères » et bien-sûr « constitution » ne figurent donc plus dans ce traité.
Les objectifs de l’Union européenne sont, pour leur part, définis en termes très généraux. Le traité de Lisbonne ne détermine pas une stratégie de puissance mais dresse un catalogue de valeurs universelles [40] à défendre, dont on peut ici donner quelques exemples significatifs : économie sociale de marché, lutte contre l’exclusion sociale et les discriminations, justice sociale, solidarité entre les générations, protection des droits de l’enfant, cohésion territoriale, promotion du progrès scientifique et technique, respect de la diversité culturelle et linguistique, sauvegarde et développement du patrimoine culturel, protection des citoyens de l’Union européenne, développement durable de la planète, solidarité entre les peuples, commerce libre et équitable, élimination de la pauvreté et protection des droits de l’Homme… L’Union européenne apparaît donc comme une puissance essentiellement « normative » [41] qui use d’instruments du « soft power ». Cette préférence pour la norme, par opposition à la force, ne doit toutefois pas conduire l’Union européenne à négliger ses ambitions de puissance dans le système international. [42]
Dans le même esprit, s’agissant de l’élargissement de l’Union européenne, aucune limitation d’ordre géographique ou civilisationnel n’est explicitement posée par le traité de Lisbonne. Ce dernier se contente rappeler le principe du respect des valeurs de l’Union européenne [43] par l’Etat candidat à l’adhésion. Une référence implicite est faite aux trois « critères de Copenhague » définis en 1993, à savoir un critère politique [44], un critère économique [45] et le critère de l’acquis communautaire [46].
S’il permettrait probablement à l’Union européenne de décider et d’agir, le traité de Lisbonne ne dit pas ce que sera l’Europe de demain. Aussi, cette question fondamentale de l’avenir de l’Union européenne est renvoyée à un « comité des sages », présidé par Felipe Gonzalez, ancien Premier ministre espagnol. Ce comité sera chargé de réfléchir à la question essentielle : « Quelle Europe en 2020-2030 et pour quelles missions ? ».
2.1.2. Avancée et limite de la politique européenne de sécurité et de défense
Dans le traité de Lisbonne, la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) apparaît en trompe-l’œil.
Certes, des avancées intéressantes sont à relever. Ainsi, les missions de la PESD sont élargies. Aux trois missions traditionnelles dites « de Petersberg » [47], le traité de Lisbonne vient ajouter [48] les actions conjointes en matière de désarmement, les missions de conseil et d’assistance en matière militaire, les missions de prévention des conflits et les opérations de stabilisation à la fin des conflits, ces missions pouvant contribuer à la lutte contre le terrorisme. Cet enrichissement, conforme à la Stratégie européenne de sécurité (2003) et déjà mis en œuvre sur le terrain, notamment en République Démocratique du Congo, s’inscrirait bien dans l’approche globale de la gestion des crises.
Par ailleurs, l’introduction d’une clause de solidarité entre les Etats membres [49] et d’un devoir d’aide et d’assistance mutuelle [50] contribuerait au développement d’un esprit de solidarité européenne. Elle lèverait également le paradoxe selon lequel l’Union européenne est capable d’exporter de la stabilité hors de ses frontières mais n’est pas en mesure, par elle-même, d’assurer la sécurité de son territoire et de sa population.
Pour autant, la PESD reste frappée par une limite congénitale. En effet, l’OTAN demeure le cadre de la défense européenne. Les dispositions inscrites dans le traité de Maastricht (1992) sont ainsi reprises par le traité de Lisbonne [51] : la PESD doit respecter les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord qui reste, pour les Etats qui en sont membres [52], le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre. Cette obligation de conformité entre les engagements souscrits au titre de la PESD et ceux souscrits au titre de l’OTAN apparaît comme un oxymore. On peut alors légitimement s’interroger sur le degré de dépendance que cette disposition fait peser sur la PESD. On touche là un point crucial. L’Union européenne se voit-elle comme une véritable puissance sur la scène mondiale ou comme un simple bloc de l’ensemble euro-atlantique ? Telle est la question à laquelle il est aujourd’hui encore impossible de répondre tant sont diverses les visions de la PESD parmi les vingt-sept Etats membres [53].
