10/2015 Actualité internationale
Synthèse de l’actualité internationale d’octobre 2015

Par Axelle DEGANS, le 1er novembre 2015  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Professeure de chaire supérieure au lycée Faidherbe (Lille) où elle enseigne la géopolitique en classes préparatoires économiques et commerciales. Membre du laboratoire HABITER (EA 2076) de l’Université Reims Champagne-Ardenne. Elle est notamment co-auteure chez Ellipses de Histoire, Géographie, Géopolitique. Concours d’entrée aux grandes écoles, Coll. Atout concours, Paris, 2015 ; et Un monde multipolaire. Géopolitique et géoéconomie, Coll. CQFD, Paris, 2014.

Voici une synthèse de l’actualité internationale d’octobre 2015 qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique ou préparent des concours. Pour ne rien manquer, le mieux est de s’abonner gratuitement à notre Lettre d’information.

L’ONU a 70 ans

L’Organisation des nations unies (ONU) est créée le 24 octobre 1945, et succède à l’inefficace Société des nations (SDN). Dotée d’un Conseil de sécurité aux cinq membres permanents disposant d’un droit de veto et d’une force d’interposition, elle intervient régulièrement dans la vie internationale. Les casques bleus sont envoyés pour une première opération de maintien de la paix en 1948 lors de la première guerre israélo-arabe, comme en 1950 lors de la guerre de Corée, puis s’interposent lors de la guerre du Liban. L’ONU condamne l’invasion du Koweït par l’Irak en 1990. Elle est d’ailleurs récompensée pour son action pour la paix en obtenant en 2001 le prix Nobel, comme en 2013 pour l’interdiction des armes chimiques. Elle œuvre aussi au développement par l’intermédiaire de ses multiples organismes spécialisés, UNICEF, OMS... En 2000, elle fixe les Objectifs du Millénaire (OMD) pour faire reculer la pauvreté, la date butoir est alors pour 2015. Cet objectif a été globalement atteint – le nombre de personnes vivant avec moins de 1,25 dollars par jour est réduit de moitié par rapport à 1990 - grâce à la réduction spectaculaire de la pauvreté en Asie, et en particulier dans la Chine qui s’ouvre au commerce mondial abandonnant son modèle autocentré. C’est bien moins vrai pour le continent africain. Des progrès restent à faire concernant la réduction de la mortalité infantile, l’amélioration de la santé maternelle, l’égalité des sexes. L’ONU soutient le développement durable- Ban Ki-moon appelle a la mobilisation- notamment dans l’organisation de la COP 21.

Les critiques visant l’ONU sont aujourd’hui nombreuses. Elle a été l’hémicycle de l’appel de D. de Villepin à ne pas intervenir en Irak en 2003 mais n’a pas empêché cette intervention américaine dont le Proche et le Moyen-Orient vivent aujourd’hui encore les désastreuses conséquences : déstabilisation politique régionale, exactions de Daech, essor du jihadisme, flux de réfugiés dont l’Europe est l’un des réceptacles. L’inaction de l’ONU est vertement critiquée. La réforme de sa gouvernance est un serpent de mer. Les membres permanents du Conseil de sécurité – Etats-Unis, Russie, France, Royaume Uni et Chine – représentent l’équilibre mondial de 1945, pas celui de 2015. Cette réforme s’annonce tellement compliquée qu’elle ne se réalise pas. Sa non-réforme la discrédite, l’ONU est de plus en plus contournée. Le monde en 2015 n’est pas plus sûr que celui en 1945, la paix peine à être maintenue.

La Palestine vient d’être acceptée à l’ONU avec le statut d’Etat non membre.

Le sort des urnes

En Guinée, le président Alpha Condé a été réélu avec plus de 57% des voix contre Cellou Diallo (31,44%). L’opposition conteste cette victoire, alors que l’Union européenne est elle aussi prise de doute sur la régularité des votes.

