Le contrôle des technologies, qu’elles soient militaires, duales ou purement civiles, est l’un des enjeux essentiels des affrontements à venir. Pour être crédible et en mesure de peser sur les affaires du monde, « l’Europe puissance » doit se donner les moyens d’atteindre une maîtrise complète des technologies qui préserveront son indépendance économique, militaire et culturelle.
La maîtrise de ces « technologies de puissance » implique un effort humain et financier considérable qui ne peut être engagé sans une mobilisation en profondeur des moyens de l’Union européenne.
Ce mémoire de géopolitique a été rédigé au Collège Interarmées de Défense dans le cadre du séminaire "Géopolitique de l’Europe", dirigé par Pierre Verluise.
POURVUE d’une monnaie, de nouvelles frontières, d’une ébauche de politique extérieure et d’un embryon de défense commune, l’Union européenne sera peut-être bientôt dotée d’une Constitution. Ainsi, cinq décennies après sa naissance, l’UE est en train de se doter des principales institutions sur lesquelles pourrait se fonder une souveraineté politique.
Au-delà de cette évolution majeure de sa dimension géopolitique, l’UE tout entière vit aussi une révolution portée par les nouvelles technologies. Cette révolution est en train de transformer en profondeur le quotidien des Européens, leurs pratiques économiques et leur vie culturelle.
L’Europe communautaire entre ainsi dans une société de l’intelligence, de l’information et de la connaissance. Dans ce contexte, la maîtrise des technologies et la capacité à innover deviennent les ressorts évidents de la puissance, de l’indépendance et de la souveraineté. Il suffit de regarder le monde : il n’est plus de pays prospère et puissant qui ne soit innovant.
Dans le même temps, l’absence de grands projets fédérateurs laisse supposer que les Européens ne sont pas encore décidés à engager de véritables programmes de recherche scientifique et de développement technologique.
La plupart des scientifiques, de toutes disciplines, le constatent chaque jour avec un découragement croissant. Ils voient partir vers les Etats-Unis, le Japon, la Chine et bientôt les autres pays asiatiques, les meilleurs des jeunes chercheurs formés non sans mal dans les universités européennes. Il en est de même des industriels, ceux du moins qui cherchent encore à maintenir en Europe des centres de décision et des laboratoires de recherche avancée[i].
Certes, les acquis incontestables des anciennes politiques industrielles et scientifiques font encore illusion. On se félicite, à juste titre, de l’Airbus, du TGV, de compétences certaines dans les sciences de la vie et dans la recherche médicale, de grands équipements comme ceux du Centre Européen de Recherche Nucléaire (CERN) ou des réussites de nos lanceurs spatiaux.
Cependant tout porte à croire que ces icônes d’une « gloire » technologique et scientifique quelque peu surannée aveuglent aussi bien l’opinion publique que la classe politique européennes. Celles-ci semblent percevoir difficilement qu’aujourd’hui la guerre se livre sur d’autres terrains. Des terrains où les concurrents de l’UE ont décidé de se donner une maîtrise absolue. Ce qui, par définition, exclue la coopération sur un pied d’égalité avec les autres, à l’instar de ce que fut, dans les années 1950, la course vitale aux premières technologies nucléaires.
Ces nouveaux terrains sont ceux que la National Science Foundation américaine a nommé en 2002, dans un rapport devenu un véritable acte de foi en l’avenir, les sciences « émergentes et convergentes »[ii]. Le terme de sciences émergentes se comprend de lui-même, sauf à préciser qu’aux Etats-Unis elles ont émergé depuis au moins 15 ans. Celui de sciences convergentes traduit un phénomène nouveau : elles se fécondent les unes les autres dans un enrichissement de type exponentiel.
Devant ce constat, on peut légitimement se demander si, dans son impatience à toucher « les dividendes de la paix » de l’après-guerre froide, l’Europe ne s’est pas assoupie ?[iii]
En effet, sans doute par absence de véritable réflexion préalable, l’UE n’a pas été en mesure d’identifier correctement les domaines technologiques cruciaux dont la maîtrise intégrale est indispensable. Une maîtrise qui exige des politiques cohérentes, coordonnées et ambitieuses, tant au niveau de l’Union qu’à celui des Etats - membres.
Cette « myopie » s’est particulièrement révélée dans trois domaines essentiels : l’énergie, l’intelligence et le vivant. Seul le domaine de la défense communautaire, bien qu’embryonnaire, a bénéficié de quelques synergies et d’une volonté politique qui - aujourd’hui – ne relève plus seulement d’un discours incantatoire.
Prenant conscience de ce danger, l’Europe communautaire semble vouloir hâter le pas. Les 23 et 24 mars 2000, elle a fixé à Lisbonne un objectif de 3% du PIB consacré à la recherche en 2010. Un objectif plus réaliste que réellement ambitieux. Si l’on examine les chiffres des premiers mois de l’année 2005, la progression est plus que modeste ( +0,6%), marquée essentiellement par la stagnation de la croissance dans la zone Euro…
Cette étude se propose donc de couvrir, en deux volets, les deux dimensions critiques d’une stratégie de puissance technologique au service de l’indépendance et de la souveraineté de l’Europe.
Ainsi, après avoir revisité la notion de stratégie de puissance technologique, la première partie s’efforce de porter un regard objectif sur le socle fondamental d’une véritable ambition : le système européen de recherche et d’innovation.
A la lumière des résultats analysés et des enjeux technologiques et scientifiques majeurs du 21ème siècle, la seconde partie tente de jeter un pont vers l’avenir, en traçant à grands traits les lignes directrices d’un espace intégré et souverain de recherche et d’innovation en Europe.
11 – Le lien « intime » stratégie – technologie
La question de la puissance revêt une signification toute particulière dans le monde de la technologie et de la recherche. La domination d’un domaine de recherche est un travail de longue haleine. Elle se prépare dès l’éveil des premières scolarisations, s’ajuste dans l’enseignement secondaire, se déploie dans le supérieur, et est pleinement activée dans le monde industriel. Là plus qu’ailleurs, l’enjeu de « suprématie » est un enjeu de façonnage et de contrôle d’écosystèmes, qui s’étendent de l’éducation jusqu’aux modèles de consommation. C’est aussi, et avant tout, le champ clos d’une guerre sans merci où stratégie et technologie forment une combinaison indissociable.
La puissance technologique se mesure d’abord en puissance de marché. Elle est avant tout une capacité à transformer des leaderships en recherche fondamentale en amont, en domination des marchés à l’aval. Ceci signifie qu’une stratégie de puissance en matière technologique n’est pas seulement un enjeu de supériorité de la science, mais également un enjeu de formation de la demande à l’aval des progrès scientifiques. L’enjeu est d’assurer une présence sur les domaines émergents, en s’assurant de la maîtrise des « têtes de pont » adéquates à chaque lieu d’effervescence des nouvelles technologies. La notion de puissance s’inscrit ainsi dans une notion de contrôle externe des organisations, au sens de Pfeffer et Salancik[iv], c’est-à-dire dans la domination des dépendances aux ressources critiques, et dans la formation de la demande qui les consomme. Cette perspective a d’ailleurs été traitée par Pianta[v] dans son analyse du changement des régimes d’accumulation au sein des Etats-Unis, et dans l’émergence d’une stratégie de domination économique appuyée sur les ressources technologiques militaires.
Ainsi, les systèmes d’opération ou encore appelés « middleware », les protocoles de communication, mais aussi l’ensemble des systèmes de classification et de « topographie » du monde de la recherche et de la technologie sont-ils des enjeux stratégiques pour la puissance d’une nation.
Cette domination des marchés technologiques repose sur une influence organisée des régulateurs, des instances de normalisation, des acteurs industriels clés, des systèmes de décision politique, et surtout du consommateur final. Les technologies dites « génériques », parce qu’elles constituent les noyaux, ou les plates-formes pivots, des futurs développements technologiques, sont les « actifs critiques » d’une telle domination.
