La pensée stratégique vietnamienne

Par Pierre JOURNOUD, le 4 septembre 2016  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Ancien chercheur et responsable du programme Asie du Sud-Est à l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire (IRSEM), Pierre Journoud est, depuis septembre 2015, Professeur d’histoire contemporaine à l’Université Paul-Valéry Montpellier et membre cofondateur du GIS (Groupement d’intérêt scientifique) ESPRIT (Etudes en Stratégie, Politiques et Relations InTernationales). Il fait partie de la délégation officielle qui accompagne le Président de la République française dans sa visite d’Etat au Vietnam (5-7 septembre 2016).

Voici une analyse inédite de la pensée stratégique vietnamienne, à l’occasion de la visite d’Etat du Président de la République française au Vietnam (5-7 septembre 2016). Illustré d’une carte à propos du contentieux en Mer de Chine du Sud, avec les revendication vietnamiennes, chinoises, malaisiennes et brunéiennes.

Résumé :

La pensée stratégique vietnamienne s’inspire d’une riche histoire militaire et d’une expérience unique des conflits asymétriques. Synthèse entre des éléments endogènes forgés au fil des siècles, à l’épreuve de nombreuses guerres contre les armées des dynasties chinoises ou sino-mongoles, et des emprunts exogènes plus récents, elle a permis d’articuler étroitement l’art ancestral de la guérilla aux nécessités de la guerre conventionnelle moderne, non sans vigoureux débats internes sur la part respective à accorder à l’une et à l’autre. La voici de nouveau mise au défi, aujourd’hui, par la résurgence de la puissance chinoise et du conflit territorial en mer de Chine méridionale. Pour atténuer la vulnérabilité de leur pays, les dirigeants du Parti communiste vietnamien ont cherché à en renforcer la profondeur stratégique : par des moyens diplomatiques, en poursuivant une quête de partenariats diplomatiques avec le souci de l’équilibre entre les puissances ; par des moyens militaires, en s’efforçant à une nouvelle synthèse entre le concept traditionnel de guerre du peuple et une stratégie encore embryonnaire de « déni d’accès ». Si la défense du régime communiste demeure une priorité, le Parti a dû réévaluer l’impératif de défense de la souveraineté territoriale, face au regain d’assertivité chinoise et à la vigueur des pulsions nationalistes que celui-ci fédère parmi les Vietnamiens. Son souci d’échapper à une relation trop exclusive avec la Chine ou avec les États-Unis offre des perspectives à saisir pour l’Union européenne et pour la France, signataire d’un partenariat stratégique avec le Việt Nam, en 2013.

I. La guerre du peuple en situation asymétrique, fondement traditionnel de la stratégie intégrale des Vietnamiens

Le Việt Nam possède et valorise, au moins depuis les années 1950, un panthéon de grands stratèges aussi riche que mal connu en Occident. Les écrits que ces héros populaires ont laissés à la postérité sont, hélas, peu nombreux. Quatre d’entre eux conservent néanmoins une place de choix, non seulement dans l’imaginaire collectif mais aussi dans les lieux de production et d’étude de la pensée stratégique vietnamienne, tels que l’Académie de défense, l’Institut de la stratégie militaire, l’Institut de défense et des relations internationales, l’Institut d’histoire militaire, et les écoles militaires.

La résistance à la Chine comme matrice de la pensée stratégique traditionnelle

Encore vénéré aujourd’hui au Việt Nam, Trần Hưng Đạo (THD) fut l’artisan de la grande victoire de Bạch Đằng contre les troupes sino-mongoles, en 1288, en tant que commandant en chef sous la dynastie des Trần. Théoricien de la « guérilla » – un art poussé à un tel degré de perfection que l’anthropologue Georges Condominas a pu la considérer comme un « trait culturel majeur et pérenne de l’espace social vietnamien » –, THD a posé les premiers éléments d’une stratégie de guerre asymétrique, que résume sa célèbre formule : « combattre le long avec le court » [1]. Il fut l’un des premiers à penser la guérilla non comme un substitut à la guerre conventionnelle, mais comme son indispensable complément. Elle seule rendait possible, en immobilisant un adversaire supérieur, la constitution d’un corps de bataille susceptible d’être engagé ultérieurement contre lui dans des batailles surprises et décisives, grâce à une grande souplesse tactique. En insistant sur l’importance de la mobilisation populaire et de la propagande, THD dessinait déjà les premiers contours de ce qui allait être qualifié beaucoup plus tard de guerre psychologique. Replacées de facto au cœur du conflit, les populations devaient être soutenues et encouragées par une série de mesures concrètes.

