Professeure de chaire supérieure au lycée Faidherbe (Lille) où elle enseigne la géopolitique en classes préparatoires économiques et commerciales. Membre du laboratoire HABITER (EA 2076) de l’Université Reims Champagne-Ardenne. Elle est notamment co-auteure chez Ellipses de Histoire, Géographie, Géopolitique. Concours d’entrée aux grandes écoles, Coll. Atout concours, Paris, 2015 ; et Un monde multipolaire. Géopolitique et géoéconomie, Coll. CQFD, Paris, 2014.
Une synthèse de l’actualité internationale de janvier 2016 qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique ou préparent des concours. Pour ne rien manquer, le mieux est de s’abonner gratuitement à notre Lettre d’information.
ISTANBUL a été endeuillée par une attaque suicide qui a causé la mort d’une dizaine de personnes – principalement des touristes allemands – non loin de la basilique Sainte-Sophie. C’est le troisième attentat en Turquie depuis l’automne 2015, cette fois-ci il touche un secteur économique vital pour le pays : le tourisme.
L’Indonésie a, elle aussi, été touchée par une série d’attentats suicides à Jakarta, la capitale. Un kamikaze s’est fait exploser en Libye, à Zliten, tuant une soixantaine de personnes. La capitale burkinabaise, Ouagadougou, a été le siège d’une attaque terroriste. Les jihadistes, qui se revendiquent d’Aqmi, ont attaqué un hôtel causant la mort 29 personnes. On peut estimer qu’Aqmi –affilié à Al-Qaida – répond ici aux coups de force de Daech à Deir ez-Zor en Syrie. Au Pakistan, les talibans ont assassiné 21 personnes dans une université du Nord-Ouest du pays, régions que les autorités ne contrôlent pas vraiment.
La Suède a rétabli les contrôles d’identité à sa frontière avec le Danemark dans la région de l’Oresund pour lutter contre les flux de réfugiés. La Suède – qui compte moins de 10 millions d’habitants – estime qu’après avoir accueilli 163 000 demandeurs d’asile, elle a atteint son seuil de tolérance. Le Danemark prend la même mesure pour sa frontière avec l’Allemagne.
La nuit de la Saint-Sylvestre a été dans plusieurs villes d’Allemagne – dont Cologne et Hambourg – l’occasion de violences sexuelles de masse perpétrées par des bandes de jeunes qui viennent d’arriver sur le sol allemand, plus de 700 femmes ont porté plainte. L’inaction de la police à Cologne, le fait que les autorités aient choisi de cacher l’information – à l’heure des réseaux sociaux et d’Internet – pour éviter une stigmatisation des migrants comme la gravité des faits ont profondément choqué l’opinion publique allemande. Cela contribue, bien au contraire, à réclamer un changement concernant la politique migratoire menée par Madame Merkel quand le pays accueille plus de 3 200 migrants chaque jour, soit environ 1,2 millions pour 2015 contre 200 000 en 2014. L’Allemagne refoule des migrants vers l’Autriche.
Un camp de conteneurs s’est ouvert à Calais pour 4 000 migrants en attente d’un passage pour l’Angleterre. La maire de Calais comme le nouveau président de la région Nord-Pas-de-Calais-Picarde réclament un renfort de l’armée.
La politique de relocalisation décidée par l’Union européenne est déjà un échec sur les 160 000 prévus, seules 272 ont été réalisées !
Le Danemark vient de voter une loi visant à confisquer l’argent des réfugiés pour participer à leurs frais de séjour. Il s’agit d’un signe fort pour les inciter à rester en deçà de la frontière danoise. Vienne qui a accueilli 90 000 réfugiés en 2015, n’en veut pas plus de 37 500 pour 2016, la Grèce ne veut pas devenir une prison à ciel ouvert...
Plus pour réussir
Extraits du catalogue des livres géopolitiques publiés par Diploweb pour la réussite aux concours.