Au Canada, les élections législatives ont été remportées par le parti libéral de Justin Trudeau qui dispose d’une majorité absolue, une situation confortable pour gouverner. Il annonce une politique de relance par la dépense publique en investissant dans les infrastructures tout en baissant les impôts des classes moyennes.

Le Guatémaltèque Jimmy Morales, ancien acteur comique, qui a pour qualité de ne pas appartenir à une classe politique corrompue, à été élu à la présidence de son pays.

La Pologne a un nouveau premier ministre, la très conservatrice Beata Szydlo, derrière laquelle tous les analystes voient le retour de Jaroslaw Kaczinski.

En Côte d’ivoire, le président sortant Alassane Ouattara a été réélu dès le premier des élections avec près de 84% des voix, mais à peine plus d’un électeur sur deux s’est déplacé.

Au Congo, Denis Sassou-Ngesso a organisé un referendum pour pouvoir briguer un nouveau mandat présidentiel après 31 ans de pouvoir. L’opposition n’a de cesse de dénoncer la manipulation des résultats : 10% de votants contre plus de 72% annoncés et appelle à la désobéissance civile. La France a exprimé clairement ses doutes sur les résultats de cette consultation.

En Tanzanie, John Magufuli a été élu avec plus de 58% des voix, mais l’opposition conteste là aussi les résultats.

Une crise des déchets au Liban

Cette crise des déchets témoigne d’une crise bien plus vaste de ce petit pays qui n’a plus de président depuis 18 mois et accueille - l’équivalent de 25% de sa population – des réfugiés syriens qui déstabilisent le fragile équilibre du pays du Cèdre. Un mouvement civil – « vous puez » – s’est organisé dénonçant non seulement les ordures qui s’entassent depuis 100 jours mais surtout l’impéritie des responsables politiques libanais.

La Turquie au centre de l’œil d cyclone

L’aviation turque a mené des frappes aériennes contre les positions du PKK – au nord de l’Irak – qui lutte contre Daesh. Un double attentat a provoqué la mort d’une centaine de personnes à Ankara. Il a frappé une manifestation pacifique d’opposition au pouvoir d’Erdogan, de très nombreux Kurdes comptent au nombre des victimes. Le pouvoir est soupçonné à minima de laxisme dans l’encadrement de cette manifestation, et même d’être plus directement impliqué car les opposants à Erdogan dénoncent sa complaisance envers les jihadistes. Ankara fait toutefois de l’EI, qui ne l’a pas revendiqué, le suspect numéro 1 de ces attentats. Il a été perpétré en pleine préparation des élections, Erdogan espère qu’elles seront des « élections de la peur » qui renforceront son pouvoir. Scénario classique…

Un Proche-Orient toujours dans l’impasse (la violence)...

Une série d’attentats à la voiture piégée a fait une cinquantaine de morts en Irak, notamment à Bassora province chiite, elle est revendiquée par l’EI.

Israël est plongé dans une nouvelle spirale de violence. Les agressions au couteau se multiplient, entrainant en retour la répression. Cette « intifada au couteau » a coûté à vie à une dizaine d’Israéliens et à une quarantaine de Palestiniens.

... l’intervention russe rebat les cartes au Proche-Orient

L’intervention russe en Syrie répond à plusieurs motifs. Il s’agit pour Vladimir Poutine d’éviter une plus grande porosité des frontières entre la Syrie et la Russie qui ne veut pas d’une remontée des jihadistes vers son territoire. L’Iran et la Russie soutiennent le régime de Bachar el-Assad. L’intervention militaire russe appuie les forces du régime qui agissent au sol. Elle est à comprendre dans l’absence d’une réelle intervention américaine en Syrie et l’indécision européenne. Cette intervention est un retour de la Russie dans le grand jeu diplomatique, en lui donnant un rôle incontournable sur le dossier du Proche-Orient. Elle pousse Washington à se rapprocher des opposants kurdes et arabes pour lutter contre Daech.