Conseiller politique et militaire de Lê Lợi (le futur empereur Lê Thái Tổ victorieux des troupes chinoises en 1428), le grand lettré stratège Nguyễn Trãi est allé plus loin encore, en se faisant le théoricien de la « guerre du peuple » [2]. Fondée sur l’impératif du réveil patriotique, la guerre devait faire du peuple des paysans la force principale capable d’abattre l’envahisseur chinois et de mettre un terme à sa politique de soumission et d’uniformisation culturelle. Défensive, par essence, et destinée à rétablir la justice dans tous les domaines, la guerre populaire était donc considérée comme juste. Elle devait se solder par la recherche d’une paix honorable au moment opportun. Nguyễn Trãi revendiquait déjà, dans le cadre d’une stratégie que le général Poirier aurait qualifié d’intégrale, le principe de simultanéité entre l’offensive et la négociation (vừa đánh vừa đàm). Or, précisément, la perception de la stratégie dans ses dimensions politique, militaire et diplomatique, et le souci de coordonner le plus étroitement possible ces trois formes de lutte sans renier la primauté du politique sur le militaire (que recommandait déjà Sun Zi six siècles avant Jésus Christ dans son Art de la guerre), constituent l’un des ses grands apports à la pensée stratégique vietnamienne. Nguyễn Trãi a développé également les prémisses de la guerre psychologique esquissées par THD, en ajoutant à la nécessité de la propagande destinée au soutien des forces amies, celle qui devait miner le moral ennemi, l’« offensive contre les cœurs » adverses, permise par une fructueuse interaction entre le travail de persuasion politique et les opérations militaires. La formule attribuée à ce stratège de « conquérir les cœurs (tâm công) plutôt que les citadelles » reflète la modernité de la pensée stratégique vietnamienne. Elle préfigure la « conquête des cœurs et des esprits » invoquée par les partisans de la contre-insurrection, au XXe siècle. Les écrits de Nguyễn Trãi, comme ses actes, trahissent l’extrême pragmatisme de la pensée stratégique vietnamienne, caractérisée par une utilisation systématique – au niveau tactique comme stratégique – de la guerre de mouvement.

Tout en s’appropriant le patrimoine stratégiste de la Chine, fondé sur l’expérience de la guerre interne entre seigneuries rivales et symétriques, les grands stratèges vietnamiens semblent avoir réussi à singulariser une pensée tout entière basée, au contraire, sur l’attaque d’un ennemi nettement supérieur en nombre. Ironiquement, la Chine, devenue entre temps l’allié stratégique, fut une source d’inspiration majeure dans la refondation de la pensée stratégique par les dirigeants communistes de la République démocratique du Vietnam (RDV) proclamée en 1945.

La refondation stratégique du Parti communiste au service de la guerre moderne

La force des principes de la guerre du peuple synthétisés, théorisés, vulgarisés et appliqués par le bureau politique du parti communiste vietnamien contre la France et ses alliés entre 1945 et 1954, puis contre les États-Unis et leurs alliés jusqu’en 1975, réside précisément dans la greffe de la pensée révolutionnaire marxiste appliquée au domaine militaire sur la tradition séculaire de lutte contre la domination chinoise.

Fondateur du parti communiste en 1930, icône de la lutte pour l’indépendance et président de la RDV jusqu’à sa mort, en 1969, Hồ Chí Minh est moins connu pour sa contribution pourtant décisive au renouveau de la pensée militaire [3]. Ses biographes le décrivent très sensible à l’impératif de défense de la « mère-patrie » à partir d’une mobilisation populaire intensive, tel qu’il avait été promu par THD et Nguyễn Trãi, dont le président Hồ allait régulièrement rappeler le souvenir pendant la guerre d’Indochine. Puisant à la fois dans la tradition militaire vietnamienne et la pensée marxiste, il dégagea, au lendemain de la première guerre mondiale, les grands principes stratégiques qui allaient progressivement être mis en œuvre, à partir de la révolution d’août 1945, pour se libérer de la colonisation : une stratégie d’insurrection armée et de « guerre du peuple » basée sur un objectif d’unité nationale et de souveraineté territoriale ; l’organisation de forces armées révolutionnaires ; la construction de bases révolutionnaires et de bases de soutien à l’arrière sur le territoire de la République populaire de Chine (RPC), proclamée en 1949.

Comme ses ancêtres, il exhorta à une résistance prolongée et à l’offensive incessante, sachant tirer le plus grand profit du secret et de la surprise. Offensive dans chaque combat, la tactique devait être subordonnée à une stratégie défensive à l’échelle nationale. Hồ rappela aussi la nécessité de combiner guerre régulière et guérilla (y compris dans sa dimension fluviale ou maritime, plus méconnue) ; de rechercher la plus grande coordination possible entre petites, moyennes et grandes batailles au service du but stratégique ; entre le front et l’arrière ; entre forces locales, régionales et régulières ; entre les différentes aires stratégiques sur l’ensemble du théâtre indochinois ; entre les « trois fronts », politique (propagande), militaire et diplomatique. Cette inscription de la stratégie dans la tradition ancestrale explique sans doute l’importance et le succès de la mobilisation populaire que le parti communiste fut à même de réaliser pendant les guerres d’Indochine. Toutefois, le choix du communisme s’est aussi accompagné du développement de la coercition et de la terreur d’État – en particulier le terrorisme sélectif – qui ont nourri et aggravé la guerre civile au lieu d’y mettre un terme.