2.1.3. La question de la légitimité démocratique de l’Union européenne
Dans cette étude sur la puissance on ne peut faire l’économie d’une courte analyse de la légitimité démocratique de l’Union européenne.
Le déficit démocratique est en effet une critique récurrente formulée par certains Européens à l’encontre de l’Union européenne, de ses politiques et de ses institutions jugées trop technocratiques. Ce problème du « lien avec les peuples » avait déjà fait l’objet d’intenses débats lors des discussions préparatoires au projet de Constitution européenne. A tel point que le Président Valéry Giscard d’Estaing, président de la Convention chargée de la rédaction du projet, avait alors proposé la création d’un Congrès des peuples formé de représentants des Parlements nationaux. Cette proposition n’avait pas été retenue.
Le traité de Lisbonne s’efforce de renforcer la démocratisation de l’Union européenne en créant deux mécanismes nouveaux dont la portée doit être tout de même nuancée.
Afin de favoriser la participation des citoyens à la vie politique européenne, un droit d’initiative populaire serait créé [54]. Le critère quantitatif retenu est celui d’un million de signatures au moins, provenant d’un nombre significatif d’États membres. Cependant, cette mobilisation citoyenne aurait pour seul effet « d’inviter la Commission européenne, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée » au Conseil des ministres et au Parlement européen. Par ailleurs, il faut que l’acte juridique demandé soit nécessaire aux fins de l’application des traités. Il s’agirait donc d’une avancée donnant contenu à la citoyenneté européenne [55] mais sans constituer pour autant un référendum d’initiative populaire.
Le traité de Lisbonne affirme également le rôle des parlements nationaux avec l’introduction d’un mécanisme d’alerte précoce [56]. Ce mécanisme permettrait à chaque parlement national d’indiquer les risques de violation du principe de subsidiarité par les institutions européennes. Au-delà d’un tiers [57] d’avis négatifs de la part des parlements nationaux, la Commission devrait revoir sa proposition. Ce mécanisme est frappé de deux limites. D’une part, il s’agit seulement d’un avis dont les institutions de l’Union européenne doivent tenir compte mais elles ne sont tenues qu’à un réexamen du projet et non à un retrait. D’autre part, l’alerte précoce ne s’applique qu’aux questions de subsidiarité [58] et non aux questions de proportionnalité [59].
Le traité de Lisbonne n’afficherait donc pas de réelles ambitions pour l’Union européenne. Cette dernière resterait dans un statut périphérique, sans réellement contester la position de centre tenu par les Etats-Unis au sein de l’ensemble euro-atlantique.
Sur le plan interne, le système communautaire serait marqué par de nouveaux rapports de forces entre les différents acteurs.
2.2. De nouveaux rapports de force entre les différents acteurs du système
A ce stade de l’étude, il est intéressant d’analyser quels sont les nouveaux rapports de forces induits par le traité de Lisbonne. Trois types se dégagent : le premier d’ordre démographique, le deuxième qui révèle des déterminismes d’insularité, d’isolement voire de morcellement, le troisième qui met en lumière la notion de panisme [60].
2.2.1. Le facteur démographique
Le poids démographique est un enjeu sur lequel viennent se cristalliser un certain nombre de tensions entre Etats membres.
La règle du vote à la double majorité au Conseil jouerait surtout en faveur des Etats les plus peuplés grâce à la prise en compte du critère de population. L’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et dans une moindre mesure l’Italie apparaissent véritablement comme des « joueurs pivots » autour desquels une coalition a le plus de chance de devenir majoritaire [61]. Paradoxalement, les pays les moins peuplés, c’est-à-dire ceux dont la population est comprise entre 0,4 million et 5 millions, arriveraient à conforter leur position, tirant avantage du critère fondé sur le nombre d’Etats membres. A l’inverse, et toujours selon ce même raisonnement statistique, l’influence d’Etats moyennement peuplés, comme l’Espagne et la Pologne, aurait vocation à décroître.