12 – L’organisation de « buts de guerre » technologiques et scientifiques
L’évaluation de la puissance technologique d’une nation ou d’une entité supranationale, peut donc être mesurée par le taux de contrôle qu’elle exerce sur l’ensemble des « actifs critiques ». Ce contrôle peut s’exercer soit d’un point de vue horizontal, c’est-à-dire sur les marchés finaux ; soit de façon verticale, c’est-à-dire le long d’une filière. Un actif est toute activité, technologie, savoir-faire humain ou machine, permettant la manufacture ou le développement d’un service durablement défendables sur les différents marchés mondiaux. Par exemple, le savoir-faire français sur les vaccins est un actif critique (stratégique) de la France.
De tels actifs s’évaluent selon deux axes : d’une part, l’étendue de l’avantage que l’on peut escompter, et d’autres part, la capacité à rendre cet actif toujours systématiquement « pivot ». L’étendue de l’avantage se mesure par la pertinence de la ressource pour l’ensemble des industries ou sociétés concernées, combinée à sa rareté, c’est-à-dire sa faible disponibilité.
Ainsi, la domination technologique et scientifique n’est plus un simple jeu de concentration de capacités à l’aube d’un conflit, comme l’analysait Mansfield[vi]. Il s’agit plutôt d’une véritable plongée dans la « forge » et la maîtrise d’une macro - culture, englobant aussi bien les entreprises, les institutions que les individus[vii]. La notion de puissance technologique et scientifique quitte ainsi la simple dimension économique pour englober les dimensions sociales, politiques et militaires d’un véritable « écosystème ». Cette puissance devient durablement défendable, dès lors que les systèmes politiques, sociaux et culturels sont « durablement » assujettis, conquis ou séduits.
La planification d’une telle stratégie de puissance passe par une définition précise de cibles, les « buts de guerre », une organisation spécifique des moyens pour les atteindre combinée à la recherche des plus grandes synergies.
Parfaitement conscients de ces enjeux, les Etats-Unis représentent un cas pratiquement « clinique » d’intégration au plus haut degré de ces comportements.
13 – Les Etats-Unis et la technologie de l’hyperpuissance
A la suite d’autres documents, le récent rapport de l’Observatoire des Sciences et des Techniques[viii] met en évidence l’aggravation continue et accélérée de l’écart conceptuel et financier entre l’effort de recherche entrepris aux Etats-Unis et celui développé en Europe.
La stratégie de « maintien contrôlé » du « technology gap » est un paramètre incontournable de la politique américaine de dominance, peut-être insuffisant mesurée de ce côté-ci de l’Atlantique.
Les Américains considèrent que la politique scientifique et technologique est un élément essentiel de leur stratégie de leadership. Dans ces conditions, il est vital pour eux de conserver dans tous les domaines une avance significative, tant sur le plan militaire, qu’économique et culturel. Dans cet esprit, l’ensemble des moyens dont dispose le gouvernement fédéral, notamment à l’étranger, est mobilisé en permanence.
Malgré un discours très « libéral », les Etats-Unis n’hésitent pas à engager des crédits publics considérables et à planifier leurs interventions, tant au niveau fédéral qu’à celui des Etats. A titre d’exemple, le récent plan en faveur des nanotechnologies est particulièrement significatif. Il prévoit en effet la formation de 1000000 de spécialistes au cours des 10 prochaines années[ix]…
Plus que jamais, les « grands projets » tels que le National Missile Defense (NMD) ou le projet de conquête de Mars[x] sont des moyens de mobiliser les énergies dans tous les domaines. Et, à partir d’une impulsion publique, favoriser l’éclosion d’entreprises innovantes capables d’un développement mondial très rapide.
Le développement de la Silicon Valley et de bien d’autres sites moins bien connus, ne se comprend pas sans cette gigantesque mobilisation, initiée et dirigée par les pouvoirs publics. Bien plus, ce développement ne peut se poursuivre et accélérer son rythme qu’en recrutant chaque année des milliers d’ingénieurs ou de chercheurs venant d’Inde, de Chine, de Corée, d’Israël, de Russie ou d’Europe pour répondre à des besoins que les Etats-Unis ne peuvent plus satisfaire par eux-mêmes. Le reste de la planète contribue ainsi à renforcer le potentiel scientifique et technologique américain et accessoirement à réduire celui des nations « contributrices »…
Une attention particulière doit être apportée à INTERNET. On a souvent affirmé qu’il marquait la fin de la géographie[xi]. En réalité, INTERNET redessine une géographie, on pourrait dire une « infogéographie »[xii], dont la circonférence est partout et le centre outre Atlantique. Si l’on rajoute à cette singularité les missions assignées à des organisations telles que ECHELON[xiii] ou la National Security Agency (NSA), on mesure le rôle que joue ce réseau dans une stratégie « unilatéraliste » très claire et, il faut le reconnaître, du point de vue américain, parfaitement légitime.
Il faut ajouter à ces différentes orientations la capacité exceptionnelle des Américains d’explorer en permanence le futur à moyen et long termes, en intégrant systématiquement veille technologique et réflexion sur l’évolution de la société. Grâce à des fondations, des universités ou des instituts de recherche les plus divers, tantôt publics, tantôt privés, souvent sans but lucratif.
Aux Etats-Unis, le « hard » (technologique) et le « soft » (sociétal) sont toujours intimement liés. Ceci est aucun doute une des caractéristiques essentielles de leur conception de la puissance globale ( global power).
A partir de ces quelques indications permettant de souligner la globalité de la stratégie américaine en matière de technologie de puissance, Il est ensuite aisé de mettre de évidence combien l’UE est loin du compte.
Ainsi, le « décryptage » des fondements d’une stratégie de puissance scientifique et technologique, sous une forme éclaircissant les enjeux de pouvoir, permet déjà de poser une question fondamentale : l’UE possède-t-elle une véritable organisation de la puissance, ou est-ce le seul apanage des Etats-Unis ?
21 – Le fruit de l’histoire
L’édification d’une politique européenne de puissance scientifique et technologique devrait répondre simultanément à deux enjeux complémentaires, la cohésion et la convergence. La question de la convergence des politiques nationales ne se pose pas dans les mêmes termes que pour l’Union Economique et Monétaire. Il s’agit moins, en effet, d’assigner aux Etats des objectifs quantitatifs identiques que de parvenir à ce que les trajectoires nationales soient compatibles et contribuent à l’esquisse d’une trajectoire communautaire plus efficace. Il s’agit d’un véritable challenge, car les spécificités nationales sont importantes. Les systèmes nationaux d’innovation sont le fruit de l’histoire particulière des nations et des conditions générales qui structurent les environnements économiques et sociaux. Ils dessinent des espaces de connexions complexes qui permettent de comprendre les logiques à l’œuvre dans les phénomènes d’innovation contemporains.
Dans la nouvelle UE élargie (mai 2004), les caractéristiques des systèmes nationaux européens diffèrent grandement d’un Etat à l’autre. Les régulations institutionnelles, tout d’abord, ne sauraient être assimilées à un modèle commun et les 25 pays sont plus ou moins proches des systèmes des trois principales nations, en terme de Recherche et Développement (France, Allemagne, Royaume – Uni).
L’Allemagne se caractérise par l’importance des collectivités régionales dans la définition et l’exécution de la politique de recherche. La France possède un système traditionnellement centralisé. Alors que le Royaume – Uni confie une large responsabilité aux fondations privées (trust) ou à des conseils thématiques, agissant comme des agences indépendantes.
La place du secteur public diffère d’un pays à l’autre. Les entreprises allemandes financent davantage la recherche nationale qu’en France et au Royaume – Uni (respectivement 60%, 50% et 50% de l’effort global[xiv]. En France et en Allemagne, les instituts de recherche d’Etat (CNRS, Max Planck) jouent un rôle fondamental, alors que les universités sont bien plus actives au Royaume – Uni.