En communiste orthodoxe et internationaliste qu’il était aussi, Hồ Chí Minh eut à cœur de moderniser la guerre du peuple pour la rendre opérante face à une grande puissance militaire. Si Engels avait théorisé le déclenchement d’une insurrection populaire au moyen d’une guerre de guérilla généralisée, Lénine avait pour sa part insisté sur la nécessité de construire une armée régulière totalement soumise au contrôle du Parti.

D’abord journaliste et chroniqueur de la guerre révolutionnaire conduite par Mao Zedong dont il traduisit une partie des écrits, un moment professeur d’histoire au lycée Thăng Long de Hà Nội, Võ Nguyên Giáp se vit confier par Hồ Chí Minh la mise en œuvre de ces deux volets stratégiques indissociables. Pourtant totalement novice dans la pratique militaire, il devint le charismatique commandant en chef d’une Armée populaire du Việt Nam (APV) modernisée grâce à l’aide chinoise et soviétique. Féru des campagnes napoléoniennes et des écrits de Lénine et Mao, mais aussi de Clausewitz et Thomas. E. Lawrence dit Lawrence d’Arabie, il apporta à son tour une contribution notable à la pensée stratégique de son pays [4]. Mais, la stratégie qu’il fut chargé de mettre en œuvre contre les Français, puis contre les Américains, et leurs alliés, s’est fortement inspirée de la « guerre révolutionnaire » théorisée par Mao Zedong dans la deuxième moitié des années 1930 [5]. Au rythme des trois étapes successives de défensive, d’équilibre des forces, puis de contre-offensive, cette guerre évolua, comme le décrit Giáp dans Guerre du peuple – Armée du peuple, d’une guérilla progressivement généralisée à une guerre de mouvement dans laquelle les troupes régulières multiplièrent les engagements frontaux. Plus spécifique en revanche, vis-à-vis de la pensée stratégique chinoise, apparaît le concept vietnamien d’offensive précoce censé, dans une situation d’impasse stratégique, accélérer l’usure psychologique d’un adversaire enclin à se lasser rapidement car ses intérêts vitaux n’étaient pas engagés, tout en démontrant la détermination des attaquants. À l’exception de la bataille décisive et victorieuse de Điện Biên Phủ, bataille clausewitzienne par excellence, les offensives précoces telles que la très controversée offensive du Tết Mậu Thân, en 1968 (d’ailleurs critiquée non seulement par Mao, mais par Giáp lui-même, marginalisé dans sa préparation), eurent un impact politique et psychologique très supérieur à leur impact militaire.

La maîtrise que les stratèges vietnamiens parvinrent à atteindre dans la dialectique entre le politique et le militaire, entre la guérilla et les batailles d’anéantissement, entre l’armée professionnelle et le peuple, eut néanmoins son revers. La guerre totale conduite au nom de l’indépendance et de l’unité nationale s’est soldée par de fortes tensions – et de nombreuses purges – au sein du parti et de ses instances dirigeantes. Surtout, la victoire a été atteinte au prix d’un coût exorbitant pour l’armée et pour la population, que reflète en partie le très lourd bilan des pertes : 3 à 4 millions de morts vietnamiens, civils et militaires des deux camps, entre 1945 et 1975.

L’héritage de l’histoire dans les Livres blancs de la Défense nationale du Việt Nam (1998, 2004 et 2009)

L’héritage des grands principes stratégiques vietnamiens de cet « art de vaincre le grand nombre par le petit nombre » (Giáp) demeure très présent dans la pensée stratégique vietnamienne actuelle. Dernier d’une série de trois qui devrait se poursuivre avec la publication attendue d’un quatrième, le Livre Blanc de 2009 exhorte ainsi à une « défense nationale de tout le peuple ». Il n’hésite pas à valoriser, dans le cadre d’une stratégie fondamentalement défensive, le concept de « potentiel politico-spirituel » défini comme « une composante du potentiel de défense nationale, inhérent aux qualités humaines, aux traditions nationales historico-culturelles, et au système politique » du Việt Nam [6]. Les ressorts qui ont permis autrefois la mobilisation totale des ressources et des énergies au sein de la société vietnamienne demeurent la clé de voûte de la stratégie actuelle du Parti : la « guerre du peuple » vise à transformer tout le peuple, qu’il soit affecté à des tâches civiles ou militaires, en véritable arme de guerre.

