Dans le cadre de ses synergies géopolitiques, le site www.diploweb.com vous présente en exclusivité sur Internet un extrait d’un ouvrage de Philippe Migaux publié en octobre 2007 par les éditions Lignes de Repères, avec une préface de Gérard Chaliand. Pour en savoir plus, consultez le dossier de cet ouvrage et suivez son actualisation sur www.lignes-de-reperes.com.
LE CLOISONNEMENT de la Jemaah Islamiyah a été facilité par l’existence d’un réseau serré de liens entre ses membres. On n’entre pas dans l’organisation par hasard. Ses militants sont issus généralement des mêmes milieux sociaux et appartiennent à des familles qui ont participé aux luttes du Darul Islam. Ils ont suivi un cursus éducatif similaire. Cette histoire commune est en outre régulièrement renforcée par le mariage avec des jeunes femmes choisies dans les familles d’autres militants. Certaines de ces unions ont d’ailleurs été favorisées par les responsables de l’organisation dans le but de renforcer le sentiment d’appartenance. Tous ces éléments, caractéristiques de la secte religieuse, ont en tout cas permis une redoutable imperméabilité de la Jemaah Islamiyah aux curiosités extérieures.
Le recrutement des combattants est sélectif. Il se fait parmi les membres confirmés de la Jemaah Islamiyah. Les candidats doivent correspondre aux « […] critères exigés par le jihad en terme de qualités personnelles, de détermination, de disponibilité et de santé ». Les premières approches ont lieu dans des pondok sympathisants de la cause salafiste, où l’on propose aux élèves de s’engager pour le jihad. Ceux-ci y sont d’ailleurs préparés non seulement par les discours sectaires de leurs enseignants, mais également par la propagande d’intervenants extérieurs qui viennent y faire des conférences ou des projections vidéo. L’un des thèmes majeurs concerne le martyre des musulmans dans le monde. Plusieurs films sont ainsi présentés au début des années 2000 sur les crimes commis contre les musulmans aux Moluques et à Célèbes. Au spectacle terrifiant de cadavres et de ruines succèdent d’autres images, soudain exaltantes, glorifiant l’action des moujahidines à l’entraînement ou sur les champs de bataille. Les élèves sont en outre invités à fréquenter sur Internet les sites islamistes où ils peuvent consulter en langue arabe les textes des penseurs les plus radicaux.
Les volontaires suivent alors de nouveaux cours religieux d’une durée générale de deux années, par groupe d’une dizaine de personnes. La majorité des groupes est composée d’hommes, mais certains sont réservés aux femmes. En quelques mois, on fait prendre conscience aux étudiants que le jihad n’est pas simplement un concept théologique mais un mode de vie qu’ils doivent adopter. Une fois leur éducation religieuse achevée, les meilleurs sont introduits au sein de l’organisation après avoir prêté allégeance à l’émir. Ils sont alors affectés dans une wakalah.
En fonction des profils, certains parmi les nouveaux partisans sont chargés de tâches missionnaires pour recruter de nouveaux adeptes. D’autres entament des études laïques, principalement dans des domaines techniques comme l’électronique ou l’informatique qui correspondent aux nouveaux besoins de la Jemaah Islamiyah. D’autres encore prennent un emploi et reversent à la Jemaah Islamiyah une partie de leur salaire. Le choix du travail est souvent guidé par les aînés. Disposer de chauffeurs de taxi, de vendeurs de téléphones portables, de commerçants itinérants, voire de représentants des forces de sécurité offre de nouvelles opportunités logistiques non négligeables et permettent d’obtenir des renseignements pour les opérations. De même, la présence d’électriciens ou de laborantins facilite l’achat discret de matériels et des produits chimiques nécessaires à la préparation d’engins explosifs.
Néanmoins la majorité des militants aspire d’abord à devenir moujahid. Cette quête nécessite une première initiation, celle de l’entraînement au combat.
L’entraînement pendant le jihad afghan fut l’un des événements fondateurs de la Jemaah Islamiyah. Il lui procura également une forte capacité d’attraction auprès des groupes jihadistes asiatiques en raison de la qualité reconnue de ses nouveaux instructeurs. La création de sa principale structure d’instruction militaire, le camp Hudaybiyah à Mindanao, permettra de former sur la zone les nouveaux membres de la Jemaah Islamiyah. Mais l’organisation régionale accueillera aussi d’autres volontaires, asiatiques ou arabes, dont certains sont originaires du Moyen-Orient ou d’Europe. Elle réussira à conserver des structures autonomes dans la jungle de Mindanao, jusqu’en juillet 2005, sous la protection de membres radicaux du MILF. La Jemaah Islamiyah disposa en outre, pendant cette période, de multiples facilités d’entraînement dans l’archipel Indonésien, mais cette fois de façon plus fragmentée et ponctuelle.