C’est la raison pour laquelle ces deux pays se sont opposés à ce système lors des négociations en souhaitant revenir à la règle de la pondération des voix qui leur donnait un poids plus important que leur taille démographique réelle (vingt-sept voix chacun, contre vingt-neuf pour les pays les plus peuplés). La Pologne a ainsi obtenu que le compromis d’Ioannina [62] jouisse d’un poids juridique plus grand que ce qui était prévu à l’origine dans le traité de Lisbonne. Le compromis permettrait à un groupe d’Etats, proches de la minorité de blocage, sans toutefois l’atteindre, de s’opposer temporairement à la prise d’une décision par le Conseil à la majorité qualifiée [63]. L’ensemble des États membres s’engagerait à rechercher une solution pour rallier les opposants tout en se réservant la possibilité de passer à tout moment au vote.
Le facteur démographique est également présent au niveau du Parlement européen. Le projet initial de répartition des sièges entre États membres pour la période 2009-2014 s’est heurté à une vive opposition de l’Italie qui, compte tenu des évolutions démographiques, se voyait attribuer un siège de moins que le Royaume-Uni et deux sièges de moins que la France, alors que les trois pays avaient auparavant un même nombre de sièges. L’Italie a réussi à obtenir un élu de plus (soit soixante-treize députés), grâce à un artifice qui permet de ne pas dépasser le plafond prévu de sept cent cinquante députés : le Président du Parlement ne serait plus comptabilisé dans ce plafond [64]. L’attribution d’un siège supplémentaire placerait à nouveau l’Italie à égalité avec le Royaume-Uni, bien que ce dernier compte près de deux millions d’habitants de plus.
La répartition des sièges entre chaque Etat membre serait assurée de façon « dégressivement proportionnelle ». Autrement dit, la répartition des sièges ne serait pas complètement proportionnelle au poids démographique de chaque Etat membre. Au final, « par rapport à 2004, la fourchette du contingent de députés entre les pays les plus peuplés et les moins peuplés sera quelque peu réduite en 2009 » [65].
Le tableau ci-joint permet de visualiser les gains et pertes de sièges au Parlement européen et les déplacements de centres de gravité qui sont susceptibles d’en résulter.
Que ce soit au Conseil ou au Parlement, on peut constater que l’Allemagne pèse un poids non négligeable, compte tenu de ses quatre-vingt-deux millions d’habitants. On peut tout de même s’interroger, au regard du déclin démographique de notre voisin d’outre-Rhin, sur le maintien d’une disproportion des représentations parlementaires allemande et française. Le différentiel serait même accru d’un député (de vingt-et-un à vingt-deux). Dans le même esprit, certains observateurs, comme Jean-Pierre Chevènement [66], se sont émus que la parité des votes au Conseil entre la France et l’Allemagne, consacrée en 1951 par Konrad Adenauer et Jean Monnet, soit rompue par la prise en compte du critère démographique.
2.2.2. Les déteminismes d’isolement et de morcellement
Quatre Etats se placeraient en situation d’exception par rapport au traité de Lisbonne et bénéficiraient à ce titre de dispositions dérogatoires, dites clauses de non-participation (ou clauses opting-out).
Le traité confirme ainsi la position particulière du Danemark [67] en matière de politique européenne de sécurité et de défense ainsi que dans le domaine de la justice et des affaires intérieures (ex-3ème pilier).
Le Royaume-Uni et de l’Irlande bénéficient aujourd’hui d’un traitement dérogatoire pour les politiques relatives à la libre circulation des personnes, à l’asile, à l’immigration et à la coopération judiciaire en matière civile. Le nouveau traité étendrait [68] cette dérogation à l’ensemble de la coopération judiciaire en matière pénale et de la coopération policière ainsi qu’au développement de l’acquis de Schengen. Londres et Dublin ont obtenu le droit de participer "à la carte" aux coopérations en matière policière et judiciaire qui les intéressent, sans pouvoir empêcher leurs partenaires européens d’approfondir leur intégration dans ce domaine.