. A. Degans, "Réussite aux concours 2018 ! La synthèse de l’actualité internationale 2017"
. L. Chamontin, "Ukraine et Russie : pour comprendre"
. G-F Dumont, P. Verluise, "The Geopolitics of Europe : From the Atlantic to the Urals"
Un rapport de novembre 2015 épingle sévèrement la gestion de la crise migratoire par la Grèce, affirmant qu’elle a « sérieusement négligé ses obligations et qu’il y a de graves déficiences aux frontières extérieures ». Réunis à Amsterdam, les ministres européens de l’Intérieur sont prêts à rétablir les contrôles aux frontières internes, l’article 26 permet de le faire en cas de « circonstances exceptionnelles » ou du fait de « manquements graves », un des grands chantiers des Pays-Bas qui viennent de prendre la présidence tournante de l’Union. Un nouveau Grexit en perspective, alors que Londres agite un possible Brexit, et que Varsovie est mis à l’Index ? Rien ne va plus... Jean-Claude Juncker affirme qu’il reste deux mois pour régler cette question migratoire... L’Union européenne, son modèle, son idéal sont puissamment remis en question en ce début d’année 2016.
Le nouveau gouvernement polonais de Beata Szydlo vient de voter une loi qui restreint fortement l’autonomie des médias du pays et s’en prend à la liberté de la Justice, imitant en cela des mesures déjà prises en Hongrie par le gouvernement de Viktor Orban. Bruxelles a réagi en menaçant de les « mettre sous surveillance » à cause des atteintes à l’Etat de droit. Pour autant, la Hongrie pourrait mettre son veto à une sanction visant la Pologne, et réciproquement. Il semble difficile de se fâcher avec Varsovie et Budapest, quand on propose d’ouvrir de nouveaux chapitres de négociation d’adhésion à un gouvernement en pleine dérive autoritaire comme celui d’Erdogan. Cela aussi les gouvernements polonais et hongrois le savent.
Les membres de l’ASEAN lancent au 1er janvier 2016 l’AEC, une communauté économique de l’ASEAN, dont l’objectif est de parvenir à un marché unique où circuleraient librement les biens, les capitaux et les travailleurs. Les obstacles restent nombreux, dont le moindre n’est pas l’absence d’un vrai leader. Le vrai dominateur commun est de faire pièce à la Chine dont l’émergence n’apparait pas vraiment « pacifique » à ses voisins. Les dix membres de l’ASEAN (Birmanie, Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam) représentent 620 millions de personnes et une croissance économique robuste (4,9%), mais les disparités sont fortes.
Pyongyang annonce avoir procédé à un nouvel essai nucléaire, cette fois-ci grâce à une bombe H. Les sismographes ont effectivement enregistré un séisme artificiel d’une magnitude de 5,1, par contre sa nature reste mystérieuse. De nombreux experts estiment que la Corée du Nord n’a pas la maitrise de la bombe H, la condamnation est néanmoins internationale et unanime. Son principal allié, la Chine, le condamne, mais cette alliance reste valide.
Les bourses de Shanghai et Shenzhen ont été fermées à deux reprises pour éviter un effondrement des cours boursiers. Les mauvais chiffres de l’activité manufacturière ont inquiété les investisseurs.
En 2015, la Chine a investi tout particulièrement dans les médias. Après avoir racheté, en 2012, la chaine de cinéma AMC, la Dalian Wanda a racheté l’américain Legendary Entertainement – qui a produit Jurassic world comme le dernier Batman - ainsi que le Suisse Infront. Un consortium chinois a acquis 13% du club de Manchester City... Le début d’un soft power ?
© Photo Barthélémy Courmont
Parade à Keelung, dans le nord de Taiwan, à l’occasion de la fête des lanternes, une tradition originaire du continent. Extrait d’un reportage de B. Courmont.
Tsai Ing-Wen remporte les élections présidentielles taïwanaises – avec 56% des voix - sur fond de morosité économique et de croissance des inégalités. Elle devra trouver le moyen de redynamiser la croissance économique et propose de miser sur l’innovation, le numérique comme les biotechnologies. Ces élections sont historiques car elles ont amené la victoire du parti séparatiste (DPP) qui refuse le retour dans le giron de Pékin. Pékin rappelle qu’il n’y a qu’une seule Chine.
