En à peine quinze ans, le Brésil est sorti de la périphérie pour devenir un acteur influent et extraordinairement visible sur la scène internationale. Cet article retrace cette transformation et explore les fonds et les contradictions de celle-ci.
Dans le cadre de ses synergies géopolitiques, le diploweb.com est heureux de vous présenter un article de Jean Daudelin, "Le Brésil comme puissance : portée et paradoxes", publié dans la revue Problèmes d’Amérique latine, n°78, automne 2010, Paris, Choiseul, pp. 29-46
EN AVRIL 2010, la revue américaine Time proclamait le président brésilien, Luiz Inácio Lula da Silva, l’homme le plus influent au monde [1]. En juin, aux côtés de la Turquie, le Brésil défiait les membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU en votant contre de nouvelles sanctions à l’Iran pour son programme nucléaire. Quelques jours plus tard, à Toronto, dans le cadre de la réunion du G20 des chefs d’État, c’est avec l’Inde et le Canada que le Brésil s’opposait aux tentatives euroaméricaines d’imposer une taxe aux institutions financières qui feraient payer à leurs banques les excès de leurs consœurs d’Europe et des États-Unis. Ces manifestations récentes du prestige de Lula et de l’assurance de sa diplomatie n’avaient de neuf que les détails, car le Brésil jouait déjà depuis quelques années dans la cour des très grands.
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La mise en échec du projet américain de zone de libre-échange des Amériques, en 2005, et, un peu plus tard, celle d’un nouvel accord commercial dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce furent largement attribuées à l’activisme du Brésil et à sa capacité de fédérer l’opposition des pays du Sud à des accords perçus comme trop favorables aux économies développées. Lors du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique, en décembre 2009, le Brésil était au centre des négociations, avec la Chine, l’Inde et les États-Unis, qui ont permis à tout le monde de sauver la face par le biais d’une entente minimaliste. Dernière des grandes économies à entrer en récession lors de la crise financière de 2008-2009, le Brésil est aussi la première à en sortir, enregistrant même, au premier trimestre de 2010, un taux de croissance de 8,4% [2], digne de celui de la Chine. Peu après son élection et encore au faîte de sa popularité, Barack Obama lui-même a cherché, lors du sommet des Amériques de Trinidad et Tobago, en avril 2009, à tirer un peu vers lui l’énorme légitimité de Lula, en affirmant lors de leur première rencontre publique que le Brésilien était « son homme [3] ».
Il n’y a pas si longtemps encore, pourtant, le Brésil ne faisait la une des journaux qu’en période de Coupe du monde de football ou parce que ses taux d’endettement, d’inflation ou d’homicides battaient des records. La position du gouvernement sur les grandes questions internationales suscitait une large indifférence, et on se souciait peu de ses présidents dans les arènes internationales. Le pouvoir dont disposaient les négociateurs brésiliens dans les cercles financiers découlait alors du danger de ce qu’une suspension du service de la dette représentait pour les banques occidentales, la Banque mondiale et le FMI.
En arrière-plan pourtant, les choses changeaient au Brésil et dans le monde et, au tournant du siècle, pratiquement du jour au lendemain, le géant sud-américain est devenu un interlocuteur difficilement contournable pour les grandes puissances, un allié recherché des petits et des moyens pays dans les grandes négociations multilatérales et à l’ONU, une destination privilégiée pour les investisseurs, un partenaire fiable pour les institutions financières internationales, et le plus important point d’ancrage de la stabilité économique et stratégique de l’Amérique du Sud. Les diplomates brésiliens sont de tous les conciliabules, du G4 au G77, en passant par les G20 et autres « clubs » par lesquels les États du monde tentent actuellement de gouverner celui-ci. Surtout, le président Lula est de tous les sommets, le premier chef politique dont à la fois les stars et les millionnaires de Davos et les organisations populaires réunies à Porto Alegre réclament la présence. À côté de lui, Barack Obama et les chefs d’État européens semblent souvent faire figure de politiciens locaux, débordés par leurs problèmes intérieurs et apparemment incapables de sortir de leur arrière-cour.
Cet article propose un état des lieux du Brésil comme puissance, identifiant les traits marquants de son influence internationale actuelle, explorant ensuite les fondements structurels et conjoncturels de celle-ci, avant d’examiner les limites de ce que les analystes brésiliens appellent la projection globale de leur pays. Il examine donc la politique étrangère du point de vue du monde, pourrait-on dire, plutôt que de celui du Brésil. Avec toutes les limites d’une analyse de conjoncture, nous tenterons de montrer que l’émergence du Brésil comme puissance n’est pas une illusion, mais qu’elle est fondée sur des changements profonds et durables de l’environnement international, de l’économie politique du Brésil et de l’enchâssement de celui-ci dans celle-là. Le portrait dressé identifie toutefois des lignes de tensions et des faiblesses qui imposent des limites assez significatives à l’influence que le Brésil est susceptible de pouvoir revendiquer avec succès au cours des années qui viennent.
« Brasil Potência » était le slogan de la dictature militaire au début des années 1970 [4], pendant sa période la plus répressive. Paradoxalement, le Brésil de l’époque était largement autocentré. Les militaires avaient bien évidemment une politique étrangère et même, sous Geisel (1974-1979), quelque chose comme une doctrine en la matière, laquelle fut appelée « le pragmatisme responsable » et qui prétendait à une autonomie certaine à l’égard des États-Unis sans toutefois verser dans la dissidence géostratégique [5]. Pourtant, si les prises de position de l’exécutif jouaient un rôle dans la gestion de la coalition militaire [6], leur impact sur le monde extérieur était marginal.
Jusqu’à l’élection de Fernando Henrique Cardoso (1994-2002), et malgré la volonté affirmée de Fernando Collor de Melo (1989-1991) de faire accéder le Brésil au « premier monde [7] », les dirigeants du Brésil démocratique s’engagèrent assez peu dans l’arène internationale, si ce n’est sur la question de l’Amazonie et, dans ce cas, pour des raisons essentiellement défensives [8]. Une confluence de facteurs rendait cette indifférence à l’endroit du monde à la fois sensée et possible. Confronté à une économie chaotique et forcé de composer avec un Congrès fragmenté et peu coopératif, l’exécutif laissa aux diplomates la gestion d’un environnement international bénin, particulièrement dans une Amérique du Sud bien engagée dans la démocratisation et où les tensions internationales étaient minimales. Seul le vieux dossier argentin méritait une attention particulière, qu’il reçut d’ailleurs, la vieille rivalité faisant place à une coopération authentique touchant d’abord les questions nucléaires et de sécurité, pour s’étendre ensuite au commerce, avec le lancement du Mercosur, en 1991.