D’autre part, la Charte des droits fondamentaux précitée, qui n’est pas formellement inscrite dans le traité de Lisbonne mais à laquelle il est fait référence, deviendrait juridiquement contraignante, sauf pour le Royaume-Uni et la Pologne [69] qui bénéficieraient de dérogations.
A ces éléments d’insularité et particularismes nationaux, s’ajouterait la possibilité pour un groupe d’Etats qui le souhaiteraient d’agir ensemble pour aller plus loin. Il s’agit, d’une part, des « coopérations renforcées » [70] que le traité de Lisbonne étend au domaine de la PESD et qui ouvrent la possibilité à un nombre limité d’Etats membres (au minimum un tiers, soit neuf actuellement) de se lancer dans une coopération plus étroite à certaines conditions. Plus flexible que ces coopérations renforcées, le traité de Lisbonne crée, d’autre part, la possibilité de mettre en place une « coopération structurée permanente » [71] en matière de défense. Si ces possibiliés offertes aux Etats membres de s’associer à leur gré, en fonction de leurs volontés et de leurs capacités, apparaissent à première vue séduisantes, on peut également y voir le germe de futures divisions. D’un côté, il y aurait le groupe des Etats pionniers qui seraient au centre du dispositif, de l’autre, les Etats qui n’y auraient pas accès et resteraient à la périphérie avec la désagréable sensation que se constitue un directoire des nations de « premier rang ».
En conséquence, « c’est bien le risque d’une Europe, non plus seulement à géométrie variable ou à la carte, mais celui d’une Europe morcellée » [72].
2.2.3.Le panisme continental
La dernière point de friction concerne la notion de panisme. A l’image de toute la construction européenne, le traité de Lisbonne postule l’existence d’une communauté d’intérêts en matière de politique étrangère et de sécurité. Or, « il ne suffit pas d’être sur le même continent pour avoir les mêmes intérêts, les mêmes valeurs, les mêmes projets…Et la somme des intérêts nationaux ne constitue pas nécessairement un intérêt commun » [73]. Ainsi, la plupart des Etats membres ont une politique étrangère marquée par un fort tropisme continental [74] et atlantiste [75]. La France est un des rares pays de l’Union européenne à développer une politique étrangère à vocation mondiale. Cette politique d’équilibre n’est pas seulement centrée sur le continent européen mais aussi, entre autres, sur l’outre-mer, la francophonie, l’Afrique et le monde arabe. Le nouveau défi qui se présente donc aux Etats membres est d’arriver à participer à cette politique européenne d’intérêts communs tout en préservant leurs propres politiques d’exception de façon indépendante.
Le traité de Lisbonne ne dessinerait pas un système européen homogène mais mettrait en lumière le poids des déterminismes géopolitiques et idéologiques de puissance.
Conclusion de la deuxième partie
Cette deuxième partie permet de mettre en lumière le caractère contrasté du traité de Lisbonne en termes géopolitiques. D’une lecture rapide se dégage en effet une impression de volontarisme. Une analyse approfondie suscite en revanche plus de réserves et laisse quelque peu perplexe.
Certes l’Union européenne serait dotée de nouveaux moyens d’action mais, pour autant, elle ne sortirait pas forcément plus puissante de ce traité.
Les objectifs de puissance resteraient, somme toute, décevants car peu ambitieux. Le manque de détermination à définir une véritable politique européenne de sécurité et de défense en serait une des illustrations les plus significatives.
De plus, l’analyse géopolitique révèlerait un paysage européen morcellé où, par le jeu de protocoles additionels et de déclarations annexes, certains acteurs viendraient réduire ou encadrer la portée de dispositions contenues dans le traité de Lisbonne.