A. Le camp Hudaybiyah à Mindanao : stages spécialisés et académie des cadets
En octobre 1994, il devient quasiment impossible d’envoyer de nouveaux militants se former en Afghanistan, d’autant que les coûts du voyage et du séjour restent particulièrement onéreux pour les finances de la nouvelle organisation. S’appuyant sur les liens tissés au Pakistan entre ses troupes et les militants du MILF, Abdullah Sungkar demande à Hashim Salamat d’autoriser la formation de ses nouveaux militants dans l’enceinte du camp Abou Bakr al Siddique. Hashim Salamat accepte aisément. Il accueille d’ailleurs déjà à Abou Bakr d’autres militants indonésiens de la TII et la demande ne lui coûte rien. La Jemaah Islamiyah ne sollicite pas de moyens particuliers et dispose déjà de ses propres instructeurs. Et surtout, cet appui est encouragé par Al Qaïda qui lui apporte alors un appréciable soutien en particulier par la mise à disposition d’instructeurs arabes. La Jemaah Islamiyah peut alors envisager l’entraînement accéléré de ses troupes. Le trajet entre Java et le Sud des Philippines est d’un prix modique et le passage discret des volontaires est garanti par la porosité traditionnelle des frontières.
Un mois plus tard, Zulkarnen envoie cinq de ses cadres, tous vétérans afghans sous la conduite de Mustapha qui deviendra par la suite le premier chef de la mantiqi 3. Ils se voient attribuer un emplacement isolé au nord de l’enceinte Abou Bakr et bâtissent eux-mêmes les premières installations avec des matériaux de fortune. Un an plus tard, le camp Hudaybiyah comprend cinq baraquements en dur, qui se répartissent en une salle de cours, un dortoir pour les élèves, un bâtiment pour les cadres, une cuisine et une mosquée.
Le camp, considéré comme prioritaire par le conseil des affaires administratives, va dès lors bénéficier d’un budget propre qui augmentera sensiblement au cours du temps. En mai 1995, Zulkarnen envoie 2 500 $ pour la construction de deux lieux de vie. Début 1996, Hambali réunit 16 000 $ pour la mise en place de nouvelles structures et l’achat d’armes. Le budget de fonctionnement est alors entièrement pris en charge par la mantiqi 1. Dès l’année suivante, en raison de l’augmentation du nombre des stagiaires, Abdullah Sungkar décide de faire financer l’entraînement par chaque mantiqi au prorata de leur participation respective. L’encadrement est soumis à des rotations régulières, les instructeurs étant considérés comme assumant eux-mêmes un temps de formation qui les prépare aux commandements opérationnels dans les wakalah. Mais cela s’avère peu réaliste. A partir de 1998, en parallèle à des stages courts pour les militants de base, sera dispensé un entraînement de plus longue durée, destiné à former spécifiquement les nouveaux cadres de terrain.
Les stages spécialisés
Pour remercier Hashim Salamat, mais aussi pour lui prouver leurs compétences, les instructeurs de la Jemaah Islamiyah réservent, en mars 1995, leur premier stage à une soixantaine de militants du MILF. Il est axé sur l’emploi particulier des mortiers et des lance-roquettes, complété par une initiation à la mise en œuvre des engins explosifs. Se succèdent alors des stages pour les membres de la Jemaah Islamiyah d’une durée variant entre trois semaines et deux mois selon les besoins des stagiaires. La cohésion des groupes est acquise par la multiplication des exercices physiques. En parallèle à des cours intensifs de religion, sont enseignées la pratique du tir aux armes légères, la topographie, la reconnaissance d’objectifs et la conduite d’embuscades.
A partir de 1998, la Jemaah Islamiyah accepte d’accueillir des combattants d’autres groupes indonésiens. Des militants de la TII, mais aussi des volontaires au jihad sulawésien, en particulier des membres du Laskar KOMPAK, sont ainsi entraînés aux techniques d’artificier. Par contre, les hommes d’Abou Sayyaf semblent avoir été rares en raison de la condamnation par le MILF de leurs modes d’action, dont l’aspect inutilement meurtrier dessert la cause islamiste.