Les spécialisations, enfin, sont elles encore le fruit de l’histoire. A cet égard, on note une forte spécialisation scientifique de l’Allemagne en chimie, physique et mathématiques alors que le Royaume – Uni possède ses centres d’excellence dans les sciences de la vie. La France possède une spécialisation particulière en physique et mathématiques. Les profils technologiques donnent la primeur à l’Allemagne pour l’industrie chimique et la motorisation ; France et Royaume – Uni sont, traditionnellement, spécialisés en aéronautique et possèdent une spécialité relative pour l’informatique et l’électronique.
Beaucoup d’autres éléments de distinction pourraient être relevés pour caractériser ces systèmes nationaux. L’important, toutefois, est de noter qu’ils n’agissent pas comme des systèmes clos mais sont au cœur d’interactions puissantes.
22 – La coopération est au cœur du processus d’innovation
La spécificité des systèmes nationaux d’innovation oblige ainsi les nations européennes à évoluer suivant des trajectoires technologiques propres, définies par les structures passées et présentes d’accumulation et d’utilisation des connaissances.
Cependant, ces trajectoires sont distinctes. Il n’y a guère de raison pour l’instant de penser qu’elles évoluent naturellement, de manière à former un système d’innovation cohérent à un niveau supranational.
Au contraire, les gouvernants sont tentés de fixer leurs politiques de façon à approfondir les spécialisations ou les avantages qu’ont pu acquérir les nations dans tel ou tel secteur. Il y a ainsi tout lieu de croire que les systèmes nationaux d’innovation renforcent leurs spécificités sur le long terme. De fait, on, constate généralement de fortes permanences sur la durée entre domaines d’excellence passés et présents. Ce constat amène à penser que les compétences scientifiques et technologiques sont cumulatives sur le long terme.
La diversité des systèmes nationaux n’est pas, en soi, un facteur de moindre efficacité de la recherche européenne. Elle peut donner l’occasion d’exploiter les spécialisations, les compétences et les synergies des efforts nationaux de recherche.
L’important en la matière est qu’il existe des forces importantes de coordination entre les divers éléments des systèmes, ce qui semble malheureusement avoir toujours fait défaut.
23 – De la coopération à la gouvernance : le coût de la non–Europe
La coopération scientifique et technologique a fait remporter à l’Europe d’incontestables succès. Il suffit d’évoquer le rôle déterminant tenu, aujourd’hui, par les industries aérospatiale et aéronautique européennes au niveau mondial. De même, en recherche fondamentale, le CERN occupe une place de leader mondial de la physique des particules et attire de nombreux chercheurs des Etats - Unis.
Cela étant, de tels succès ne doivent pas masquer les faiblesses du mode de développement coopératif toujours pratiqué par les Etats de l’Union européenne. Dans un certain nombre de secteurs, d’une part, l’UE affiche des faiblesses que le développement coopératif n’est pas parvenu à surmonter. Faiblesses dues pour l’essentiel à une absence de vision fédératrice[xv]. D’autre part – et là réside la difficulté centrale – cette Europe coopérante ne s’est pas muée, au fil du temps, en Europe gouvernante, en dépit de l’extension explicite des compétences reconnues à l’Union européenne depuis le traité de Maastricht.
Autrement dit, la principale question posée à l’Europe communautaire en terme de puissance scientifique et technologique, est peut-être moins celle de l’ouverture et de l’interopérabilité des systèmes nationaux de recherche, que celle de leur gouvernance d’ensemble.
A cet égard, on voit bien que la gouvernance du système européen de la recherche est loin d’avoir trouvé une réponse satisfaisante. L’Europe de la recherche est composée de différents compartiments, davantage juxtaposés qu’organisés en un tout cohérent.
L’essentiel de la politique se décide, pour l’heure, au niveau des Etats, lesquels continuent à financer la quasi-totalité de l’effort public de recherche et à employer l’essentiel des chercheurs.
A l’heure actuelle, c’est par le dialogue entre les administrations nationales, les organismes intergouvernementaux et la Commission que s’édifient les bases d’une souveraineté scientifique et technologique de l’UE. Ce dialogue est difficile et s’organise au travers d’instances manquant certainement d’une autorité suffisante pour être réellement efficientes.
En réalité, il en va de la recherche comme de la politique économique dans son ensemble. Le système européen d’innovation ne saurait être le décalque des systèmes nationaux. Pour poursuivre efficacement un objectif de puissance, il devra, demain, être considéré comme un tout.
L’analyse de ses résultats confirme cette nécessité.
31 – Une situation préoccupante
Un constat semble s’imposer sur la durée : la situation de la recherche européenne est préoccupante.
Loin de combler le retard chronique évoqué au premier chapitre, les écarts avec d’autres pays, comme le Japon, tendent à se creuser. Dans un domaine d’activité comme la recherche et le développement, ne pas avancer plus vite que son concurrent équivaut à reculer (graphiques 1 et 2, en bas de page).
Sans vouloir transformer les indicateurs[xvi] en instruments de jugement, il faut tout de même constater qu’ils sont tous concordants pour prendre la mesure du retard. Comment s’en étonner dès lors que l’UE investit une part moins importante de sa richesse dans la production des connaissances et dans la transformation des résultats de la recherche en progrès technologiques ou en innovations ?
Si les indicateurs chiffrés utilisés pour apprécier l’effort de recherche montrent que l’UE fait à peu prés jeu égal avec les Etats-Unis dans plusieurs grands domaines (physique, mathématiques, recherches biomédicales), voire les dépassent dans quelques uns (chimie), ils montrent aussi un retard important dans d’autres (sciences pour l’ingénieur, nanosciences, biotechnologies).
Il faut de surcroît nuancer ces mesures globales comparatives. Pour l’UE, rappelons qu’elles ne sont généralement qu’une addition de potentiels nationaux, une juxtaposition sans synergie voire sans coopération ni même concertation.
Cette absence de concertation entre les Etats membres n’a naturellement pas favorisé la cohérence des politiques nationales de recherche. Ce qui souligne, s’il en était besoin, que l’Europe puissance scientifique et technologique n’existe pas encore…
Si l’Europe communautaire peut-être comparée à ses compétiteurs américains et japonais en recherche de base (avec la limite qui a été soulignée sur l’approche additive), les pays de l’UE souffrent en revanche d’une réelle inefficacité à transformer en innovations technologiques et en gain de puissance les performances de leurs recherches. Il s’agit d’un paradoxe en miroir de celui du Japon. L’excellence scientifique européenne n’engendre pas suffisamment de puissance technologique.
L’exemple le plus démonstratif de cette difficulté est, bien sûr, celui du « World Wide Web ». Créé en 1983 au CERN à Genève par des chercheurs européens, il a finalement été diffusé et exploité commercialement avec succès par les Américains…
Certes, des applications technologiques européennes sont néanmoins de grands succès (espace, aéronautique…) mais les pays de l’Union accusent un retard important dans les technologies de souveraineté et de puissance comme les technologies de l’information et de la communication ou les biotechnologies. La fragilité des positions technologiques est confirmée par le nombre de brevets déposés dans ces technologies clés du futur, ce qui montre là encore que l’Europe fait moins bien que les Etats – Unis ou le Japon.
En corollaire, les positions technologiques de l’UE continuent à se dégrader. Le déficit commercial dans les échanges extérieurs des produits de haute technologie s’aggrave depuis 1990 : il est actuellement de 28 milliards d’euros[xvii]. Le commerce de la propriété intellectuelle est ainsi nettement à l’avantage des américains.
Ainsi, en dépit de son potentiel, l’UE innove moins que ses autres concurrents. Cette faiblesse technologique est une menace pour sa souveraineté, dans la mesure où la recherche et le développement sont devenus des déterminants de puissance entre grandes nations.