Dans un premier temps, en somme, c’est moins la démocratisation du pays que la stabilisation de l’économie induite par le Plan Real, en 1994 [9], qui semble fonder l’émergence du Brésil comme puissance. Depuis lors, la présence internationale du Brésil, son prestige et son influence ne cessent de croître tant dans les Amériques que dans le reste du monde.
Bien qu’un peu trompeuse historiquement, l’idée que la puissance du Brésil s’est diffusée progressivement de sa région immédiate vers l’ensemble de la planète n’est pas complètement fausse. Nous l’utiliserons dans les pages qui suivent pour organiser la formidable prolifération des initiatives de politique étrangère du Brésil au cours des dernières années.
Par un hasard de l’histoire et de la géographie, le Brésil partage des frontières avec tous les pays d’Amérique du Sud, hormis l’Équateur et le Chili. Les préoccupations stratégiques de ses élites politiques et militaires s’organisent de longue date autour de l’Amazonie dans le Nord et l’Ouest, et de l’Argentine au sud. Et c’est en grande partie par le biais d’un rôle actif au sein d’une pléiade de mécanismes de coopération multilatérale que l’on a géré l’environnement immédiat du pays. L’essentiel de ces mécanismes a surgi depuis le début des années 1990.
Bien que centrale pour la politique de défense du pays et pour son image de marque internationale, l’Amazonie a été le parent pauvre de la diplomatie brésilienne. Certes, le Traité de coopération amazonienne de 1978 s’est vu donner pour la première fois, en 2002, un secrétariat permanent, basé à Manaus [10], mais ni le Brésil ni ses voisins ne semblent vouloir construire sur cette base un système plus ample de collaboration régionale. De fait, les tensions entre pays « amazoniens », particulièrement entre, d’un côté, la Colombie et, d’un autre côté, l’Équateur et le Venezuela, ainsi qu’entre le Venezuela et la Guyane, ont été gérées dans le cadre plus large d’institutions et d’arrangements sud-américains (cf. infra).
Celles-ci, pour l’essentiel à l’initiative du Brésil, s’organisent autour d’une relation avec l’Argentine qui est centrale depuis l’indépendance du pays et sur laquelle la diplomatie brésilienne a construit depuis la fin des années 1980 une série de cercles concentriques. Le Mercosul (Marché commun du Sud), lancé en 1991 avec l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay, devrait bientôt [11] inclure le Venezuela, et compte la Bolivie et le Chili comme membres associés. À ce groupe, et encore une fois à l’initiative du Brésil, l’UNASUR (l’Union des nations du Sud) ajoute les pays andins, ainsi que la Guyane et le Surinam pour former officiellement, en 2008, une organisation prétendant intégrer l’ensemble du sous-continent américain, et dotée non seulement d’un secrétariat mais aussi d’un Conseil de défense et, bientôt, d’un parlement.
Au-delà de l’hémisphère Sud, la diplomatie brésilienne s’est appuyée sur le Groupe de Rio, formé en 1986 comme mécanisme de consultation entre les gouvernements membres du Groupe de Contadora (et ceux de son groupe d’appui), tous deux mis sur pied pour organiser les positions de plusieurs pays d’Amérique centrale, des Caraïbes et d’Amérique du Sud face aux guerres civiles centroaméricaines et à l’engagement des États-Unis dans celles-ci. Lors de son dernier sommet, à Playa del Carmen au Mexique, en février 2010, ses membres ont annoncé sa transformation en une Communauté des États latino-américains et caribéens (CALC) réunissant tous les États des Amériques, à l’exception du Canada et des États-Unis.
Outre ces mécanismes, le Brésil est bien sûr aussi un membre influent de toutes les composantes de l’infrastructure institutionnelle interaméricaine, centrée sur l’Organisation des États américains et sur la Banque interaméricaine de développement, mais incluant aussi des arrangements de coopération militaire – Junte interaméricaine de défense – et sanitaire – Organisation panaméricaine de la santé – passablement développés.
La diplomatie brésilienne, enfin, professionnelle et déjà bien organisée depuis la seconde moitié du XIXe siècle, a intensifié sa présence dans la région par les déplacement de plus en plus fréquents de ses ministres des Affaires étrangères successifs et, surtout, par l’engagement croissant du président du pays, évoluant depuis 1994, sous Cardoso, d’un activisme certain, nouveau dans le contexte brésilien, à ce qu’il faut bien appeler l’hyperactivité de Lula, tant dans la région que dans le monde.
Au cœur de cette toile de plus en plus dense d’arrangements plus ou moins formels de coopération, de dialogue et de coordination, le Brésil s’impose comme un joueur clé dans pratiquement toutes les initiatives internationales qui affectent le continent, agissant rarement seul et mobilisant plutôt l’un ou l’autre de ces arrangements ou leur adjoignant, au besoin, des acteurs extrarégionaux, qu’il s’agisse des États-Unis ou d’États européens.
Le rôle du Brésil est surtout visible dans le cas des crises politiques qui, depuis 2000 en particulier, se multiplient dans la région. Au Venezuela, en 2002, face au putsch qui renverse brièvement Hugo Chávez, les Brésiliens organisent la dénonciation du coup d’État par les États d’Amérique du Sud, alors que les États-Unis et le Canada tergiversent. En 2003, lorsque Caracas est le théâtre d’affrontements violents entre l’opposition et le gouvernement, c’est cette fois avec les États-Unis qu’ils mettent sur pied un Groupe d’amis du Venezuela, incluant aussi le Chili, le Mexique, le Portugal et l’Espagne, qui tente de concilier les parties. En 2004, l’intervention de Lula et l’envoi à Haïti d’une mission onusienne dirigée par le Brésil viennent légitimer le coup d’État franco-américain contre Jean-Bertrand Aristide. En 2005, le ministre des Affaires étrangères Celso Amorim fait la navette entre Brasilia et La Paz pendant que s’affrontent les partisans du président Evo Morales et les autonomistes des régions productrices de gaz de l’Est du pays qui se trouvent près de la frontière du Brésil et dont le gaz alimente São Paulo. Les crises de 2008 et 2009 entre la Colombie et ses voisins équatoriens et vénézuéliens, qui suivent la violation de la frontière équatorienne par des troupes colombiennes et la signature d’un accord permettant l’usage de bases aériennes colombiennes par des troupes américaines, sont de même désamorcées par Lula et ses diplomates, dans le cadre de l’UNASUR. Enfin, depuis le renversement de Manuel Zelaya au Honduras, en juin 2009, le Brésil est au cœur des négociations concernant, selon les différents moments, son retour immédiat, la tenue et la reconnaissance des élections présidentielles qui ont suivi le coup d’État, la reconnaissance du nouveau gouvernement, les conditions de sa réintégration au sein de l’Organisation des États américains, et, tout récemment, celles du retour définitif de Zelaya dans le pays.
