5/2016 Actualité internationale
Synthèse de l’actualité internationale de mai 2016

Par Axelle DEGANS, le 1er juin 2016  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Professeure de chaire supérieure au lycée Faidherbe (Lille) où elle enseigne la géopolitique en classes préparatoires économiques et commerciales. Membre du laboratoire HABITER (EA 2076) de l’Université Reims Champagne-Ardenne. Elle est notamment co-auteure chez Ellipses de Histoire, Géographie, Géopolitique. Concours d’entrée aux grandes écoles, Coll. Atout concours, Paris, 2015 ; et Un monde multipolaire. Géopolitique et géoéconomie, Coll. CQFD, Paris, 2014.

Que retenir de mai 2016 ? Voici une synthèse de l’actualité internationale de mai 2016 qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique ou préparent les oraux des concours. Pour ne rien manquer et réussir la dernière ligne droite, le mieux est de s’abonner gratuitement à notre Lettre d’information.


Le sort des urnes

En Iran, les réformateurs ont remporté les élections législatives de mai 2016, mais ils ne disposent pas de la majorité même en s’alliant aux modérés de Rohani.

Au Congo, après la réélection, le président Denis Sassous-Ngesso renouvelle les ministres, et nomme 8 femmes. Probablement un changement dans la continuité, même si des dignitaires du régime ont été écartés du pouvoir.

Aux Philippines, Rodrigo Duterte est élu à la présidence après avoir proposé l’exécution de milliers de criminels. Un discours populiste qui a visiblement plu.

A Londres le conservateur Boris Johnson ne s’est pas présenté pour un troisième mandat. En pleine interrogation sur le possible Brexit, 57% des londoniens ont porté leur choix sur le travailliste Sadiq Kahn : c’est le premier maire musulman de Londres. Une capitale où près de 40% des habitants sont nés à l’étranger

L’Amérique latine dans la tourmente…

Au Brésil, le taux de chômage atteint presque 11% au premier trimestre 2016. C’est dans ce contexte économique dégradé que la présidente Dilma Rousseff, accusée de corruption (scandale qui rattrape aussi l’ancien président Lula, le père de la « renaissance brésilienne » du XXIème siècle) est destituée par le sénat. Il faut savoir que, selon l’institut Atlas Politico, 60% de ces mêmes sénateurs sont poursuivis pour corruption, blanchiment d’argent, manipulations électorales... Michel Temer devient président par intérim pendant les 180 jours de la mise à l’écart de Dilma Rousseff.

Au Venezuela, la situation continue à se dégrader avec une inflation probablement supérieure à 700%, les produits de première nécessité manquent, les coupures d’eau et d’électricité sont quotidiennes. Un bras de fer oppose le président Maduro – héritier de Chavez – à l’opposition qui ne parvient pas à se constituer de façon unitaire. Le Venezuela est au bord de l’implosion sociale, comme en témoigne la situation de Caracas devenue l’une des villes les plus dangereuses à l’échelle mondiale... La population se fait désormais justice elle-même et les lynchages se multiplient. La grande corruption de la police et de la justice explique aussi cette montée angoissante du niveau de violence dans un pays dans l’impasse. Nicolas Maduro a déclaré l’ « état d’urgence économique », alors que l’opposant Henrique Capriles appelle l’armée à la désobéissance. Les émeutes à Maracaibo, deuxième ville du pays et capitale économique, montrent que le pays est au bord de la guerre civile.

Porto Rico vient de se déclarer en faillite faute de n’avoir pu honorer une créance de 470 millions de dollars. Cette ile associée aux Etats-Unis s’est lancée dans une fuite en avant dans l’endettement. San Juan doit faire face à une nouvelle échéance de 2 milliards de dollars pour le mois de juillet 2016. Le Congrès américain autorise l’ile à restructurer sa dette de 70 milliards de dollars pour la sortir de l’impasse.

L’instabilité perdure en Orient

L’Irak a de nouveau été en mai 2016 le siège d’attentats particulièrement meurtriers perpétrés par l’EI. La population civile a investi la zone verte de Bagdad, l’une des plus sécurisée du pays, demandant des actions concrètes contre la corruption, autre gangrène du pays.

La Syrie a été la cible d’une série d’attentats meurtriers qui ont fait 145 morts sur la côte, région Alaouite, minorité religieuse à laquelle appartient la famille El Assad. L’EI subit une double offensive, Al Nostra, la banche syrienne l’Al Qaida, essaie de lui enlever Raqqa alors qu’une vaste offensive menée par les troupes fédérales irakiennes, avec appui américain se déroule Falloujah.