L’académie militaire des cadets de la Jemaah Islamiyah
Elle a été créée par décision directe du markaz, sur proposition d’Abdullah Sungkar. Le programme du Kuliah Harbiyah Dauroh (KHD, Cours d’entraînement des cadets) s’étend sur trois périodes de six mois, séparées par deux coupures d’un mois. Les recrues doivent appartenir à la Jemaah Islamiyah depuis au moins deux ans et s’être fait remarquer pour leur fidélité, leurs bonnes connaissances religieuses et leur aptitude au commandement.
Le programme d’instruction, particulièrement complet, suit en parallèle un double cursus religieux et militaire. En matière coranique, l’enseignement porte sur six thèmes : la connaissance de l’islam [fiqh], l’étude des traditions du Prophète (hadiths), les règles de la foi [aqidah], l’engagement religieux [ibadah], la prédication [dakwah] et la conduite de la guerre sainte. En matière militaire, si la formation générale porte sur les tactiques de guérilla, l’accent est régulièrement mis sur les techniques terroristes spécifiques au milieu urbain. L’entraînement physique régulier (sports collectifs, parcours d’obstacles, courses d’orientation, etc.) est complété par des cours d’autodéfense, vaguement inspirés du penchak silat.
Pour bien montrer l’attention portée à la préparation au jihad de ses cadres, c’est l’émir Abou Bakar Bashir en personne qui préside, dans l’enceinte du camp, la cérémonie de promotion en avril 2000. Le MILF est représenté par plusieurs de ses cadres. Neuf des nouveaux promus sont alors désignés pour servir d’instructeurs à la deuxième promotion, qui comprend dix-sept stagiaires indonésiens.
L’entraînement commence dès avril 2000, mais il est interrompu en juillet. L’offensive des forces armées philippines sur les camps du MILF, et en particulier sur l’enceinte Abou Bakr oblige la Jemaah Islamiyah à déménager rapidement du camp Hudaybiyah pour se réinstaller au camp Jabal Quba. Les stagiaires y finissent leur instruction avec plusieurs mois de retard, en raison du temps passé à construire de nouvelles installations qui resteront cependant plus rudimentaires. Trois autres promotions d’une vingtaine de cadets vont s’y succéder jusqu’au début de 2005. Quant aux structures d’Hudaybiyah, laissées à l’abandon, elles sont investies par l’armée philippine en décembre 2000.
B. Les camps des Moluques
Les combats jihadistes aux Moluques, déclenchés à la mi-1999, n’ont pas entraîné de réaction particulière au sein du markaz qui s’est installé dans la mantiqi 2 depuis le retour de ses chefs en Indonésie. Ceux-ci restent centrés sur la stratégie régionale. Ce sont les responsables de la mantiqi 1 qui vont prendre de façon autonome la décision d’apporter leur concours aux musulmans moluquois. Au début de l’année 2000, Zulkarnen et Abou Jibril organisent l’envoi d’instructeurs qui s’installent dans trois camps rudimentaires où ils forment des militants locaux, mais également des volontaires venus de Java et de Célèbes. Les deux premières structures sont dissimulées aux alentours des villages de Tobelo et Galeha, sur la côte orientale de l’île Halmahera. Le troisième camp est situé au sud de l’île de Morotai. L’entraînement est principalement axé sur le tir aux armes légères, mais aussi sur la réalisation d’engins explosifs improvisés. Là encore, l’utilisation d’obus ou d’engrais chimiques est approfondie. Parmi les instructeurs figurent deux ressortissants malaisiens, Hassan Azahari et Mohamed Top.
C. Les camps de Poso (Centre Célèbes) liés à Al Qaïda
Le camp d’Ampana, près du lac Poso est constitué d’une dizaine de baraquements. Il est, au départ, utilisé par le Lashkar Jundallah, une milice religieuse originaire de Makassar. Le choix de l’emplacement tient à son environnement désertique et à sa proximité géographique avec la ville de Poso, capitale du Centre Célèbes, à majorité chrétienne. Le camp sert également de centre de commandement local d’où seront menées de nombreuses attaques contre les villages de l’ennemi.