Pendant la même période, la politique commerciale de la région a tourné autour d’accords bilatéraux entre les États-Unis, le Canada et certains pays andins, caribéens et centraméricains, et surtout du projet de création d’une zone de libre-échange couvrant l’ensemble de l’Amérique (ZLEA). Ce projet, porté par les États-Unis et le Canada, le seul par définition sur lequel le Brésil ait prise, inquiétait aussi fortement son gouvernement, puisqu’il risquait de marginaliser le Mercosur et d’articuler l’ensemble du continent au marché nord-américain. Une diplomatie brésilienne pugnace et mobilisant toutes les alliances disponibles – confrontée il est vrai à un gouvernement américain en fin de compte peu intéressé à « payer » quoi que ce soit en retour des concessions qu’il exigeait – réussit en bout de ligne à mettre l’entreprise en échec.
Au cours des dix dernières années certes le Brésil n’était pas le seul « entrepreneur » politique sur le continent. En attestent les relations militaires étroites entre les États-Unis et la Colombie, les accords bilatéraux mentionnés plus haut et la mise sur pied par le Venezuela d’une alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA), l’unissant entre autres à Cuba, au Nicaragua, à la Bolivie et à l’Équateur. Mais ni les États-Unis ni le Venezuela ne peuvent revendiquer la même prééminence que le Brésil : leurs jeux d’alliances sont nettement plus étroits et, surtout, ils ont souvent eux-mêmes partie liée aux tensions et aux crises qui secouent le continent, ce que le Brésil a réussi à éviter.
Une dynamique similaire s’est produite au niveau global, le Brésil « émergeant » rapidement pour devenir une présence constante dans les grandes arènes internationales et un participant indispensable dans un nombre croissant de processus de négociations multilatérales.
Les indicateurs de cette émergence sont légion. Absent du Conseil de sécurité de l’ONU pendant vingt ans, de 1968 à 1988, le Brésil est depuis lors avec le Japon le pays du monde qui occupe le plus régulièrement un poste de membre non permanent en son sein avec cinq mandats de deux ans en un peu plus de vingt ans. Plus remarquable, encore, la position du Brésil au Fonds monétaire international a changé drastiquement en à peine plus de dix ans, le pays passant de débiteur massif et peu fiable au milieu des années 1980, à créditeur en 2010 [12] et, surtout, à demandeur insistant de réformes qui remettraient en cause l’emprise occidentale sur l’organisation.
Cela dit, la rigidité du système onusien et des grandes institutions financières internationales font en sorte que la position d’un pays en leur sein reflète mal l’influence qu’il exerce dans le monde. Pour prendre la mesure de cette dernière, il faut examiner les grandes arènes de négociations internationales, les « clubs [13] » et les sommets au sein desquels se discutent les problèmes du monde, ainsi que les petits regroupements ad hoc qui prennent en main les problèmes les plus aigus.
De tous ces points de vue, le Brésil est passé depuis dix ans, et tout particulièrement depuis l’élection de Lula, d’une marginalité presque totale à une remarquable centralité. Peu de questions globales peuvent aujourd’hui être abordées sérieusement, et peu de problèmes réglés, sans que le Brésil ne soit autour de la table.
À titre d’exemple, l’échec de l’accord de Doha, en 2008, s’est joué en fin de compte dans le cadre restreint d’une négociation impliquant, outre les États-Unis et l’Europe, non pas le Japon ou même la Chine, mais plutôt le Brésil et l’Inde. Lors de la conférence de Copenhague sur le climat, c’est dans le cadre d’une réunion impliquant la Chine, l’Inde et le Brésil, mais à laquelle Barack Obama dut s’imposer [14], qu’un accord – aussi bancal soit-il – fut forgé. Le Brésil, enfin, occupe une place centrale au sein du G20 des ministres des Finances et surtout de celui des chefs d’État, ce regroupement qui a déplacé le G8 comme gestionnaire de l’économie mondiale, la crise financière de 2008-2009 ayant détruit la crédibilité des grands États capitalistes et sévèrement miné leur capacité d’action.
Si la montée en puissance du Brésil est constante depuis l’arrivée de Cardoso au pouvoir, l’inflexion de son engagement a changé substantiellement sous Lula, particulièrement à partir du début de son second mandat, en 2006. Dans un premier temps, en effet, c’est clairement aux clubs des démocraties capitalistes, du G8 à Davos, que le Brésil aspirait et au sein desquels il gagnait du prestige et de l’influence. Lula, arrivant au pouvoir dans un climat d’incertitude face à l’orthodoxie de ses engagements économiques, ne remit d’abord pas en cause cette orientation, au grand soulagement des grandes banques occidentales, des gouvernements du Nord et des institutions financières internationales. Porté aux nues par le FMI et les grandes publications financières, il devint à leurs yeux le poster boy d’une gauche modérée, démocratique et « sérieuse », le représentant d’un Sud sympathique dont les prétentions, les discours et l’ascension, à la différence de ceux du Venezuela, de l’Iran ou de la Chine, étaient dénués de toute menace [15].
L’accès aux clubs occidentaux acquis, l’inflexion changea toutefois, et la place du Sud et de ses préoccupations gagnèrent de l’espace dans les discours, les positions internationales du Brésil et surtout dans les jeux d’alliance qu’il promouvait.
De longue date, dans le cadre des grandes négociations commerciales, le Brésil jouait un rôle important au sein du G77, le groupe des pays en développement. Mais cet engagement est en décalage marqué avec sa participation au Groupe de Cairns, regroupant les grands exportateurs de produits agricoles, et surtout à son entrée dans les clubs informels les plus sélects de l’OMC où, clairement, ses diplomates ne défendent que les intérêts de leur pays. C’est donc ailleurs que le nouveau tiers-mondisme de la politique étrangère de Lula se déploie.
D’une part, la traditionnelle politique africaine du Brésil se fait plus agressive, avec des visites fréquentes et nombreuses de Lula dans la région, qui s’ajoutent à son activisme plus traditionnel au sein de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP). Le Brésil est par ailleurs la cheville ouvrière de sommets entre l’Amérique latine et les pays arabes (ASPA), ainsi qu’au cœur du lancement d’un forum de coopération entre l’Amérique latine et l’Asie de l’Est (FOCACAL).