A l’issue de cette étude et si l’on veut poursuivre la réflexion, trois séries d’éléments peuvent être pris en compte.
Tout d’abord, il convient de rester prudent car rien n’est encore formellement acquis. Le traité de Lisbonne est une construction fragile. Elle reste subordonnée à la ratification par chacun des vingt-sept Etats membres de l’Union européenne, ratifications qui devraient intervenir avant les élections européennes de juin 2009. Chaque pays ratifie le texte selon ses propres dispositions nationales. Comme pour le projet de Constitution européenne, deux options s’offrent aux Vingt-Sept : soit la ratification par voie parlementaire, soit la ratification par référendum. Si l’Irlande a choisi l’approbation du nouveau traité par la voie référendaire [76], les vingt-six autres Etats membres ont opté pour la voie parlementaire. Au 1er mars 2008, cinq pays ont ratifié le traité de Lisbonne : Hongrie [77], Malte, Slovénie, Roumanie et France [78]. L’histoire récente nous apprend à prendre en considération plusieurs facteurs qui peuvent influencer, dans un sens comme dans l’autre, les opinions publiques et les parlementaires : la complexité du texte, une Europe perçue à la fois comme trop distante et trop intrusive et le contexte politique local au moment de la ratification.
Ensuite, nous n’avons essentiellement mis en lumière que des potentialités. L’usage qu’il en sera fait dépendra de la dynamique politique enclenchée. Cette dernière résultera notamment du profil des personnalités politiques qui seront désignées pour occuper les nouveaux postes à responsabilités, notamment ceux de Président du Conseil européen et de Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Aussi, on peut dire, en paraphrasant le député européen Alain Lamassoure, que le traité de Lisbonne est un outil qui s’userait prématurément si l’on ne s’en servait pas. Cela dépendra aussi de ce que les Etats accepteront dans les faits, notamment en cas de crise, de « lâcher » aux nouveaux responsables communautaires.
Enfin, et c’est sûrement là le point le plus important pour celui qui s’intéresse au destin de la France, ce traité aurait des conséquences à terme sur notre politique internationale. Comme nous avons essayé de le démontrer, l’Union européenne n’est pas (encore) un Etat mais est suffisamment intégrée pour pouvoir tenir certaines fonctions régaliennes. C’est même à ce jour la seule union économique régionale à disposer d’un tel degré d’intégration, à tel point qu’« il est possible de parler de regroupement régional à vocation supranationale » [79]. En ce sens, le traité de Lisbonne porte en lui les outils d’une révolution géopolitique silencieuse. En s’auto-limitant et en concédant un nouveau pan de leur souveraineté au profit de l’entité Union européenne, les Etats-nations sont peu à peu en train de « sortir d’une réalité géopolitique pour en modeler une autre » [80].
La question se pose alors de la compatibilité de cette dynamique supranationale avec la défense de nos intérêts géopolitiques. Est-ce à dire comme le pense le Président de la République qu’il n’y a pas désormais « de France forte sans l’Europe » [81] ? Où est-ce au contraire un adieu à la France qui s’en va ? Comme souvent, une partie de la réponse est fournie par l’histoire qui sert de porte d’entrée pour aborder les questions complexes. L’obsession de l’indépendance nationale est une constante de l’histoire politico-militaire de la France depuis les premiers rois capétiens [82]. Or, en dessinant les contours d’un futur Etat européen supranational, le traité de Lisbonne viendrait justement couper le fil rouge de l’histoire de notre construction nationale, marquée par une résistance constante à toute logique de nature impériale.
Si elle veut conserver son rang de puissance mondiale, la France devrait donc maintenir sa politique d’équilibre, à la fois européenne et mondiale, sous peine de sortir de l’Histoire. Car « on lie les bœufs par les cornes et les hommes par les traités » [83]...