Attentat terroriste contre un avion de ligne russe

Un avion de ligne de la compagnie russe Metrojet a explosé en plein vol au dessus de Sinaï, le 31 octobre 2015, causant la mort de 224 personnes. La cause très probable serait une bombe placée à bord grâce à des complicités à l’aéroport. Le Sinaï est une région de non-droit où sévissent les islamistes d’Ansar Beit Al-Makdis, qui ont fait allégeance à l’EI.

Le général Al-Sissi est très mécontent de la décision britannique de la suspension de tous les vols à destination de Charm el-Cheikh

L’Union lève ses sanctions contre la Biélorussie

Alors que la dissidente biélorusse Sveltana Alexievitch reçoit le prix Nobel de littérature, son pays qui a joué le rôle d’intermédiaire sur le dossier ukrainien – les accords de Minsk – voit la levée des sanctions européennes. Son président Loukachenko a de plus refusé l’installation d’une base militaire russe sur son territoire. Est-ce un début de normalisation des relations entre Bruxelles et Minsk ?

L’Union relève les seuils de pollution

L’Union modifie les seuils de pollution des moteurs diesel des voitures et le relève à la surprise des écologistes. Les tests se feront aussi sur piste, les rejets d’oxyde d’azote autorisés passeront de 80 à 168 mg/km.

Il s’agit en fait de protéger l’emploi automobile en Europe, un secteur qui mobilise environ 12 millions de personnes.

L’Union est à la peine face au flux de réfugiés

La situation d’urgence pousse l’Union européenne à essayer de trouver une solution pour faire face à l’affluence des migrants. La Turquie joue un rôle régional important en accueillant plusieurs millions de réfugiés depuis l’Irak et la Syrie, et l’Union souhaite qu’Ankara joue le rôle de verrou migratoire. La Turquie réclame en échange une aide de trois milliards de dollars, une libéralisation des visas pour les citoyens turcs qui se déplacent en Union européenne, ainsi que l’ouverture à la négociation de nouveaux chapitres quant à son processus d’adhésion. Un processus en suspension depuis plusieurs années.

Un nouveau sommet s’est tenu à Bruxelles sur la question des migrants entre 10 pays membres (Suède, Pays-Bas, Allemagne, Autriche, Hongrie, Slovénie, Croatie, Grèce, Bulgarie et Roumanie) et la Macédoine, l’Albanie et la Serbie ; soit les pays de la « route des Balkans ». La Grèce voit l’arrivée de plus de 9 000 personnes chaque jour, la Slovénie a accueilli plus de 60 000 personnes en quelques jours... Frontex va déployer plusieurs centaines de personnes pour aider les pays de Balkans à faire face à cette vague migratoire qui entend se diriger de préférence vers la Suède ou l’Allemagne. L’Union européenne cherche depuis deux mois une solution à cette crise qui la divise profondément, la renvoie à ses fondements, ses préférences, ses peurs...dont la moindre n’est pas celle de sa propre disparition. Le HCR estime que plus de 705 000 personnes ont traversé la Méditerranée depuis janvier 2015, plus de 560 000 sont arrivés en Grèce. Près des deux tiers sont des Syriens fuyant les combats.

La signature d’un vaste accord transpacifique

Ce traité de libre-échange (TPP) a été signé entre les Etats-Unis, le Japon, l’Australie, Brunei, le Canada, le Chili, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le Vietnam. Washington réussit ainsi à imposer ses normes – très libérales - dans une région très influencée par Pékin, une belle victoire pour Barack Obama à qui il reste à obtenir l’assentiment parlementaire. Cet accord n’est pas seulement économique, il relève très largement de la volonté géopolitique américaine de se recentrer sur l’Asie.


L’Afghanistan toujours dans la tourmente

Les talibans reprennent la ville de Kundunz en Afghanistan, ville de 300 000 habitants non loin du Tadjikistan, en une journée. Une contre-offensive est menée par l’armée afghane soutenue par des frappes aériennes de l’OTAN. Un centre médical tenu par MSF Belgique a été touché causant la mort de 22 personnes et un immense émoi.