32 – Un risque de dispersion plus grand avec l’élargissement
La grande dispersion qui existait déjà dans l’Europe des Quinze risque de se majorer avec le récent élargissement aux dix nouveaux membres.
Les efforts de Recherche et Développement des 15 « anciens » Etats membres étaient déjà très dispersés ( cf graphique 1, en bas de page). En pourcentage de PIB, les extrêmes vont de 0,7% pour le Portugal à 3,85% pour la Suède ( 8 pays ont un engagement supérieur ou égal à la moyenne de 1,9%)[xviii]. Les variations sont encore plus importantes lorsque sont analysés les profits de répartition des dépenses entre secteur public et secteur concurrentiel ou les accords de coopération de recherche entre secteur public et secteur privé. Au cours des dix dernières années, les pays dont l’investissement était le moins important ont certes fait un effort pour combler leur retard, mais cette trop grande dispersion pénalise l’Union européenne. Présente à tous les niveaux, communautaire, national et régional, la dispersion existe aussi entre secteur privé et secteur public, entre disciplines « balkanisées »…
Immanquablement, cette fragmentation des forces a plutôt confiné à une attitude défensive qu’à une politique de conquête des marchés.
Comme le montre la carte ci-dessous, au moment où l’UE s’ouvre en mai 2004 à un élargissement plus vaste, aucun des nouveaux Etats membres n’a d’engagement en recherche et développement supérieur voire égal à la moyenne de l’UE 15 (0,2% du PIB pour Chypre, pays dont l’engagement est le plus faible à 1,4% du PIB pour la Slovénie, pays dont l’engagement est le plus fort.
Il en résulte donc inexorablement une diminution de la moyenne européenne dont il faudra tenir compte dans la définition d’une politique européenne de puissance scientifique et technologique.
Ainsi, la logique de construction qu’il faut traiter par des moyens spécifiques, devrait prendre garde à ne pas tirer vers le bas la nécessaire logique de compétition de la recherche. Il s’agit là d’un véritable choix politique : il faut s’interroger si l’on peut, avec le même levier, poursuivre deux objectifs aussi différents que la course vers la puissance scientifique et technologique et la cohésion sociale et économique.
Confrontée à ce dilemme dès sa création, l’UE à navigué entre de nombreux modèles d’organisation de la recherche. A partir des années 1980, l’Europe de la recherche prend un nouveau virage en créant le Programme Cadre pour la R&D[xix] (PCRD), instrument subsidiaire d’une politique communautaire, destiné à trouver de nouvelles synergies.
33 – Le PCRD : une analyse critique pour un bilan nuancé
Le PCRD est conçus par la Commission européenne assistée de très nombreux comités, puis soumis au Conseil des ministres avant d’être adopté par le Parlement européen selon une procédure de codécision.
Pendant toute la durée de son exercice, soit 4 ans, un PCRD procède par appels d’offre ; les dossiers soumis sont évalués par des groupes d’experts sous l’autorité de la Commission. La contribution financière européenne de soutien aux projets retenus se fait essentiellement sous deux modes :
. actions à frais partagés couvrant jusqu’à la moitié des coûts ;
. actions concertées couvrant uniquement et totalement les frais de coordination.
Cinq programmes successifs[xx], dotés de budgets croissants, se sont déroulés depuis 1984. Leur étude juxtaposée permet de bien comprendre le processus de leurs évolutions (graphique 2, en bas de page).
L’adoption du 1er PCRD (1982 - 1986) a marqué la volonté de l’Europe de se doter d’un instrument de coordination de l’ensemble des actions menés dans le domaine de la recherche ( 3 750 M écus).
C’est surtout avec le 2ème PCRD (1986 - 1990) que recherche et développement technologique inclus dans l’Acte unique (Titre XV articles 130 F à P) sont devenus un domaine de compétence communautaire (4 500 M écus).
Le 3ème PCRD (1990 - 1994) a ensuite comporté un volet visant à la formation et à la mobilité du capital humain (6 600 M écus).
Le 4ème PCRD (1994 – 1998) a connu une nette augmentation budgétaire (13 215 M écus) pour promouvoir l’excellence scientifique, renforcer la coordination, la coopération et la valorisation, et à aider à définir et à mettre en œuvre les autres politiques européennes.
Enfin, le 5ème PCRD (1998 – 2002) a connu des infléchissements intéressants : nombre plus limité de programmes centrés sur des grands problèmes auxquels la société européenne doit faire face. Accent mit sur les PME, actions clés, coordination renforcée entre les différents programmes, flexibilité grâce à une adaptation régulière et une approche de type « bottom - up » (15 000 M euros).
En résumé, il s’agit de mettre en place une ébauche de synergies au service de la compétitivité.
Toutefois, le bilan d’ensemble que l’on peut dresser semble avant tout entaché de lourdeur et de manque de transparence.
En effet, l’élaboration et la gestion d’un PCRD, véritable labyrinthe de complexité, ont été régies par une « comitologie » où s’infiltraient les lobbies[xxi]. Influencée par ces lobbies nationaux scientifiques (surtout de défense) et industriels (surtout des grands groupes), la politique européenne de recherche a sans doute manqué d’audace, faisant ainsi l’impasse sur les choix volontaristes, tels que la robotique ou les nanosciences. Les thèmes retenus ont sans doute été trop nombreux et trop dispersés pour constituer réellement une logique de puissance et de souveraineté.
De surcroît, les PCRD ont privilégié les travaux de nature appliquée, ce qui a certes permis de favoriser les coopérations entre universitaires et industriels, mais aussi fait l’impasse sur la recherche fondamentale, « cheval de bataille » de la maîtrise des actifs critiques.
On retrouve dans cette dynamique l’objectif économique qui a donné naissance et qui a prévalu pendant longtemps à la CEE. On peut légitimement se demander si cette impasse, conjuguée à l’absence de véritables efforts pour structurer la recherche, n’ont pas finalement privé l’UE des infrastructures et des plateaux technologiques essentiels à son indépendance future ?
Navigant entre coopération, cohésion et compétition pour répondre à de multiples objectifs, les PCRD semblent avoir manqué de logique cohérente. En la matière, la politique de l’UE n’est pas encore au point de constituer le cadre prospectif et programmatique d’un système européen de la recherche.
Seuls quelques programmes (par exemple : électronique, informatique, matériaux, automobile) se sont inscrits dans une logique intégrée de compétitivité. Cependant, la lourdeur des procédures et leur caractère « top – down » ont conduit les Etats membres à mettre en place, sur l’initiative de la France, le programme de substitution Euréka[xxii].
Alors que la recherche changeait d’échelle durant les années 1990, les PCRD n’auront pas été les instruments réellement attendus. En dépit d’une volonté manifeste de « fédérer » les efforts, ils n’auront pas permis une « européanisation » des infrastructures. Leur adaptation aux nouvelles approches de la puissance scientifique et technologique reste à ce jour un projet inachevé.
Le diagnostic général de cette première partie recèle les indices d’une certaine gravité : il semblerait en effet qu’il ne s’agisse plus de procéder qu’à de simples ajustements.
L’état des lieux du concept de puissance scientifique et technologique est en effet profondément marqué par des différences d’échelle : l’UE ne souffre pas la concurrence avec les Etats-Unis.
Que nous apprend toutefois cette comparaison ? Elle montre la nécessité de « buts de guerre » formulés par l’Etat et pilotés avec les industriels. Elle montre surtout que l’absence d’organisation dans les systèmes de recherche se paye tous les jours par un recul de puissance continu.
Une profonde mutation est donc nécessaire pour construire un véritable espace intégré de la recherche et de l’innovation en Europe. Un espace stratégique, oeuvrant efficacement au service de l’indépendance et de la souveraineté scientifiques et technologiques.
11 – Une révolution des systèmes d’information
Le monde est entré dans une société où non seulement la recomposition est permanente et donc les repères mouvants, mais où la place du virtuel et des échanges d’informations domine.
