Agrégée d’histoire, co-auteure de Les grandes questions internationales, éd. Studyrama 2013 et auteure du livre Les pays émergents : de nouveaux acteurs, Ed. Ellipses, collection CQFD, 2011. Professeure d’histoire, de géographie et de géopolitique en classes préparatoires économiques et commerciales au Lycée Dessaignes (Blois).
Synthèse de l’actualité internationale de mai 2014 qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique ou passent un concours. Le Diploweb se tiendra à leur côté jusqu’aux oraux ! Pour ne rien manquer, le mieux est de s’abonner à notre compte twitter.com/diploweb. Comme les gagnants de l’année passée !
LE PREMIER enseignement du scrutin de mai 2014 – pour ceux qui en doutait – est que l’Union européenne ne fait plus rêver ses concitoyens, et c’est encore moins ses jeunes. On observe une progression notable de l’extrême-droite en France, au Royaume Uni où l’Ukip recueille 28% des voix, au Danemark où le parti populaire progresse, en Belgique où le parti nationaliste flamand atteint 32% des voix... L’extrême-gauche progresse dans des pays comme la Grèce avec Syria, les « indignés » apparaissent dans la péninsule ibérique ou en Italie... Le parlement européen élu en mai 2014 est un peu plus à droite que le précédent, la percée des eurosceptiques est le fait le plus remarquable. La députée européenne Sylvie Goulard souligne que 2/3 des suffrages sont allés à des partis pro-européens, ce qui est juste, mais un tiers non. C’est déjà très significatif : c’est un vote du déclassement. La population ne semble plus vouloir de ce que l’UE est devenue, accusée d’être « éloignée des préoccupations quotidiennes » des Européens, d’être « opaque »... A l’Ouest elle est accusée de s’être élargie trop rapidement sans s’y être vraiment préparée, à l’Est d’être peu généreuse... la libre circulation des personnes est même remise en cause au sein de la population européenne. Les défis auxquels doit faire face l’UE sont immenses, au moment où la guerre civile est à ses frontières et que la négociation d’un accord transatlantique ne fait pas l’unanimité. Il faut aussi et surtout retrouver le chemin de la croissance économique et de l’emploi pour pouvoir préparer notre avenir.
En France, les élections européennes ont été remportées par un parti eurosceptique, le Front National, avec 24,8% des voix pour un scrutin européen de nouveau marqué par une abstention massive 58%. L’UMP obtient 20,8%, le PS joint au PRG 13,98%... Ce scrutin, qui s’est d’abord joué sur des motifs nationaux, est un terrible démenti pour la majorité au pouvoir, et n‘est pas bien plus rassurant pour l’UMP. Ce vote n’est plus seulement un vote protestataire. Si la base électorale du FN est composite, on peut considérer que ce vote est une remise en cause profonde de la politique menée de plusieurs années, de l’austérité, mais aussi des pratiques de la classe politique française qui se coupe du « pays réel ». Il s’agit d’une sanction des partis politiques qui présentent en tête de liste des personnes qui ne s’investiront pas forcément dans leur nouvelle mission, ayant déjà d’autres mandats électoraux, ou présentées parce qu’il faut bien leur donner un mandat. Une maladie française, bien moins répandue chez nos voisins. C’est aussi une réaction face un contexte dépressif qui dure depuis au moins 2009 et dont on ne perçoit pas la fin. Ce vote est donc un rejet d’une politique inefficace, d’une Europe qui ne protège pas, il traduit aussi une peur de l’avenir. C’est donc un vote pour le changement.
Nous envoyons au parlement européen 24 députés frontistes sur 70 que compte la délégation française. La question est de savoir si cela nous permettra de peser davantage sur la politique européenne pour que l’Europe que nous construisons nous ressemble davantage ? Pas sûr...
Les élections législatives indiennes ont été remportées par Narenda Modi, à la tête du BJP, parti nationaliste hindou. Il met fin au règne du parti du Congrès dirigé par la famille Gandhi depuis Nehru, père de l’indépendance. Il a invité son homologue pakistanais, Nawaz Sharif, pour son intronisation, une première.
Abdel Al-Sissi, qui a montré qu’il exerce le pouvoir d’une main forte –comme le montre les arrestations et les exécutions de plusieurs centaines de personnes - vient d’être élu président de l’Egypte avec 96% des voix, et une participation d’environ 45% (les Frères musulmans ont appelé à l’abstention). Il doit juguler une inflation à près de 12%, relancer une économie au point mort alors que près de 40% des Egyptiens vivent sous le seuil de pauvreté. Le secteur du tourisme est particulièrement affecté par la conjoncture égyptienne.
Le premier ministre irakien Nouri Al-Maliki a exercé son autorité d’une poigne de fer. Les élections législatives n’en sont pas moins ensanglantées par une série d’attentats. La règle officieuse veut qu’un chiite soit premier ministre d’Irak, Nouri Al-Maliki est donc confiant.