Un Airbus d’Egyptair, qui reliait Paris au Caire, s’est crashé en Méditerranée avec une soixantaine de personnes à son bord. L’hypothèse de l’attentat semble à considérer. Cela ne manquera pas de fragiliser le secteur touristique égyptien déjà très éprouvé et si important pour l’économie égyptienne.

Une redéfinition des relations en Asie

Tsai Ing-wen, la nouvelle présidente taïwanaise indépendantiste, veut un maintien du statut quo et non pas une évolution vers une seule Chine. Sa marge de manœuvre est pourtant ténue, car les économies de la République populaire de Chine et de Taïwan sont imbriquées. En effet, la Chine reçoit 40% des exportations taiwannaises. Tsai Ing-wen a appelé, lors de son discours d’investiture, à un « dialogue positif », mais Pékin a mis en garde celle qu’elle considère comme une ile rebelle, contre tout dessein d’indépendance. Pékin qui a récupéré Hong Kong et Macao entend faire de même avec Taiwan. Hong Kong qui bénéficie d’un statut particulier jusque 2047, se fait rappeler à l’ordre régulièrement par Pékin. Un message clair pour tous.

Les Etats-Unis viennent de lever l’embargo sur les armes pour le Vietnam, imposé après la défaite de 1975. Il s’agit d’une normalisation des relations entre les deux Etats, alors que la pression de Pékin s’accentue en mer de Chine méridionale. Le Vietnam participe aux accords transpacifiques, développant une nouvelle diplomatie en direction de Washington, pour trouver un contrepoids à Pékin.

TTIP : les révélations de Greenpeace

Pour qui la mondialisation est-elle « heureuse » ? Après les révélations de lanceurs d’alerte qui ont produit le scandale « Panama papers » en avril 2016, Greenpeace livre sur la place publique des textes secrets des négociations en cours concernant les accords transatlantiques. L’ONG nous apprend que le principe de précaution n’apparait pas dans ces négociations. C’est une moins value par rapport au GATT qui reconnaissait la règle d’exception générale autorisant les Etats à réglementer pour « protéger les êtres humains, les animaux et la santé des plantes » voire « la conservation des ressources naturelles non renouvelables ». Ces révélations soulignent aussi le fossé qui sépare Européens et Américains dans de nombreux domaines (marchés publics, droits de douanes, mesures phytosanitaires et sanitaires, agriculture...). Dans ce dernier cas, l’Union européenne réclame la disparition de certaines appellations américaines qu’elle estime usurpées comme « Bourgogne ». La négociation que mène l’Union européenne est collective, elle ne peut être interrompue par un seul Etat membre, même la France.

Le chemin des présidentielles américaines...

Côté républicain, la candidature de Donald Trump est claire. Il a pris le parti de force, contraignant ses adversaires au retrait du fait de leur peu de popularité. Les oppositions internes sont pourtant fortes, à commencer dans le clan Bush. Le milliardaire se présente comme le candidat anti-establishment ce qui indispose un nombre certain de Républicains, inquiets en outre par la teneur des discours de Trump, au point d’envisager de voter Hillary Clinton. Côté démocrate, la candidature d’Hillary Clinton, sa personnalité très froide, son passé de première dame et donc de tenante de l’establishment, exaspère une partie des démocrates, et de nombreux soutiens de Bernie Sanders – qui a refusé de retirer sa candidature -annoncent qu’ils préféreront voter Trump que Clinton...

Les deux grands partis sortiront fragilisés par cette élection présidentielle qui porte les stigmates de la crise née des subprimes qui a accru les inégalités internes aux Etats-Unis. Un vote par défaut ? La dénonciation des accords – ou de leur négociation - de libre-échange transpacifique et transatlantique fait recette parmi les partisans de Trump et Sanders, cela mérite à minima réflexion. L’année 2016 s’est ouverte sous des auspices moins favorables qu’en 2015 (décélération de la croissance économique, de la création d’emplois...), l’inquiétude de la classe moyenne se renforce, alors que 80% des Américains n’ont pas retrouvé leur niveau d’avant crise. Une défiance nouvelle vis-à-vis de la mondialisation au cœur même des Etats-Unis ? La montée des populismes n’est pas que l’apanage de l’Europe...