Au-delà de ce tiers-mondisme des petits, toutefois, c’est probablement l’engagement du Brésil dans les efforts d’articulation des grandes puissances non occidentales qui fait l’originalité de la politique de Lula. Certains de ces efforts semblent plus structurés, tel le forum Inde-Brésil-Afrique du Sud (IBSA), lancé à Brasília en 2003 et dont les sommets de chefs d’État – le plus récent en avril 2010 – ont mené à des accords de coopération économique et technique bi- et trilatéraux et à la mise sur pied de divers groupes de travail et fora thématiques. Les sommets des BRIC – une initiative russe reprenant l’acronyme créé par la banque d’affaires Goldman Sachs [16] – inaugurés en 2009 (Iekaterinbourg, novembre) et repris par le Brésil (Brasilia, avril 2010), manifestent aussi une volonté de dialogue et de coordination dans des instances qui échappent à l’initiative occidentale [17]. Plus récemment, et plus spectaculairement aussi, on a vu le Brésil se montrer compréhensif à l’endroit des aspirations nucléaires de l’Iran et se poser, avec la Turquie, comme médiateur global entre ce pays et le reste du monde, dont en particulier les États qui dominent le Conseil de sécurité de l’ONU [18].
Ce portrait déjà long demeure partiel. Le Brésil est aussi au cœur du dialogue, des négociations commerciales et de la coopération entre l’Europe et l’Amérique latine. Ses réserves pétrolières, dont l’ampleur est chaque semaine révisée à la hausse, font déjà penser à plusieurs analystes que, bientôt exportateur net de pétrole, il pourrait aussi joindre l’OPEP. On le voit, l’impression que les Brésiliens, Lula en tête, sont maintenant partout et que ce qu’ils font dans le monde compte plus que jamais auparavant n’a rien de trompeur. Avant de discuter la portée et les implications de cette nouvelle présence, essayons toutefois d’en identifier brièvement les ressorts.
L’environnement international a changé drastiquement depuis la fin de la Guerre froide et a ouvert un espace important pour de nouveaux joueurs. Il est apparu rapidement en particulier que l’unipolarité stratégique importait moins que la multipolarité économique et que l’immense supériorité militaire des États-Unis s’avérait être d’une utilité marginale pour la gestion des problèmes économiques, environnementaux, sanitaires et même sécuritaires qui dominaient l’agenda international. De même l’infrastructure de gouvernance centrée sur le Conseil de sécurité des Nations unies sur les institutions de Bretton Woods et, depuis les années 1970, sur le G7/8, s’avéra souffrir d’un double déficit : de légitimité – largement congénital – mais aussi d’efficience, qui impliquait qu’on trouve par le biais d’autres arrangements une capacité d’action suffisante.
Un espace existait donc au tournant du siècle pour de nouveaux joueurs, dont la participation était susceptible de pallier au moins en partie ce double déficit. Comme on l’a vu, le Brésil a remarquablement réussi à investir cet espace, et il doit ce succès à une combinaison assez étonnante de facteurs, essentiellement intérieurs, que nous allons maintenant examiner.
Le Brésil dispose d’une combinaison de caractéristiques qui font dire depuis longtemps qu’il est promis au statut de grande puissance : 5e pays au monde en surface et en population, il fait maintenant partie des dix plus grandes économies de la planète. Ces facteurs lui assurent d’abord et avant tout une domination incontestable dans sa propre région dont il représente 40 % du territoire et à peu près la moitié du PIB et de la population. Comme les États-Unis, en somme, et à la différence de toutes les autres puissances de la planète, le Brésil – n’en déplaise à Hugo Chávez – n’a pas de concurrent et surtout pas d’ennemi véritable dans son environnement stratégique immédiat.
Disposant d’énormes ressources minérales, il est aussi l’un des plus grands exportateurs de produits agricoles de la planète [19]. Pourtant son sous-sol demeure encore largement inexploré, son potentiel hydrique très partiellement harnaché et une large partie de ses terres cultivables inexploitée. L’essentiel de ces terres, en Amazonie, représente par ailleurs la plus grande forêt tropicale de la planète et un réservoir incomparable et lui aussi largement inexploré de biodiversité. L’augmentation récente du prix des produits miniers et alimentaires placent le Brésil dans une situation privilégiée que la croissance démographique de la planète et l’augmentation explosive de la demande dans les pays en développement – surtout en Asie – rendent peu susceptible d’être remise en cause, même à long terme. La dépendance énergétique qui avait contribué à briser le miracle des années 1970 appartient désormais au passé : non seulement le pays est essentiellement autosuffisant en pétrole et en gaz, mais sa matrice énergétique qui combine le pétrole (38%), l’éthanol (30%), l’hydro-électricité (15%) et une part croissance de gaz naturel (10%) est la plus équilibrée de toutes les économies développées [20]. Qui plus est, le gouvernement prévoit d’investir massivement dans la relance de ses projets hydro-électriques et dans son programme nucléaire. Enfin, l’augmentation constante de ses réserves pétrolières et gazières suggère fortement que, nonobstant la croissance prévue de la demande intérieure, le Brésil pourrait bientôt devenir un exportateur significatif d’énergie.
Ce sont en grande partie ces attributs naturels qui placent le Brésil au centre de tant de ces discussions globales que nous avons mentionnées dans la première partie : commerce international, changement climatique, protection de la biodiversité, sécurité alimentaire ou énergétique, aucune de ces questions ne peut faire l’objet d’une entente internationale sans que le Brésil n’y donne son accord. Une partie de l’émergence du Brésil comme puissance est en somme tout à fait... naturelle.
Le Brésil disposait depuis longtemps de plusieurs de ces attributs « objectifs » que, pourtant, il s’avérait être incapable d’exploiter. Peu à peu, depuis le retour au pouvoir des civils, en 1985, et de façon accélérée à partir de la seconde moitié des années 1990, des changements politiques et « de » politiques ont changé la donne.
La stabilisation de l’économie, due en large partie au Plan Real de Fernando Henrique Cardoso, a dégagé des ressources pour le secteur public, relancé l’investissement productif privé tant national qu’international, et déplacé le centre d’intérêt de la politique nationale et de l’administration publique des questions financières vers les problèmes de développement économique et social. La consolidation de ce tournant doit toutefois être attribuée à l’élection de Lula et à l’absence de réorientation significative des politiques macroéconomiques. En éliminant aux yeux des investisseurs privés brésiliens et étrangers, ainsi que des institutions financières multilatérales, l’essentiel du « risque Brésil », un Lula orthodoxe prouvait que même l’arrivée de la gauche au pouvoir n’impliquait d’aucune façon que les obligations financières du Brésil, le respect des droits de propriété ou une politique anti-inflationniste rigide ne seraient remis en cause. Le soulagement que provoqua cette prise de conscience, après la panique de l’automne 2002 [21], lorsqu’il devint clair que la droite allait perdre l’élection, explique en grande partie l’enthousiasme manifesté à l’endroit de Lula dans les grands centres financiers, de même que l’hyperbole de leurs médias à son égard. Plus fondamentalement, la continuité remarquable des politiques économiques des gouvernements brésiliens – depuis maintenant plus de seize ans – la croissance régulière et de plus en plus rapide ainsi que la résilience de l’économie nationale face à la crise financière de 2008-2009 ont conféré au pays un prestige global extraordinaire et donné à ses prises de position un poids et une légitimité uniques.