Les élections sud-africaines ont confirmé le pouvoir de l’ANC. Le parti de feu Nelson Mandela a déjà pourtant largement déçu. Les réformes structurelles ne sont pas menées, l’apartheid économique – malgré l’émergence d’une classe moyenne africaine -se poursuit comme en témoigne la misère dans les townships tel celui de Soweto. Les grèves des mineurs de Marikana (qui ont déjà fait une trentaine sont morts dans des émeutes avec la police il y a deux ans) rappellent que les formidables écarts sociaux de ce pays ne se résorbent pas. Ce membre des BRIC’s, émergent africain, ne construit toujours pas les routes, les réseaux d’adduction en eau, les écoles de qualité ou les centres médicaux attendus par une grande partie de la population. Le pays reste abonné à un taux élevé de chômage – 24,7% en décembre 2013 – qui concerne plus des 2/3 de ceux qui vivent dans les townships. Il reste aussi une terre de violence comme l’illustre le procès de l’athlète Nestor Pistorius, ainsi qu’une terre de corruption, et Jacob Zuma ne l’incarne que trop. Alors, pourquoi cette victoire de l’ANC ? Ce parti reste celui qui a mis fin à l’apartheid cette aura est une rente de situation – la même dont bénéficie Robert Mugabe au Zimbabwe – qui risque de s’épuiser si le nouveau mandat de J. Zuma ne gomme pas davantage les inégalités sociales du seul pays africain qui a organisé la coupe du monde de football.
La crise dure depuis plus de 6 mois. Une partie de la population conteste le premier ministre Yingluck Shinawatra, sœur de Thaksin ancien premier-ministre convaincu de corruption. Cette contestation menace de paralysie le pays. Le général Prayuth Chan-Oha prend le pouvoir par un coup d’Etat militaire, le 12ème depuis la mise en place de la monarchie constitutionnelle thaïe. Il a immédiatement imposé un couvre-feu au pays. Il existe une certaine résignation à Bangkok mais les « chemises rouges », surtout implantées auprès des paysans du Nord du pays, risquent de ne pas accepter aussi facilement ce putsch. Le général annonce pourtant vouloir « ramener la joie chez tous les Thaïlandais ».
Elles se tiendront début juin, mais le vainqueur, Bachar el-Assad est déjà connu. La Syrie a déjà perdu près de 10 millions de ses ressortissants qui ont préféré l’exil (déstabilisant tout le Proche Orient, Liban, Jordanie) et déplore plus de 150 000 morts lors de cette guerre civile – qui n’est pas sans rappeler celle qui se joua en Espagne – que le pouvoir est désormais en passe de gagner.
Alstom est un des fleurons industriels français qui nous équipe en rames ferroviaires, qui a fourni les turbines du plus grand barrage hydroélectrique du monde, celui des Trois gorges en Chine et aujourd’hui défraie la chronique économique. Patrick Kron en assume la direction depuis 2003 et restructure l’entreprise en proie à des difficultés financières, puis incarne sa renaissance. En 2006, Bouygues rachète les parts de l’Etat, mais la crise économique depuis 2008 handicape l’entreprise. Bouygues, à la recherche d’argent frais après sa mésaventure avec Numéricâble, décide de vendre ses parts. L’américain General Electric est sur les rangs et le gouvernement a souhaité entendre la proposition de l’allemand Siemens. Ce dernier est européen mais Alstom et lui sont plus concurrents que complémentaire et l’on craint les licenciements. L’autre est américain mais Alstom lui offre une complémentarité nouvelle. Alstom est bien à l’heure du démembrement. Se pose alors la question de la pertinence du rapprochement industriel entre Alstom et/ou GE, Siemens. GE vient de promettre la création de 1 000 emplois en France et communique par des spots publicitaires, quand Siemens annonce la suppression de plus de 11 000 postes.
Le referendum organisé dans l’Est du pays par les pro-russes a élargi le fossé entre Kiev et cette partie de l’Ukraine. Cette guerre civile de « faible intensité » a fait déjà plusieurs dizaines de morts.
Les élections ukrainiennes ont porté au pouvoir le « roi du chocolat », Petro Porochenko. Il a remporté ces élections dès le 1er tour. Son 1er objectif est d’endiguer une guerre civile qui menace dans la partie orientale du pays, notamment à Donetsk et Lougansk. Il engage un bras de fer avec Moscou concernant les livraisons de gaz, et surtout leur prix...
Alors que la route de la Soie renait de ces cendres, Moscou annonce la création d’une union économique eurasienne avec la Biélorussie et le Kazakhstan, l’Arménie et le Kirghizstan pourraient la rejoindre très prochainement. Au 1er janvier 2015 cette union de 170 millions de personnes doit mettre en place une politique économique concertée dans les secteurs de l’agriculture, l’énergie, les transports et l’industrie. Elle repose sur la libre circulation des hommes, des produits, des services et des capitaux, prenant exemple sur l’Union européenne. Une Eurasie nouvelle sur laquelle plane l’ombre de l’Ukraine. Une union eurasienne qui détient 20% des réserves mondiales avérées de gaz, 15% de celles du pétrole, et un marché de consommateurs en pleine expansion. Cette union ancre davantage la Russie – qui a une double nature européenne et asiatique comme l’a très bien montré H. Carrère d’Encausse – en Asie, ce continent en pleine croissance économique alors que l’Europe se défie et défie Moscou. Pékin et Moscou viennent de signer un contrat quasi historique dans le domaine gazier, 38 milliards de m3 par an sur 30 ans, la Chine qui s’est d’ailleurs bien gardée de condamner Moscou en Crimée ou en Ukraine...
