Avec 18 pays sur 27 caractérisés en 2006 par une balance commerciale extra-communautaire déficitaire, l’Union européenne a devant elle un immense défi : la compétitivité.
On ne peut pas compter sur l’Irlande, la Suède et l’Allemagne pour redresser seules la situation, particulièrement si un pays comme la France passe durablement dans le rouge. Pour faire durablement de l’Union européenne une puissance commerciale, il convient donc de s’interroger aux échelles locales, nationales et communautaires sur les remèdes à inventer pour sortir l’UE d’une tendance lourde au déficit de sa balance commerciale extra-communautaire.
LE CHIFFRE VIENT d’être connu et il a fait l’effet d’une bombe. En 2007, le déficit commercial de la France a atteint 39,2 milliards d’euros. C’est une nouvelle importante qui conduit élargir notre regard à l’ensemble de l’Union européenne.
La France est-elle une exception ? Considérons les chiffres consolidés les plus récents disponibles sur la base de données en ligne d’Eurostat, ceux de l’année 2006.
En 2006, la balance commerciale extra communautaire de l’espace UE27 est déficitaire de 193 milliards d’euros. Ce qui est rarement précisé dans les publications destinées au grand public, où l’on préfère généralement présenter l’UE comme une « puissance commerciale ».
Sur 27 Etats membres ou candidats, en 2006, 18 pays affichent une balance commerciale extra communautaire déficitaire.
Regardons le graphique 1 : Espace UE-27, balance commerciale extra-communautaire, en milliards d’euros, 2006. Les 18 pays déficitaires.
Sur ce premier graphique, il est possible de distinguer deux sous-groupes.
Premier sous-groupe, sur la gauche : 3 pays en grande difficulté, avec un déficit commercial entre 50 et 91 milliards d’euros. Avec un déficit de 90,73 milliards d’euros, les Pays-Bas sont dans la situation la plus délicate, mais peut-être faut-il y voir en partie une conséquence de « l’effet Rotterdam ». Les marchandises qui arrivent dans les ports néerlandais mais sont destinées au reste de l’UE sont enregistrées dans les statistiques harmonisées du commerce de l’UE au poste des Pays-Bas.
Le Royaume-Uni présente le deuxième déficit commercial extra-communautaire de l’espace UE27 en 2006 : 70,03 milliards d’euros. L’Espagne avance le troisième déficit : 50,99 milliards d’euros.
Deuxième sous-groupe : 15 pays en difficulté, avec un déficit commercial entre 0,1 et 21 milliards d’euros. Il s’agit par ordre décroissant des pays suivants : Italie (-20,61), Grèce (-15,32), Belgique (-10,78), Pologne (-8,89), Roumanie (-7,25), Hongrie (-6,09), Portugal (-5,12), Slovaquie (-4,52), Luxembourg (-4,44), République tchèque (-3,55), Lituanie (-1,65), Chypre (-1,41), Bulgarie (-1,22), Lettonie (-0,81) et Estonie (-0,18).
En 2006, seulement 9 pays membres de l’espace UE-27 ont une balance commerciale extra-communautaire excédentaire.
Observons le graphique 2 : Espace UE-27, balance commerciale extra-communautaire, en milliards d’euros, 2006. Les 9 pays excédentaires.
Ici aussi, nous pouvons distinguer deux nouveaux sous-groupes.
Le troisième sous-groupe est celui caractérisé par un léger excédent, inférieur à 3,3 milliards d’euros. Il compte seulement quatre Etats. Par ordre croissant, il s’agit des pays suivants : Malte (0,03), Slovénie (1,57), Danemark (2,17) et France (3,2). Signe que ce groupe est en situation fragile, la situation de la France s’est dégradée depuis, comme cela a été précédemment noté.
Enfin, le quatrième sous-groupe rassemble cinq Etats dont le commerce extra-communautaire est largement excédentaire en 2006, de 6 à 58 milliards d’euros. Par ordre croissant, il s’agit des pays suivants : Finlande (6,38), Autriche (8,48), Irlande (13,7), Suède (16,21), Allemagne (58,85).