Non seulement le Brésil semble avoir géré son économie et son système financier mieux que n’importe quel grand pays occidental – à l’exception peut-être du Canada – mais, contrairement à la Chine en particulier, personne ne peut lui attribuer une responsabilité dans l’émergence des déséquilibres qui ont mené à la crise. Qui plus est, le redressement économique brésilien s’est accompagné – à la différence de la Chine et de la Russie – d’une remarquable consolidation de sa démocratie et, surtout, d’une réduction spectaculaire de ses taux de pauvreté et de l’inégalité sociale qui avaient toujours entaché l’image du pays [22].
Dans le contexte d’une économie stable et en croissance, les programmes de transfert de revenus conditionnels lancés sous Cardoso et consolidés par Lula avec Bolsa Família ont en effet eu un impact très fort sur les couches les plus pauvres de la population. Depuis 2004, la croissance du revenu du tiers inférieur a en effet augmenté de plus de 9 % par an, dépassant très largement celle de l’économie dans son ensemble. Outre l’effet de légitimité globale déjà noté – Bolsa Família est sans doute le programme social le plus connu sur la planète –, ces politiques ont créé les conditions d’une croissance largement autocentrée. Combiné au fait que l’économie brésilienne demeure peu ouverte – le commerce ne représentait que 10,7 % de son PIB en 2007 – et admettant d’emblée que ce développement n’a pas que des avantages [23], il place néanmoins le Brésil dans une position exceptionnelle puisque, contrairement à la croissance encore largement dépendante des exportations de la plupart des autres pays émergents et de la Russie, la sienne échappe en grande partie aux aléas de l’économie mondiale.
L’« Itamaraty », le ministère des Affaires étrangères du Brésil, occupe de longue date une position privilégiée au sein de l’appareil gouvernemental brésilien. Une tradition ancienne, un prestige découlant de son rôle crucial dans la consolidation territoriale du pays, au tournant du siècle passé, un processus de sélection extrêmement sévère de ses personnels et, depuis 1945, le passage obligé par une académie propre – l’Institut Rio Branco – ont depuis longtemps conféré au corps diplomatique brésilien une cohérence exceptionnelle, ainsi qu’une remarquable autonomie institutionnelle [24]. Une longue pratique du multilatéralisme et des relations suivies avec les puissances occidentales et, après la Seconde Guerre mondiale, un nombre grandissant de pays du Sud ont préparé le terrain pour la diplomatie plus agressive que rendait possible la stabilisation du pays : aucune des arènes que l’on investit fortement à partir des années 1990 n’était ainsi étrangère au pays ou à ses diplomates.
L’arrivée au pouvoir de Cardoso, qui avait brièvement dirigé l’Itamaraty sous le gouvernement d’Itamar Franco, et surtout de Lula, qui s’était pourtant montré largement indifférent aux questions internationales, ajouta un activisme présidentiel intense à une diplomatie qui demeurait relativement effacée. Lula décida par ailleurs de s’adjoindre un conseiller spécial en politique étrangère, donnant pour la première fois un caractère bicéphale à son appareil diplomatique. Il fit surtout plus de déplacements à l’étranger que Cardoso, qui était déjà bien plus sorti du pays que n’importe lequel de ses prédécesseurs. Au cours de ses deux mandats, enfin, 40 ambassades furent ajoutées à une couverture déjà plutôt complète et on lança un programme d’expansion accéléré du corps diplomatique, la cohorte d’entrée passant de 28 à 105 par an depuis 2006 et pour cinq ans [25], un niveau qu’on prétend maintenir jusqu’en 2014, faisant gonfler les effectifs du ministère de plus de 15% [26]. La forte présence globale du Brésil s’appuie en somme aussi sur une proximité très concrète, tant de ses présidents que de ses diplomates.
On le voit, l’activisme intense et l’influence croissante que nous avons décrits dans la première section s’appuient sur une base solide, constituée tant de facteurs matériels que politiques et bureaucratiques. Cela étant dit, où va cette politique étrangère, et quelles en sont les limites ?
La plupart des analyses de la politique étrangère contemporaine du Brésil convergent pour dire qu’elle est beaucoup plus active et plus compréhensive, et du même coup moins obsédée – en bien ou en mal – par les États-Unis. On s’entend aussi pour parler d’une inflexion plus ou moins significative, à partir de la seconde moitié du premier mandat de Lula, de l’Occident vers le sud et l’orient. Plusieurs ont interprété l’activisme grandissant du Brésil comme l’expression d’une quête d’autonomie, dont certains trouvent d’ailleurs les traces sous Geisel, Kubitschek et Goulart. De ce point de vue, l’inflexion « luliste » est par exemple interprétée comme le passage de « l’autonomie par la participation » à celui de « l’autonomie par la diversification [27] ». D’autres y voient plutôt l’abandon d’une attitude pragmatique au profit d’une politique plus idéologique et plus nationaliste [28], un tournant qui inquiète les analystes conservateurs qui s’étaient enthousiasmés pour Lula [29].
Notre lecture de la politique étrangère de Lula suggère moins un tournant qu’une plus grande ambiguïté normative, les élans tiers-mondistes alternant avec le plus grand pragmatisme. Certes, le Brésil est devenu en quelques années l’un des plus généreux donateurs d’aide au développement [30], Lula s’affiche volontiers avec Hugo Chávez, Fidel Castro et Mahmoud Ahmadinejad, et ses diplomates s’opposèrent à l’imposition de sanctions par le Conseil de sécurité contre l’Iran et refusent toujours de condamner le Soudan pour ses violations des droits humains. De même, Lula et ses principaux conseillers diplomatiques – Samuel Pinheiro Guimarães, Marco Aurelio Garcia et Celso Amorim – multiplient les critiques des « banquiers blancs aux yeux bleus [31] », des grandes puissances, du caractère inéquitable des traités et des institutions internationales [32], ils parlent de la solidarité du « Sud » et réaffirment l’indépendance de la politique étrangère du pays.