En mer de Chine orientale, des chasseurs chinois ont « frôlé » des avions japonais aux limites de leurs zones aériennes d’identification, le Japon a officiellement protesté contre des « manœuvres dangereuses ». La Corée du Nord, elle fait un geste envers le Japon en rouvrant le dossier des japonais enlevés entre le début des années 1970 et celles des 1990. Un geste très apprécié à Tokyo.
Le Xinjiang chinois (la région turcophone où passe l’ancienne route de la soie) a été de nouveau le théâtre d’un attentat à la voiture piégée qui a fait une trentaine de morts et près de 100 blessés. Les Ouigours –aujourd’hui minoritaires dans leur propre capitale Urumqi du fait de la politique de colonisation menée par Pékin – se radicalisent en parallèle à leur marginalisation économique croissante.
Le Vietnam reproche à la Chine d’avoir installé une plate forme de forage Haiyang-981 dans les eaux des Paracels revendiquées par Pékin et Hanoï (mais pas seulement). La population vietnamienne a multiplié de violentes manifestations anti-chinoises qui ont tourné à l’émeute et provoqué l’inquiétude de Pékin. Un bateau de pêche vietnamien a été coulé lors d’une altercation avec un navire chinois... Tokyo à fait savoir sa solidarité avec Hanoï concernant le différent en mer de Chine méridionale...
Depuis plusieurs années le printemps chinois est synonyme de ralentissement économique, cette année n’échappe pas à la règle. Pékin doit soutenir la croissance en ouvrant les vannes du crédit pour l’immobilier – après avoir durci les conditions pour éviter une bulle immobilière – car le bâtiment est un secteur crucial pour le pays. Les tensions économiques sont fortes, dans un pays où la dette privée additionnée à la dette publique représente plus de 230% du PIB... Xi jinping a bien conscience d’être sur une corde raide. La production industrielle ralentit or le pays doit maintenir une croissance à plus de 7% pour créer assez d’emplois, et doit aussi assainir ses finances... une difficile équation.
Au moment où Washington négocie de vastes accords de libre-échange avec l’Asie (accords transpacifique) et l’Europe (le partenariat transatlantique) la justice américaine accuse 5 militaires chinois de cyberespionnage au détriment d’entreprises aussi sensible qu’Alcoa (aluminium), ou Westinghouse (nucléaire), Allegheny Technology... Même si les Etats-Unis ne sont pas exempts de critiques dans ce domaine – il faut se rapporter aux révélations d’E. Snowden - la Chine est connue pour être le principal pays de hackers.
Les premiers soldats de la force européenne de l’Eufor-RCA sont arrivés à Bangui, les violences continuent et tiennent, par endroit, du « nettoyage ethnique ». Au Mali des forces armées ont repris Kidal, Bamako demande à la France de l’aider à la reconquérir. L’ONU mène une enquête au Sud-Soudan concernent de probables actes de crimes contre l’humanité
Les règles de la comptabilité nationale ont évolué pour adopter le SEC 2010. Ainsi, la recherche-développement n’est désormais plus considérée comme une dépense mais comme un investissement. La richesse nationale évaluée devrait ainsi augmenter de 2 à 3%. Ce changement aura aussi un impact sur notre dette publique calculée par rapport au PIB... Le nouveau mode de calcul, permet au Nigéria de se présenter comme la première économie africaine.
A quelques semaines du coup de sifflet qui ouvrira la coupe de football 2014 les interrogations sont nombreuses. Le Brésil est le 2ème pays émergent à l’organiser et comme souvent les travaux ne sont pas terminés, ainsi le stade de l’Arena corinthians de Sao Paulo risque de ne pas avoir de réseau de télécommunication opérationnel pour le match d’ouverture du 12 juin... ni d’aéroport relié aux réseaux de transports en commun ! La population, acquise au football, l’est moins à la copa tant les frais engagés sont jugés déraisonnables au regard de tout ce qui reste à faire pour la population. Le bus de la Seleçao a même été arrêté par des professeurs en colère... La fête de ne devrait pas être gâchée...
Le pape s’est rendu à Jérusalem et a invité les dirigeants israéliens et palestiniens à invoquer Dieu pour « le don de la paix ». Il s’est arrêté face au nouveau « mur la honte » qui sépare israéliens et palestiniens et a prié. Mahmoud Abbas et Shimon Peres ont accepté son invitation de venir à Rome pour la Pentecôte...
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Point d’actualité internationale d’avril 2014
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Voir une présentation d’un ouvrage auquel Axelle Degans a contribué "Les grandes questions internationales", L. Briday, A. Chaffel, P. Dallenne, A. Degans, éd. Studyrama
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