Manuscrit clos le 21 mars 2008
« En ce qui concerne le traité de Lisbonne, l’Irlande a accepté d’organiser un second référendum l’année prochaine [en 2009], lorsque les inquiétudes de la population irlandaise auront été apaisées. Le rejet du traité lors du référendum du mois de juin [2008] a provoqué la suspension de la réforme tant attendue des institutions de l’Union européenne.
Bon nombre d’Irlandais s’inquiètent des conséquences du traité sur leur politique fiscale, sur leur neutralité militaire ou sur les questions éthiques, telles que l’avortement. Le Conseil a fourni des garanties juridiques selon lesquelles le traité ne porterait pas atteinte à la souveraineté du gouvernement irlandais sur ces questions.
Les Irlandais ont également refusé le projet de réduction du nombre de membres de la Commission européenne, qui aurait pour conséquence que les États membres, dont l’Irlande, ne disposeraient plus automatiquement d’un commissaire européen chacun. Le Conseil a accepté de prendre les mesures juridiques nécessaires pour que chacun des 27 États membres de l’Union européenne puisse continuer à envoyer un commissaire à Bruxelles, en cas d’entrée en vigueur du traité. »
Source : http://ec.europa.eu/news/economy/081212_1_fr.htm
En savoir plus
Sur le site Europa Voir
Sur le site touteleurope.fr Voir
[1] Le Monde, 26 octobre 2007.
[2] Chargée de préparer le projet de Traité constitutionnel, la Convention sur l’avenir de l’Europe a débuté ses travaux le 1er mars 2002. Le projet de Constitution a été adopté à Rome le 29 octobre 2004.
[3] Sa dénomination officielle est : « Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne ».
[4] CIG 14/07 (avec un tableau de correspondance des numérotations) sur http://www.consilium.europa.eu.
[5] Politiques communautaires (1er pilier), politique étrangère et de sécurité commune (2ème pilier) et justice et affaires intérieures (3ème pilier).
[6] Nouvel article 32 TUE.
[7] « Le principe est posé que l’UE a compétence pour toutes les relations extérieures dans les domaines où elle a la compétence intérieure… Bref, 90 % des relations internationales qui relèvent, heureusement, des arts de la paix. » (LAMASSOURE Alain, « Le traité simplifié et la relance de l’Europe », Défense nationale et sécurité collective, août-septembre 2007, p. 20).
[8] SOFAs (Status of Forces Agreements : accords sur le statut des forces permettant la protection du personnel en opération).
[9] Arrêt AETR (Cour de Justice des Communautés Européennes, 31 mars 1971).
[10] Nouvel article 15 TUE.
[11] Nouvel article 18 TUE. Cet intitulé répond au refus britannique sur la création d’un « Ministre des affaires étrangères de l’Union » prévu par le projet de traité constitutionnel. Ses prérogatives sont toutefois identiques.
[12] Actuellement détenues par l’espagnol Javier SOLANA.
[13] Actuellement détenues par l’autrichienne Benita FERRERO-WALDNER.
[14] Nouvel article 27 TUE.
[15] L’état-major de l’Union européenne (EMUE) pourrait à ce titre y être rattaché. Ce point n’est pas encore tranché.
[16] Association des nations de l’Asie du Sud-est, Association sud-asiatique de coopération régionale, Communauté andine, Conseil de coopération du Golfe, Espace économique européen, Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, Mercosur, Organisation des Nations-Unies, Organisation mondiale du commerce, Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, Partenariat euro-méditerranéen, Rencontre Asie-Europe et Sommets G7-G8.
[17] Nouvel article 32 TUE.
[18] Idem.
[19] Nouvel article 34 TUE.
[20] Protocole sur les « dispositions transitoires ».
[21] Nouvel article 16 TUE et 238 TFUE.
[22] Protocole sur les « dispositions transitoires ».
[23] Des études statistiques ont ainsi montré que le nombre de coalitions gagnantes augmentent de façon significative, passant d’environ 2% à plus de 12% (voir PONCINS Etienne (de), La Constitution européenne en vingt-cinq clefs, Paris ; Lignes de repères, 2005, 256 p. : étude de la 12ème clef relative au mode de décision du Conseil).