En quelques années, les progrès techniques ont été fulgurants et nous sommes sous le coup du « deuxième déluge », celui de l’information[xxiii]. C’est une des grandes nouveautés que la deuxième moitié du 20ème siècle nous laisse en héritage. Albert Einstein déclara même, dans les années 1950, qu’à côté de la bombe démographique et de la bombe atomique, la troisième bombe du 20ème siècle était celle des communications[xxiv].
Ce nouveau domaine des sciences et des technologies de l’information et des communications est particulièrement vaste : télécommunications ( services et équipements) ; informatique (matériels, services et logiciels), audiovisuel (production et services, électronique grand public) ; composants (passifs, semi-conducteurs, nanotechnologies). Sans oublier l’interaction humaine et la cognition, la robotique et les entités artificielles actives autonomes apprenantes et réflexives.
Une donnée essentielle est à prendre en compte : la recherche joue un rôle majeur dans ce domaine. Les efforts de R&D y sont en moyenne 3 fois supérieurs à ceux de l’ensemble de l’industrie. Dans la « e-société » qui est aujourd’hui prégnante, le temps se raccourcit et l’on assiste à une course permanente à l’émergence de l’innovation et à sa diffusion.
La concurrence est particulièrement rude parce que la diffusion de l’« e-société » devient un facteur essentiel de compétitivité des économies. L’Europe n’est pas en pointe dans la pénétration de ces technologies dans la société. De surcroît, son économie pâtit de handicaps réglementaires, financiers et culturels. Le taux de croissance de la zone Europe restant, quant à lui, largement en dessous du seuil de compétitivité de 3%.
Les Etats-Unis, quant à eux, dominent ce secteur stratégique.
Dans ce contexte émerge ainsi une première priorité : augmenter la pénétration d’Internet en Europe et stimuler son utilisation à l’école, dans les échanges commerciaux, dans le travail, dans l’administration, en santé…Un Internet moins cher, à large bande, plus sûr.
Un autre enjeu concerne directement la recherche : c’est celui de l’intégration de l’informatique et des communications dans les pratiques de la science. Dans la plupart des disciplines, la « e-science » s’impose aux chercheurs, elle permet la visualisation, la modélisation, l’exploitation des données, l’accès à distance. Elle permet aussi le partage des ressources scientifiques.
Les sciences de la vie, les communications mobiles et satellitaires, la navigation, les sciences de l’environnement, les nanotechnologies, la maîtrise de l’espace sont quelques-uns des domaines de la « e-science » que l’UE se doit de maîtriser.
12 – Les sciences du vivant
Comprendre comment fonctionne la complexité du vivant est un défi stratégique qui va occuper toute cette décennie et probablement les suivantes.
L’Europe doit prendre toute la place qui est la sienne dans ce qui s’apparente véritablement à un défi de première importance, parce que c’est de l’avenir du genre humain dont il s’agit.
Les enjeux cognitifs, philosophiques et éthiques de ce grand challenge s’inscrivent parfaitement dans cette Europe de l’intelligence qui revendique une exception. Comprendre le vivant – « cette poussière d’étoile », comme le dit l’astrophysicien Hubert Reeves – est un travail qui a commencé il y a déjà prés de quarante ans. L’Europe ( à l’époque CEE), avec notamment la France, était en première place lors des phases préparatoires du séquençage du génome humain.
Aujourd’hui, la maîtrise du génome fait surgir d’évidents enjeux de domination et de puissance :
. Les caractéristiques génétiques de l’individu qui pourraient être utilisées à des fins de dangereuse sélection de l’espèce humaine ( élimination systématique des « faibles ») ;
. Le clonage reproductif et thérapeutique qui ouvrirait la voie à la régénérescence des organes et des tissus, à « l’homme régénéré » ;
. La lutte contre les mécanismes du vieillissement cérébral qui permettrait de protéger une population occidentale dont la moyenne d’âge ne cesse d’augmenter.
Comprendre la virulence des agents infectieux pourrait également éviter qu’une simple épidémie de grippe provoquée par un virus plus agressif ne dévaste un jour la planète. La génétique, enfin, va servir de modèle pour la mise au point de nouvelles puces électroniques, plus rapides, plus puissantes. La cellule, avec sa multitude de machines minuscules, guide aujourd’hui la recherche sur la voie de la réalisation des nanomoteurs.
Les biologistes sont donc clairement face à un changement d’échelle, les sciences de la vie deviennent une « big science [xxv] ». Les projets n’ont plus la même nature, les technologies, les disciplines et les expertises nécessaires sont nombreuses et variées. C’est dans leur complémentarité que se trouve une des clés de la puissance.
13 – L’espace, frontière stratégique de la puissance technologique
L’espace est une source de connaissances scientifiques passionnantes. L’espace fait rêver, mais l’espace, c’est aussi utile. Très utile pour observer la terre et son environnement. Au chevet de la planète, l’espace est un poste de surveillance globale et régional idéal. L’espace peut, en effet, aider à mieux cerner ces inquiétants changements climatiques et à mieux prévoir les catastrophes naturelles qui n’épargnent pas le continent européen.
C’est aussi, évidemment, un poste d’observation stratégique d’où la fonction« monitoring[xxvi] » prend la dimension d’un paramètre essentiel de la puissance.
Les investissements réalisés depuis 40 ans, notamment en France avec le CNES, ont fait de l’Europe une puissance spatiale scientifique et technologique grâce à l’Agence spatiale européenne. Ariane, succès emblématique de l’Europe dans le monde, a conquis 50% du marché des lancements commerciaux. En 2000, l’industrie européenne des satellites a remporté 50% des contrats commerciaux mondiaux [xxvii].
L’espace est certainement un enjeu stratégique d’indépendance et de souveraineté technologique. La réussite le 12 février 2005 du lancement d’Ariane V – 10 tonnes a magnifiquement démontré que l’Europe a bien l’envergure d’une puissance spatiale. Il lui appartient néanmoins de le rester.
La réunion intergouvernementale qui s’est tenue à Edimbourg, les 14 et 15 novembre 2001, a tracé le futur de l’Europe spatiale mais n’a malheureusement pas levé tous les obstacles, notamment budgétaires, à la mise en œuvre de tous les projets.
En 2008, avec le projet Galileo[xxviii], l’Agence spatiale européenne donnera à l’Europe son indépendance technologique civile vis-à-vis des Etats-Unis et de leur système GPS. Toutefois, la question de l’apport de Galileo en matière de renseignement militaire stratégique n’est pas encore tranchée.
Enfin, la Commission a récemment lancé le concept du système GMES[xxix] pour la collecte, l’analyse et la diffusion des données et des informations sur l’environnement et la sécurité.
L’espace est donc un objet d’étude et un lieu d’exploration. C’est aussi un laboratoire particulièrement performant d’où émergent nombre de technologies. Dans ce laboratoire, l’UE tient déjà une place éminente et fait pratiquement « jeu égal » avec son grand rival d’outre Atlantique. Une performance qui n’est pas neutre, loin s’en faut.
Dans la société de l’information et de la mobilité, le besoin d’espace est de plus en plus fort. Il n’est plus temps de savoir si l’espace est utile, mais bien de quelle puissance l’UE souhaite bénéficier au travers de la maîtrise des technologies spatiales.
Dès lors, une certitude émerge telle une évidence : le niveau d’un Etat n’est plus suffisant même pour les meilleures équipes.
Dans ce cadre contraint, l’UE s’annonce comme la nouvelle dimension, car elle permet une concentration de moyens sur un site ou en réseau et qu’elle devient un espace de mobilité des talents et des idées.
Les défis scientifiques et technologiques qui se posent à l’UE à l’aube du 21ème siècle sont d’une ampleur inégalée. Si l’UE apporte quelques réponses concrètes à cette problématique générale, on constate qu’il lui reste encore à trouver un cadre institutionnel adapté.