Quelles sont aujourd’hui les menaces à affronter ?

Les Livres Blancs vietnamiens ne sont guère prolixes sur les menaces non traditionnelles, pourtant à l’origine de coopérations bilatérales et multilatérales de plus en plus nombreuses, telles que la sécurité alimentaire, les épidémies, le changement climatique et les catastrophes naturelles, la piraterie ou le terrorisme. Or, certaines d’entre elles suscitent de légitimes inquiétudes, comme les conséquences désastreuses de la montée du niveau de la mer liée au réchauffement climatique sur le développement agricole et l’accès aux ressources en eau. Dans le bassin du Mékong, ces problèmes se trouvent même aggravés par la décision de la Chine de construire une cascade de barrages en amont du fleuve.

En revanche, le Livre Blanc de 2009 n’occulte pas les risques liés aux menaces traditionnelles, qu’il rappelle dès son introduction : compétition entre les grandes puissances, prolifération d’armes de destruction massives, et surtout, disputes maritimes, tout particulièrement celles qui affectent « les souverainetés territoriales et les intérêts nationaux en mer de l’Est », suscitent des « tensions » susceptibles de dégénérer en « conflits », comme ce fut le cas avec la Chine, en 1988, dans l’archipel des Spratly. Omniprésente dans les conversations, la résurgence de la « menace chinoise » ne saurait être évoquée comme telle dans le Livre Blanc, pas plus que dans tout autre document public. Les auteurs reconnaissent toutefois que ces disputes portent préjudice au développement d’une économie maritime (p. 18) appelée à prendre une part croissante dans la richesse nationale de l’État littoral vietnamien et, par conséquent, dans la pensée stratégique : la résolution n°9 introduite par le comité central du Parti, en 2007, dans le cadre d’une « stratégie maritime du Việt Nam pour 2020 », soulignait d’ailleurs déjà l’importance géo-économique et géostratégique de la mer de l’Est. Dans le Livre Blanc, les auteurs réaffirment l’importance de la dialectique entre le développement économique, auquel l’APV continue de prendre une part active ; les capacités de défense et la coopération internationale – un triptyque à l’origine du concept de national comprehensive security entériné pour la première fois par le bureau politique dans sa résolution n°13 du 20 mai 1988 [7].

II. Une nécessaire actualisation face à la Chine du XXIe siècle


Un volet diplomatique : la « stratégie de couverture »

Aujourd’hui comme hier, mais avec un degré de sophistication proportionnel à l’interdépendance politique et économique croissante entre les deux pays, la stratégie vietnamienne s’élabore avant tout en fonction de la Chine. À la fois étroite, profondément asymétrique et dangereusement ambivalente, la relation sino-vietnamienne est perçue, au Việt Nam, à travers un système de valeurs qui s’est construit sur des mécanismes d’emprunt et de différenciation élaborés dans tous les domaines, mais aussi de diabolisation vis-à-vis de l’« ennemi du Nord » aux ambitions majoritairement perçues comme expansionnistes et hégémonistes. L’incursion militaire chinoise dans les provinces septentrionales vietnamiennes pendant la guerre-éclair de 1979, événement officiellement tabou dont la mémoire n’est entretenue que d’une façon très discrète, a brutalement fait resurgir le spectre du retour de l’« ennemi » traditionnel.

Après l’adoption de la politique du Đổi Mới (« renouveau »), en 1986, et la libéralisation de l’économie pour créer les conditions d’une croissance durable, le bureau politique s’est lancé dans une quête effrénée de partenariats économiques et diplomatiques, au nom d’une diplomatie omnidirectionnelle que le 7e Congrès du Parti a érigée en doctrine, dès 1991. Avec un appétit d’autant plus grand que leur politique de collectivisation de l’économie et d’occupation militaire du Cambodge les avait conduits au bord de la faillite, au début des années 1980, les dirigeants vietnamiens ont alors développé une graduation de partenariats plus étroits, essentiellement « compréhensifs » et « stratégiques ». Soucieux de mettre fin à l’isolement du Việt Nam après le retrait et l’effondrement de son allié soviétique, le Parti a voulu renforcer ainsi la profondeur stratégique qu’il avait précocement commencé à se forger dans sa zone d’influence traditionnelle en intensifiant ses activités au Laos et au Cambodge. L’inquiétude suscitée par le renouveau de la puissance et de l’activisme de la Chine a précipité la recherche de contrepoids.