L’Arabie saoudite a procédé à 47 exécutions, notamment de jihadistes mais aussi du cheikh Nimr Baqr Al Minr, un dignitaire de la communauté chiite saoudienne. Cette exécution a provoqué l’ire de Téhéran, des mouvements de foules dans toutes les communautés chiites de la région, ainsi l’ambassade saoudienne à Téhéran a été attaquée par des manifestants. Cette attaque a été condamnée par les différentes pétromonarchies du Golfe, le tout se joue sur fonds d’une décrue significative du cours du brut. Comment comprendre ces exécutions ? Le cheikh Nimr Baqr Al Minr, bien que très critique vis-à-vis de la politique du royaume saoudien n’appelait pas à la violence. On peut probablement comprendre son exécution pour « compenser », auprès de sunnites, celles des jihadistes. Riyad envoie un signal fort aux sunnites, et à Daech.
Avec un baril de pétrole à moins de 30 dollars, les comptes publics des pays exportateurs passent dans le rouge. La Russie doit baisser ses dépenses publiques et envisage de privatiser en partie Rosneft. L’Arabie saoudite pense à vendre en partie l’Aramco.
Riyad réfléchit sérieusement à coter en bourse la Saudi Aramco, a fait savoir le prince héritier Mohammed ben Salmane. La Saudi Aramco produit chaque jour plus de 11 millions de barils équivalent pétrole et s’appuie sur des réserves de pétrole estimées à 267 milliards de barils ce qui en fait la plus importante société pétrolière du monde... et donc la plus chère probablement des « milliers de milliards de dollars ». Alors pourquoi envisager de se séparer partiellement de ce qui apparait comme la poule aux œufs d’or, alors que les autres Etats la conservent jalousement ? La baisse du cours du pétrole est responsable d’un déficit budgétaire qui atteint 19% pour le royaume saoudien, au moment où les tensions internes et régionales sont très fortes.
Le Sud-Est de la Turquie a été le théâtre d’une nouvelle tuerie. Les forces turques ont tué 32 combattants kurdes, démontrant qu’Ankara ne se concentre pas que sur Daech.
La Libye est déchirée par la guerre civile à l’image de ses deux gouvernements. Le parlement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale, est soutenu par l’Egypte comme les Emirats arabes unis. Le gouvernement de Tripoli des Frères musulmans est soutenu par la Turquie, le Qatar et plusieurs milices sur place. Daech s’est implanté à Syrte depuis laquelle est menée la conquête de la région pétrolifère, il contrôle désormais le port de Ben Jawad.
La Tunisie a établi une fragile démocratie, des élections se sont tenues en 2014, une coalition- Nidaa Tounès et Ennahda – est au pouvoir. La situation économique dégradée, près d’un jeune sur trois est au chômage, et les attaques régulières des jihadistes font régner un climat d’insécurité préjudiciable. A Kasserine, les manifestants demandent « du travail, des libertés, de la dignité ». L’armée a repris le pouvoir en Egypte, la Syrie, la Libye et le Yémen sont en proie à la guerre. Les fruits des révoltes arabes sont pour l’instant amers.
Le pays de la « révolution bolivarienne » est en pleine crise économique, victime d’une économie de rente, d’une évolution régressive au niveau de la diversification économique, le pays est en plein marasme du fait de la décrue – près de 60% en 2015 - du prix de l’or noir, la récession aurait atteint 10% en 2015, l’inflation presque 80%. La situation politique n’est pas réellement meilleure. Le Parlement est aux mains de l’opposition à Nicolas Maduro, un climat de fortes tensions s’est déjà installé entre la présidence et le Parlement dirigé par Henry Ramos. La question qui se pose au Venezuela est comment sortir du chavisme, l’expulsion d’environ 10 000 Colombiens accusés de mener une guerre économique responsable – aux yeux de Caracas – du marasme du pays n’est que de la gesticulation.