Le futur de la recherche en Europe reste donc, pour une grande partie, à inventer.
21 – Imaginer l’avenir de l’Europe de la recherche
L’avenir européen des politiques publiques de la science et de la recherche a fait l’objet d’une réflexion collective menée dans le cadre d’un projet nommé Europolis, dont les résultats ont été publiés au printemps 2000[xxx].
Plusieurs forums de discussion ont permis d’identifier les principaux enjeux des politiques de recherche à l’échelle européenne, de tracer les perspectives d’évolution institutionnelles et d’imaginer les mécanismes susceptibles d’y répondre au mieux.
Cet effort de prospective intéresse cette étude à plus d’un titre. En effet, l’initiative a été jugée suffisamment prometteuse pour être financée par le 6ème PCRD. De fait, le projet avait pris corps au moment où le commissaire européen Philippe Busquin lançait « le concept d’espace européen de la recherche » au Conseil européen de Lisbonne, en mars 2000. Il ne s’agit donc pas de spéculations académiques sur le sujet, mais bien d’une tentative de peser sur le débat.
Europolis participe donc de l’effort de renouvellement actuel de la politique de recherche européenne.
Par ailleurs, le projet a été mené indépendamment de la Commission par des experts issus des milieux scientifiques et administratifs ayant une forte expérience des questions de politique de recherche européenne. L’un des initiateurs, Antonio Ruberti, a d’ailleurs exercé les fonctions de commissaires européens à la recherche en 2002.
Le rapport reflète ainsi les conceptions de professionnels particulièrement impliqués dans la construction d’une Europe de la recherche au quotidien et susceptibles de peser sur les responsables gouvernementaux. Ses conclusions ont donc servi de piliers pour étayer en partie la suite de cette réflexion.
22 – La politique européenne de la recherche à la croisée des chemins
Les forces qui s’exercent aujourd’hui sur les systèmes d’innovation en Europe, imposent des directions particulières aux politiques publiques. Il apparaît, de ce point de vue, que l’Europe est à un moment de son histoire où des choix doivent être opérés pour orienter l’avenir. Il s’agit bien de savoir si l’Europe a la capacité de faire face à un projet politique ambitieux et, dans l’affirmative, à quelles conditions.
A l’échelle de l’UE, il semble que la solution soit clairement institutionnelle. A cet égard, le progrès passe forcément par un effort accru d’intégration de la politique de recherche au niveau communautaire. Comme il a été précédemment démontré, la « non-Europe » a un coût que l’on ne saurait sous-estimer.
Cette conclusion s’inscrit malheureusement dans le courant critique qui alimente plus généralement la réflexion actuelle sur l’état de l’UE :« La politique européenne aux abonnés absents », titrait récemment un quotidien français, faisant état des critiques grandissantes à l’égard d’un prétendu immobilisme des Quinze face au risque de récession[xxxi].
Il faut donc forcer les barrages sous le signe de l’imagination. Dans cette étude, l’auteur envisage les voies institutionnelles possibles, sinon probables, d’une réponse de l’UE 25 en la matière, à partir de trois scénarii schématiques mais réalistes et crédibles.
23 – Trois scénarii d’évolution pour la recherche en Europe
De ce point de vue, la discrimination des projections s’opère selon le degré plus ou moins grand de cohérence donnée, dans les dix ans à venir, à la formulation des politiques de recherche à tous les niveaux des entités politiques : régions, nations et, bien sûr, Union européenne.
Le premier scénario, le moins intégrateur, suppose néanmoins un volontarisme certain. Il implique un changement de perspective notable par rapport à la situation d’aujourd’hui et nécessiterait sans doute des réformes importantes.
L’esquisse peut-être tentée d’une « Europe helvétique » où l’Union alignerait ses procédures, de façon paradoxale, sur un modèle qui a jusqu’à présent fortement contesté ses propres valeurs. Dans un monde cantonal, « à la Suisse », le maximum de décision intervient à l’échelon le plus décentralisé, régional ou interrégional. Dans cette hypothèse, l’UE cesserait de considérer son action historique et fondatrice en faveur de la science comme une priorité : une grande partie de ses compétences serait renationalisée. De ce fait, tout effort d’harmonisation des politiques nationales serait abandonné au profit d’une attitude d’inspiration libérale, qui laisserait à l’UE le soin d’élaborer les règles du jeu en matière de propriété industrielle et de standards techniques. Une telle Europe laisserait s’étioler ses principaux relais et moyens d’action.
A l’évidence, le PCRD, des structures de coordination du type d’Eurêka ou des institutions comme la Fondation européenne de la science (ESF) verraient leur influence décliner de façon irrémédiable. La coordination s’effectuerait au niveau inter régional, en laissant une capacité d’initiative importante aux agents. Comment, dans un tel contexte, concevoir de véritables « grands projets » ?
A l’autre extrémité du spectre se dégage le cadre d’une Europe très intégrée ou « Europe fédérale », selon un schéma prôné par certains courants europhiles actuels. Dans de scénario, le développement d’une société européenne fondée sur le savoir est reconnu comme une priorité de l’Union qui hérite de compétences importantes dans les différents domaines de l’économie du savoir, science, enseignement, fiscalité incitative, etc. La gouvernance du système européen de recherche et d’innovation est profondément renouvelée. Le PCRD devient un instrument de coordination fondamentale. Il s’appuie sur la création de plusieurs puissantes agences indépendantes et sur l’européanisation des grandes infrastructures de recherche. En contrepoint, le programme Eurêka devient le support d’une politique globale d’innovation et coordonne la contribution à la recherche d’autres politiques européennes concernées, comme la politique agricole. Un programme spécifique est bâti pour anticiper l’intégration des nouveaux pays membres. Quid, néanmoins, des particularismes nationaux et des « exceptions culturelles » ?
Dans le dernier scénario, qui dessine une « Europe de la Table ronde », priorité est donnée aux mécanismes de concertation interétatiques. Les Etats coordonnent graduellement leurs politiques sans l’imposition d’une autorité centralisatrice, en usant du PCRD comme d’un catalyseur.
Eurêka se spécialise dés lors dans l’aide à l’innovation technologique des PME, pendant que les soutiens directs du PCRD se concentrent sur des actions concernant la très haute technologie. La Fondation européenne de la science est amenée à jouer un rôle croissant dans l’aide à la recherche fondamentale et dans la coordination des actions des agences nationales. La mise à niveau des systèmes d’innovation des pays d’Europe de l’Est est réalisée graduellement grâce aux moyens des fonds structurels. De grandes agences européennes sont crées, dans tous les domaines où le principe intégrateur s’impose naturellement.
Une telle hypothèse suppose évidemment une volonté politique forte et une capacité à mobiliser des fonds européens de diverses provenances (fonds structurels, fonds de la PAC,etc.…) afin de réaliser pas à pas la construction d’un espace unifié pour la recherche européenne.
Parmi les 3 scénarii imaginés par l’auteur de cette étude, le dernier a une préférence particulière ; il est clair qu’il est le plus réalisable à court et moyen termes et qu’il permet de répondre correctement aux principaux défis identifiés par ailleurs. Il représente une solution médiane d’adaptation réaliste mais volontariste de l’existant. Il se trouve, de surcroît, qu’il correspond peu ou prou aux orientations définies par la Commission elle-même sous la dénomination « d’Espace Européen de la Recherche »[xxxii].
C’est donc sur cette ébauche de structure intégrée qu’il faut désormais s’adosser pour tenter, en dernière analyse, de dresser les lignes directrices d’un projet véritablement fondateur.
31 – Une volonté de rupture avec le passé
Affichant une forte volonté de rompre avec les pratiques antérieures, l’ancien Commissaire européen de la recherche Philipe Busquin a, d’emblée, annoncé, en 1999, qu’il préparerait non pas un 6ème PCRD mais un nouveau PCRD.