Un petit air de paix froide

L’OTAN vient de déployer des missiles anti-missiles en Pologne sur la base de Redzikowo, Vladimir Poutine estime que c’est une violation des accords de 1987 URSS-Etats-Unis. Washington affirme, sans convaincre Moscou, que le système Aegis est tourné contre l’Iran, alors que les Américains viennent de renouer des relations avec Téhéran. L’OTAN, sous l’impulsion des Etats-Unis réunit certains voisins de la Russie : l’Islande, le Danemark, la Finlande, la Suède et la Norvège, pays inquiets depuis l’annexion de la Crimée par Moscou.

5/2016 Actualité internationale
Carte. Les élargissements de l’OTAN post-Guerre froide
Légende et carte conçues par Pierre Verluise, carte réalisée par Matthieu Seynaeve pour Diploweb.com

La Russie a fait savoir qu’elle ne resterait pas sans réagir à une nouvelle extension de l’OTAN en Europe.

Le temps des symboles

Le président Obama s’est rendu en mai 2016 à Hiroshima, dans le cadre de la réunion du G7. Le symbole est puissant pour cette ville, première victime de la bombe atomique qui a fait 140 000 victimes le 6 août 1945. Il ne s’est pas excusé pour l’usage de la bombe, et a de nouveau plaidé pour un monde sans armes nucléaires.

Hissène Habré, ancien président du Tchad entre 1982 et 1990, vient d’être reconnu coupable de crimes contre l’humanité et condamné à la prison à perpétuité par le tribunal spécial africain qui siège à Dakar.

Des succès français

Le groupe Renault-Nissan va débourser un peu moins de 2 milliards d’euros pour prendre le contrôle de son rival asiatique Mitsubishi, grand spécialiste des 4x4. Cela montre la bonne santé du groupe dirigé par Carlos Ghosn, mais c’est en fait Nissan qui réalise cette opération. Racheté par Renault en 1999, Nissan est aujourd’hui plus dynamique que la marque au losange.

Les chantiers de Saint-Nazaire – STX France – viennent de sortir le plus grand paquebot de croisière le Harmony of the seas : 360 mètres de long, 72 mètres de hauteur pouvant accueillir plus 6 300 passagers. STX France enregistre de nouvelles commandes et doit livrer 14 paquebots d’ici 2026, une bonne nouvelle pour l’emploi.

Un peu de clarté dans un monde opaque ?

Après le scandale du « Panama papers » et en plein jugement du « Luxleak » les paradis fiscaux que sont Bahreïn, le Liban, Nauru, Vanuatu et Panama se sont engagés auprès de l’OCDE à échanger des données fiscales. Si cette démarche va dans le bon sens, il faut quand même avoir conscience que les paradis fiscaux servent d’abord les intérêts des plus riches – personnes privées, entreprises comme Etats – le Luxembourg n’engage-t-il pas des poursuites judiciaires contre ceux qui ont révélé l’ampleur des détournements fiscaux en plein cœur de l’Europe communautaire ? Une étude universitaire menée par Stefan Zeume, Hannes Wagner et James O’Donovan montre que les marchés financiers ont sanctionné les entreprises mises en cause dans le scandale Panama papers. Cela s’est traduit par la disparition de 0,64% des 67 000 milliards de dollars de leur capitalisation boursière de décembre 2015. Les grands investisseurs institutionnels ont commencé à réagir, comme le fonds souverain norvégien attaché à l’éthique de ses placements. On peut donc être optimiste, mais pas aveugle pour autant, les paradis fiscaux sont très nombreux : Delaware (Etats-Unis), City londonienne (Royaume-Uni) en tête.

Le Trésor américain vient de lever le secret sur les avoirs américains détenus par l’Arabie saoudite ; Alors que certains estimaient que Riyad détenait plus de 700 milliards de dollars de la dette américaine, vrai pouvoir sur Washington notamment en cas d’enquête sur les responsabilités concernant les attentats du 11 septembre 2001, il s’avère qu’elle en détient environ 117 milliards. C’est bien sûr une somme considérable, mais qui n’a rien à voir avec les actifs détenus par les puissances asiatiques – 1 245 milliards pour Pékin et 1 137 pour Tokyo - son pouvoir d’action est donc limité.

Copyright 31 mai 2016-Degans/Diploweb.com


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Ce volume Actualité internationale rassemble les synthèses de janvier à décembre 2015.

A. DEGANS, Actualité internationale 2015
Copyright Degans/Diploweb.com

Les références de cet ouvrage sont : Axelle Degans, Actualité internationale 2015, éd. Diploweb.com, 2016. ISBN : 979-10-92676-07-5
Bonne lecture ! Axelle Degans


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