Mais dans le même temps, le Brésil accepte finalement d’imposer des sanctions contre l’Iran [33], les grandes compagnies minières et d’ingénierie brésiliennes accompagnent Lula dans ses voyages, celui-ci fait l’apologie des programmes d’infrastructure du régime militaire, c’est Marco Aurelio Garcia qu’on envoie défendre les intérêts de Petrobras – la plus grande compagnie d’Amérique latine – en Bolivie, le gouvernement brésilien renoue une coopération militaire avec les États-Unis suspendue par Geisel en 1976, et il annonce l’établissement d’une coopération stratégique avec la France, centrée sur le transfert de technologie et de matériel militaire. Certes, le Brésil fait preuve d’une remarquable retenue dans ses relations avec ses voisins et son engagement international est généralement constructif et toujours dénué d’agressivité, mais aucune logique normative ou idéologique ne semble guider sa diplomatie. En fait, si rien ne permet de parler d’un réalisme froid – à la française, par exemple – on pourrait probablement qualifier la politique étrangère du Brésil de « réalisme soft », les grands principes pouvant, selon les circonstances, être mis entre parenthèses, surtout lorsqu’ils heurtent les intérêts stratégiques du pays ou les investissements de ses compagnies. Dans les termes de Celso Amorim lors de la visite de Lula en Guinée équatoriale, en juillet 2010, « Business is business [34] ». Le Brésil, en somme, semble avoir beaucoup d’amis, mais aussi beaucoup d’intérêts.
Acceptant en somme l’hypothèse de base d’une quête d’autonomie – qu’on peut d’ailleurs assimiler avec Max Weber à une simple recherche de pouvoir [35] – et sans prétendre mettre un terme au débat sur la nature de la réorientation opérée sous Lula, nous essaierons maintenant de mettre en évidence les tensions qu’implique cette quête, et les limites et contraintes qui s’imposent à elle.
Dans un pays immense, dépourvu de concurrents régionaux, peu dépendant des marchés étrangers, et que son isolement relatif, ses ressources et son marché interne abritent dans une large mesure des tribulations de la politique et de l’économie mondiale, la politique étrangère importe assez peu. Le sort du pays ne se joue clairement pas à l’Itamaraty, dans les débats entre pragmatistes et nationalistes, à l’ONU, ou dans les réunions, les sommets et les rencontres bilatérales auxquels Lula participe. La diplomatie devient un jeu largement symbolique et, par conséquent, pour autant que les ressources soient disponibles, l’espace d’un activisme intense et du déploiement de dispositions normatives ou idéologiques. De ce point de vue, l’inflexion souvent notée entre l’ère de Cardoso et celle de Lula correspondrait moins à un réalignement durable vers le sud et la gauche qu’à un relâchement de la discipline qu’imposait encore sous le premier l’incertitude de la stabilisation économique, puisque les marchés, comme on a pu le voir au moment de l’élection de Lula, avaient encore prise sur le sort du pays. À partir de 2005, ce n’est clairement plus le cas et le Brésil – pour autant qu’il maintienne les conditions domestiques de son immunité relative, ce qu’il fait – peut se « payer » une ouverture à l’Iran d’Ahmadinejad et une attitude de défiance à l’égard des membres permanents du Conseil de sécurité.
L’énorme prégnance du Brésil en Amérique du Sud en fait certes une puissance incontournable et incontestée, mais pas un leader régional [36]. On accepte toujours les invitations du Brésil, on rejoint les sommets et les organisations qu’il met sur pied, et sa médiation est presque toujours la bienvenue. Et on admet sans ambages que plusieurs de ses initiatives, entre autres dans les conflits entre la Colombie et ses voisins, ont authentiquement contribué à désamorcer les conflits. Mais on n’accepte pas ses prétentions à une quelconque représentation de la région, pas plus qu’on appuie ses entreprises d’affirmation de son statut d’acteur et de puissance globale. Aucun pays important de la région, par exemple, n’appuie les revendications du Brésil à un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU. Ses tentatives de faire élire ses représentants à la tête d’organisations internationales sont presque systématiquement sabotées par ses voisins. Contournant son opposition à un accord de libre-échange hémisphérique, le Chili, le Pérou et la Colombie ont signé des accords séparés avec les États-Unis, et même le petit Uruguay, pourtant lié par le Mercosur à une position commune avec le Brésil, a osé mentionner son intérêt pour des négociations commerciales indépendantes [37]. Les crises cycliques et répétées entre les membres du Mercosur révèlent des fissures profondes au cœur même de l’arrière-cour du pays, menant des analystes influents – Marcos Jank [38], entre autres – et même José Serra, ancien ministre de l’Économie, gouverneur de São Paulo et maintenant candidat à la présidence, à remettre en cause ouvertement l’utilité de l’arrangement pour le Brésil [39]. De toute évidence, les perspectives d’une intégration de l’ensemble de l’Amérique du Sud, dans le cadre de l’UNASUR sont, quant à elles, encore pires [40].
L’alternative bolivarienne pour les Amériques de Hugo Chávez, par ailleurs, si elle se pose comme un défi aux aspirations des États-Unis dans la région, représente beaucoup plus clairement une remise en cause des prétentions brésiliennes à intégrer le sous-continent dans l’UNASUR. Que la Bolivie et le Paraguay, dépendances locales du géant brésilien, fassent grand cas de leur participation à l’ALBA et remettent en cause, drastiquement dans le premier cas, les arrangements d’exportation d’énergie vers le Brésil dont dépendent leur économie, ne représentent que des cas extrêmes. Fondamentalement, les pays d’Amérique du Sud ne peuvent acquiescer à l’institutionnalisation d’une asymétrie de plus en plus flagrante [41], et cherchent, entre eux et avec des partenaires extérieurs, à la contrebalancer, ce qui, très clairement, ne peut que nuire aux projets du Brésil dans la région.
La diplomatie extra-hémisphérique du Brésil rencontre des obstacles différents. Dans le forum IBSA et dans les BRICS, ce n’est pas le poids d’une interdépendance asymétrique qui nuit à la consolidation des alliances, mais bien l’absence d’interdépendance entre ces pays et le peu de chevauchements qui existent entre leurs intérêts. Les positions de l’Inde, de l’Afrique du Sud et du Brésil sur les questions commerciales et de sécurité ne convergent pas du tout [42]. De même, on voit mal ce qui unit le Brésil à la Russie et à la Chine sinon l’opportunité conjoncturelle de poser l’existence d’un pôle, aussi artificiel soit-il, dont les États-Unis et l’Europe seraient absents.
Les pays africains semblent plus ouverts et tant les investissements brésiliens – massifs dans certains pays comme l’Angola [43] – que son aide au développement sont bien accueillis [44] et, comme en témoigne l’élection régulière du Brésil au Conseil de sécurité, ils lui en sont reconnaissants. Leur relation avec l’Europe, les États-Unis et la Chine, toutefois, limitent la marge de manœuvre des États africains. L’absence d’appui des délégués africains lors du vote du Conseil de sécurité sur les sanctions contre l’Iran (2010/06/11) est à cet égard révélatrice, tout comme le refus de l’Union africaine d’appuyer les projets de réforme de l’ONU du G4 – i.e. des quatre principaux prétendants à un siège permanent, le Brésil, l’Allemagne, l’Inde, et le Japon [45].