Éléments d’un soft balancing diplomatique complémentaire du hard balancing militaire, ces partenariats privilégiés constituent, aujourd’hui plus que jamais, l’une des dimensions essentielles de la hedging strategy (« couverture de risques ») – une version modernisée de la stratégie du faible au fort. En fournissant un cadre diplomatique au niveau pratiquement le plus élevé, mais en deçà de l’alliance formelle, ils offrent un instrument majeur des relations internationales post-guerre froide destiné à les rendre plus flexibles et interdépendantes pour éviter tout retour de la bipolarisation. Ils n’effacent pas toute divergence entre les pays signataires mais impliquent une coopération globale plus soutenue [8]. Le Việt Nam fut l’un des cinq premiers pays à signer un partenariat stratégique avec la Russie, en 2001, élevé en 2012 au stade suprême de « partenariat stratégique compréhensif », comme il l’avait déjà été avec la Chine en 2008. Depuis, sa toile n’a cessé de s’étendre puisqu’en 2014, le pays était signataire de 13 partenariats stratégiques – dont le Japon (2006), l’Inde (2007), la Corée du Sud (2009), le Royaume-Uni (2010), l’Allemagne (2011), la France, l’Indonésie, Singapour et la Thaïlande (2013) – et de 11 « partenariats compréhensifs », parmi lesquels l’Australie et la Nouvelle-Zélande (2009), les États-Unis et l’Ukraine (2013). Fondés sur des critères de puissance et d’influence classiques – politiques, militaires et économiques –, ces partenariats n’ont cependant pas le même poids et ne garantissent nullement un engagement automatique du partenaire dans le cas d’un affrontement armé dont le Việt Nam serait victime, ni même un soutien des positions vietnamiennes dans les litiges insulaires qui l’opposent notamment à la Chine. Ainsi, la Russie, pourtant l’un de ses principaux partenaires et son principal fournisseur d’armes, s’est-elle abstenue de toute prise de position dans la querelle territoriale sino-vietnamienne. Les partenariats stratégiques n’en sont pas moins présentés dans le dernier Livre Blanc de 2009 comme une contribution importante aux objectifs de la politique étrangère et de défense vietnamienne : la protection de l’indépendance nationale et de la souveraineté territoriale, l’accélération de l’intégration internationale du pays et du développement économique, la confiance stratégique et la stabilité du régime à l’intérieur des frontières. Pour accroître la crédibilité du volet diplomatique de sa stratégie, le bureau politique a estimé nécessaire de rattraper également une partie de son retard militaire.

Un volet militaire : vers une stratégie de déni d’accès

Jadis l’armée la plus redoutée d’Asie du Sud-Est, l’APV a très vite été distancée par l’Armée populaire de libération chinoise – dont la modernisation accélérée fut d’ailleurs l’une des conséquences imprévues des difficultés rencontrées dans sa guerre-éclair de 1979 contre le Việt Nam. Pour être à même de faire face un jour à la supériorité de la puissance militaire chinoise et renforcer la défense de son territoire côtier et insulaire, le Việt Nam s’est lancé dans l’ébauche d’une stratégie de « déni d’accès » en mer de Chine méridionale, comme les Chinois eux-mêmes pour éloigner les Américains du Pacifique occidental. En hausse de 113% entre 2004 et 2013 – la plus forte progression en Asie du Sud-Est –, ses dépenses militaires ont permis d’accélérer la modernisation de ses forces maritimes et aériennes. En achetant notamment à la Russie, en 2009, six sous-marins de la classe Kilo équipés de missiles balistiques d’une portée de 280 km, le Việt Nam a consenti un effort sans précédent pour un primo-accédant à cette capacité. Une telle force de frappe conventionnelle devrait le faire accéder, autour de 2020, au tout premier rang des flottes sous-marines d’Asie du Sud-Est. Pour protéger son territoire et sa flotte de surface en cas d’affrontement naval, Hà Nội a également acquis des avions de combat Su-30 MK2, armés de missiles de croisière antinavires – en plus de la douzaine d’avions Su-27 relativement modernes et des nombreux Mig qu’il possède déjà –, mais aussi, six avions DHC-6 Twin Otter au Canada, parfaitement adaptés à la surveillance maritime.

Soutenues par une politique plus volontariste et collaborative dans le domaine de l’industrie de défense destinée à renforcer l’autonomie stratégique du Việt Nam, ces capacités nouvelles sont assurément loin d’être au niveau quantitatif et même qualitatif de celles de la Chine. Pékin a désormais les moyens de les neutraliser et le fait savoir [9], notamment à propos des missiles balistiques des Kilo vietnamiens. Elle peut faire jouer sa supériorité militaire et financière dans une guerre d’attrition. De plus, faute d’un accroissement sensible des effectifs de la marine et de l’aviation vietnamiennes, la maintenance des navires et des avions semble encore très insuffisante pour les rendre pleinement opérationnels, surtout au regard de la longueur des côtes à protéger – plus de 3 200 km, par où sont arrivées bien des invasions dans la longue histoire de ce pays… Il reste, enfin, à relever correctement le défi majeur de l’interopérabilité, qui requiert une intégration accrue entre le système de défense antiaérienne (avions de combat et missiles sol-air), l’artillerie côtière, les missiles guidés à partir des frégates, et les navires d’attaque rapide. À terme, cependant, l’augmentation des capacités vietnamiennes, si elle se poursuit, devrait rendre plus complexe et plus couteux tout aventurisme de la part de Pékin sur les côtes et les îlots vietnamiens. En combinant une stratégie actualisée de guerre du peuple intégrant le volet traditionnel de la guérilla fluviale et maritime, avec celle du déni d’accès, Hà Nội accroît la crédibilité de ses ambitions dissuasives vis-à-vis de la Chine, malgré la criante infériorité de ses moyens militaires et économiques.