Le camp d’Ampana est dirigé par le vétéran afghan Omar Bandon. Il a reçu l’apport d’instructeurs arabes, diligentés par Al Qaïda. En échange, un certain nombre de volontaires du Moyen-Orient et d’Europe vont faire, par petits groupes, le voyage à Célèbes pour être formés sur place. Certains auraient participé à des combats locaux. Le responsable de l’entraînement physique est, fin 2000, l’Indonésien Parlindungan Siregar qui, en 1998, lors de ses études d’ingénieur aéronautique en Espagne, avait été rallié à l’islam radical par l’Espagnol d’origine syrienne Imad Idriss Barakat Yarkas. Ce dernier s’est même rendu au camp d’Ampana en mai 2001, avant d’envoyer d’Espagne financements et volontaires, dont l’Espagnol converti Louis Jose Galan Gonzales. Le camp fut investi, en décembre 2001, par l’armée indonésienne qui y interpella alors plusieurs ressortissants étrangers. De profil sportif, ils se sont présentés comme de simples membres d’ONG wahhabites venus apporter un soutien humanitaire aux populations musulmanes meurtries par les combats.
Le camp semble avoir été agrandi rapidement en trois structures autonomes. L’une d’entre elles compte parmi ses cadres une dizaine de membres de la Jemaah Islamiyah qui y organise deux types de stage : celui prévu pour les combattants dure un mois, celui destiné aux instructeurs le triple. Le programme est directement inspiré de celui d’Hudaybiyah. Parmi leurs stagiaires figurent plusieurs dizaines de volontaires envoyés par leur organisation, dans l’attente de la mise en place complète des infrastructures de Jabal Quba. La majorité d’entre eux ont d’ailleurs acquis une expérience pratique des combats en s’associant aux unités du Lashkar KOMPAK. La Jemaah Islamiyah aurait également été présente dans une autre structure, plus rudimentaire, installée ultérieurement près du lac Towuti.
On notera que plusieurs vidéocassettes de propagande sur les entraînements à Poso ont été réalisées par le ressortissant allemand d’origine égyptienne Reda Seyam. L’une d’entre elles présente des entraînements effectués en forêt par un groupe d’une vingtaine de combattants. Les dernières images montrent les mêmes hommes recevant de nuit leurs armes avant de partir en opération. Il semble que cette dernière corresponde à l’attaque contre le village chrétien de Tangkura, rasé le 27 novembre 1998.
D. Le camp de Baten
Le réchauffement des relations entre Abdullah Sungkar et Ajungan Masduki – favorisé en grande partie par Dodo Mohamad Darda, le fils de Kartosurwiryo – a permis également l’ouverture aux militants de la Jemaah Islamiyah, des camps clandestins de l’Armée islamique indonésienne. Ceux-ci, de petite taille, ont été construits dès les premiers mois de la Reformasi, alors que les services de sécurité indonésiens, en voie de réorganisation, délaissaient largement la surveillance des milieux islamistes. Ils sont, pour leur grande majorité, installés dans des zones reculées de Java. Le plus actif est le camp de Banten, dans la partie occidentale de l’île. Au moins quatre membres de la Jemaah Islamiyah impliqués ultérieurement dans les attentats de Bali 1 – Imam Samudra, Iqbal, Hassan Azahari et Nourredine Top – y auraient servi d’instructeurs. Ces deux derniers ont associé par la suite plusieurs de leurs anciens stagiaires à la préparation de l’attentat contre l’ambassade d’Australie.
E. Le camp Jabal Quba
La Jemaah Islamiyah a pu reprendre ses activités d’entraînement à Mindanao, dès la fin 2000. L’emplacement choisi reste sur le territoire de la province de Lanao del Sur, mais dans une zone plus difficilement accessible, celle des monts Cararao. La topographie du terrain renforce la sécurité des nouvelles installations, mais rend plus difficile l’arrivée des stagiaires comme l’approvisionnement en matériels. Jabal Quba n’offrira pas les mêmes prestations qu’Hudaybiyah, même si ses cadres ont bénéficié rapidement de l’appui de groupes radicalisés du MILF, installés à proximité. Certains d’entre eux ont d’ailleurs fui avec leurs familles l’enceinte Abou Bakr en compagnie des stagiaires de la deuxième promotion de cadets de la Jemaah Islamiyah. Leur entraînement peut reprendre alors de fin 2000 à juillet 2002. Trois autres promotions leur succèderont.
Le camp Jabal Quba dispense un programme inspiré de celui d’Hudaybiyah. Hormis pour les cadets, dont l’entraînement reste identique, il va offrir principalement des modules courts de formation aux militants de la Jemaah Islamiyah et de l’Armée islamique d’Indonésie. Il ouvre surtout plus largement ses portes aux combattants philippins qui lui assurent en échange un soutien logistique.