Après la phase un peu euphorique qui suivit l’élection de Lula, les puissances occidentales se sont aussi révélées être de piètres alliées. Les concessions européennes et américaines sur les questions agricoles se font toujours attendre. De même, les paroles encourageantes des gouvernements français et américain concernant la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, après l’initiative brésilienne à Haïti, en 2004, se sont avérées sans lendemain. Il ressort en somme que l’accès aux clubs occidentaux est hautement conditionnel et que le Brésil ne les rejoint finalement que parce qu’il leur est utile, comme c’est le cas maintenant pour le G20. Les réformes de la Banque mondiale et du FMI, de même, devront de toute évidence être arrachées de force. Dans ces discussions, d’ailleurs, ce sont probablement moins les grands que les « moyens » en déclin, comme la France et la Grande-Bretagne à l’ONU, ou le Canada au G8 et au FMI, qui sont susceptibles de résister le plus.
Paradoxalement, en somme, à un engagement global sans précédent du Brésil semble correspondre un certain isolement, le pays voyant sa base traditionnelle en Amérique du Sud se fissurer, et ne trouvant nulle part ailleurs une coalition relativement stable, fondée sur des intérêts convergents substantiels, à laquelle s’identifier durablement. S’ajoutant aux résistances régionales déjà mentionnées, les modalités actuelles d’insertion de l’Amérique du Sud dans l’économie mondiale, qui favorisent un retour à l’extroversion du XIXe siècle, semblent particulièrement défavorables à la consolidation par le Brésil d’une véritable base d’opération d’où rayonner dans le monde.
L’époque n’est pas indulgente pour les puissants. Les États-Unis, plus riches, plus développés technologiquement, mieux armés que qui que ce soit, et plus dominants que quiconque dans l’histoire moderne, le découvrent tous les jours, du golfe du Mexique à l’Afghanistan, en passant par la frontière mexicaine, les territoires palestiniens et l’Irak.
Dans les critiques féroces de la diplomatie brésilienne qu’ils publiaient récemment, Jorge Castañeda [47] et Fernando Henrique Cardoso [48] avaient donc la part belle. Que faisait le Brésil pour réduire l’animosité entre la Colombie et le Venezuela ? Comment les autorités ne pouvaient-elles pas arrêter les flux de drogues venant de la Bolivie ? Pourquoi le Brésil était-il incapable de régler le différend entre l’Argentine et l’Uruguay sur la localisation d’une usine de pâte à papier ? Impuissant dans sa périphérie immédiate, que faisait le Brésil au Honduras, piégé – tout comme l’OEA et les États-Unis – dans une rixe entre oligarques et, surtout, en Iran, négociant avec la Turquie un accord bancal sur le transfert de combustible nucléaire ?
Même juste, la critique est trop facile ou, plutôt, elle manque sa cible. Il est certes vrai que la politique étrangère du Brésil « se cherche ». Mais elle n’a pas à « se trouver » en Amérique du Sud ou au sein du Mercosur car, si ses diplomates sont effectivement plus aptes à régler une crise au Moyen-Orient que dans le Cône Sud, il n’y a aucune raison pour qu’ils ne le fassent pas.
L’absence de clarté quant à la direction à donner à la politique étrangère du pays résulte en partie de la consolidation, par le biais d’un redressement économique et social sur le plan intérieur, d’une indépendance à l’endroit de son environnement international qui, parmi les économies majeures de la planète, est probablement unique. Elle découle aussi de la fluidité d’un environnement international où chaque question détermine des alignements différents et, par conséquent, où les grandes convergences identitaires et les alliances « naturelles » se fragilisent ou s’avèrent impossibles à construire.
Les choses pourraient toutefois changer assez rapidement. Si le monde a peu de prise sur le Brésil, ce dernier en a de plus en plus sur certaines parties du monde. Les choix nationaux concernant par exemple l’exploitation de l’Amazonie et, surtout, la présence croissante de multinationales brésiliennes à l’étranger ont de claires implications de politique étrangère. Le Brésil évoquera-t-il frileusement sa souveraineté pour adopter des politiques aux conséquences environnementales sévères ? De même, quelle sorte de multinationales Petrobras (6e compagnie au monde en capitalisation) et Vale (3e consortium minier au monde) seront-elles, et quelle politique le gouvernement brésilien adoptera-t-il face aux pays où elles opèrent ?
On peut évidemment donner la réponse cynique et prévoir – comme certains indices le suggèrent d’ailleurs [49] – que l’émergence du Brésil comme puissance n’aura rien d’unique et qu’elle impliquera simplement l’arrivée d’un autre acteur international guidé par des intérêts étroitement conçus. Mais on peut aussi rêver un peu, penser à l’élégance de la domination brésilienne du football et imaginer une politique qui, exploitant précisément la nouvelle légèreté de sa dépendance à l’endroit du monde, fasse du Brésil, pour paraphraser un slogan de son gouvernement actuel, l’artisan d’un « Mundo de todos [50] ».
Copyright automne 2010-Daudelin/Choiseul
La revue Problèmes d’Amérique latine sur le site des éditions Choiseul Voir
[1] . M. Moore, “Luiz Inácio Lula da Silva”, Time Magazine, 29 avril 2010, http://205.188.238.181/time/specials/packages/completelist/0,29569,1984685,00.html, consulté le 26/06/2010.
[2] . “Economic and Financial Indicators”, The Economist, 19 juin 2010.
[3] . “Obama : Lula Is ‘Most Popular Politician On Earth’”, Huffington Post, 2 avril 2009, http://www.huffingtonpost.com/2009/04/02/obama-lula-is-most-popula_n_182433.html
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[11] . Longtemps retardée, elle ne dépend plus, au moment d’écrire ces lignes, que d’un vote positif du Sénat paraguayen, ce qui ne veut pas dire qu’elle soit acquise.
[12] . « Brasil credor, sem milagre », O Estado de São Paulo, 6 octobre 2009, http://www.estadao.com.br/estadaodehoje/20091006/not_imp446390,0.php, consulté le 8/10/2009.
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[22] . IPEA, « Dimensão, evolução e projeção da pobreza por região e por estado no Brasil », Comunicado do Ipea, nº 58, Rio de Janeiro, Instituto de Pesquisa Econômica Aplicada, juillet 2010, 14 p.
[23] . A. Fraga, “Brazil’s Consumer as a Driver of Growth : a One-Legged Stool”, Financial Times, 2010, http://blogs.ft.com/economistsforum/2010/01/brazils-consumer-as-a-driver-of-growth-a-one-legged-stool/, consulté le 25/06/2010 ; G. Mantega, « Guido Mantega : estamos más adelantados que EEUU y Europa », America Economía, 22 juin 2010, http://www.americaeconomia.com/revista/estamos-mas-adelantados-que-que-eeuu-y-europa, consulté le 13/07/2010.