Un équilibre bien délicat

La pensée stratégique vietnamienne
Carte du contentieux en Mer de Chine du Sud
Cliquer sur la vignette pour agrandir la carte. Réalisation C. Bezamat-Mantes pour Diploweb.com

Depuis la dernière crise sino-vietnamienne provoquée, au printemps 2014, par l’installation d’une plateforme pétrolière chinoise dans les eaux que le Việt Nam considère comme relevant de sa ZEE, au large de l’archipel des Paracels, les dirigeants vietnamiens ont accéléré leur stratégie d’internationalisation du conflit amorcée au tournant des années 2000-2010. La marge de manœuvre est étroite car il ne pas mettre en péril le dialogue de haut niveau qu’ils entretiennent tant bien que mal avec leurs homologues chinois. Tout en réaffirmant une posture de neutralité – fondée sur le triple refus de toute base étrangère sur le territoire vietnamien, d’alliance militaire et de relation dirigée contre un Etat tiers – ils ont réussi à accélérer leur rapprochement avec plusieurs grandes puissances susceptibles d’exercer un réel contrepoids, même dans le domaine sensible de la coopération de défense [10]. Au cours de l’année 2014, ont été annoncés successivement, la livraison de 6 patrouilleurs maritimes par le Japon, la levée partielle de l’embargo sur les armes létales par les États-Unis, et la livraison de navires par l’Inde, en échange de droits d’exploration pétrolière. Sans doute, malgré la persistance de certains obstacles bilatéraux, le Việt Nam revêt-il désormais une importance accrue dans les stratégies respectives de ces trois pays en rivalité stratégique avec la Chine – les États-Unis (Asian rebalancing), le Japon (Look South) et l’Inde (Act East). Cette clumping bamboo strategy, qui consiste à maximiser les relations avec les grandes puissances sans trop se rapprocher avec l’une d’elle au détriment des autres, augmente aussi le risque que le Việt Nam soit à nouveau entraîné ou instrumentalisé dans des tensions, des crises ou des conflits qui ne le concerneraient pas directement. Mais, déjà bien intégré à l’Asean et à ses diverses extensions, devenues une composante essentielle de sa profondeur stratégique à laquelle contribuent également les instances multilatérales telles que l’ONU, l’UE/ASEM, l’APEC ou l’OIF, le Việt Nam se sent sûrement plus assuré pour manœuvrer au mieux de ses intérêts et maintenir autant que possible une politique étrangère d’équidistance entre les puissances, en évitant toute réaction disproportionnée de la Chine.

Bien qu’il soit très difficile de suivre le cheminement de la pensée stratégique, hier comme aujourd’hui, compte tenu de l’opacité qui entoure le processus de décision collégial au sein du Bureau politique du Parti, les objectifs assignés à la stratégie par la commission militaire centrale du Parti communiste – qui reste l’organe principal de son élaboration finale – sont connus : la défense du régime communiste et du territoire vietnamien contre toute menace interne ou externe. Elle postule donc la fidélité de la population et de ses élites à un parti communiste déjà fortement éprouvé par la corruption, par ses concessions réelles ou supposées à l’égard de la Chine, et par sa politique répressive à l’égard de bloggeurs et de dissidents politiques pourtant patriotes. Au dilemme de sécurité extérieur suscité par la Chine s’ajoute donc un dilemme de sécurité interne. La survie du PCV, qui a fondé sa légitimité sur des succès politico-militaires puis économiques auxquels la Chine populaire a largement contribué, dépend non seulement de la poursuite du soutien de Pékin, mais aussi de l’adhésion des élites et de la population. Or, plus le Parti paraît céder aux pressions que la Chine assume plus ouvertement parce que le rapport de force lui est de plus en plus favorable, en échange de son appui politique et financier, plus la population, dans ses profondeurs, s’éloigne du régime. Comme l’ont montré les violentes manifestations du printemps 2014 contre des intérêts privés assimilés à la Chine, le risque principal pour les dirigeants vietnamiens réside dans la jonction des deux mécontentements, intérieur et extérieur, qu’ils s’efforcent de prévenir par un mélange de séduction et de répression. Sans doute, le sommet du Parti est-il traversé par le clivage classique entre réformateurs et conservateurs. Majoritairement conclus avec des démocraties, les partenariats stratégiques sont parfois interprétés par les partisans de la libéralisation politique, réformateurs pour la plupart formés aux États-Unis et plus soucieux de la sécurité humaine, comme ayant vocation à faciliter la démocratisation progressive du régime, que réclament des bloggeurs et des Vietnamiens d’outre-mer de plus en plus influents au sein d’une société civile en gestation. À l’aune de ces débats internes, la perspective d’une nouvelle étape dans le rapprochement avec les États-Unis – en particulier la signature du Trans-Pacific Partnership dont Hà Nội espère une réduction de sa dépendance commerciale et financière vis-à-vis de la Chine, son plus grand partenaire commercial depuis 2004 – revêt un caractère encore plus sensible, révélateur de la dialectique entre sécurité et indépendance économique promue par le Parti depuis les années 1990.