[24] Il s’agirait là d’un des plus importants transferts de compétentes des Etats membres vers l’Union européenne depuis plusieurs années.
[25] Nouvel article 333 TFUE.
[26] Nouvel article 18 TUE.
[27] Nouvel article 45 TUE.
[28] Nouvel article 46 TUE.
[29] La supranationalité est un mode d’organisation qui place l’institution au-dessus des Etats qui la compose. Elle se caractérise notamment par l’existence d’organes indépendants des gouvernements des Etats membres, dotés de pouvoirs de décision qui s’imposent aux Etats et aux particuliers. On parle ainsi d’organisation supranationale par opposition à l’organisation de type intergouvernemental, plus respectueuse des intérêts nationaux, car privilégiant la coopération entre Etats membres pleinement souverains.
[30] PONCINS Etienne (de), op. cit. (étude sur le champ de la majorité qualifiée).
[31] Nouvel article 17 TUE.
[32] Nouvel article 14 TUE.
[33] Nouvel article 19 TUE.
[34] Déclaration n° 17 relative à la primauté.
[35] Nouvel article 263 TFUE.
[36] Signée par la Commission, le Parlement et le Conseil européen lors du Conseil européen de Nice le 7 décembre 2000.
[37] Nouvel article 6 TUE.
[38] Amené à se prononcer sur le traité de Lisbonne, le Conseil constitutionnel de la République française a jugé que certaines dispositions relatives à des matières régaliennes, telles que « l’espace de liberté, de sécurité et de justice », appellent une révision constitutionnelle dès lors que sont affectées « les conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale » (décision 2007-560 DC du 20 décembre 2007 sur www.conseil-constitutionnel.fr).
[39] Toutefois, les termes de « fonction législative », « procédure législative » et « acte législatif » sont maintenus, notamment dans les nouveaux articles 14, 16 et 17 TUE.
[40] Nouvel article 3 TUE.
[41] LAIDI Zaki, La norme sans la force. L’énigme de la puissance européenne, Paris ; Les presses de Sciences Po, 2005, 159 p.
[42] « Dans ce contexte, la puissance économique de l’Union Européenne reste très dépendante des importations, en particulier d’énergie. Une de ses faiblesses est de ne pas avoir su organiser son potentiel militaire. Pourtant, elle dispose d’un potentiel économique lui conférant la dimension d’une puissance civile. Aussi, pour subsister, l’Union Européenne doit clarifier ses ambitions de puissance ». (discours de l’amiral OUDOT de DAINVILLE, chef d’état-major de la marine, au 4ème colloque Naval de Défense, Paris, Ecole militaire, 15 novembre 2007).
[43] Nouvel article 49 TUE.
[44] Présence d’institutions stables garantissant la démocratie, l’Etat de droit, les droits de l’Homme, le respect des minorités et leur protection.
[45] Existence d’une économie de marché viable et capacité à faire face aux forces du marché et à la pression concurrentielle à l’intérieur de l’Union.
[46] Aptitude à assumer les obligations découlant de l’adhésion et notamment à souscrire aux objectifs de l’Union politique, économique et monétaire.
[47] Missions humanitaires ou d’évacuation de ressortissants ; missions de maintien de la paix ; missions de forces de combat pour la gestion de crises (définies en 1992).
[48] Nouvel article 43 TUE.
[49] Au profit d’un Etat membre victime d’une attaque terroriste ou d’une catastrophe naturelle ou d’origine humaine (nouvel article 222 TFUE).
[50] Au profit d’un Etat membre victime d’une agression armée sur son territoire (nouvel article 42 TUE).
[51] Nouvel article nouvel article 42 TUE.
[52] C’est-à-dire vingt-et-un pays de l’Union européenne sur vingt-sept (Autriche, Chypre, Finlande, Irlande, Malte et Suède ne sont pas membres de l’OTAN).