[24] . Z. B. Cheibub, « Diplomacia e construção institucional : o Itamaraty em uma perspectiva histórica », Dados, n° 28(1), 1985, pp. 113-131 ; J. W. Cason, T. J. Power, “Explaining Change in Brazilian Foreign Policy Making in the Cardoso-Lula Era”, International Political Science Review, n° 30, 2009, pp. 117-140 ; M. Gomes Saraiva, A diplomacia brasileira e as visões sobre a inserção externa do Brasil : institucionalismo pragmático x autonomistas, Madrid, Real Instituto Elcano, ARI 46/2010, 2010, 9 p.
[25] . C. Lafer, « Diplomacia brasileira, novas variações críticas », O Estado de São Paulo, 20 juin 2010, http://www.estadao.com.br/estadaodehoje/20100620/not_imp569235,0.php, consulté le 21/06/2010.
[26] . Calcul approximatif à partir des données du ministère de la Planification. Voir Secretaria de Recursos Humanos, « ...Planfication. Boletim Estatístico de Pessoal », Brasilia, Ministério do Planejamento, Orçamento e Gestão, 15 (167), mars 2010, 119 p.
[27] . G. Cepaluni, T. Vigevani, op. cit., 2009.
[28] . P. R. de Almeida, « Um exercício comparativo de política externa : FHC e Lula em perspectiva », Meridiano 47, n° 42/43, janvier-février 2004, pp. 11-15 ; M. Gomes Saraiva, op. cit., 2010 ; C. Lafer, op. cit., 20 juin 2010.
[29] . “Whose Side is Brazil on ?”, The Economist, 13 août 2009, http://www.economist.com/displayStory.cfm?story_id=14214011, consulté le 25/09/2009.
[30] . “Speak softly and Carry a Blank Cheque”, The Economist, 15 juillet 2010, http://www.economist.com/node/16592455, consulté 19/07/2010.
[31] . « Crise foi causada por “gente branca e de olhos azuis”, diz Lula », O Estado de São Paulo, 26 mars 2009, http://www.estadao.com.br/noticias/economia,crise-foi-causada-por-gente-branca-e-de-olhos-azuis-diz-lula,345255,0.htm, consulté le 26/03/2009.
[32] . S. Pinheiro Guimarães, « A energia nuclear e a soberania nacional », Carta Maior, 4 mai 2010, http://www.cartamaior.com.br/templates/materiaMostrar.cfm?materia_id=16572, consulté le 14/06/2010 ; S. Pinheiro Guimarães, « Energia nuclear, meio ambiente e soberania », O Estado de São Paulo, 26 mai 2010, http://www.estadao.com.br/estadaodehoje/20100526/not_imp556876,0.php, consulté le 26/05/2010.
[33] . “Brasil to Comply with UN Sanctions against Iran”, Brazil Focus Weekly Report, 7 -13 août 2010, pp. 5-6.
[34] . D. Fleischer, “Lula’s Eleventh African Visit”, Brazil Focus Weekly Report, 3-9 juillet 2010, pp. 6-10.
[35] . Défini comme une « probabilité d’action autonome » (M. Weber, Economy and Society : An Outline of Interpretive Sociology, vol. 1, éd. G. Roth et C. Wittich, Berkeley, University of California Press, 1978).
[36] . Je dois cette intuition à Diana Tussie.
[37] . « Uruguai não vai tolerar indiferença do Mercosul », O Estado de São Paulo, 18 décembre 2006, http://txt.estado.com.br/editorias/2006/12/18/eco-1.93.4.20061218.28.1.xml, consulté le 18/12/2006.
[38] . M. S. Jank, « O risco da “Mala sem Alça” », O Estado de São Paulo, 5 octobre 2004, pp. A-2.
[39] . « Serra vê Mercosul como “barreira” », Valor Econômico, 20 avril 2010, http://clippingmp.planejamento.gov.br/cadastros/noticias/2010/4/20/serra-ve-mercosul-como-barreira, consulté le 22/04/2010.
[40] . S. W. Burges, “Bounded by the Reality of Trade : Practical Limits to a South American Region”, Cambridge Review of International Affairs, n° 18 (3), 2005, pp. 437-454.
[41] . F. Masi, M. I. Terra (dir.), Asimetrías en el Mercosur ¿ Impedimento para el crecimiento ?, Montevideo, Red Mercosur de Investibaciones Económicas, 2008, 231 p.
[42] . A. Oliveira, J. Onuki (dir.), Coalizões Sul-Sul e as negociações multilaterais : os países intermediários e a coalizão IBSA, São Paulo, Mídia Alternativa, 2007, 224 p.
[43] . STRATFOR, “Angola, Brazil : A Line of Credit and a Leg Up”, Strategic Forecasting, 25 août 2010, http://www.stratfor.com/analysis/20100624_angola_brazil_line_credit_and_leg, consulté le 25/08/2010.
[44] . S. Gratius (dir.), « IBSA : ¿Un actor internacional y un socio para la Unión Europea ? », Working Paper, n° 63, Madrid, Fundación para las Relaciones Internacionales y el Diálogo Exterior (FRIDE), juillet 2008, 31 p.
[45] . « Planalto lamenta apoio de africanos às sanções ao Irã », O Estado de São Paulo, 11 juin 2010, http://www.estadao.com.br/noticias/internacional,planalto-lamenta-apoio-de-africanos-as-sancoes-ao-ira,564927,0.htm, consulté le 11/06/2010.
[46] .« ET ALORS ? »
[47] . J. Castañeda, « Gigante ou anão diplomático ? », O Estado de São Paulo, 27 septembre 2009, http://www.estadao.com.br/suplementos/not_sup441726,0.htm, consulté le 30/09/2009 ; J. Castañeda, Jorge, « Lula : jugar en primera división sin mojarse », El País, 24 mai 2010, http://www.elpais.com/articulo/opinion/Lula/jugar/primera/division/mojarse/elpepuopi/20100524elpepiopi_4/Tes, consulté le 25/05/2010.
[48] . F. H. Cardoso, « Política externa responsável », O Estado de São Paulo, 6 juin 2010, http://www.estadao.com.br/estadaodehoje/20100606/not_imp562213,0.php, consulté le 10/06/2010.
[49] . S. W. Burges, J. Daudelin, “Brazil : How Realists Defend Democracy”, dans T. Legler, S. F. Lean, D. S. Boniface (dir.), Promoting Democracy in the Americas, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 2007.
[50] . Pendant plusieurs années, les pages web du gouvernement brésilien sous l’administration Lula avaient dans l’un de leurs coins un petit drapeau et le slogan « O Brasil de todos. »
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