Rien n’a encore été publié à propos de la révision opérée en 2013 de la résolution n°8 adoptée par le comité central lors de son 8e plenum, en 2003. Reflet de la stratégie de « coopération-lutte » (vừa hợp tác vừa đấu tranh), cette résolution faisait alors de la Chine un pays avec lequel « coopérer », et des États-Unis, un pays contre lequel il fallait « lutter » parce que sa promotion des Droits de l’Homme et sa critique du régime de parti unique étaient perçues comme une menace à l’encontre des « intérêts nationaux » du Việt Nam. Si les États-Unis sont sûrement considérés désormais, à l’instar de la Chine, à la fois comme des partenaires et des adversaires potentiels, le Parti n’a aucun intérêt à se laisser enfermer dans la rivalité stratégique croissante entre ces deux grandes puissances mondiales, dont la mer de Chine méridionale est peu à peu redevenue l’un des champs d’application.

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Conclusion : quelle posture pour l’Union européenne (UE) et pour la France ?

Deuxième partenaire commercial du Việt Nam (11,3%) après la Chine (23%), en 2013, et deuxième investisseur après les États-Unis, l’UE apparaît comme l’une des alternatives à ce scénario. Elle s’intéresse de plus en plus aux facteurs d’instabilité de la région et, en particulier, au risque d’un conflit maritime susceptible de mettre en péril sa propre sécurité économique. Elle propose de partager sa vaste expérience des différends maritimes et défend, avec la « puissance douce », une solution pacifique fondée sur le respect du droit international. Elle se présente depuis peu comme un élément d’équilibre utile auquel Hà Nội paraît de plus en plus sensible. Face à la recrudescence des tensions bilatérales entre Pékin, d’une part, Hà Nội et Manille de l’autre, la France conserve quant à elle d’indéniables d’atouts, malgré son éloignement. Son relatif désintérêt pour la recherche des solutions aux conflits territoriaux, dans lesquels elle a pourtant une part de responsabilité comme ancienne puissance coloniale, a sans doute aggravé l’effritement de ses positions dans la région. Il peut aussi avoir contribué à l’échec de ses tentatives d’intégration dans des structures multilatérales plus opérationnelles comme l’ADMM+ [11], alors même que les stratèges vietnamiens ont fait du règlement du conflit maritime leur principale priorité. Plusieurs facteurs, en revanche, militent en faveur d’une posture diplomatique d’essence médiatrice, plus active et plus visible, dans le conflit en mer de Chine méridionale qui constitue à ce jour le plus grand défi de sécurité du Việt Nam : la place de la France dans l’UE que les dirigeants vietnamiens considèrent comme l’un des acteurs clés du maintien de l’équilibre multipolaire et la possibilité qu’elle a d’investir plus activement les espaces de dialogue politique déjà existants, par exemple au sein de l’ASEM ; le souvenir encore positif des prises de position du général de Gaulle et de nos efforts diplomatiques pour faciliter la solution des conflits qui ont déchiré la péninsule indochinoise dans les 1960-1990 ; enfin l’avantage comparatif que la France possède encore par rapport à ses concurrents européens en tant que puissance militaire, exportatrice d’armes, et puissance du Pacifique, riveraine de la Chine. Pionnière dans ce domaine en Europe, la France jouit d’une relativement bonne relation de défense avec Hà Nội, fondée sur une convergence d’analyse de la situation géopolitique et quelques coopérations ciblées. Mais, un « partenariat stratégique » qui manquerait de substance sur l’un des principaux enjeux de sécurité régionale pourrait faire naître à terme, au Việt Nam, des frustrations dommageables pour l’ensemble de la relation franco-vietnamienne.