Vers le début de la levée des sanctions pesant sur l’Iran

Nous sommes trois mois après la signature de l’accord de Vienne du 14 juillet 2015 concernant le nucléaire iranien. Ce compromis que l’on peut qualifier d’historique devait entrer en vigueur trois mois après sa signature. Les parlementaires américains ne s’y sont pas opposés, les députés iraniens l’ont accepté. S’ouvre donc en octobre 2015 une période de dix années, en quatre étapes, de mise en application des accords signés. L’Iran recouvre progressivement son rôle de leader régional. Il participe à la conférence de Vienne sur la Syrie.

L’empire du Milieu à l’heure du ralentissement économique

Après une glorieuse décennie avec un taux de croissance économique à deux chiffres et une insolente santé quand l’Occident était frappé par la crise des subprimes, la Chine connait un ralentissement assez marqué. Pékin annonce une croissance de 6,9% pour le troisième trimestre 2015, inférieure au 7% prévus et un des plus mauvais score depuis 2009. La Chine doit de plus en plus compter sur sa consommation domestique – comme les pays les plus avancés – car la demande des pays occidentaux est morose depuis plusieurs années. On peut pourtant s’interroger sur la véracité des chiffres – comme très souvent – certains économistes évaluent la réalité de la croissance chinoise autour de 5% - pour la Coface - 4% pour les économistes japonais.

Ce ralentissement économique de la Chine – son « atterrissage » - pèse sur les performances de l’économie mondiale, et en particulier sur celles des pays émergents qui lui vendent beaucoup de matières premières. Elle explique aussi en partie la décrue du prix des matières premières et des hydrocarbures – alors que le marché est devenu offreur avec les huiles et gaz de schistes.

Cela n’empêche pas les firmes chinoises CGN et CNNC de s’associer au projet d’EDF d’un réacteur EPR à Hinkley Point au Royaume Uni. Une première.


La Chine met fin à la politique de l’enfant unique

Cette politique mise en oeuvre par Deng Xaoping au début des années 1980 est une restriction sur les libertés individuelles particulièrement dure : campagne de stérilisation, avortements forcés, les « enfants noirs » non déclarés et donc non scolarisés ou soignés... et un déséquilibre du sex-ratio très marqué en défaveur des filles.

Cette Chine loin des vertiges de la puissance économique vous salue ©Courmont

400 millions de naissances auraient été « évitées », mais la Chine devient vieille avant d’être riche. La démographie sera son talon d’Achille car outre son vieillissement, la réduction progressive de la population active amènera mécaniquement une augmentation du coût de la main d’œuvre. Il y a deux ans cette politique a déjà été assouplie mais sur les 11 millions de familles qui auraient pu en profiter seulement 700 000 ont exercé ce nouveau droit : le coût d’un second enfant est prohibitif notamment dans les grandes villes.

L’enfant unique serait devenue une norme acceptable... Cette décision n’aura pas d’effet avant 20 ans si tant est que cette politique porte ses fruits.

Les retrouvailles familiales en Corée

Près de 200 familles sud-coréennes ont pu se rendre quelques heures en Corée du Nord pour retrouver les leurs dont elles sont séparées depuis la guerre de Corée. Des retrouvailles symboliques et très fortement chargées en émotions, les premières depuis trois ans.

La grande pauvreté recule

La Banque mondiale estime que l’ « extrême pauvreté » - vivre avec moins de 1,25 dollars par jour - recule passant de 902 millions d’individus en 2012 à 702 en 2015, malgré la croissance démographique. L’organisme relève d’ailleurs son seuil d’extrême pauvreté de 1,25 à 1,90 dollars par jour. Une nouvelle porteuse d’espoir.

Copyright Novembre 2015-Degans/Diploweb


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