A l’origine de ce changement à priori radical, on retrouve le diagnostic grave porté sur l’état de la recherche et de l’innovation en Europe. Rappelons un constat sans appel : face à ses concurrents, l’UE élargie accuse un retard croissant. Cette faiblesse inquiétante dans un secteur stratégique pour l’UE et ses citoyens impose un engagement fort pour l’élaboration et la mise en œuvre d’une nouvelle politique de recherche et de développement technologique.
Dans sa communication du 18 janvier 2000, la Commission a lancé le projet d’établir « un Espace Européen de la Recherche (EER) ». La recherche est donc placée au centre des priorités de l’Union ; la mesure des enjeux semble enfin prise.
Le Parlement, dans sa résolution du 11 mai 2000, puis lors de délibérations ultérieures, a confirmé son très fort soutien pour l’EER.
Au plus haut niveau politique, l’importance de la science et de la technologie a été ainsi, pour la première fois, reconnue avec force au sein de l’UE. La dimension européenne de la recherche apparaît donc s’imposer. L’ambition est de structurer la recherche en Europe par une mise en commun des ressources et une coordination des efforts.
L’EER est désormais le nouvel horizon qui traduit la volonté politique d’utiliser la recherche comme un levier du développement culturel, social et économique de l’Europe.
32 – Vers un espace européen de la recherche
Selon ses concepteurs, la construction de cet EER se veut progressive et doit s’appuyer sur une démarche construite et ciblée. L’on peut donc raisonnablement supposer qu’elle suit en cela ce que l’on a dénommé en première partie « stratégie des buts de guerre scientifiques et technologiques ».
Pour ce faire, les dirigeants européens devront tout d’abord coordonner les politiques nationales et européennes, avec la constitution d’une base d’information sur les activités nationales. Etalonner ensuite les performances de ces politiques pour – in fine – arriver à cartographier l’excellence.
Rien, naturellement, ne pourra se faire sans une nouvelle approche européenne en matière d’infrastructures de recherche incluant l’établissement d’un réseau européen de communications électroniques.
Une stratégie en faveur de la mobilité devra de surcroît rapidement voir le jour. Elle mettra en œuvre des mesures notamment financières pour atteindre une masse critique de chercheurs mobiles au sein de l’Europe et attirer des scientifiques étrangers de haut niveau. C’est d’ailleurs ce qui traduira le mieux la dimension régionale et internationale de l’EER.
Ces trois grands principes qui fondent l’architecture de notre scénario 3, sont également inscrits en filigrane dans les objectifs affichés par le 6ème PCRD. Il y a donc matière à voir là des signes de cohérence encourageants…
33 – L’Espace européen de la recherche, premier bilan
Depuis maintenant 5 ans, l’EER semble être au cœur de la politique de recherche de l’UE. Un vaste chantier d’analyse, de réflexions et d’initiatives progresse. La conception et la préparation du PCRD qui couvre la période 2002-2006 sont, nous l’avons déjà remarqué, tout entières articulées sur la réalisation de cet objectif.
Ainsi, par souci d’efficacité et pour éviter la dispersion des efforts, les soutiens de l’UE se concentrent désormais sur un choix de sept domaines prioritaires[xxxiii]. Ces priorités constituent autant de champs de recherche dans lesquels les interventions de l’UE peuvent apporter une véritable valeur ajoutée européenne.
La création des « réseaux d’excellence », un des objectif majeur de l’EER, constitue l’un des nouveaux instruments développé par le sixième PCRD. Les premières « cartes » déjà mises en chantier concernent des thèmes en émergence dans les secteurs à progrès particulièrement rapides, tels les sciences du vivant, les nanotechnologies et la recherche socio-économique.
Enfin, une évaluation est actuellement en cours, à l’échelle européenne, pour favoriser l’utilisation optimale des infrastructures scientifiques existantes et permettre d’identifier les nouveaux besoins. Ce processus a déjà conduit à la création en 2004 du GRID (Globalisation des Ressources Informatiques et des Données)[xxxiv], un nouveau concept de réseau à très grand débit réservé aux échanges croissants des masses très importantes de données scientifiques entre les centres européens de recherche.
L’Espace Européen de la Recherche n’est pas le succédané d’une « Europe de la technologie » qui aurait échoué. C’est, au contraire, l’affichage d’une ambition nouvelle non dépourvue de moyens. Son originalité – et aussi sans doute sa principale force – sont de respecter le mode de construction traditionnel itératif de l’Union européenne. Une stratégie des « petits pas », certes, mais une stratégie concertée qui fait l’économie vitale des retours en arrière et des projets aventureux.
L’histoire récente de la construction européenne se fonde après la Seconde Guerre mondiale, au nom de la paix, pour pouvoir enfin promouvoir ensemble des valeurs communes : la liberté, le progrès et l’égalité.
La renaissance de l’idée européenne n’était alors qu’un rêve porté par une poignée de visionnaires : Robert Schuman, Jean Monnet, Konrad Adenauer, Paul Henry Spaak, Alcide de Gasperi. Rappelons-le, jamais l’Europe n’avait été aussi affaiblie. Coincée entre le bloc communiste à l’Est dont l’utopie trompait nombre de peuples et l’Amérique, à l’Ouest, dont on découvrait l’ampleur de la domination. L’Europe, embourbée dans une décolonisation difficile, tentait de panser ses plaies encore béantes. L’Europe accusait un retard sans précédent au plan politique, social, économique, technologique, scientifique. La civilisation européenne était en lambeaux.
Depuis plus d’un demi-siècle, le rêve de ces quelques visionnaires animés par une authentique force de la paix est devenu une réalité dynamique qui s’est progressivement imposée.
Cependant, dans le monde tel qu’il est en ce début de 21ème , changeant, globalisé, toujours en proie à de dangereux conflits locaux ou régionaux, l’idée européenne doit être encore plus prégnante. Il faut en effet prendre garde à la « panne d’Europe » qui menacerait une UE qui se croirait enfin accomplie dès lors qu’elle aurait atteint ses objectifs économiques.
Il ne faut pas s’y tromper, une nouvelle mutation technologique s’annonce, aux perspectives, si l’on y prend garde, redoutables. Les prochaines années seront marquées par un phénomène d’une portée sans précédent : la convergence entre nanotechnologies, biotechnologies, technologies de l’information et sciences cognitives (NBIC, pour reprendre la terminologie américaine).
Il s’agit d’un fondement clé de l’hyper puissance américaine : il existe aux Etats-Unis, dans les milieux intellectuels, économiques, militaires et politiques, une perception globale de ce phénomène.
Depuis l’espace jusqu’au tréfonds des océans, d’Internet à CNN, des algorithmes évolutionnaires au génome, d’Hollywood à « l’information dominance », de la puce au microdrone, de CARLYE à IN.Q.TEL, de PALM à BLUE-GENE, de WINDOWS à ECHELON, se met en place progressivement un véritable système de « monitoring » de la planète. Il constitue la trame du réseau technologique et informationnel qui tend à devenir le support essentiel de l’exercice de la souveraineté américaine. « Modeler le monde, formater les esprits » (« Shaping the world, shaping the mind ») était, ne l’oublions pas, la manière dont le président B.Clinton résumait les objectifs de la politique extérieure des Etats-Unis. Cette stratégie unilatéraliste et globaliste inspire toujours les déclarations officielles américaines les plus récentes.
Dès lors, si les Européens veulent une UE indépendante, il leur faut d’abord prendre conscience de l’ampleur de ce phénomène et de la menace qu’il constitue. C’est, semble-t-il, en cours.