Le niveau de ces entraînements reste basique, mais leur dureté est certaine comme le montre la mort de plusieurs stagiaires au cours de leur formation. L’expertise des instructeurs de la Jemaah Islamiyah dans le domaine de l’action terroriste permet aux tenants de la branche régionaliste de développer une nouvelle collaboration avec différents groupes jihadistes, tant philippins qu’indonésiens. Les Philippines deviennent ainsi une nouvelle terre de jihad.
On notera que diverses rumeurs ont fait état, sans pouvoir formellement l’établir, de la présence de la Jemaah Islamiyah dans d’autres bases, de moindre importance et situées hors de l’île de Java. Ainsi, au début de 2006, des installations abandonnées depuis un an furent découvertes par l’armée indonésienne dans les forêts de l’île de Ceram. Elles semblent en fait avoir servi aux militants de la TII. De même, le camp situé aux environs de Balikpapan, l’une des principales villes de la province indonésienne du Kalimantan, fut principalement utilisé par des groupes jihadistes venus de Célèbes.
F. La cellule Al Ghuraba
De façon plus inattendue, Hambali a également créé à Karachi au Pakistan, et ce dès 1999, une structure extérieure, la cellule Al Ghuraba [les étrangers]. Elle est formée de jeunes adultes, voire d’adolescents, proches parents pour la plupart de membres de la Jemaah Islamiyah et originaires d’Indonésie, mais aussi de Malaisie et de Singapour. Al Ghuraba sera dirigée successivement par deux individus. Le premier est le fils d’Abou Bakar Bashir, Abdul Halim. Après de nombreux allers et retours en Afghanistan, il retournera s’occuper de son père lorsque celui-ci sera arrêté en octobre 2002. Le second est le propre frère d’Hambali, le nommé Abdul Hadi, plus connu sous son pseudonyme de Gun Gun. Il est interpellé le 23 octobre 2003 en compagnie de dix-sept autres membres de la cellule encore présents à Karachi. Tous seront expulsés quelques mois plus tard dans leurs pays d’origine.
Les locaux successifs de la cellule Al Ghuraba à Karachi ont servi au transit clandestin des membres de la Jemaah Islamiyah en route pour l’Afghanistan, à commencer par Hambali lui-même à plusieurs reprises. Les membres arrivés avant la mi-2001, dont Abdul Halim et Gun Gun, ont reçu une formation militaire en Afghanistan dans les camps d’Al Qaïda. Mais la plupart – une trentaine d’Indonésiens, de Malaisiens et de Singapouriens, arrivés après 2002 – n’ont pu suivre que des entraînements plus courts, dispensés cette fois dans les camps pakistanais du groupe jihadiste pakistanais Lashkar e Taeba (LeT, l’Armée des purs).
En pratique, la cellule Al Ghuraba semble avoir eu une triple mission. D’abord, il faut créer un réservoir de futurs cadres pour la Jemaah Islamiyah, en faisant suivre aux militants un enseignement religieux à l’université islamique Abou Bakr de Karachi, considérée comme proche du LeT, complété par un entraînement militaire. Il s’agit ensuite d’installer, dans une zone musulmane estimée sûre, un lieu d’asile potentiel pour les militants en fuite d’Asie. Enfin, il convient d’établir une présence dans la proximité d’Al Qaïda, pour lui fournir une aide et un relais qui puissent permettre à la Jemaah Islamiyah d’être mieux reconnue au sein de la mouvance jihadiste internationale.
Copyright 2007-Migaux-Lignes de repères
L’ASIE DU SUD-EST demeure un des théâtres privilégiés d’action de l’islam combattant, comme l’ont rappelé les attentats de Bali en 2002.
Où en est-on aujourd’hui avec la menace islamiste dans cette région ? Quelle est la véritable place d’Al Qaeda au sein des réseaux terroristes locaux ? Quelles perspectives pour l’avenir ?
Telles sont les principales questions que traite cet ouvrage, l’un des seuls disponibles en français sur le sujet.
Réfutant les simplifications hâtives, l’auteur démontre que l’islamisme combattant dans cette région demeure un phénomène multiforme, avec des aspects globaux (la logique du jihad prôné par Al Qaeda ), des aspects régionaux (notamment illustrés par la Jemaah Islamiyah) et d’autres plus locaux. D’autant que l’Asie du Sud-Est est elle-même une zone hétérogène, terre de diversité religieuse et haut lieu de luttes coloniales.
Le site des éditions Lignes de Repères.
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