[53] Le général de Gaulle disait déjà la même chose en d’autres termes : « Parmi les Gaulois, les Germains et les Latins, beaucoup s’écrient : Faisons l’Europe ! Mais quelle Europe ? C’est là le débat (cité par BEAUDOUIN Christophe, Fédéralisation de l’Europe, novembre 2007 sur http://www.observatoiredeleurope.com).
[54] Nouvel article 11 TUE.
[55] Qui s’ajoute à la citoyenneté nationale sans la remplacer.
[56] Nouvel article 12 TUE et protocole sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne.
[57] Un quart dans le domaine « justice et affaires intérieures ».
[58] En d’autres termes, le partage de compétences entre l’Union européenne et les Etats membres.
[59] C’est-à-dire la limite d’action des institutions européennes à ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs des traités.
[60] Représentation géopolitique ou processus de regroupement fondés sur une communauté d’ordre ethnique, religieuse, régionale ou continentale.
[61] Les statisticiens ont d’ailleurs développé un indice, dit de « Banzhaf », issu de la théorie des jeux, qui permet de mesurer ce phénomène (cité par PONCINS Etienne (de), La Constitution européenne en vingt-cinq clefs, Paris ; Lignes de repères, 2005, 256 p. : étude de la 12ème clef relative au mode de décision du Conseil).
[62] Du nom d’une île grecque sur laquelle s’est tenue une réunion informelle européenne en 1994.
[63] Déclaration ad article 9 C, paragraphe 4, du TUE et article 205, paragraphe 2, du TFUE et protocole sur le même sujet.
[64] Déclaration concernant la composition du Parlement européen et déclaration de l’Italie relative à la composition du Parlement européen.
[65] DUMONT Gérard-François, « Constitution de l’Union européenne : Quels pouvoirs aux peuples ? », mai 2005, sur www.diploweb.com
[66] CHEVENEMENT Jean-Pierre, « Pour ou contre le traité de Lisbonne », Valeurs actuelles, 23 novembre 2007, p. 27.
[67] Protocoles et déclarations concernant la position du Danemark.
[68] Protocoles et déclarations sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de liberté, de sécurité et de justice.
[69] Protocole sur l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la Pologne et au Royaume-Uni. Le nouveau gouvernement polonais, au pouvoir depuis le 21 octobre 2007, a cependant annoncé qu’il reviendrait sur cette position.
[70] Nouvel article 20 TUE.
[71] Nouvel article 46 TUE.
[72] CHALTIEL Florence, « Le traité modificatif peut-il être un traité ambitieux ? », Revue du marché commun et de l’Union européenne, n° 510, juillet/août 2007, p. 420.
[73] CHAUPRADE Aymeric, Géopolitique, Constantes et changements dans l’histoire, Paris ; Ellipses, 2007, p. 510.
[74] Dans la mesure où leurs intérêts sont essentiellement européens.
[75] L’exemple de la crise irakienne de 2003 nous a montré que la majorité des Etats membres (ou candidats pour 2004 voire 2007) s’est alignée sur la position américaine.
[76] La Constitution irlandaise de 1990 impose une consultation directe de la population dans le cas où le texte opère des transferts de souveraineté, comme c’est le cas pour le traité de Lisbonne.
[77] Premier pays de l’UE à avoir ratifié le traité le 17 décembre 2007.
[78] La loi autorisant la ratification du traité de Lisbonne a été publiée au Journal officiel le 14 février 2008.
[79] CHAUPRADE Aymeric, Géopolitique, Constantes et changements dans l’histoire, Paris ; Ellipses, 2007, p. 900.
[80] op. cit. p. 903
[81] Allocution à l’occasion de la conférence des ambassadeurs (Paris, palais de l’Elysée, 27 août 2007).
[82] COLSON Bruno, « La culture stratégique française », Stratégique, 53, 1992-1, p. 31.
[83] Armand-Jean Du Plessis, Cardinal, Duc de Richelieu (1585-1642).
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