Manuscrit clos au printemps 2015

Copyright Septembre 2016-Journoud/Diploweb


NDLR : Cette note de synthèse – inédite - a été rédigée au printemps 2015. Pierre Journoud , son auteur, était alors chercheur à l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire (IRSEM), en charge de son programme Asie du Sud-Est. Depuis septembre 2015, il est Professeur d’histoire contemporaine à l’Université Paul-Valéry Montpellier.

Le lecteur désireux d’actualiser la deuxième partie de cette note pourra se référer à :
. Béatrice Giblin et Benoît de Tréglodé (éd.), « Les enjeux géopolitiques du Viêt Nam », dossier d’Hérodote, n°157, 2e trimestre 2015.

. Pierre Journoud, « Les Philippines, le verdict de la Haye et la nouvelle donne stratégique en mer de Chine méridionale », tribune en ligne sur le site Internet de la Revue Défense Nationale (http://www.defnat.fr/site_fr/tribune/fs-article.php?ctribune=879).


Bibliographie

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. WOMACK (B.), China and Vietnam : Politics of Asymmetry, Cambridge, Cambridge University Press, 2006.

Plus entretiens de l’auteur, en 2014-2015, avec Christian Lechervy, conseiller aux affaires stratégiques et asiatiques à l’Elysée (2012-2014), Carlyle Thayer, expert australien des questions politico-militaires vietnamiennes ; et avec des experts de l’Académie de Défense et de l’Académie diplomatique du Vietnam.


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[1D’après une source vietnamienne du XVe siècle – Đại Việt sử ký toàn thư (« Histoire complète du Đại Việt ») – citée dans : Lê Thành Khôi, Histoire et anthologie de la littérature vietnamienne, des origines à nos jours, Paris, Les Indes Savantes, 2008, p. 180.

[2Nguyễn Văn Nguyên, Les Écrits à l’Armée de Nguyễn Trãi – Questions de philologie, Hà Nội, Institut Han-nom/EFEO, 1998 (préfacé par Phan Huy Lê, traduit et présenté par Philippe Papin) ; Ưng Quả, « Un texte vietnamien du XVe siècle. Le “Bình Ngô Đai-cáo” », Bulletin de l’EFEO, t. 46, n°1, 1952, p. 279-295 (http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1952_num_46_1_5167).

[3Voir notamment Hồ Chí Minh Toàn tập (« Œuvres complètes de Hồ Chí Minh »), Hà Nội, Nhà xuất bản Chính trị Quốc gia, 1990-200 (15 volumes, dont 12 téléchargeables sur : https://thehehochiminh.wordpress.com/tp/).

[4Général Võ Nguyên Giáp, Guerre du peuple – Armée du peuple, Paris, Maspero, 1966 (1re éd. vietnamienne 1961) ; Guerre de libération : politique, stratégie, tactique, Paris, Éditions sociales, 1970 ; Armement des masses révolutionnaires – Edification de l’armée du peuple (1972), in Giap, Ecrits, Hà Nội, Editions en langues étrangères, 1977.

[5La Guerre révolutionnaire par Mao Tsé-Toung, Paris, Editions sociales, 1955 (traduction français d’écrits chinois datant de 1936 et 1938).

[6Ministry of National Defence, White Paper on Vietnam National Defence, Hà Nội, 2009, p. 34-36 ; p. 90-91 (http://admm.org.vn:6789/TempFiles/8b863840-e3f6-41b4-9943-d9b4c9770d4c.pdf).

[7Nguyen Vu Tung, « Vietnam’s New Concept of Security », in K.W. Radtke et R. Feddema (éd.), Comprehensive Security in Asia : Views from Asia and the West on a Changing Security Environment, Boston, Brill, 2000, p. 405-424.

[8Pham Binh Minh (actuel ministre des Affaires étrangères), « CP of Vietnam, Building strategic, comprehensive partnerships – Vietnam’s soft power », 12 mai 2014 (http://www.solidnet.org/vietnam-communist-party-of-vietnam/cp-of-vietnam-building-strategic-comprehensive-partnerships-vietnams-soft-power-en).

[9Lyle J. Goldstein, « China’s Nightmare : Vietnam’s New Killer Submarines », 29 mars 2015 (http://nationalinterest.org/feature/chinas-nightmare-vietnams-new-killer-submarines-12505).

[10Vice-ministre de la Défense nationale depuis 2009 et membre du comité central du parti depuis 2011, le général Nguyễn Chí Vịnh, titulaire d’un doctorat en relations internationales (Russie), est souvent présenté comme l’aiguillon de la pensée stratégique vietnamienne dans le domaine de la coopération de défense.

[11Inspiré par le Viêt Nam, l’ADMM+ est le plus haut mécanisme de coopération entre les ministres de la Défense des dix pays aséaniens et ceux des huit pays de dialogue que sont la Chine, la Russie, les États-Unis, l’Inde, le Japon, la République de Corée, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.

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