Il faut relever la performance de l’Irlande qui, peuplée de 4,2 millions d’habitants, se place au troisième rang des pays de l’espace UE-27 pour ce critère. La Suède, avec 9 millions d’habitants, monte sur la deuxième marche du podium, avec un excédent de 16,21 milliards d’euros. L’Allemagne, avec 82,4 millions d’habitants obtient la médaille d’or haut la main, avec un excédent commercial de 58,85 milliards d’euros. A l’échelle mondiale, l’Allemagne apparaît ainsi comme le seul géant commercial de l’espace UE-27.
Cependant, si l’on rapporte l’excédent commercial à la population de chaque pays, la hiérarchie des trois champions est inversée.
Observons ensemble le graphique 3 : Excédent commercial en milliards d’euros divisé par la population en millions d’habitants, en 2006.
En divisant l’excédent commercial en milliards de dollars par la population en millions d’habitants, l’Irlande se place nettement au 1er rang, la Suède au 2e et l’Allemagne seulement au 3e. Ce serait donc le « Tigre irlandais » qui aurait sous cet angle la structure économique la plus exportatrice de ces trois pays.
Au vu des données pour l’année 2006, seulement 2 pays sur les 12 entrés en 2004 ou 2007 affichent alors une balance commerciale extra-communautaire excédentaire. Il s’agit de Malte et de la Slovénie.
Les dix autres pays entrés dans l’UE en 2004 ou 2007 possèdent tous en 2006 une balance commerciale extra-communautaire déficitaire (cf. supra).
Quel est le résultat ? Considérons, le graphique 4 : Espace UE-27 et espace NEM-12, balance commerciale extra-communautaire, en milliards d’euros, 2006. 10 pays des NEM-12 sont déficitaires.
En dépit des apports de Malte et de la Slovénie, la balance commerciale extra-communautaire des 12 Etats entrés en 2004 ou candidats pour 2007 est en 2006 déficitaire de 33, 97 milliards d’euros. Autrement dit, les élargissements de 2004 et 2007 ne résolvent pas la tendance au déficit de la balance commerciale extra-communautaire.
Avec 18 pays sur 27 caractérisés en 2006 par une balance commerciale extra-communautaire déficitaire, l’Union européenne a devant elle un immense défi : la compétitivité. Les estimations pour l’année 2007 qui viennent de paraître sont à peine meilleures, avec un déficit de 185,7 milliards d’euros pour l’UE27 [1].
On ne peut pas compter sur l’Irlande, la Suède et l’Allemagne pour redresser seules la situation, particulièrement si un pays comme la France passe durablement dans le rouge. Pour faire durablement de l’Union européenne une puissance commerciale, il convient donc de s’interroger aux échelles locales, nationales et communautaires sur les remèdes à inventer pour sortir l’UE d’une tendance lourde au déficit de sa balance commerciale extra-communautaire.
UNE QUESTION pour les dix prochaines années : les 12 nouveaux Etats membres suivront-ils le modèle irlandais ? Pour que la réponse soit positive, ces pays doivent relever de nombreux défis. Sans prétendre à l’exhaustivité en voici deux. Le premier défi est le vieillissement de la main d’œuvre lié pour partie à la faible fécondité des nouveaux pays membres. Le deuxième défi est l’éradication de la corruption pour optimiser l’usage des fonds communautaires, « à l’irlandaise ».
Pour la mise en perspective des élargissements de l’Union européenne, voir aussi le livre de Pierre Verluise, Fondamentaux de l’Union européenne. Démographie, économie, géopolitique. Préface du recteur G.-F. Dumont. 10 cartes, 28 graphiques, bibliographie, index. Coll. Référence géopolitique. Paris : Ellipses, décembre 2008, 160 p. Voir
[1] Eurostat, communiqué de presse STAT/08/22, 15 février 2008, 7 p.
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