Ratification, corruption, participation : les travaux de l’UE

Par Pierre VERLUISE, le 1er mai 2008  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Docteur en Géopolitique. Directeur du diploweb.com. Chercheur à l’IRIS

Ratification du traité de Lisbonne, lutte contre la corruption, participation aux élections pour le Parlement européen… L’Union européenne ne manque pas de défis à relever.

LA PROCHAINE journée de l’Europe, le 9 mai 2008, invite à s’interroger. Quels sont les défis que les 27 pays membres de l’Union européenne auront à relever dans les prochains mois ?

Sans prétendre à l’exhaustivité, en voici trois : la ratification du traité de Lisbonne, la lutte contre la corruption et la participation aux élections pour le Parlement européen.

Premier défi : la ratification du traité de Lisbonne

Le Non français du 29 mai 2005 a mis l’Union européenne (UE) dans un « coma léger », pour reprendre l’expression de Jean Quatremer. Après un temps de réflexion puis de négociation, le traité de Lisbonne a été signé le 13 décembre 2007 par les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne à vingt-sept (UE-27). Il doit théoriquement être ratifié avant le 1er janvier 2009, soit par la voie parlementaire, soit par référendum dans le cas de l’Irlande.

A la date du 10 avril 2008, le traité de Lisbonne a été ratifié par huit Etats sur vingt-sept. Ce sont de nouveaux Etats membres qui ont ouvert le bal des ratifications : la Hongrie, Malte, la Slovénie et la Roumanie. Puis un ancien Etat membre a suivi, la France, le 14 février 2008. Depuis, trois autres pays se sont ajoutés à la liste : la Bulgarie, la Pologne et l’Autriche.

Au 10 avril 2008, il reste donc dix-neuf ratifications à obtenir, dont une par voie référendaire, en Irlande. L’Irlande s’est déjà fait connaître au moment du traité de Nice par un refus, qui avait été levé par l’organisation d’un deuxième référendum. Pratique qui peut se discuter. Nul ne sait avec certitude comment voterons les Irlandais cette fois-ci, probablement en juin. Autre question : comment se passera la ratification au Royaume-Uni ? Et la surprise pourrait bien venir d’un autre pays. Quoiqu’il en soit, obtenir encore dix-neuf ratifications représente bien un véritable défi pour les partisans du traité de Lisbonne.

Deuxième défi : la lutte contre la corruption

Les élargissements de 2004 et de 2007 ont ouvert la porte de l’Union européenne à des Etats qui affichent souvent une solide culture de la corruption politique. C’est à dire l’abus de pouvoir par les dirigeants politiques à des fins personnelles, dans le but d’augmenter leur pouvoir ou leurs richesses.

Pour évaluer la corruption, Transparency International a créé un outil : l’indice de perceptions de la corruption (IPC). Celui-ci agrège les avis d’experts à l’égard de la corruption. L’IPC se présente sous la forme d’une note sur 10. Comme à l’école, il vaut mieux - pour la démocratie - être proche de 10 que de 1. La moyenne mondiale est à 5.

En 2004, l’UE-25 compte huit États dont l’IPC est inférieur à 5 sur 10. Ce groupe compte deux États de l’ex-UE-15 : l’Italie et la Grèce. Ce qui démontre que l’ancienneté communautaire n’est pas un gage de vertu. S’y ajoutent six des dix nouveaux États membres. Le moins bien classé est le plus peuplé. Il s’agit de la Pologne : 3,5.

Le passage de l’ex-UE-15 à l’UE-25 induit une perte de 1,1 point sur 10 pour l’ensemble communautaire. En 2004, la moyenne de l’UE-25 tombe à 6,58.

Que nous apprennent les données les plus récentes ? En 2007, l’IPC moyen de l’UE-27 est de 6,37 sur 10. Autrement dit, le résultat est moins bon que trois ans auparavant, puisqu’on passe de 6,58 à 6,37.

En 2007, l’UE-27 compte sept Etats dont l’IPC est inférieur à 5 sur 10. Un seul ancien Etat membre, la Grèce. Six nouveaux Etats membres sur douze : la Slovaquie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Bulgarie et la Roumanie. Si la Pologne a fait des progrès, les deux derniers pays entrés sont en situation de lanternes rouges. La Roumanie se place à 3,7 sur 10. C’est pourquoi la Commission européenne a invité la Bulgarie et la Roumanie à renforcer la lutte contre la corruption. Compte tenu de l’ampleur des fonds communautaires attribués aux nouveaux pays membres dans une perspective de mise à niveau, c’est bien un défi pour l’UE que renforcer la lutte contre la corruption.

Particulièrement dans la perspective des prochaines élections pour le Parlement européen.

Troisième défi : la participation aux prochaines élections pour le Parlement européen

Depuis la première élection du Parlement européen au suffrage universel, en 1979, le taux de participation diminue régulièrement. 63%, 61 %, 58 %, 56% - 49,8% en 1999 – et 45,7% en 2004 pour l’élection qui a suivi l’adhésion de dix nouveaux Etats membres.

On pouvait espérer que les électeurs des nouveaux pays membres participeraient en nombre pour manifester leur enthousiasme européen… Excepté Malte, Chypre et la Lituanie, le taux de participation dans les nouveaux pays membres à été inférieur à la moyenne communautaire. Autrement dit, l’élargissement de 2004 a contribué à la diminution de la participation moyenne. Pourquoi ? Parce que les sept autres nouveaux Etats membres ont des taux de participation faibles, entre 41% pour la Lettonie et 16,9% pour la Slovaquie. La Pologne, le plus peuplé des NEM, se place à 20,8%. Ce qui signifie que seulement un électeur polonais sur cinq vote pour ce scrutin.

En règle générale, les électeurs européens boudent de plus en plus ces élections, alors que le rôle de cette institution ne cesse d’augmenter. Chacun sait que les lois communautaires l’emportent sur les lois nationales. Et que le traité de Lisbonne renforcerait encore les pouvoir du Parlement européen. Question : les élections du printemps 2009 pour le prochain Parlement de l’UE-27 inverseront-elles la tendance ? S’approchera-t-on à nouveau d’un taux de participation d’environ 50% ? Dépassera-t-on ce seuil symbolique ? Ou bien poursuivrons-nous la glissade, passant de 45, 7% aux environs de 40% ? Nul ne le sait. En revanche, chacun conviendra que la participation aux prochaines élections pour le Parlement européen est bien un défi pour l’UE.

Ratification du traité de Lisbonne, lutte contre la corruption, participation aux élections pour le Parlement européen… L’Union européenne ne manque pas de défis à relever. Et cette courte liste ne se prétend pas exhaustive. Chacun peut d’ailleurs la poursuivre…

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Plus à ce sujet : Pierre Verluise, 20 ans après la chute de Mur. L’Europe recomposée, Paris : Choiseul, 2009. Voir


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