En 2015, les Etats-Unis ont créé quelques 2,7 millions d’emplois, le taux de chômage a ainsi retrouvé la barre de 5%, mais les salaires restent faibles (le salaire minimum est à 7,25 dollars de l’heure), 20% des Américains vivent sous le seuil de pauvreté ou à son voisinage.
Les Etats-Unis sont en pleine révolution énergétique, ce qui soutient la croissance comme les emplois. Ils commencent à exporter du gaz naturel grâce à leur nouveau terminal de Sabine Pass.
La France compte 66, 6 millions d’habitants au 1er janvier 2016, c’est le deuxième pays le plus peuplé de l’Union européenne derrière l’Allemagne (81,2 millions) mais devant le Royaume Uni (64, 8 millions). L’année 2015 est remarquable à deux égards, malheureux. Le premier est la recrudescence de la mortalité, une première depuis les années 1960. Le second n’est pas moins inquiétant, il s’agit d’une baisse de la natalité de 2,3% en 2015 (-19 000 par rapport à 2014). Certes dans un continent entré en « hiver démographique » (G-F Dumont), la France semble tenir son rang avec une fécondité de 1.96 enfants par femme, mais on s’éloigne du seuil de renouvellement des générations, la France vieillit... une mauvaise nouvelle. Comment expliquer ce retournement de conjoncture démographique, alors que la France parvenait à maintenir une fécondité à 2 enfants par femme jusque 2014 ? La faute à la situation économique dégradée ? Mais est-elle vraiment pire qu’en 2013 ? Moins de personnes en âge d’avoir des enfants ? La nouvelle politique familiale – rabot du quotient familial pour les impôts, baisse des prestations de garde, et conditionnement des allocations familiales – a probablement envoyé un signal anxiogène aux familles. La France serait-elle en train de perdre une de ces exceptionnalités les plus positives ?
Les Etats-Unis et l’Union européenne viennent de lever leurs sanctions contre l’Iran qui a procédé à un échange de prisonniers avec Washington. Des dizaines de milliards de dollars d’avoirs iraniens vont être dégelés, alors que Téhéran prévoit de renforcer sa production pétrolière. L’Iran apparait comme un pays avide de s’équiper et de se moderniser : une aubaine pour les grandes sociétés aussi bien occidentales que chinoises.
En visite officielle en Inde, le président François Hollande a promis que la France investirait dans les infrastructures de la plus grande démocratie du monde, notamment dans les « smart cities » - villes durables- de Chandernagor, Pondichéry et Nagpur. Une sérieuse option est mise pour la vente de 36 Rafales (peut-être 10 milliards d’euros), il reste à négocier les contreparties financières et technologiques.
Le président iranien Hassan Rohani, en visite à Paris, a commandé 114 Airbus (des A320, A321, des A330 et 16 A350 12 A380) pour moderniser sa flotte aérienne. Les entreprises de BTP Vinci, ADP et Bouygues vont participer à la modernisation d’aéroports (comme celui d’Ispahan) quand PSA y investira bientôt 200 millions d’euros et que Total achètera 150 à 200 000 barils par jour.
L’Allemagne d’Angela Merkel s’enorgueillit d’une croissance de 1,7% pour 2015, un taux de chômage inférieur à 5% et un excédent budgétaire de 12 milliards d’euros. L’Allemagne vient de connaitre une « décennie dorée ».
Outre-manche, la croissance économique serait de 2,7% pour 2015 et le taux de chômage autour de 5,1%, par contre les salaires progressent peu. Ainsi, 300 000 emplois ont été créés en seulement trois mois, et 800 000 sont restés vacants ; cette donne explique la pression migratoire à Calais.
L’année 2015 a été particulièrement favorable aux producteurs de champagne qui ont vendu pour environ de 4.75 milliards d’euros. La France absorbe la moitié de la production, le Royaume Uni et les Etats-Unis demeurent de très importants marchés, ceux du Japon et de l’Australie sont en expansion.
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