Il s’agit ensuite de réagir de manière appropriée, sans hostilité ni agressivité, mais aussi sans complexes. Les Américains ont une stratégie de Recherche et Développement parfaitement justifiable de leur point de vue, mais l’UE n’a pas, à leur égard, d’obligation d’aveuglement…
C’est donc au niveau de l’UE 25 que la politique de recherche doit désormais être conduite en concertation et en complémentarité avec les politiques nationales. La décision de Lisbonne, en mars 2000, de créer un Espace Européen de la Recherche va dans cette direction. L’EER jette les bases d’une véritable politique scientifique et technologique commune pour l’Union, capable de réaliser l’objectif final d’indépendance et de souveraineté technologiques.
C’est dans ce même esprit que les chefs d’Etat de gouvernements ont confirmé une nouvelle ambition qui donnera une impulsion décisive à la dynamique de l’EER : d’ici 2010, l’Union européenne s’engage à élever les dépenses globales de recherche à 3% du PIB, soit une fois et demi le taux actuel. Ce bond considérable contribuerait à combler le retard par rapport aux Etats-Unis et au Japon.
L’EER, tel qu’envisagé, représentera ainsi une mutation grâce à laquelle le concept même de recherche européenne pourra se décliner de manière aussi familière que les notions de marché ou de monnaie unique.
L’Europe de l’intelligence et de l’immatériel est donc l’Europe qui pourrait faire gagner l’UE. Après l’Europe verte, c’est l’Europe de la science qu’il reste à construire. Une science au service des hommes, bien sûr, mais aussi – et peut-être surtout – au service d’une certaine idée de « l’Europe – puissance », une idée que n’auraient peut-être pas reniés les « Pères fondateurs ».
Manuscrit clos en avril 2005.
Notes de l’étude
[i] [1]
[ii] [2]
[iii] [3]
[iv] [4]
[v] [5]
[vi] [6]
[vii] [7]
[viii] [8]
[ix] [9]
[x] [10]
[xi] [11]
[xii] [12]
[xiii] [13]
[xiv] [14]
[xv] [15]
[xvi] [16]
[xvii] [17]
[xviii] [18]
[xix] [19]
[xx] [20]
[xxi] [21]
[xxii] [22]
[xxiii] [23]
[xxiv] [24]
[xxv] [25]
[xxvi] [26]
[xxvii] [27]
[xxviii] [28]
[xxix] [29]
[xxx] [30]
[xxxi] [31]
[xxxii] [32]
[xxxiii] [33]
[xxxiv] [34]
Copyright 30 mars 2005-Bio-Farina / www.diploweb.com
[1] « La fuite des cerveaux en Europe », Le Monde, du 23 mars 2003.
[2] DASQUIE Guillaume, Les nouveaux pouvoirs, Flammarion, 2004, pp 34-35.
[3] ATTALI Jacques, Europe(s), Fayard, 2001, p 12.
[4] PFEFFER, J & SALANCIK, G, The external control of organizations : A resource dependence perspective, Harper & Row, 1988.
[5] PIANTA M, New technologies across the Atlantic : US leadership or European autonomy ?, Hertforshire, Simon & Schuster, 1988.
[6] MANSFIELD Edwar D, The concentration of capabilities and the Onset of war, Journal of conflict resolution, 1992, pp. 3-4.
[7] ABRAHAMSON E. & FOMBRUN C.J, Forging the iron cage : Inter-organizational networks and the production of macro-culture, Journal of management studies, 1992, Vol 29, N° 2, pp. 175 – 194.
[8] Sciences et technologies, Editions Economica, indicateurs 2003, pp.45-47.
[9] Science & Vie, décembre 2004, p.72
[10] Rappelons le rôle joué par la conquête de la Lune sous la présidence Kennedy, à la fois pour mobiliser l’opinion et réaliser les avancées technologiques nécessaires à la défense et au rayonnement des USA.
[11] ATTALI Jacques, EUROPE(S), Fayard, 2001, pp 45-47.
[12] Terme du rédacteur, E. Bio-Farina.
[13] Réseau de renseignement anglo-saxon, basée sur les interceptions hertziennes et les écoutes. Redoutable et performant, son antenne « Europe » est basée en Grande-Bretagne.
[14] Second european report on S&T indicators, office des publications officielles des communautés européenne, Bruxelles, 2001, p.257
[15] Discours prononcé par J.Chirac à Strasbourg, le 6 mars 2002 : « Il semble que l’Union Européenne, en même temps qu’elle découvre une fracture qui s’élargit et s’approfondit sans cesse entre les deux rives de l’Atlantique, prenne peu à peu conscience de son manque de réflexion politique, voire géopolitique, sur le sujet, s’agissant, en particulier, de l’insuffisance des efforts entrepris, de l’absence de coordination de ceux-ci, et surtout de l’inexistence de grands projets mobilisateurs »
[16] Sources : communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions, Vers un espace européen de la recherche, www .PANEUROPE.com, novembre 2004.
[17] Benchmark Cordis, base de données sur la recherche, http/cordis.com
[18] id
[19] Le PCRD est devenu le principal instrument de la politique communautaire de recherche civile. Il définit pour quatre ans, selon une approche descendante (ou top down), les domaines technologiques stratégiques à promouvoir. Il est élaboré par la Commission européenne, en vertu de son pouvoir d’initiative, et adopté ensuite par le Parlement européen et le Conseil, en vertu du principe de codécision. Le premier PCRD a été élaboré en 1984.Actuellement, la Commission travaille à l’élaboration du 7ème PCRD ( 2006-2010) qui devrait s’efforcer d’approfondir significativement les synergies coopératives entre les Etats membres. Parmi les nombreux sites internet traitant des PCRD, on peut citer notamment : www .PANEUROPE.com, www.culture.gouv.fr, www.eurofaire.com .
[20] www.PANEUROPE.com /PCRD
[21] MANACH Jean Marc, Le cyberlobbying des industries décrypté, http/www.transfert.net, 2003.
[22] Eurêka est une initiative créée en 1985 entre la France et l’Allemagne. Son objectif est de susciter et soutenir les coopérations transfrontalières entre entreprises et instituts de recherche européens, pour le développement d’innovations économiquement compétitives.
[23] ASCOTT, Roy, cité par Pierre Lévy dans Cyberculture, Paris, Odile Jacob, 1987, p. 78.
[24] Cité par LEVY, Pierre, même source, p.45.
[25] Sciences & Vie, décembre 2004, p.55
[26] L’art de la guerre, août-septembre 2004, p.64
[27] www.cite-sciences.fr , politique spatiale : « Comment l’Europe résiste-t-elle à la concurrence ? »
[28] http//europa.eu.int/comm/dgs/energy_transport/galileo/index.fr.htm
[29] Surveillance globale par une constellation de satellites radars et optiques en place en 2006
[30] Financé par la Commission européenne dans le cadre du 5ème PCRD, ce projet était destiné à favoriser un débat en profondeur sur la politique de l’UE dans le domaine de la science et de la technologie. Le projet s’est centré sur 3 objectifs principaux : évaluer l’évolution récente et probable (1999-2010) du contexte économique, social et politique, scientifique et technologique de l’UE et son impact potentiel. Mesurer les transformations des institutions en charge de la science et de la technologie, et, enfin, construire les scénarios institutionnels pour la future politique scientifique et technologique de l’Europe. Les principales conclusions peuvent être consultées sur le site w3.obs-ost.fr/fr/projet_europolis.
[31] Laurence Caramel, « La politique européenne aux abonnés absents », Le Monde, 11 avril 2004.
[33] Les 7 domaines thématiques retenus sont : Génomique et biotechnologies pour la santé, technologies pour la société de l’information, nanatechnologies, aéronautique et espace, sûreté alimentaire, développement durable et changement planétaire, citoyenneté et gouvernance dans la société européenne de la connaissance.
[34] Dans un contexte international fortement constitutif, où le développement de la recherche repose, de plus en plus, sur la capacité à intégrer des approches complémentaires, l’objectif du GRID est de dynamiser et de rendre opérationnelle, à un moment critique, la contribution des équipes européennes dans tous les domaines prioritaires identifiés.
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